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Aviation Générale

La France prépare l’arrivée des avions électriques dans ses aéro-clubs

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Gil Roy

Cette année encore, les avions électriques étaient en vedette au salon Aero. Encore des promesses et surtout beaucoup de questions. Dans le but d’apporter des réponses opérationnelles, la Fédération française aéronautique va lancer avant fin 2017 une expérimentation grandeur nature, en exploitant un avion électrique dans une structure de type aéro-club. La FFA a réussi à entrainer dans son projet tous les acteurs, des régulateurs (DGAC et EASA) aux constructeurs, en passant par les instructeurs, les assureurs, les aéro-clubs, les mécaniciens, l’aérodrome et bien sûr les pilotes. Tous semblent décidés à passer des promesses au concret.«  Nous avons besoin d’un terrain de jeu avant d’avoir les règles du jeu. Nous sommes face à une somme d’interrogations considérable. Nous ne pourrons pas avoir de réponses, tant que le nœud réglementaire ne sera pas desserré. », affirme Jean-Luc Charron, le tout nouveau président de la Fédération française aéronautique. C’est lui qui en 2011 a lancé le chantier de « l’aéro-club de demain », un vaste remue-méninge au sein duquel, la transition énergétique n’est qu’une piste de réflexion parmi une multitude d’autres.

Toussus-le-Noble, terrain d’expérimentation

L’avion électrique s’est imposé naturellement dans le débat. « Si Piccard et Borschberg ont réussi à faire le tour du monde avec un avion électrique, nous devrions pouvoir enchainer les tours de piste ». Des voix ont commencé à se faire entendre, notamment à Toussus-le-Noble, la plus grande plate-forme d’aviation générale, là où la ministre de l’environnement est venue voir voler l’E-Fan avant qu’Airbus ne mette le grappin dessus. Toussus, c’est surtout un aérodrome où à certaines heures de la journée, certains jours, seuls les avions électriques peuvent réglementairement voler. Sauf qu’actuellement, il n’y a pas plus d’avions électriques à Toussus, qu’ailleurs !

Les planètes ainsi alignées, Toussus-le-Noble s’est révélé, pour la Fédération, être une opportunité géographique et politique, en même temps que la motorisation électrique apparaît être une opportunité de transition énergétique. « Toussus est donc l’endroit où nous allons pouvoir évaluer l’exploitation d’un avion électrique, en condition d’aéro-club, au sein d’un inter-club. On en profitera aussi pour développer une plate-forme numérique de partage entre plusieurs aéro-clubs », résume J.L. Charron. Le numérique est un autre axe fort de la réflexion sur l’aéro-club de demain à côté de la mutualisation des moyens.

Le FabLab ou un sas d’évaluation

C’est ainsi que la Fédération a lancé l’idée d’un « FabLab » fin 2014. Elle utilise volontairement une expression « à la mode » qui recouvre l’idée « d’un laboratoire qui réunit tous les acteurs de l’exploitation d’un avion électrique », explique le président de la FFA, en insistant sur le mot « exploitation ». On retrouvera ici les constructeurs, le régulateur, les instructeurs, les présidents de clubs et les pilotes. Il y aura aussi les assureurs et les mécanos. « L’idée n’est pas seulement de faire voler les avions, mais d’obtenir un retour d’expérience maîtrisé. Ce FabLab sera un sas d’évaluation entre les ingénieurs qui ont conçu l’avion et les aéro-clubs qui l’exploitent ».

Même si l’industrie aéronautique chinoise est engagée dans la production en petite série d’avions légers électriques, ces appareils sont destinés au marché local. © Gil Roy / Aerobuzz.fr

Le FabLab est ouvert à tous les constructeurs explique J.L. Charron tout en précisant que la Fédération « ne cherche pas à évaluer la faisabilité de l’électrique ». Elle veut un avion électrique susceptible d’être produit, dès à présent, en série. Le choix est limité. Le seul qui réponde au cahier des charges est le WattsUp, version électrifiée de l’Alpha Trainer, que Pipistrel a présentée à Aero 2016.

