Le championnat du monde de voltige 2015 qui débute le 20 août à Châteauroux est en fait le 4ème mondial qu’organise la France. Le premier a eu lieu du 18 au 31 juillet 1972, sur la base aérienne de Salon de Provence, dans le sud de la France. Il a tourné au cauchemar pour l’équipe de France mal préparée. Il y aura un avant et un après Salon.
De l’avis de tous, ce premier championnat du monde de voltige organisé par la France, du 18 au 31 juillet 1972, sur la base aérienne de Salon-de-Provence, est une grande réussite, sauf, évidemment, pour les voltigeurs français qui sont passés complètement à côté de la compétition. Le premier français, Luis Pena sur Cap 20 se classe quinzième, devant Dousson. Les deux compétiteurs sur lesquels reposaient les espoirs de la sélection tricolore terminent dans les profondeurs du classement général : Jean-Claude Ordoux, est 24ème, et Robert Paar, 44ème.
L’Acrostar qu’ils partageaient est hors de cause. Les erreurs de jugement dont a été victime le premier, et la malchance qu’a subi le second entre les vols, ne peuvent pas expliquer à elles seules la contreperformance des deux favoris français. Il faut aller chercher ailleurs les causes de la déroute française.
Pour Jean Eyquem qui sera chargé, à l’issue de ce championnat désastreux, de reconstruire l’équipe de France, la raison première est une sélection tardive et une préparation collective trop brève. Il est convaincu que la France possède le potentiel pour jouer les premiers rôles. La suite donnera raison au chef de la délégation tricolore.
En attendant, la France qui se classe quatrième par équipe, traverse ce 7ème championnat du monde en spectatrice impuissante. Elle assiste de loin au duel entre l’URSS et les USA. Les soviétiques, historiquement favoris avec Egorov et Pimenov sur leur efficace Yak18, vont être détrônés par des américains déchaînés. Menés par Hillard, Soucy et Poberezny sur leur impressionnant Pitts S1S, ils vont faire forte impression. La sélection américaine qui a envoûté ceux qui l’ont vue à l’entraînement à Romans (Drome), dans les semaines qui ont précédé la compétition officielle, va faire, à Salon-de-Provence, un véritable show. A l’évidence, les Américains ont le sens de la communication.
Les trois Pitts S1S de l’équipe US, étincelant dans leur livrée d’un rouge rutilant, sont lustrés chaque jour, et les trois pilotes, en combinaison rouge assortie, se font conduire à leur avion, à travers le parking, par une Ferrari, rouge évidemment ! Même si certains trouvent qu’ils en font peut-être un peu trop, la Provence leur réussit. Les USA signent, avec la manière, un époustouflant grand chelem. Charlie Hillard est sacré champion du monde. Avec Gene Soucy et Tom Poberezny, qui deviendra plus tard le président de l’EAA (la puissante association des constructeurs amateurs américains), Hillard donne aux Etats-Unis, aussi le titre par équipe. L’américaine Mary Gaffaney et son Pitts S1 est championne du monde devant « l’armada » des 5 pilotes russes.
Une fois encore, la chance a souri aux audacieux. Le soviétique Egorov, champion du monde sortant et grand favori de cette 7ème édition du mondial de voltige, laisse passer la sienne lors de l’ « Intégral 4’ ». La défaillance de son chronomètre mécanique le conduit à finir son vol « au jugé ». Il sera pénalisé pour dépassement du temps réglementaire. Nul ne peut affirmer que lors de cette épreuve, il aurait pu passer devant Hillard. Je me souviens de son immense tristesse mêlée de rage qui l’a envahi quand, de retour au parking, frappant son chrono, peut-être mal remonté, il avait compris que le titre venait de lui échapper définitivement. Pour l’accueillir et le réconforter, il n’y aura qu’un commissaire politique. Celui que tout le monde voyait en or ou en argent, est rétrogradé à la 5ème place.
Salon 1972 est le premier championnat du monde de voltige auquel j’assiste. Et pourtant, j’ai le sentiment qu’il y a eu un avant et qu’il y aura un après. Je suis encore étudiant à l’ESTA, fabuleuse école d’ingénieur L’Ecole Spéciale des Travaux Aéronautiques a été créée initialement pour donner, en un an, une formation d’ingénieur aéronautique aux Gadzarts diplômés, afin de leur éviter de passer 2 ans à Sup’aéro et d’y revoir des enseignements déjà connus. Elle était financée entièrement par la taxe d’apprentissage et les élèves devaient être boursiers de l’industrie. Montaine et moi étions boursiers d’Avions Mudry en 71/72 : en échange de cette bourse, nous avions un engagement de ne pas quitter l’entreprise pendant 3 ans, si si, ça a existé ! Les promos tournaient avec 20/25 élèves, dans des baraquements préfabriqués de la faculté d’Orsay. Les professeurs étaient tous des ingénieurs en activité aux Avions Marcel Dassault, à l’Aérospatiale, à l’ONERA, à Air France, à la DGA (l’IGA Wanner, grand pilote d’essais du CEV, que de souvenirs !), bref, que des grands pontes. L’école a été victime de la raréfaction des TA et a dû fermer., aujourd’hui disparue. Je suis boursier des Avions Mudry, avec Montaine Mallet (qui formera la French Connection Airshow avec Daniel Héligoin). Nous allons prendre la suite de Claude Piel, de Nénad Hrisafovic et de Louis de Goncourt au bureau d’études de Mudry. A Salon, je ne suis qu’un observateur, attentif. J’ai pour mission d’essayer de deviner ce que sera la voltige du futur…
Le Cap 20 dont Salon constitue la deuxième apparition en compétition internationale, commence à être pris en main par Jeff Baudoin, Daniel Héligoin (interdit de vol !), Robert Dousson et Louis Pena, mais il est déjà dépassé par les Pitts, beaucoup plus agiles, par l’Acrostar d’Eric Muller (volets/ailerons conjugués à la profondeur), et par le monstrueux, mais magistral Yak18. Le rapport poids/puissance du dernier né de Mudry, et la forme elliptique de l’aile le desserviront. Très fin, contrairement à l’Acrostar, il demande beaucoup d’habileté pour rester « dans le box ». Mudry et l’Armée de l’Air ont déjà pris la décision, depuis plusieurs mois, du Cap20-260 Le Cap 20-260 est équipé d’une version acrobatique expérimentale du Lycoming 6 cylindres. C’est le même moteur que Zlin a choisi de monter sur son Zlin 50, successeur du Zlin 526, dont la fin de règne, est évidente à Salon-de-Provence.
