Un AIP entré en vigueur le 24 mars 2022 indique que l’aéroport de Barcelone n’autorise plus les monoturbopropulseurs. L’interdiction fait suite à plusieurs incidents liés à des monomoteurs. Une décision qui interroge Cédric Lescop, PDG de Jetfly qui exploite 40 PC-12 en Europe, et qui voit les effets de la concurrence entre aviation d’affaires et aviation commerciale.
A la suite « de délais excessifs pour gérer les incidents », l’aéroport Josep Tarradellas Barcelone-El Prat, géré par le groupe Aena, a décidé de ne plus accueillir les monoturbopropulseurs. L’AIP (Aeronautical Information Publication) AD2 LEBL 1 est entré en vigueur le 24 mars 2022, qui précise désormais ces restrictions.
En 2017, l’aéroport avait déjà interdit les avions de moins de 2.000 kg de masse maximale au décollage. Avec cette nouvelle modification apportée par l’AIP, l’accès à l’aéroport de Barcelone se complique davantage pour les monomoteurs.
Pour Cédric Lescop, PDG de la compagnie luxembourgeoise Jetfly qui exploite 40 PC-12, « c’est une décision regrettable, maladroite, prise sans discussion préalable avec les opérateurs. »
Ce sont les société de handling présentes sur l’aéroport, seules conviées à une réunion organisée par Aena, qui ont alerté les opérateurs dont le PDG de Jetfly qui poursuit : « depuis l’AIP, nous avons effectué plusieurs aller-retour avec Aena pour proposer des procédures, nous essayons de faire avancer les choses mais le gestionnaire semble camper sur ses positions. »
Pour la compagnie Jetfly, l’aéroport de Barcelone représente 50 mouvements par an. « L’interdiction des monoturbopropulseurs n’est pas dramatique pour notre activité, mais elle est toutefois impactée » précise encore Cédric Lescop.
Le PDG de Jetfly situe l’origine de l’amendement à l’AIP en octobre 2021. « Un PC-12 privé a connu une surchauffe importante des freins sur un taxiway, à un point d’arrêt situé à l’intersection de deux autres taxiways » explique Cédric Lescop. « Le fusible thermal a opéré et les pneus se sont dégonflés, puis les pompiers sont intervenus, immobilisant l’avion mais à un endroit qui toutefois ne gênait pas les autres mouvements. »
Une société de maintenance située sur l’aéroport, qui travaille habituellement avec Jetfly, a pris en charge le PC-12. Mais l’indisponibilité des pièces de rechange a contraint d’immobiliser l’avion trois jours. « Une situation inacceptable pour le gestionnaire de l’aéroport, qui aurait aimé que la réparation ne prenne pas plus d’une heure » précise encore Cédric Lescop.
L’aéroport Josep Tarradellas a accueilli en 2019 un nombre record de passagers, dépassant les 52,6 millions, majoritairement transportés par Vueling et Ryanair. C’est le deuxième plus grand terrain d’Espagne, qui enregistre plus de 310.000 mouvements par an, dont 2.800 assurés par l’aviation d’affaires.
Pour le PDG de Jetfly, la raison majeure de cette interdiction réside ailleurs que dans les délais de réparation. « Comme beaucoup d’aéroports, Barcelone est anti aviation d’affaires. Un monoturbopropulseur prend le créneau d’un avion commercial qui génère davantage de revenus. L’aviation d’affaires est donc moins intéressante pour ces grandes plate-formes. »
A la suite de la publication de l’AIP interdisant l’accès de l’aéroport de Barcelone aux monoturbopropulseurs, les représentants des propriétaires européens, et espagnols en particulier, mais aussi des opérateurs et plusieurs constructeurs ont adressé une lettre commune à Aena, gestionnaire de l’aéroport.
« Les organisations soussignées, représentant les constructeurs d’aéronefs, les opérateurs d’aviation d’affaires et les propriétaires d’aéronefs privés, sont profondément préoccupées par cette interdiction d’accès à l’un des principaux aéroports d’Europe et, par conséquent, à la première destination d’affaires et touristique de la ville et de la région de Barcelone » précise la lettre envoyée au gestionnaire de l’aéroport en date du 18 mars 2022.
« Les types d’aéronefs concernés, tels que le Daher TBM 940, le Diamond DA50Le DA50 est motorisé par un Continental CD-300 à pistons. Il est toutefois cité dans la lettre destinée à l’aéroport de Barcelone., le Kodiak 100, le Pilatus PC-12 et le Piper M600, sont les modèles d’aéronefs les plus modernes, efficaces, peu polluants et fiables du marché actuel. »
En conclusion, la lettre précise l’engament des signataires dans une « exploitation sûre et efficace de l’aéroport et de son espace aérien » et propose une rencontre de manière à étudier les mesures d’atténuations alternatives à la fermeture de l’aéroport aux monoturbopropulseurs.
Quelques jours plus tard, le 25 mars 2022, la directrice de l’aéroport de Barcelone, Sonia Corrochano Gómez, explique que le temps d’intervention sur incidents liés aux monoturbopropulseurs sur l’aéroport ont été jugés excessifs, « perturbant les autres opérations commerciales. »
En plus de la gêne occasionnée pour quelques 12.000 passagers sur une fenêtre de 3 heures durant laquelle les monoturbopropulseurs opèrent habituellement, pour la directrice, c’est en outre un problème de tractage qui a motivé la décision d’établir une nouvelle règle. La direction de l’aéroport, impose ainsi aux opérateurs d’intervenir en cas d’incident ans un « délai raisonnable » et correspondant à une temps de réponse qui ne doit être en aucun cas inférieur à 30 minutes.
« L’aéroport possède des équipements permettant de transférer les avions afin d’intervenir en support aux agents d’assistance engagés par la compagnie lorsque ces derniers ne peuvent pas résoudre un incident. Toutefois, l’utilisation de cet équipement devient très difficile dans le cas d’avions monomoteurs à turbopropulseurs, en raison de la position de l’hélice » précise la lettre.
« C’est très maladroit » juge Cédric Lescop qui poursuit : « c’est normalement à l’aéroport de gérer ces problématiques et ce problème de tractage devrait être le même qu’avec un Beech 1900 qui, pourtant, n’est pas concerné par l’AIP. »
« Malgré tout, nous jouons le jeu » déclare le PDG de Jetfly, « et nous essayons de trouver des compromis et d’avoir une approche constructive. Nous avons acheté des barres de tractage, nous avons également contracté avec Iberia les services de tractage sur Barcelone, nous montrons notre bonne volonté mais le gestionnaire de l’aéroport demeure peu réceptif » déplore Cédric Lescop.
Fabrice Morlon
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