Le WattsUp de Pipistrel préféré à l’E-Fan d’Airbus

L’E-Fan auquel tout le monde pense n’est encore qu’une promesse. La FFA ne voulait pas être prisonnière du calendrier glissant d’Airbus. La décision récente du constructeur d’abandonner le programme, lui donne raison.  Reste à savoir maintenant ce que va devenir l’E-Fan.

Après un décollage médiatique à forte pente, le projet E-Fan d’avion-école électrique n’apparaissait depuis plusieurs mois plus comme une priorité pour Airbus. © Gil Roy / Aerobuzz.fr

Juin 2017 est d’autant plus loin que la DGAC semble pressée de voir fonctionner l’aéro-club électrique avant la fin de cette année. D’autres grands aérodromes d’aviation générale aux prises avec leurs riverains se sont également déclarés intéressés. Les aéro-clubs de Toulouse-Lasbordes et de Lyon-Bron ont notamment fait part de leur volonté d’accueillir un FabLab. Airbus, Piccard, Borschberg et les autres ont, malgré eux, créé une frustration chez les riverains qui n’est pas le moindre des paradoxes de l’électrification de l’aviation…

Un vrai aéro-club 100% électrique

De la manière pragmatique qui le caractérise, Jean-Luc Charron entend démarrer l’expérience sur un lieu unique et avec un seul avion mis à la disposition de cinq ou six clubs. Il souhaite les premiers mois ne l’ouvrir qu’à la double-commande avec des pilotes brevetés et avoir à bord systématiquement un instructeur référent à qui il demandera un retour d’expérience standardisé. Il veut fonctionner avec une dizaine d’instructeurs formés par le constructeur, en l’occurrence Pipistrel, et autorisés par la DGAC ou l’EASA.

Siemens s’est engagé depuis deux ans dans un programme de motorisation électrique de l’aviation légère. Des essais concluants ont été réalisés, mais aucune solution industrialisable n’est encore proposée. © Gil Roy / Aerobuzz.fr

La DGAC qui a mis un pilote inspecteur dans la boucle souhaiterait ouvrir l’expérience, d’emblée aux débutants, en début de formation (ab initio). C’est l’un des multiples points qui restent encore à trancher. L’un des points essentiels est de savoir sous quel régime l’avion électrique qui n’entre dans aucune case sera autorisé à voler. Le plus simple serait une dérogation sous la forme d’un « Permit to fly », ce qui permettrait de se raccrocher à un mode de fonctionnement éprouvé par ailleurs et de rassurer les assureurs. Une condition indispensable au démarrage du projet…

S’alléger des apriori pour faire décoller d’expérimentation

Dans cette expérimentation, la FFA joue le rôle de facilitateur en réunissant autour de la table tous les acteurs. Les exigences démesurées des uns risquent de décourager les autres, d’où le challenge pour l’équipe fédérale de la recherche systématique du bon sens. « Si on veut que les mécanos deviennent des ingénieurs électriciens, il faudra un an de formation. En revanche, si ils ne doivent surveiller que certains points, une semaine suffira », fait remarquer J.L. Charron.

Le programme d’entretien des avions électriques reste à écrire. C’est l’un des objectifs cruciaux de l’expérimentation que va réalisée la FFA à Toussus-le-Noble. © Gil Roy / Aerobuzz.fr

« C’est valable aussi pour l’entretien courant. Si on transpose les programmes faits pour les avions à piston, quel intérêt de faire une visite toutes les 50 heures. Toutes les 150, 200 voire 250 pourraient peut-être suffire. La problématique réside plus au niveau de la gestion des batteries que de la maintenance du moteur. » Là encore, le pragmatisme doit l’emporter sur les habitudes et les apriori. « Si la réglementation nous impose une maintenance trop lourde, ce sera plus cher ».

