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Aviation Générale

La survie des petits aéro-clubs en jeu face à la réglementation européenne

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Fabrice Morlon

Des élèves pilotes sur liste d’attente, un Cessna 152 qui ne peut servir pour l’instruction, telle est la situation ubuesque des Ailes Armoricaines. L’aéro-club breton, petite association de 20 membres, ne trouve pas son responsable pédagogique imposé par la réglementation européenne et craint de devoir bientôt fermer définitivement son hangar.

« A l’heure actuelle, nous sommes une association qui créée de la frustration, non seulement pour les potentiels futurs élèves pilotes mais aussi pour nous-mêmes » se révolte Julien Lavallade, président des Ailes Armoricaines, « nous sommes dans l’incapacité réglementaire de faire ce pour quoi un aéro-club est fait : transmettre, apprendre aux jeunes et aux moins jeunes à voler. »

L’aéro-club des Ailes Armoricaines, au pied des Montagnes Noires dans le Morbihan, en Bretagne, se trouve dans une situation ubuesque. Avec des élèves sur liste d’attente et malgré le matériel adéquat, un Cessna 152 dédié à la formation, l’aéro-club ne peut former de nouveaux pilotes car dans l’incapacité de nommer un responsable pédagogique, prérequis pour tout organisme de formation déclaré (DTO).

Organisme de formation déclaré

La réglementation européenne de base (« Basic Regulation ») impose en effet que tous les organismes de formation de pilotes soient déclarés auprès des instances nationales de l’aviation, la DGAC en France. Mais les petites structures associatives n’ont pas forcément les ressources humaines nécessaires pour permettre une attribution de chaque poste.

Idéalement situé à Guiscriff, le terrain des Ailes Armoricaines permet de rejoindre rapidement les aérodromes voisins et offre une vue imprenable sur le littoral. © Les Ailes Armoricaines

L’aéro-club a été contraint de cesser en 2018 son activité de formation, faute d’instructeur, ce qui a entraîné une perte des renouvellements d’adhésions parmi les quelque 60 membres qui formaient l’aéro-club. Aujourd’hui composé de 20 membres, avec 5 élèves sur liste d’attente, un Cessna 172 pour les brevetés et un Cessna 152 pour la formation, et après deux ans de petites annonces pour trouver un instructeur, en vain, le ciel des Ailes Armoricaines s’assombrit dangereusement.

Recherche responsable pédagogique

De manière à éviter d’avoir à vendre l’avion école, le Cessna 152 est en location auprès d’un autre aéro-club. « Depuis quelques semaines », explique encore Julien Lavallade,  « nous avons potentiellement trois Formateurs-Instructeurs (FI) restreints à pouvoir effectuer des heures d’instruction dans notre aéroclub, mais nous sommes dans l’impossibilité d’ouvrir, faute de responsable pédagogique. » Que ce soit pour dispenser une formation au PPL ou au LAPL, la réglementation impose en effet que les FI ne soient par « restreints » de manière à ce que l’organisme de formation soit reconnu DTO.

Chacun pour soi

Le président se désole également du manque de solidarité qui, selon lui, caractérise le tissu associatif des aéro-clubs aujourd’hui : « J’ai le sentiment que les aéro-clubs sont de plus en plus des entités qui fonctionnent seules, sans trop se soucier des autres clubs «  regrette le président des Ailes Armoricaines, qui poursuit : « avec l’intermédiaire du CRA, nous avons demandé aux aéro-clubs voisins si un responsable pédagogique accepterait de jouer ce rôle dans notre structure, malheureusement sans succès. » Il faut noter ici que les différents postes imposés pour le DTO ne sont pas honorifiques et impliquent une réelle responsabilité : le représentant pédagogique, associé dans la structure au correspondant prévention sécurité répondent directement au responsable du DTO, lui-même responsable devant l’autorité.

Cloué au sol

Face à cette situation inextricable, le Président de l’aéro-club des Ailes Armoricaines est pessimiste tout en dénonçant une réglementation inadaptée aux petites structures associatives : « Quelle est la solution ? La fermeture simple et définitive de notre aéro-club, alors que plusieurs dizaines d’élèves sont sur liste d’attente pour la formation ? Le système est-il encore adapté aux petits aéro-clubs ? »

Et Julien Lavallade de conclure : « Il est en tout cas désespérant pour nous d’avoir des instructeurs, un avion, des élèves, mais la tête à regarder le ciel sans pouvoir décoller du plancher des vaches. »

Fabrice Morlon

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Fabrice Morlon

Pilote professionnel, Fabrice Morlon a rejoint la rédaction d’Aerobuzz, début 2013. Passionné d'aviation sous toutes ses formes, il a collaboré à plusieurs médias aéronautiques et publié une dizaine d'ouvrages, notamment sur l'aviation militaire.

