Dans un email daté du 27 octobre 2021, la Direction de la sécurité de l’aviation civile (DSAC) Centre-Est adresse une mise en garde, sans ambiguïté, aux utilisateurs de Cervens. L’avenir du dernier terrain ULM de Haute-Savoie apparaît menacé. D’ores et déjà, plus de vingt machines y sont clouées au sol.
Entre lac et montagne, proche de Thonon-les-bains, la base historique (créée en 1983) de Cervens abrite aujourd’hui une soixantaine de machines, pour moitié peu actives, réparties dans deux structures, Scorpio et Alp-ULM, avec deux tiers affiliés à la première et un tiers à la seconde. Les mouvements sont limités par l’exiguïté de la piste (280 x 30 m), des cheminements très élaborés et les contraintes drastiques d’utilisation respectées par les utilisateurs pour préserver un bon voisinage : vols interdits avant 9 h en semaine, les dimanches et jours fériés, limités les samedis. Ainsi, très peu de nuisances particulières sont exprimées par les riverains du terrain.
Tout irait bien si le terrain n’était régi par un arrêté remontant aux pratiques des années 1990, où le club Alp-ULM était le plus actif et l’entreprise Scorpio axée sur le vol libre et la formation ULM. Logiquement pour cette époque, l’arrêté autorise l’ensemble des machines du club et seulement les machines de l’entreprise. Le parc ayant évolué au fil des décennies avec de nouvelles machines simplement basées chez Scorpio, la sous-préfecture s’est inquiétée début 2021 de cet arrêté depuis longtemps inadapté.
Via la FFPLUM, l’autorité a demandé aux deux structures de lui présenter un projet d’arrêté commun. Une réunion regroupant l’Aviation civile régionale (DSAC-Centre Est), la sous-préfecture et la préfecture, et à laquelle ont été conviés les représentants et médiateurs des deux structures en a défini le cadre. Ce projet d’arrête est basé en particulier sur l’entente des deux structures pour un organe commun de gestion, suivant l’exemple de Cessieu (Isère), et une croissance mesurée des mouvements. Mais, en attente du nouvel arrêté, on imagine l’ambiance délétère exacerbée sur le terrain par l’actualité du classement des machines basées en autorisées ou non.
Néanmoins, Alp-ULM et Scorpio se sont accordées, en optant dans le projet d’arrêté qu’elles ont présenté en commun en juillet 2021 sur une autogestion du parc basé, sans limiter arbitrairement et surtout définitivement le nombre des machines, au vu en particulier des nombreux ULM peu actifs. Car une comptabilité des mouvements est difficilement envisageable sur un tel terrain non contrôlé. Le sous-préfet en a pris acte. Puis, s’appuyant sur une procédure judiciaire sans rapport direct avec le projet, il l’a brusquement suspendu ce 26 septembre 2021…
L’inquiétude des ulmistes locaux tourne à l’angoisse depuis la diffusion ce 27 octobre 2021 d’un mail lapidaire de la DSAC-Centre Est (Direction de la sécurité de l’Aviation civile) visant autant les autorisations de plus de la moitié des machines actives que la pérennité même du dernier terrain ULM de Haute-Savoie depuis la destruction de Sallanches.
De fait, dans ce mail la DSAC-CE assène que les machines non liées au club et « n’appartenant pas à la société Scorpio ne sont pas acceptées sur la plate-forme« . Cette application tranchante de l’arrêté de 1999 repose sur l’affirmation que « les services de l’État sont très régulièrement et de manière vigoureuse interpelés sur le non-respect de l’arrêté préfectoral sur la plate-forme de Cervens, ainsi que sur le comportement inacceptable de certains pilotes« . Lesquels pilotes « mettent en danger l’existence même de la plate-forme« .
Tout ceci restant non documenté, tandis les deux structures n’ont connaissance d’aucune plainte aigüe… Quant à l’arrêté, il était tombé dans une telle désuétude qu’aucun des services de l’Etat n’a jamais relevé d’infraction concernant la situation des machines aujourd’hui visées, et que jusque récemment, l’Aviation civile elle-même délivrait des cartes d’identification attachant sans distinction des ULM à Cervens.
» Je rappelle que les plates-formes ULM sont créées par arrêté préfectoral, arrêté qui peut être très simplement et très rapidement révoqué par le préfet en cas de trouble. L’irrespect et l’irresponsabilité de certains pilotes mettent donc maintenant l’existence de vos structures en réel danger« , prévient la directrice de la DSAC Centre-Est.
La longue agonie de Sallanches a profondément marqué l’aviation de loisirs locale. L’intransigeance de l’autorité ne milite pas pour la préservation de Cervens.
Gabriel Gavard
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La pente est-elle savonnée ou seulement savonneuse ?
Dans quelle mesure un service public, qui se doit d’être garant d’actions argumentées et proportionnées (mais rêve je ?), peut-il menacer de sanctions sur la base de ce qui est présenté par lui-même comme des « on dit » ?
La moindre des chose n’est elle pas, en la circonstance, de documenter formellement les attendus, de sorte qu’ils soient à la fois identifiés et discutés ?
Bizarre… ☹
Etonnante cette lettre de la DSAC qui ne communique pas la documentation objective et factuelle des "interpellations vigoureuses et fréquentes des Services de l'Etat et d'activités irresponsables de pilotes" sur laquelle elle se base, d'autant que très peu de pilotes d'aviation générale des plateformes proches tant françaises que suisses sont au courant des contraintes imposées à la base ULM de Cervens et peuvent la survoler sans respecter eux-mêmes ces contraintes (pas de vol avant 9h, pas de vol les dimanche et jours fériés, pas de vol le samedi entre 12h30 et 15h), notamment à cause de la proximité de la CTR et de la TMA de l'Aéroport international de Genève qui amène des trafics externes dans cette zone. Heureusement l'utilisation maintenant répandue des enregistrements de trajectoires GPS et des transpondeurs devrait facilement dédouaner les pilotes ULM de ces allégations.