Intégrer l’avion électrique dans le cursus de formation

L’arrivée des avions électriques dans les aéro-clubs va entraîner une véritable révolution culturelle. La transition énergétique implique une remise à plat de l’existant. Parmi les questions qui se posent, il y a, par exemple, celle de la place réservée à l’avion électrique dans le cursus de formation des pilotes. « Il y aura forcément des allers retours entre électrique et thermique. C’est un point crucial et nous ne voulons pas que les décisions soient prises en dehors des aéro-clubs », insiste le président de la FFA.

Il faut oublier les grands principes et accepter de rechercher la meilleure solution avec humilité. « La formation des premiers instructeurs va permettre de voir entre les instructeurs, et entre les instructeurs et le constructeur, les points sur lesquels il faudra faire porter la formation en particulier. Cette approche devrait nous permettre de voir si les premières leçons doivent être modifiées ou pas. Et si il y a des changements, il faudra déterminer s’ils vont dans le sens de l’allongement ou du raccourcissement de la durée de la formation ».

La simplicité de la gestion du moteur électrique pourrait faciliter les premières leçons de l’apprentissage du pilotage en permettant à l’élève-pilote de se concentrer uniquement sur le pilotage et ses trajectoires. Cela implique un apprentissage ultérieur de la conduite d’un moteur thermique. © Gil Roy / Aerobuzz.fr

A ce stade, on peut penser que l’élève qui n’aurait à se concentrer que sur sa trajectoire et non pas sur la gestion moteur en plus, devrait progresser plus vite, que dans le schéma actuel. Cela introduit la possibilité de décaler dans le temps les séquences de formation. « Il faut être ouvert à tout et surtout ne pas avoir d’apriori », répète inlassablement le président de la FFA. C’est valable pour la formation comme pour tous les autres points.

La première année à 400 heures de vol

Au cours des deux dernières années, Jean-Luc Charron en tête, la FFA a ouvert des chantiers avec chacun des acteurs du projet. Le moment est arrivé de passer aux actes. A condition que l’administration ne soit pas exagérément exigeante, Pipistrel est prêt à produire un avion, en moins de trois mois.

« Compte-tenu du nombre d’instructeurs et d’aéro-clubs impliqués dans le FabLab, nous estimons que nous totaliserons entre 375 et 400 heures de vol, au minimum, la première année. Il est possible qu’un seul avion ne suffise pas. », fait remarquer J.L. Charron qui soulève au passage le problème du financement du projet, d’autant que les cinq ou six aéro-clubs qui vont envoyer des pilotes et des instructeurs, ne doivent pas perdre de l’activité.

Et si au final, l’expérience démontre que l’avion électrique n’est pas adapté à une activité en aéro-club, la valeur de revente des avions s’écroulera. C’est aussi un des multiples paramètres que doit prendre en compte la FFA.

« Avec l’avion électrique, nous nous sommes rapidement aperçu d’un paradoxe. Les grands défricheurs de domaines ont crédibilisé l’électrique. Mais, si leurs concept planes ont un intérêt médiatique, ils n’ont en revanche, aucun intérêt d’un point de vue opérationnel ». En attendant que l’offre s’élargisse, la Fédération française aéronautique va définir, avec le Pipistrel WattsUp, le mode d’emploi de l’avion électrique. Et si l’expérimentation est concluante, les aéro-clubs pourront prendre le relai. Et à ce moment-là, l’avion électrique ne sera plus une promesse, mais une réalité.

Gil Roy

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Gil Roy

Gil Roy a fondé Aerobuzz.fr en 2009. Journaliste professionnel depuis 1981, son expertise dans les domaines de l’aviation générale, du transport aérien et des problématiques du développement durable est reconnue. Il est le rédacteur en chef d’Aerobuzz et l’auteur de 7 livres. Gil Roy a reçu le Prix littéraire de l'Aéro-Club de France. Il est titulaire de la Médaille de l'Aéronautique.

View Comments

  • Le problème critique réside avant tout dans le stockage de l'énergie... Est-il prévu de faire des expérimentations en utilisant une pile à combustible sachant qu'il y a eu des progrès et qu'il y a des programmes en cours pour des applications specifiques... ?