View Comments

  • La France est le pays d Europe ou les tarifs de l heure de vol sont parmi les moins chers...Et oui !!! Meme si cela necessite des sacrifices. Fait qui merite d etre souligne puisque nos instructeurs d aeroclubs sont benevoles. Un fait unique en Europe.
    Le décret du 16 août 1901 pris pour l'exécution de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'association est donc unique .
    Les associations francaises a but non lucratif sont protegees par ce decret republicain qui nous est cher. Cependant que nos amis europeens pilotes venus d ailleurs se font une joie de profiter de nos infrastructures aux prix raisonnables .
    La vision , la mentalite qu offre un pays republicain tel que le notre a des pays de l Union Europenne comptant beaucoup de royaumes : Grande-Bretagne, Irlande du Nord, Belgique, Pays-Bas, Espagne, Danemark, Suede, Norvege n est pas completement partagee par tous.

  • Je suis époustouflé et très admiratif qu'on puisse défendre ainsi la réglementation européenne comme le font certains. Je reste ébaubi devant leur connaissance des textes, qui n'a certainement d'égal que leur compétence en vol pour s'exprimer avec cette assurance. J'ai pour ma part des exemples assez nombreux, précis et démonstratifs, qui m'avaient laissé penser qu'on avait atteint des sommets kafkaïen d'absurdité administrative, à faire comprendre qu'on puisse invoquer un début de phobie. Mais je réalise que certainement c'est moi qui ne comprend rien, ou pas grand chose. Bravo et merci pour vos éclairages. PS : restant solidaire des Ailes Armoricaines, je leur souhaite bon courage pour leur futur audit, ou, ce que je ne souhaite à personne, en cas d'enquête suite à un problème, s'ils interprètent les textes sans avoir un doctorat es-EU.

    • Complètement d'accord,
      Pour voler il faut un avion, une licence, de l'entrainement et une bonne connaissance de sa machine. Plus l'autorité de tutelle nous abreuve de textes règlementaires qui associent auto justification son existence et méconnaissance complète de la réalité du terrain, plus elle ne fait que dégrader la sécurité des vols de façon particulièrement sournoise.
      Le temps que les pilotes privés et les instructeurs bénévoles peuvent consacrer à leur loisir n'est pas extensible à l'infini, dès lors chaque heure passée à devoir se "farcir" ces tombereaux de textes et d'acronymes et à tenter d’en faire l'exégèse et l'analyse, est une heure qu'on ne passe pas à voler et à monter son expérience, donc une heure perdue.
      Merci à Stéphane Hunault de nous faire part de son analyse au travers de son post sur ce sujet qu’il maitrise visiblement très bien, mais en le lisant je me demande juste s'il faut en rire ou en pleurer: l’instructeur d’aéroclub en 2020 doit-il être juriste, ingénieur Enac, ou au niveau d'un Directeur des Opérations Aériennes d'une compagnie nationale pour enseigner et tester des PPL ? Personnellement je préfère qu’il connaisse mieux son avion que ces piles de paperasse, même si je les apprends par cœur elle ne me seront d’aucune utilité quand il faudra gérer une panne moteur au décollage, improviser une glissade pour éviter de casser l’avion lors d’un posé en campagne, analyser au mieux une situation météo qui se dégrade ou savoir si une anomalie mécanique est un vrai no go ou pas.
      Comme une impression que sur ce sujet là, comme sur d'autres en ce moment, beaucoup regardent sereins, avec un sourire plein de satisfaction, l’orchestre du Titanic jouer une dernière partition… .

    • La connaissance du contexte légal est une nécessité, même s'il faut être "cablé d'une certaine manière" pour y parvenir.
      Les service français ont la réputation de sur-traduire les textes communautaires : nous avons là des hyper spécialistes donc.
      Et la pratique sur le terrain doit se soumettre à ces traductions transcriptions...

      Mais j'ai également conscience que c'est de cette manière que l'on peut construire un espace cohérent qui s'appelle l'Europe. C'est un des prix à consentir pour en retirer tant d'avantages, en terme de stabilité monétaire et sociale, de taille critique à l'échelle mondiale, de paix...

      • Une maxime me vient en tête, qui illustre ce que je pense de l'Europe et des avantages qu'on en retire...
        Je ne sais plus qui a dit que le bonheur (= le confort de vie en Europe) se mesure au bruit qu'il fait en s'en allant.

