Au Mondial de l’ULM de Blois (septembre 2021), la petite turbine (136 cv) du français Turbotech a bluffé les plus sceptiques. Helyxis et JMB Aviation l’ont, respectivement, montée sur un hélicoptère ultra-léger et sur un ULM VL3 dont les premiers vols sont annoncés pour les semaines à venir. Une turbine pour l’aviation légère : un rêve en passe de devenir une réalité prometteuse.
Jean-Baptiste Bély annonce le premier vol de son hélicoptère ultra-léger Choppair CR4-T avant la fin septembre 2021, sur l’aérodrome de Bourg-en-Bresse. « Nous avons fait tourner la turbine Turbotech juste avant le salon de Blois. Nous l’avons montée sur la cellule deux semaines plus tôt », précise Jean-Baptise Bély, dirigeant d’Helyxis, la société qui développe le projet. Au Mondial de l’ULM, l’hélicoptère et sa turbine ont attiré énormément de visiteurs qui ont pu également découvrir une longue pale aux couleurs de Duc Hélices.
Pour l’hélicier français, c’est aussi l’exploration d’un nouveau domaine. « Il nous a fallu quatre années de recherche avec Helyxis, Dynali et d’autres hélicoptéristes pour mettre au point cette pale », explique Michael Derderian, ingénieur responsable du bureau d’études de Duc Hélices. Sur l’aérodrome de Villefranche-Tarrare où il est implanté, l’hélicier s’est doté d’une presse industrielle de plus de 5 m de long. Le rotor principal a un diamètre de 6,40 m. Duc Hélices fournit aussi le rotor de queue.
L’hélicier est également présent sur l’ULM VL3 de JMB Aviation dont la livraison de l’hélice tripale, à pas variable, est prévue avant fin septembre 2021. Même si, comme le souligne Michael Derderian, « la turbine est beaucoup plus douce pour l’hélice qu’un moteur classique », un développement spécifique a été nécessaire. A titre d’exemple, le démarrage de la turbine doit se faire à pas 0 et non pas en drapeau.
A Blois également, JMB Aviation, présentait un biplace VL3 équipé de la turbine Turbotech et d’une hélice tripale tronquée. Il s’agissait en fait d’une maquette de la motorisation. Pour le constructeur belge d’ULM haut de gamme, le Mondial de Blois était l’occasion idéale pour montrer son prochaine ULM qui va faire rêver nombre de pilotes.
Le VL3 turbinisé sera une machine encore plus élégante. Le capot-moteur va gagner une quarantaine de centimètres en longueur qui, d’un point de vue esthétique, renforceront encore l’image de puissance qui se dégage de cet ULM. La turbine plus légère de 30% que le moteur Rotax 914 qu’elle remplace, est aussi plus longue, ce qui permet de récupérer le centre de gravité. « Le bâti moteur et la position sont arrêtés. Il nous reste à définir l’échappement », résume Jean-Marie Guisset, l’un des deux frères Guisset qui dirigent JMB Aviation. Pour Damien Fauvet, le fondateur Turbotech, « la turbine est facile à intégrer, du fait de l’absence de système de refroidissement et de circuit auxiliaire. Elle comporte moins d’équipements connexes ».
« Nous prévoyons de commencer les essais en vol, dès début 2022. », précise Jean-Marie Guisset. « Nous nous donnons quatre mois pour les réaliser entièrement. Notre objectif est d’être prêt à livrer les premiers ULM à turbine au moment du salon Aero 2022 ». Le salon de Friedrichshafen est prévu fin avril 2022. Le compte est bon. Jean-Marie Guisset affirme avoir déjà vendu un premier appareil. Le VL3 fait partie de ces machines volantes à part, à l’image du TBM de Daher, qui ont leurs inconditionnels. La turbine ne peut que combler les aficionados du VL3.
La turbine que va recevoir l’ULM belge développe 136 cv à pleine puissance. Elle sera tarée à 109 cv comme l’impose la réglementation ULM. « Nous pourrons récupérer de la puissance avec l’altitude automatiquement », promet le constructeur belge. De son côté, Damien Fauvet, annonce une consommation remarquablement modeste, de l’ordre de 25 litres à l’heure de vol, en croisière à 75% de puissance et 6.000 ft d’altitude. « L’absence de système de refroidissement, réduit la trainée, et offre un gain de consommation de l’ordre de 10 à 20%. », précise-t-il.
Une consommation comparable à celle d’un classique Rotax. Ajouter à celle-ci, une procédure de démarrage d’une simplicité stupéfiante (un bouton « on/off ») et une monomanette pour la conduite du vol, cette petite turbine pourrait changer le visage de l’aviation légère dans les années à venir. L’un de ses atouts réside dans le fait que cette turbine n’est pas le modèle réduit d’une turbine existante.