  • Les paramoteurs électriques volent depuis plusieurs années sans aucun souci de fiabilité, leur autonomie est limitée à une heure et leur tarif reste élevé mais ils ont permis d'implanter des écoles ULM là où rien n'était possible...
    Le confort de ces machines, leur facilité de mise en oeuvre et leur propreté sont incomparables, même si le bruit de l'hélice persiste il n'y a aucun bruit moteur et cela permet de voler sans casque anti bruit !
    Pas de pannes, pas d'entretien, pas de problèmes de voisinage !

    • Le sujet évoqué par la FFA est l'arrivée hypothétique sur le marché d'un appareil certifié double commandes pour aéroclub et non d'un ULM et encore moins d'un parapente dont la masse hors pilote se situe aux alentours de 40 kgs. Pour Gil, loin de moi de critiquer notre FFA dont le rôle consiste aussi à prévoir la relève technologique mais simplement je conteste la confusion savamment entrenenue entre développements de prototypes, dont la faisabilité n'est même pas encore totalement démontrée et l'arrivée d'appareils utilisables en club avec des perfos semblables à nos montures actuelles . Ce n'est pas un fossé mais un océan qui existe actuellement entre espoir et réalité.

  • Certes il ne faut pas rejeter le progrés mais je me pose quelques questions pragmatiques de gestionnaire de club et pilote privé:
    1) Il semble à l'heure actuelle que les soucis principaux se situent au niveau des batteries, on est loin d'avoir maîtrisé l'emport electrique.
    2) On vient de sortir une autre idée , on va interdire les emport, d'Ipad, I phone tec à bord des avions de ligne...on peut m'expliquer pourquoi? C'est dangereux l'electricité?
    3) Avion électrique ,OK mais pour quel prix SVP?? quand on voit qu'on est à racler les fonds de tiroir pour acheter un moteur, (méme pas neuf) ou un petit avion Lego Plastique qui marche à l’essence auto et qui coute prés de 200K€??... on en revient à la cause source..le pognon!. tout ça pour voir disparaître le vendeur ou constructeur 6 mois plus tard..
    4) J'ai vu plus haut, "avions électriques pour faire des tours de piste moins bruyants" ..laissez moi rire, ce n'est pas le bruit qui dérange les riverains : non c'est de VOIR des avions , c'est ça qui les emmerde ,( sinon ça fait longtemps qu'on aurait plus de mobs sans pots d'échappement dans les lotissements); la peur panique qu'il y en ait un qui tombe sur leur téte...gaulois quoi.. rajoutez ça à une forme une lutte des classes contre des nantis..et on a fait le tour de l'écologie aéronautique..

  • bonjour,
    quitte a me répéter…je signale que tout cela (autos,vélos…etc) n'est pas "écolo" car utilise du nucléaire pour charger les batteries prouvez moi qu'ils se recharge en photovoltaïques et là on en reparle…faudra le répéter combien de fois ça …!?

    • AUCUNE, absolument aucune production d'énergie ni consommation d'énergie n'est neutre écologiquement.
      Donc la seule question qui compte c'est "est-ce que ça présente un gain"
      et ses sous-questions : "par rapport à l'existant, sur l'ensemble des nuisances, sur une partie seulement, et pour chacune, de quel ordre"
      Visiblement vous ne vous posez pas cette question de la bonne façon, donc vous avez une conclusion bidon

  • Le Silent electro à 200000€? Un quasi neuf construit par l'inventeur du système FES (front electric sustainer) à vendre 81000€ il y'a peu.