  • L’INTER-CRA FFA du GRAND-OUEST
    se déroulera à RENNES
    le samedi 31 Octobre 2020, une occasion pour en discuter tous ensemble, partager des expériences et trouver des solutions. Amicalement

  • Dans mon club, aucun FI n'est pro, contrairement à ce qu'affirme un commentaire. De plus, un fait est problématique avec ce club: 3 FI restreints, cela veut dire 3 FI qui viennent d'être formés mais qui n'ont pas fini leur période "probatoire"... Ou est-ce une autre situation ? 3 FI formés pour un club de 50 membres, c'est correct ! Mais qu'est devenu leur tuteur, FI superviseur ? Enfin, comme le précise le premier commentaire, il est tout à fait possible que l'un d'entre eux " fasse fonction de", comme on disait dans l'armée... Bref, encore une fois, on tape sur la réglementation et la DGAC, mais on ne lit pas les textes et on évite de réfléchir. Je suis sûr que la FFA trouvera une solution.

  • Au lieu de crier au loup, lisez donc la réglementation...
    Le niveau d’expérience du Responsable pédagogique d’un DTO est défini dans l’ AMC1 DTO.GEN.210(a)(2)...
    Or ce n’est qu’un AMC. N’IMPORTE QUI PEUT PROPOSER UN AMC ALTERNATIF dans lequel il définit que face au manque d’instructeurs complets (situation qui ne devrait pas durer bien longtemps si on s’en réfère aux périodes précédentes de crises dans l’aviation civile). À charge pour lui de démontrer alors qu’avec un FI restreint comme RP, le niveau de sécurité peut tout à fait être le même au regard :
    - du type d’avion utilisé ;
    - du volume d’activité envisagé ;
    - de l’assistance qui lui sera fournie par le représentant légal ;
    - etc...
    J’ai justement commencé en tant que chef-pilote d’un club tout à fait semblable à celui-ci en étant simple IATT tout frais sorti de St-Geoirs, l’équivalent « arrêté de 81 » du FI restreint d’aujourd’hui.
    Mon expérience du milieu associatif me permet de constater encore une fois que ce sont justement les Yakas-Faucons qui crient au scandale qui laissent mourir notre si belle aviation légère EN NE FAISANT RIEN et non la réglementation ou l’administration tant décriées.

    Tout est dedans. Y a qu’à lire...

    • D'accord ...
      Ne pas confondre restreint et limité...
      Il est vrai que "limité", c'est à dire non CPL, ne devrait pas empecher pas de prendre la responsabilité de RP, surtout dans une petite structure de 2 avions...
      A négocier au lieu de crier ...

  • Ce serait plus clair si on pouvait comprendre le rôle de ce conseiller pédagogique..... Breveté depuis très longtemps, je n'ai jamais entendu parler de cet animal là....!

  • J'ai abandonné l'aviation légère à cause des trop nombreuses contraintes imposées par des ignares en matière aéronautique.
    Tous les bons instructeurs sont partis.

      • Mais commentaire tellement réaliste ! Il ne s'adresse pas à vous, instructeur qui apprend à un élève à tenir le manche, mais à tous ceux, les très nombreux autres, qui font en sorte qu'on n'arrive jamais à escalader la montagne de paperasse qui gène la montée dans l'avion, encore plus la descente, encore plus l'entretient.
        La quantité de contrainte à escalader (paperasse, procédures, autorisations, accessibilité, médical, etc...) pour faire juste un petit vol de promenade en cette belle après-midi d'été avec madame, dégoutte à la longue même les plus passionnés, donc en premier lieu, les "vieux" instructeurs.
        Même en ULM ça se durcit !
        Comment voulez-vous que les effectifs rajeunissent quand les aérodromes sont fortifiés à la Vauban !
        Un autre sujet sur Aérobuzz parle des problèmes réglementaires qu'ont les aéromodélistes, qui sont en train de tuer l'aéromodélisme. Prenez garde messieurs de l'aviation légère, car les mêmes contraintes vous touchent et ont déjà depuis longtemps commencé à vous étrangler ! Aéroclubs moribonds, vol à voile qui vieillit, nouveaux avions modernes impossible à certifier en moins de 10 ans de travaux sans revenus, matériels hors de prix sans justifications autre que la paperasse à payer…
        Alors les gens sont partis vers l'ULM, et tuent l'ULM dont les machines modernes plus performantes que les "certifiés" sont aujourd'hui dans l'œil des instances. Finis les ULM légers accessibles à tous car on ne peut pas se faire de mal, genre Part 103 aux USA ou il ne faut même pas de licence… Des avions sans permis ! De quoi faire une crise cardiaque fulgurante au plus petit gradé de l'EASA !!!

  • Bonjour moi pilote
    Depuis long année je vois que long fait tout pour durcir et faire crevé ce sport de loisir et tout ce qui ce Gref autour
    Quand tout sera mort et demonté ont donnera des subventions pour tout recoustruire
    Ça c est bien francais

  • Lourdeur administrative qui comme toujours n'apporte rien ni à la qualité de formation ni à la sécurité...
    Juste de la paperasse, l'administration se créant son propre travail.

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