A cause des problèmes de refroidissement des aubages et des taux de compression, il n’est pas possible de faire d’une grosse turbine, une petite, affirme le fondateur de Turbotech, qui construit des mini-turbines depuis l’âge de 14 ans. Au début, c’était pour équiper ses modèles réduits. A l’âge de 20 ans, il est passé à l’aviation grandeur comme disent les aéromodélistes.
Damien Fauvet a développé sa turbine sur le principe du cycle régénératif. Un principe qui existe depuis les années cinquante et qui repose sur la mise en œuvre d’un échangeur thermique destiné à réduire la consommation de carburant. « Cela permet d’obtenir une turbine de 100 cv avec un niveau de consommation comparable à celui d’un Rotax et un coût de production acceptable ». Turbotech a noué un partenariat avec Le Guellec qui fournit à Airbus des microbubes destinés au système de climatisation des avions.
Début 2017, le jeune chercheur qui travaillait encore pour Safran, a présenté à son employeur un prototype de la mini turbine. Par la suite, il a réussi deux levées de fonds successives. Une première de 3,2 M€ auprès de Safran et GO Capital, et une seconde de 3 M€ auprès de la DGAC et de la Région Ile-de-France.
Le 1er janvier 2018, Turbotech s’est installé sur l’aérodrome de Toussus-le-Noble, en région parisienne. Damien Fauvet et les trois jeunes ingénieurs qui l’accompagnaient dans son projet, ont tous quatre démissionné de Safran. « Les aides nous ont permis de financer le développement jusqu’aux essais ».
La turbine que Turbotech a fait tourner pendant trois jours au mondial de l’ULM est la cinquième itération. La turbine totalise 150 heures d’essais sur banc. « Nous sommes actuellement à la moitié des essais de type « certification moteur. Les essais de balayage vibratoires sont réalisés en parallèle avec un autre moteur. Un tiers du programme a déjà été réalisé ». Damien Fauvet a fait le choix d’inscrire le développement de son projet dans le cadre de la certification européenne qui régit les moteurs. La fin des essais au sol est prévue pour début 2022. « On aura alors balayé l’ensemble du spectre qu’impose la certification moteur ». C’est plus compliqué, mais cela entre-ouvre les portes d’un marché beaucoup plus large.
Les essais en vol doivent donc débuter en septembre 2021, avec l’hélicoptère ULM d’Helyxir, à Bourg-en-Bresse. Dans la foulée, ils débuteront sur avion, avec JMB Aviation.
Les essais en vol devraient se poursuivre durant tout le premier semestre 2022. La commercialisation est attendue au second semestre 2022. Le prix annoncé à Blois est de 75.000 € HT à comparer aux 43.000 € HT d’un Rotax 915. Turbotech vise une production d’une vingtaine de moteurs en 2022, soit autant que ce qui a déjà été produit depuis le lancement de ce programme. « Nous avons testé une dizaine de moteurs en vol et nous en prévoyons autant pour les essais en vol« , précise Damien Fauvet.
Outre Helyxis et JMB Aviation, un autre fabricant d’hélicoptères ULM et deux autres constructeurs d’ULM trois-axes seraient intéressés. Un constructeur d’avion certifié envisagerait de faire voler sous laisser-passer un avion à turbine. Le marché des appareils non certifiés (ULM, LSA et Experimental) apparaît donc comme une marche vers le certifié pour cette turbine prometteuse « made in France ».
Gil Roy
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Je comprends mal les commentaires négatifs relatifs au coût de cette turbine. Comme n’importe quel ensemble industriel, le prix sur le marché est conditionné par le nombre d’unités produites. Si cette motorisation trouve son marché, outre atlantique, ça devrait en faire une proposition pertinente pour les ULM.
Je verrai très bien ce genre de turbine dans un véhicule terrestre.
Une propulsion 100% électrique et une turbine pour recharger des batterie et fournir une alimentation supplémentaire.
Batteries seraient seules à être utilisées en ville, et un mix batterie/turbine le serait hors de la ville.
cette idée n'est pas de moi, mais avec des turbines se réduisant et pouvant "avaler" n'importe quoi, ce n'est peut-être plus une utopie.
Encore une merde ultra bruyante qui va nous exploser les oreilles pour le plaisir d une seule personne. Vivement une vraie réglementation du bruit des avions
Arnaud Hagard, au lieu de vous soulager au milieu de ce chemin public, je vous invite à faire le tour des posts traitant justement des enjeux et réalités factuelles (écologie dans le sens large) autour des pratiques aéro qui ne sont pas que loisirs.
Juste ajouter cette analogie : c'est le sport loisirs qui crée la "dynamique", en faisant exister les infrastructures, crée des vocation, entretien les filières (des jobs) qui permet le sport de haut niveau... Sans tous ces "petits dojos de campagne" il n'y aurait pas de Teddy...
Passez un jour prêt d'un stade de foot plein de supporters et mesurez le bruit svp.