    • Bonjour le bar de l'escadrille !
      De quoi parle-t-on : de technologie ? De voisinage ? De prix d'usage ? De sécurité ?...
      Ou si c'était un savant dosage de toutes ces composantes qui permettront à l'aéronautique légère des rester accessible à nos enfants...
      Si l'on se pose la question du marché, inhérent à un retour sur investissement substantiel, nous ne pouvons pas espérer utiliser une techno spécifique sur nos avions d'aéro-clubs. Pour se le prouver, regardons le retrait d'Airbus de l'E-fan.
      Par contre, et nous avons de nombreux partenaires potentiel si nous approchons la recherche en marge de solutions de grande diffusion, sur ligne similaire à Serge Pennec avec sa Gaz'aile.
      Une veille s'impose donc en direction des secteurs qui doivent adapter leur motorisation sur des marchés substantiels. Peut-être ces acteurs seront-ils attentifs à intégrer nos besoins dans leur cahier des charges. Trouvons des synergies !
      En tout état de cause, la religion du conservatisme va devoir faire preuve d'ouverture, ou s'attendre à entrer au musée.
      Pour se donner une idée de qui donne le tempo : quel est aujourd'hui l'importance parc d'ULM vis à vis de l'aviation loisir ? En prolongeant l'observation, en particulier sur l'évolution du Rotax (V 912), les plus emblématiques de nos machines, les Robins, tirent partie de l'importance de ce parc :o) !
      Je ne vois qu'une seule issue : s'ouvrir et investir.

  • ... oh que de complaintes et de scepticisme...
    "Ce n'est pas parce que les choses sont difficile que nous n'osons pas mais parce que nous n'osons pas qu'elles sont difficiles." Sénèque. Il y a 2'000 ans déjà.
    Il n'y a pas de doute que l'aviation va passer à l'électrique tôt ou tard... autant s'y préparer aujourd'hui !!! Pour info, en Suisse, nous acceptons depuis peu les ULM après 30 ans d'interdiction, mais ils doivent être électrique!!!

    • Mais non voyons Jojo des ULM suisses ,il y en avait depuis 30 ans ..mais ils étaient tous en France à la Frontiére...

