Saison cruelle pour Mikael Brageot qui pensait pouvoir jouer sur les deux tableaux. Rattrapé par son statut de professionnel de la compétition aérienne, il est contraint en 2017 de renoncer à l’équipe de France de voltige et au championnat de monde (WAC 2017) pour honorer ses engagements en Red Bull Air Race (RBAR). Du coup, le championnat de France de voltige Aresti aura une saveur particulière cette année pour le nouveau de la Master Class Red Bull.
Lorsqu’à la mi-février le calendrier de la Red Bull Air Race (RBAR) a été bouclé, un détail nous a sauté aux yeux : la dernière course de la saison, celle de Lauzitz (Allemagne) se déroulera les 16 et 17 septembre 2017, soit en plein milieu des championnats du monde de voltige aérienne Unlimited (WAC2017) à Malelane (Afrique du Sud) du 9 au 17 septembre 2017. Or, parmi les Frenchies qui slaloment entre les pylônes blancs et rouges, il en est un qui compte beaucoup pour la voltige française : Mika Brageot, médaille d’or de l’épreuve Libre-Inconnu au Mondial 2015.
Trancher dans le vif !
En intégrant la Master Class de la Red Bull Air Race, Mika Brageot est entré dans la cour des Grands, et le téléscopage calendaire avec le gratin de la voltige mondiale l’a contraint à faire un choix. Disons-le tout simplement : il ne participera pas aux WAC2017. Sa décision a été simple à prendre, car il y a huit courses aux championnats Master Class et les huit courses doivent être courues sous peine d’être mathématiquement pénalisé au classement général.
De ce fait, Mika Brageot a dû remettre en cause l’idée qu’il s’était fait de sa double-activité : « Depuis quelques années, je me bats pour montrer qu’on peut gérer à la fois la voltige et la Red Bull Air Race mais, cette année, ma démonstration a atteint ses limites à cause des calendriers qui s’accrochent. Les gens de la voltige sont déçus mais ils comprennent, Loïc Logeais (Directeur Technique National, NDLA) et Eric Vazeille (entraîneur de l’équipe de France, NDLA) les premiers. », explique le pilote français.
Le choix logique d’un prodige de la voltige
Egalement, la différence de capacité logistique entre les deux organisations a joué en faveur de la firme autrichienne : là où l’équipe de France de voltige ne savait pas encore quand et comment elle enverrait ses pilotes en Afrique du Sud, Red Bull, eux avaient déjà tout planifié. Dates précises, containers ou avions-cargos attitrés, billets d’avions, réservations d’hôtels, etc, et ce, pour chaque course et chaque membre, de chaque équipe.
On ne peut pas jeter la pierre à l’équipe de France pour ce « défaut d’organisation » qui, en réalité, n’en est pas un, car les gens qui la composent évoluent à travers un statut associatif qui comporte ses avantages, mais aussi ses contraintes de disponibilités et de finances. Aussi aurait-on presque l’impression qu’en préférant Red Bull, Mika Brageot serait devenu ingrat en délaissant une équipe de France associative qui l’a fait grandir, qui l’a conduit vers ses premières grandes victoires, bref qui l’a presque élevé. Mais, en creusant un peu, le choix du Français demeure tout à fait logique, et n’est que bon sens.
Brageot ne lâche pas son équipe !
L’Aresti est une discipline assez ambiguë, surtout en équipe de France, car c’est à la fois un sport individuel quand on est seul dans son avion ou, par exemple, quand on fait de la préparation physique, mais aussi un sport d’équipe quand il s’agit d’analyser le vol des autres, de donner des conseils, ou tout simplement de cumuler les points de chacun pour remporter un titre par équipe ; colonne du tableau CIVA (Commission Internationale de la Voltige Aérienne) que la France domine depuis des années.
Mais malgré de bons résultats, une « association » comme l’équipe de France de voltige est négligeable au profit d’une « profession » : « Grâce au statut associatif, si quelqu’un manque en équipe de France, il est possible de trouver rapidement un remplaçant. Le championnat Air Race est différent, car on a un statut professionnel. Les mécaniciens, l’analyste, le team manager, etc, sont tous sous contrat. Si je me désengage, même sur une seule course, ça pénalise toute l’équipe », explique Mika Brageot, bien conscient qu’en tant que pilote, il est le dernier maillon de la chaîne. « Mon absence les impliquerait directement. Je ne peux pas faire ça ». Il n’y a donc aucune ambiguïté en Red Bull Air Race : il s’agit bien d’un sport d’équipe stricto sensu, où chacun dépend des autres. Autorisons-nous enfin une petite extrapolation en imaginant que les contrats Red Bull prévoient probablement une clause qui obligerait, en toute logique, les compétiteurs à participer aux courses sauf, bien entendu, cas extrême (familial, médical, mécanique, etc).
A la conquête du titre national
Dans cet imbroglio entre Aresti et pylônes en nylon, la chance de Mika Brageot est qu’il ne lèsera aucun sponsor puisque dans les deux disciplines, il s’agit de Breitling. Et l’horloger suisse ne se plaindra pas de cette situation, étant donné que les courses Red Bull disposent d’une communication sans faille qui se traduit par une belle couverture médiatique, à l’inverse de la voltige, hélas, serait-on tenté de dire.
Mais, imaginons que Mika Brageot devienne ultra performant en RBAR : devrait-on craindre que le Français abandonne définitivement l’Aresti ? Le pilote affirme que non : « La voltige et la course aérienne sont deux activités différentes. Je suis engagé dans les deux. Les deux me passionnent. Je resterai engagé dans les deux. Il y aura d’autres championnats du monde, ou d’Europe, auxquels je participerai ! Et puis, j’ai la chance de pouvoir voltiger deux semaines par mois car, entre deux courses, quand le MXS-R voyage dans un container, je m’entraîne sur mon Extra 330SC ».
Preuve par la démonstration, puisqu’il n’y aura pas de course à ce moment-là, Mika Brageot s’alignera aux championnats de France de voltige qui se dérouleront à Niort, du 11 au 16 juin prochains : « Mentalement, j’aborderai ces championnats de voltige très différemment et ça sera très intéressant : d’habitude, un bon résultat entraîne une place en équipe de France, mais cette année, sachant que de toute façon je n’en ferai pas partie, je serai complètement libéré de cette pression-là. J’espère que ça jouera en ma faveur ! ».
Ce serait un comble que Mika Brageot devienne champion de France cette année, car on a rarement vu un champion de France Elite ne pas être en équipe de France. Mais on a rarement vu aussi, la Fédération Aéronautique Internationale se prendre ainsi les pieds dans le tapis en validant son calendrier sportif…
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Bien expliqué Bastien. Bravo pour le tact d'equilibriste verbal. Puissent tous les lecteurs, et institutions, lire entre les lignes, les figures (de style) et les pylônes