Ce qui pose problème avec les turbines à gaz c'est qu'elles tournent de plus en plus vite lorsque la taille devient de plus en plus petite et donc niveau utilisation en turboprop c'est le coût faramineux du réducteur comme on le voit déjà sur tous les hélicoptères quelle que soit la motorisation.
Une turbine de cette taille doit tourner à 30, 40 000 tr/min aussi il faut un réducteur avec un rapport de l'ordre de 150, 200 pour entraîner une hélice dans de bonnes conditions. Un réducteur certifié avec un tel rapport doit coûter deux yeux et deux bras à produire.
Une erreur s'est introduite dans mon propos précédent ; le rapport du réducteur est de l'ordre de 15 à 20 et non pas 150 à 200
Avec les machines de taillage et traitements thermiques modernes le réducteur n'est pas forcément si cher à produire, et surtout ce n'est pas une technologie inaccessible. En revanche, en ce qui concerne les étages chauds, obtenir une température d'entrée de turbine élevée qui est condition pour un moteur compact et léger, il faut taper dans des alliages et techniques de fabrication autrement plus complexes et spécifiques.
Projet intéressant dans cette gamme de puissance, avec un gain certain en compacité du GMP pour un gros couple disponible à l'hélice, sans vibrations. Et sans Avgas ?
Reste à voir le coté puissance sonore et sonorité.
Un très beau projet, qui va intéresser nombres d'hélicoptériste...
Coté fabrication et coût de fabrication, une turbine reste quand même plus complexe à faire un bon vieux moteur 4 temps. Les aubes de turbine, c'est quelque chose...
En modèle réduit on s'en tire avec des ensembles usinés dans la masse, qui vont être difficile à transférer plus gros. Et nos rendements sont pas terribles...
A suivre !
Peut-elle fonctionner à l'huile végétale ? Si c'est le cas, c'est une très bonne nouvelle.
Elle est polycarburant : diesel, jet-A1, sans plomb98, etc
Leur turbine est sans doute formidable. Mais je doute qu’elle puisse être vendue à un prix qui permette son adoption dans la petite aviation certifiée - j’espère me tromper d’ailleurs. Je pense plus en l’état qu’elle n’est qu’un démonstrateur pour développer des turbines à des niveaux de puissance ou il sera possible de la valoriser aux prix pratiqués dans le « certifié »
Pendant ce temps, les chinois vendent désormais d’excellentes copies de rotax…
Le problème reste toujours le même notre aviation civile va inventer des obstacles car ayant tuer ULM... Elle est très disponible maintenant. pour d'autres actions..
Quel est ce charabia ? C'est incompréhensible ! L'ULM n'est pas tué comme vous semblez le dire ! Exprimez vous correctement.
Il me semble lire que le principe de ce "générateur de couple à une hélice" qui me fait rêver* est innovant avec la récupération de l'énergie thermique... peut-on en savoir plus ?
* imaginer nos petites machines à la fois plus légères, économes, silencieuses, facilement pilotables...
Effectivement, avec un seul compresseur, même s'il est centrifuge, le taux de compression ne doit pas être très élevé (sans doute inférieur à 10). L'échangeur de chaleur doit avoir un rôle central pour obtenir un rendement pas ridicule (26%) du tout.
Les 19 litres à l'heure sont apparemment obtenus à la puissance de 55 kW (19l/H x 40MJ/l / 3600s x 26% = 55 kW), ce qui corrobore les spécifications de leur turbogénérateur TG-R55.
Peut-être qu'avec les moyens modernes de fabrication, faire une turbine ne coûte pas plus cher que de fabriquer un moteur à piston plein de pièces mobiles? Après tout, ce sont surtout les procédures de certification, qui gonflent le prix, surtout sur des petites séries... et d'ailleurs, un turboprop de modèle reduit de 9Kw coûte 4000€ https://ab-airmodel.com/Turbine-JetCat-SPT10-RX-Turboprop
le prix catalogue a été publié. Il est raisonnable
Un R22 français vole très bien avec un simple APU qui est d'un prix très abordable.
75000€, raisonnable ?
Vous vivez dans quel monde ?
Atterissez !. Pas la moindre chance d'en vendre ne serait-ce qu'un seul exemplaire à ce prix
Je maintiens ce que j'ai ecris. Aucune application pour l'aviation légère possible.
Publié, mais où?
Les informations "disponibles" évoquent une gamme de prix comprise entre 80'000€ et 140'000€. HT.
J'espère que ces informations seront drastiquement revues à la baisse, sans quoi le produit restera une niche au niveau de l'aviation légère ou ultralégère...
Dans notre article, nous avançons le chiffre de 75.000 €HT. C'est le prix que nous a donné Damien Fauvet, le PDG-fondateur de Turbotech que nous avons rencontré à Blois et avec qui nous avons pu échanger longuement. Tout est dans notre article