  • L’ENFER EST PAVE DE BONNES INTENTIONS
    Notre Fédération, la FFA, lance une expérimentation grandeur nature portant sur l’Aviation Electrique.
    Un premier objectif est annoncé : « définir un terrain de jeu avant d’avoir les règles du jeu et desserrer le nœud entanglement », formule définitive qui considère que le seul obstacle à l’aviation électrique est réglementaire.
    Ah bon ? Je croyais que les principaux obstacles étaient techniques … que les questions de la fiabilité des batteries, de leur autonomie et des opérations de recharge étaient au cœur de la problématique ?
    LE CARCAN REGLEMENTAIRE
    Sur le sujet de l’obstacle réglementaire, revenons aux bases : la première justification de la réglementation dans notre domaine est celle de la sécurité des pilotes, des passagers et des tiers (je ne privilégie aucun ordre). L’EASA et la FAA ont fini par reconnaître que le carcan réglementaire bridait l’évolution et pouvait même être un frein à l’amélioration de la sécurité, c’est pourquoi ces deux agences nous préparent une des nouvelles « moutures » réglementaires (en Europe nouvelle CS-23, Part 21 « adaptée », Part M-Light, …). Toutes ces améliorations portent sur des domaines connus s’appuyant sur des millions d’heures de vol.
    Poussant l’argument, certains vont même jusqu’à proposer de considérer que l’expérience acquise sur des ULM de moins de 472,5 kg (je résume et je ne rentre pas dans le détail de l’Annexe 2) pouvait être prolongée jusqu’à 600 kg pour s’affranchir significativement des contraintes réglementaires. Je n’ouvre pas ici ce débat mais je constate que les défenseurs de cette approche s’appuient sur une affirmation de fiabilité (dont la démonstration reste à faire, mais c’est un autre sujet).
    OK, les millions d’heures de vol sur des configurations connues permettent au moins de réfléchir à un allègement significatif du carcan réglementaire.
    Mais en sommes-nous vraiment là sur l’aviation électrique ?
    Quel est ce carcan réglementaire ? La version électrique de la CS-LSA ? Qui, parmi nos dirigeants éclairés se sont vraiment penchés sur l’ASTM F2840 ? Rappelons que ce texte a été élaboré par les industriels avant d’être validé par l’EASA. Et en ce qui me concerne, j’y ai travaillé pendant des mois et je n’y vois (à quelques exceptions près) que des affirmations de bons sens et une quête uniquement tournée vers la sécurité. Je suis prêt à ouvrir le débat avec autant de spécialistes que nécessaires.
    LE PREUVE PAR SOLAR IMPULSE
    Mais en sommes-nous vraiment là sur l’aviation électrique ?
    Où est l’expérience qui nous permettrait de « couper dans les virages » ? Solar Impulse ? Ce serait la première fois, dans l’histoire de l’Aviation, qu’un démonstrateur de technologie (les anglo-saxons parlent de Proof Of Concept) qui n’a pas vocation à explorer tout le domaine de vol servent de preuve de fiabilité.
    Mais au sujet de Solar Impulse, rappelons quelques faits : le 3 juillet 2015, une dérive thermique de quelques cellules mal contrôlées par le BMS a failli faire prendre feu à l’avion qui se pose in-extremis à Hawaï, il y restera 8 mois en réparation, après une véritable interruption volontaire de vol ! Loin de moi de vouloir réduire la portée de cette formidable Aventure, mais de grâce ne considérons pas que cette Aventure vaut démonstration de fiabilité …
    Et du même coup, l’analogie entre tour du monde et tours de pistes me semble des plus osées… Solar Impulse est un laboratoire (jetez un coup d’œil aux photos de son cockpit …) qui ne présage en rien le pilotage de base en aéroclub …
    Les autres expériences sérieuses en aviation électrique s’appellent Electro-Trainer (Pipistrel) et Efan 1 (Airbus) : à eux deux, ils cumulent quelques petites centaines de vol, chaque fois avec un pilote d’essai à bord (j’entends notamment par ce terme, un pilote qui connait par cœur les systèmes et leurs limites), mais jamais avec l’objectif de démontrer à un tiers la fiabilité du système électrique. A ma connaissance (et c’était rappelé par une slide présentée par l’EASA à Friedrichshafen), seul Airbus a commencé cet exercice de démonstration de fiabilité avec l’EFAN 2.0.
    TOUSSUS LE NOBLE
    Comme tous les pilotes engagés dans la protection de notre droit de voler, j’observe avec anxiété les difficiles relations avec certains riverains de la plateforme de Toussus et je comprends clairement l’enjeu qu’il y a à faire avancer au plus vite une aviation silencieuse permettant de faite cohabiter sereinement adaptes du vol et du barbecue dominical (certains peuvent pratiquer les deux …).