Le Zlin 50 et le Cap 20-260 ne brilleront jamais en championnat : Le Zlin 50 restera dans l’esprit Zlin avec une trop grande surface alaire, une forte inertie de roulis et une voilure mal calée sur le fuselage. Le Cap20-260, est toujours aussi fin, plus lourd ; sa surpuissance ne masquera pas ses défauts originels, notamment sa forme en plan elliptique (il est restauré et en vol en CNRAC à La Ferté-Alais). , qui sera mon premier travail en arrivant à Beynes.
En quittant Salon-de-Provence, en cette fin juillet 1972, Jean Eyquem et Auguste Mudry se donnent une lourde mission : l’un doit reconstituer une véritable équipe sportive, l’autre leur donner un avion simple et économique, dans l’esprit aéro-club, « capable » de donner aux pilotes, dans un premier temps, le niveau championnat du monde, puis dans un deuxième temps, avec un autre avion, « capable » de monter sur le podium. En laissant le temps au temps. D’où le Cap20L, le Cap21, le Cap231.
Jean-Marie Klinka
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WAC 1972 : Les français passent à côté de leur premier mondial à domicile
Jean Eyquem,le Chef,a finalement réussi a redonner à la France une Equipe capable de remporter le mondial!Papa Mud doit être mis à l'honneur lui aussi,car il a payé de sa personne et de ses deniers,pour mettre au point une machine capable de rivaliser avec les meilleures.Rendons hommage également à Monsieur Régis Alajouanine qui a tant fait pour que les avions Mudry restent acteurs sur le théatre de la voltige aérienne.Ces photos anciennes sont des documents appréciés,avec les membres de l'équipe de France,dont certains (tous)ont ,fatalement changé!Peut-être les croiserais-je à Châteauroux,ces jours,car j'y serais pour une semaine afin de supporter mes amis pilotes Français.Cordialement.
Daniel ,le supporter Roannais.
WAC 1972 : Les français passent à côté de leur premier mondial à domicile
Merci m'sieur Klinka pour cette sympathique tranche d'histoire.
WAC 1972 : Les français passent à côté de leur premier mondial à domicile
Pour info, Gene Soucy vole encore en meetings aux 'Sates, alors que les autres grands noms si élégamment cités par JMK ne le font plus que dans nos mémoires collectives... et sur les dérives de nos merveilleux avions Normands.
Et oui, bien sur, "May the best one(s) win" a Chateauroux!
WAC 1972 : Les français passent à côté de leur premier mondial à domicile
Et on le surnomme même "Mister Airshow" !
J'ai vu sa démo de nuit sur son AgCat au printemps ... c'est beau !
WAC 1972 : Les français passent à côté de leur premier mondial à domicile
Fight is on !!!!
Tape is on !!!!
WAC 2015 is in force.............
Bonne chance aux Français(es).
Et que le / la meilleur(e) gagne.
WAC 1972 : Les français passent à côté de leur premier mondial à domicile
J'ai aussi entendu dire qu'ils avaient un encadrement pas trop mal ;-)
Avec une pensée particulière pour l'Ami Ralloch qui prendra sa retraite militaire peu après les WAC ...
WAC 1972 : Les français passent à côté de leur premier mondial à domicile
Merci Jean-Marie pour ces souvenirs.
Et le mois prochain tu rédigeras exactement le contraire : équipe, préparation, appareils et je pense Résultats.
Elles, et Ils, en ont les moyens.
Bonne chance !
WAC 1972 : Les français passent à côté de leur premier mondial à domicile
Un bel article, les 3 américains ont créé les red baron sur Pitts et ensuite la patrouille de christen eagle si je me souviens bien.Une autre époque, beaucoup de nostalgie pour les anciens comme moi.
WAC 1972 : Les français passent à côté de leur premier mondial à domicile
Super article merci !
WAC 1972 : Les français passent à côté de leur premier mondial à domicile
Un article et un point de vue plus qu'intéressants pour les passionnés ... Merci beaucoup !
WAC 1972 : Les français passent à côté de leur premier mondial à domicile
Une belle rétrospective publiée au moment opportun...
Merci à vous et bonne chance à nos compétiteurs.
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