En propulsant Baptiste Vignes dans l’élite de la voltige française, le directeur technique national de la FFA a remis en question le mode de sélection des pilotes en équipe de France et semé le doute chez les anciens.
Lors des épreuves du championnat de France « Elite » de voltige qui s’est déroulé, du 18 au 22 juin 2012 à Castres, les pilotes étaient sous pression. Plus que d’habitude… Il y avait bien sûr un titre en jeu. Il y avait surtout, pour ceux qui font régulièrement la compétition en tête, une place en équipe de France à décrocher. Depuis que le précédent directeur technique national, contre l’avis de l’entraîneur national, a décidé de programmer le championnat national en début de saison et de l’utiliser d’une part comme un entraînement pour la compétition internationale de l’année, d’autre part comme un moyen de sélection en équipe de France, le championnat de France est devenu un passage obligé pour tous les voltigeurs qui visent la sélection tricolore. Pas forcément une remise en question de leur statut. Cette année, l’enjeu était différent, simplement parce que le nombre des places en jeu était plus restreint que les années antérieures. Les titulaires se sont sentis menacés…
Loïc Logeais, le nouveau directeur technique national, a en effet décidé de réserver une place à un espoir, en l’occurrence à Baptiste Vignes qui a tout remporté en catégorie « Advanced » ces trois dernières saisons. Cette démarche du DTN s’inscrit dans le cadre de la nouvelle politique de promotion des sports aériens de la Fédération française aéronautique. En voltige cela se traduit par la mise en place d’une détection des talents dans les clubs et un soutien à ceux qui font des résultats. Le DTN s’est fixé pour objectif de faciliter la progression de ceux qui ont du potentiel. C’est le cas de Baptiste Vignes qui s’est donc vu ouvrir les portes de l’élite.
Le jeune pilote ne cachait pas sa fierté de rejoindre le groupe de compétiteurs qu’il admire, de pouvoir voler dans le même box qu’un Nicolas Ivanoff et de côtoyer les militaires. Mais, il n’a pas été facile pour lui d’assumer son parachutage parmi l’élite, d’autant que ses nouveaux coéquipiers ont mal vécu son arrivée synonyme de remise en question de leur légitimité. Eux aussi vivaient cette situation pour la première fois. Toutefois, il n’a jamais été question d’animosité entre les pilotes. C’est le principe qu’ils remettaient en question pas le nouveau venu d’autant que Baptiste a rapidement été confronté à la dure réalité de la catégorie « Unlimited ».
Même si les avions sont désormais les mêmes, en « Advanced » et en « Unlimited, » les figures sont radicalement différentes. Au final, en Unlimited, les programmes sont plus intenses, plus longs, plus techniques. Pendant la compétition, Baptiste Vignes était le premier à reconnaître que la marche est très haute. Depuis que la catégorie « Advanced » a été créée, Coco Bessière n’a jamais dit autre chose. Depuis toujours il combat l’idée selon laquelle l’ « Advanced » serait l’antichambre de l’ « Unlimited ». Les difficultés rencontrées par Baptiste le confirment.
A mi-parcours du championnat de France 2012, les voltigeurs n’ont pas été les seuls à vivre péniblement une pression inhabituelle. Loïc Logeais, s’est retrouvé à devoir gérer une situation complexe. Il devenait de plus en plus inconfortable pour lui de défendre son choix. Il en était à devoir imposer Baptiste Vignes en équipe de France au détriment de pilotes qui faisaient un meilleur championnat de France. Et puis Baptiste a manqué le troisième et dernier programme. Le compétiteur comme le DTN ont convenu à l’issue du championnat qu’il était trop tôt…
Comme aurait dit Shakespeare s’il avait été à Castres, « beaucoup de bruit pour rien ». Après quelques jours de tension nerveuse, l’équipe de France a retrouvé sa forme classique. Tous les titulaires ont retrouvé leur place, à l’exception de François Rallet qui s’est classé neuvième au championnat de France. Cette année, la Slovaquie, pays organisateur des championnats d’Europe, ayant refusé la participation d’ouvreurs, les équipes ne peuvent aligner que huit pilotes. Le pilote de l’EVAA fait les frais de cette décision.
Même si les pilotes civils de l’équipe de France ont plus ou moins mal vécu le championnat, il ne faut pas remettre en question l’idée d’ouvrir les portes à des espoirs. C’est un moyen d’anticiper le renouvèlement les cadres. C’est aussi un message fort envoyer à la base qui a légitiment l’impression d’un verrouillage. Le verrouillage existe parce que les pilotes en place sont nettement au-dessus des autres. Les membres de l’équipe de France font parties de l’élite mondiale. Qui s’en plaindra ? Pour qu’ils jouent pleinement leur rôle de locomotives au niveau national, il faut qu’il y ait des pilotes prêts à les suivre. Le DTN est donc dans son rôle quand il se soucie aussi du réservoir.
Le DTN a toutefois prévenu les compétiteurs qu’il reviendrait à une formule classique pour constituer l’équipe de France 2013. Il ne remet pas pour autant en question sa politique de promotion, mais le Mondial 2013 ayant lieu aux USA, le transport des avions impose un calendrier beaucoup plus serré. Les compétiteurs devront être prêts plus tôt. Baptiste Vignes le sait et on peut compter sur lui, aidé de son club Dijon Voltige, pour se hisser au niveau de ses coéquipiers.
Dans cette histoire, le seul qui y ait trouvé son compte, semble être Coco Bessière. Cela ne lui a pas déplu que ses pilotes aient été soumis à une forte pression. D’abord à l’occasion du deuxième stage de préparation de l’équipe de France au cours duquel, le DTN et l’entraîneur avaient fait venir des juges pour noter les pilotes. Ensuite pendant le championnat de France. C’est une bonne préparation en vue des prochains rendez-vous internationaux, à commencer par le championnat d’Europe qui aura lieu du 1er au 9 septembre 2012 en Slovaquie. La pression sera au rendez-vous pour la France qui ira défendre son titre par équipe et celui de Renaud Ecalle.
La voltige française a la chance de posséder une belle équipe nationale et de compter des espoirs prometteurs. Il ne lui manque plus que des supporters…
Gil Roy
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