    GALAXY NOTE 7
    Au plus vite … cela signifie-t-il au mépris des contraintes techniques ? Je veux à ce sujet rappeler ce qui semble être une explication (non officielle) de l’origine de problème de Samsung sur les inflammations spontanées du Galaxy note 7 : les services techniques demandaient quelques semaines supplémentaires pour achever la mise au point du nouveau téléphone, mais les services marketing ont obtenu gain de cause en accélérant la sortie du modèle pour devancer d’Apple.
    Dois-je rappeler que cela a coûté plusieurs dizaines de milliards à Samsung ?
    Notre communauté a-t-elle les reins suffisamment solide pour voir s’enflammer une batterie mal dimensionnée, au BMS mal adapté ou au pilote insuffisamment expert pour comprendre ce qui se passe ?
    Je noircis le tableau ? Non, j’initie juste une analyse de risque : en commençant par identifier un événement « indésirable » … La suite de l’analyse de risque est à exiger des prétendants aux vols de démonstration.
    LE FABLAB
    L’idée de cette entité ne serait pas seulement de faire voler des avions mais d’obtenir un retour d’expérience « maîtrisé » …un sas d’évaluation entre les ingénieurs qui ont conçu l’avion et les aéroclubs qui les exploitent. Très bien mais il s’agit de la FFA pas de la FFPLUM, tous nos avions doivent être certifiés et l’étape de la certif me semble dangereusement absente de cette approche.
    Tant et si bien que le WattsUp de Pipistrel semblerait préféré à l’EFAN. Je suis, à ce stade, obligé d’inviter mes lecteurs à entrer dans le détail : chez Pipistrel, le WattsUp désigne le démonstrateur de technologie tandis que l’Alpha Electro désigne l’avion proposé à la vente depuis 2014 et, à ma connaissance, jamais encore vendu (pourquoi ?). De même que l’EFAN 1 désigne le démonstrateur et l’EFAN 2 l’avion qui devait être certifié.
    Le FABLAB est l’outil imaginé par la FFA pour répondre à la frustration des aéroclubs confrontés à des riverains mécontents et constatant que l’aviation électrique semble à porter de main …Je comprends l’idée et je considère qu’elle doit être développée (il nous faut montrer que les choses bougent).
    La FFA va trouver tout plein de candidats instructeurs d’une part et pilote brevetés d’autre part pour voler dans ces prototypes … mais comment va-t-on leur expliquer que l’instructeur « référent » qui devra être à bord sera ipso-facto un pilote d’essai -une courte formation par le constructeur est-elle vraiment suffisante pour aborder un tel niveau de nouveauté ?- qui vole sur une machine dont la fiabilité n’a jamais fait l’objet d’une démonstration contradictoire devant un tiers qualifié (c’est bien là un des aspects de la certif …) et que leur assurance devra couvrir le vol sur prototype non certifié ....
    Tout cela va reposer sur le Permit-to-Fly de la DGAC dont on attend beaucoup, beaucoup de compréhension…
    FAIRE DECOLLER L’EXPERIMENTATION
    Réunir tous les acteurs pour rechercher le bon sens (les constructeurs sont dépourvus de bon sens ?) … et s’alléger d’exigences annoncées comme démesurées. Encore une fois, je voudrais être certain que nos dirigeants aient pris le soin de lire l’ASTM F2840 (qui est le cœur du texte de certif d’un LSA électrique) avant de répéter que ces exigences sont démesurées et ne pas se lancer entraîner par Pipistrel qui porte partout cette affirmation.
    Accélérer le passage du démonstrateur à celui de l’avion fiable pouvant être mis en main de tous et présentant un véritable intérêt opérationnel, si tel est vraiment le sujet, alors il faut le travailler en profondeur. Et exiger des prétendants (je constate qu’il n’y en a aujourd’hui qu’un seul : Pipistrel) une véritable démonstration contradictoire de fiabilité de la chaîne électrique.
    Parce que notre sécurité de pilote le vaut bien !
    Et nous allons vite découvrir que cette démonstration de fiabilité va fortement ressembler à une exigence de certification et que la FFA (avec le support de la DGAC ?) va devoir se substituer à la seule autorité reconnue pour ce type de certif : l’EASA ….
    Nous constaterons aussi qu’une telle démonstration de fiabilité prend du temps : c’est un dossier, des démonstrations et des tests physiques à réaliser et à analyser. Qui rendent peu réaliste le vol dans les prochains mois….
    Mais ne sommes-nous pas là en train d’initier un mélange des genres ou chacun ne joue pas vraiment son répertoire d’excellence ? Ne sommes-nous pas en train de confondre vitesse et précipitation et rejouer le coup du Galaxy Note 7 ?

    • Un habitué de cette chronique aéronautique,
      qui œuvre certainement au quoditien dans ce même secteur et livre une analyse frappée de réflexions et de bon sens.
      Ne confondons pas expérimentation et solution industrielle fiable ayant démontré un certain niveau de fiabilité et de sécurité.
      Les "one shot" type Solar Impulse sont des coups, parfois plus médiatique que porteur d'espoir au niveau de Monsieur tout le monde.
      Je ne vois pas d'autre part d'où vient Gilles, cette affirmation que la puissance sur un avion électrique serait plus facile à gérer.
      Il y a toujours la même manette pour faire varier la vitesse me semble t il?
      Enfin, je crois qu'on cède à une tendance politiquement correcte de transition énergétique qu'on mets à toutes les sauces, portée par le vent écologique qui brasse plus que ses éolienne....

  • Les avions de club électriques, mais bon Dieu pourquoi faire? Se la jouer écolo, alimenter des prétendues start-up qui tentent avec plus ou moins de succès d'engranger des subventions et autres petits investisseurs? Soyons sérieux, s'il est un domaine où la prise de risque doit être écartée à tous prix, c'est bien l'aviation. Le rapport masse-énergie restitué des accumulateurs actuels plafonne malgré des avancées fort coûteuses avec le Li-ion. En club, en plus, mais quel intérêt de remplacer un O-235 par un moteur, certes plus léger, mais avec un devis poids totalement incompatible avec une autonomie de plusieurs heures sous peine de plomber la charge alaire au-delà du raisonnable ? Et qu'on ne vienne pas citer en exemple la Tesla, engin ruineux pour frimeurs bobo! Tout commentaire contradictoire basé sur des éléments objectifs sera plus que bienvenu.

    • Donc évacuer d'emblée le fleuron de la production élec, un succès commercial planétaire mùalgré son prix, qui a tapé plus dans le segment premium (fut il bobo ou pas) qu'aucune autre marque en 30 ans, vous semble une base de discusion raisonnable ?
      Ce serait peu comme si il y a 30 ans, votre discussion sur l'aviation sans commandes de vol électrique avait commencé par "et qu'on ne me parle pas d'Airbus, ce machin pour technocrate européens anti-américain"

      • Quel rapport entre la référence que vous faites entre les commandes de vol électriques et le fait qu'aujourd'hui n'existe pas de solution purement électrique pour propulser un avion d'aéro-club au-delà de quelques TDP? Je critique simplement ces effets d'annonces qui défient les règles énergétiques connues de rendements réels des batteries embarquées. Un jour viendra certainement où un pas technologique sera franchi pour conserver ou produire l'énergie électrique à coût abordable avec un rapport massique réaliste adapté à l'aviation. Désolé de n'est pas encore le cas ou bien vous seriez déjà Prix Nobel mon ami...

        • Le projet de la FFA est tout sauf un effet d'annonce. Elle le porte depuis au moins trois ans et réalise un travail de fond remarquable. C'est ce que j'ai essayé de démontrer dans mon article. Apparemment, je n'y suis pas parvenu pour tous. Jean-Luc Charron et son équipe ont tiré les leçons du diesel et même de l'ATL. Et c'est avec une humilité remarquable et surtout sans apriori qu'ils abordent le problème. Ils n'ont pas d'avis sur la question. Ils veulent juste expérimenter. Pourquoi dès lors tant de critiques, souvent bien peu constructives. Pourquoi ne pas essayer d'aider la FFA à dénouer le sac de noeuds plutôt de l'enfoncer ?

    • Un avion électrique pour faire des tours de piste en école sans trop de bruit tout simplement,une aubaine pour les écoles près des agglomérations......

      • Des tours de piste, c'est ça? Chapeau aux trésorier des clubs qui pourront amortir l'engin sur la seule base de TDP. On en reparle dans 2 ou 3 ans OK?
        Quant aux riverains, ils trouveront autre chose pour se plaindre, je leur fais confiance ! La boboïte est partout on dirait bien...

  • Pour l'instant il n'y a pas assez d'autonomie et le constructeur avoue beaucoup de retard quant a l'autonomie initialement proposée.
    Si c'est pour finir avec 30 minutes de range çà risque de finir comme le feu ATL présenté jadis comme le renouveau de l'aviation générale et relégué dans les greniers des aéro-clubs.
    Optons pour des solutions viables et non des emplâtres sur des jambes de bois pour faire tendance et puis plus rien...

    • En fait, la seule application raisonnable d'un moteur électrique dans le domaine de l'aviation d'aéroclub semble être, à l'heure actuelle, pour le vol à voile.
      Le planeur "Silent" en est l'exemple: il est équipé d'un moteur électrique logé dans le nez, avec une hélice bipale qui se replie. Cela permet le décollage, le gain d'altitude suffisant pour accrocher les "pompes" et le dépannage éventuel lorsqu'il n'y a plus d'ascendances, pour revenir au terrain (si l'on est pas trop loin!)
      Seul obstacle: le prix d'environ 200 000 €. Un peu moins cher en kit.

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