Sur le chemin du Pacifique, les Rafale, A400M et A330 MRTT de l’armée de l’Air et de l’Espace se sont arrêtés en Alaska, le temps de participer à l’exercice Arctic Defender. Ils y ont retrouvé l’Allemagne et l’Espagne, avec leurs Typhoon, et bien entendu l’US Air Force et ses F-35. Sans oublier les F/A-18 des US Marines et quelques F/A-18 canadiens.
C’est une question digne du Jeu des 1.000 euros : quelle est la capitale de l’Alaska ? Réponse Juneau, un patelin de 30.000 habitants perdu dans l’étroite bande de terre longeant la Colombie britannique. Dans les faits, la capitale économique et première ville du 49ème état américain est toutefois Anchorage, cité maritime sans grâce.
Pour qui n’aime ni les hydravions, ni la pêche et les moustiques, l’Alaska présente un intérêt limité. Mais pour les militaires, le territoire est un formidable verrou entre les océans Pacifique et Arctique et un pont essentiel entre le continent américain et l’Asie.
Accessoirement, et c’est une autre question éligible au jeu de France Inter, l’Alaska a été vendue par la Russie aux Etats-Unis 7,2 millions de dollars en 1867. La valeur des parchemins étant fluctuante à travers les âges, rien ne garantit que l’actuel Tsar de toutes les Russie se satisfera longtemps de l’initiative commerciale de son lointain prédécesseur… D’où le renforcement des moyens américains dans la région.
D’où également la participation américaine à Arctic Defender qui ne devait être au départ qu’un exercice trilatéral entre Français, Allemands et Espagnols sur le « range » mis à leur disposition par l’US Air Force. Celle-ci s’est donc greffée sur l’exercice avec des F-35, vite rejoints par des F/A-18 des US Marines et quelques F/A-18 canadiens. Au total, Arctic Defender a donc réuni plus de 90 avions, dont une trentaine de chasseurs venus d’Europe.
« En termes de préparation à la guerre de haute intensité, différents niveaux d’entraînement existent explique un pilote de Rafale. Très clairement les conditions offertes par Arctic Defender placent cet exercice au meilleur niveau ! ».
Les règles d’utilisation de l’espace aérien, immense et avec très peu de contraintes, permettent d’exploiter les avions de combat au mieux de leurs possibilités. On l’a vu dans l’épisode précédent avec les A400M, mais il en allait de même avec les Rafale capables de pousser à 600 noeuds, un peu plus d’une centaine de pieds au-dessus du sol seulement.
Tandis que les A400M et ravitailleurs Phénix étaient basés à Elmendorf, les chasseurs français étaient quant à eux installés sur la base aérienne d’Eielson, au niveau de Fairbanks. Si Anchorage est un trou perdu à l’échelle des Etats-Unis, alors que dire de Fairbanks, 400km plus au nord ?
A l’origine une ville de chercheurs d’or, on trouve encore sur l’aéroport civil des épaves de Curtiss Commando et des DC-4 en état de vol aux couleurs d’Everest Air Fuel. A l’est de la piste sont rassemblés des centaines d’avions légers, un Air Park et un lac artificiel où barbotent des dizaines d’hydravions.
Posée à une vingtaine de kilomètres dans le sud-est de Fairbanks, Eielson Air Force Base a donc rassemblé plusieurs dizaines de chasseurs : Hornet des Marines et de la Royal Canadian Air Force, Typhoon allemands (faute de place, les Tornado opéraient depuis Elmendorf) et espagnols, F-35 de l’USAF et enfin les quatre Rafale venus de France et tous au standard F4.1. Mais pourquoi quatre avions seulement ?
« Parce qu’il nous fallait trouver un compromis entre les besoins de la mission Pégase et notre engagement opérationnel pour la protection des Jeux Olympiques de Paris, tout en faisant face à la mise en place du 5ème escadron Rafale à Orange » explique le général Guillaume Thomas qui dirige la mission Pégase.
Quatre Rafale, accompagnés par trois A400M et un Phénix de ravitaillement en vol, c’est donc le fruit d’un compromis. Certes la participation allemande comprenait pas moins de 12 Tornado et quatre Typhoon. Mais il s’agissait pour la Luftwaffe d’un investissement majeur pour l’année 2024, avec un accompagnement logistique kolossal et notamment le transport par voie maritime de plusieurs centaines de conteneurs ! En comparaison, les Français avaient choisi de voyager très léger en utilisant simplement les A400M et Phénix de la mission Pégase.
« A cette légèreté correspondait une prise de risque mais le bilan est excellent, avec une disponibilité de 100% sur 67 sorties réalisées par les chasseurs au cours d’Arctic Defender » souligne le général Thomas. Le bilan des ravitailleurs A400M et Phénix est également flatteur, avec le ravitaillement d’une centaine d’avions (Tornado, Typhoon, mais aussi F/A-18, F-35 et F-22 américains) en une dizaine de sorties. L’entraînement sur les Phénix a particulièrement intéressé les Canadiens, la Royal Canadian Air Force devant toucher ses premiers Airbus A330 MRTT à partir de 2027. « Ils attendent leurs avions avec impatience, ils nous l’ont dit » soulignait d’ailleurs un pilote d’Airbus français.
Mais revenons aux Rafale…
Le contingent français comprenait une vingtaine de navigants au total, pilotes et navigateurs, et parmi eux une équipe de l’ECE 1/30 Côte d’argent, l’escadron de chasse et d’expérimentation du CEAM, venus en Alaska pour tester le standard F4.1 en conditions réelles, ou presque. Rappelons d’un mot que le standard F4 représente un saut qualitatif important pour le Rafale, avec des évolutions nombreuses sur l’avionique et le système d’arme.
Environ la moitié de la flotte française est aujourd’hui portée à ce standard, avec déjà une première capacité opérationnelle (PCO) obtenue pour les missions air-air. La PCO dans le cadre des missions air-sol devrait suivre à la fin de l’été, ouvrant la voie à une mise en service opérationnel (MSO) complète du Rafale F4.1 prévue dans les prochains mois, avec les livraisons progressives des nouvelles capacités aux escadrons.
« Dans le cadre de la mission Pégase, Arctic Defender nous a offert la possibilité d’évaluer la cohérence d’ensemble et d’expérimenter de nouvelles capacités de ce nouveau standard » explique un des pilotes de l’ECE présent sur l’exercice. « Pour nous, il s’agissait en quelque sorte d’une grande répétition avant la MSO ».
L’équipe du CEAM pouvait notamment compter sur l’engagement de nombreux plastrons, dans le domaine air-air mais aussi dans le domaine de la guerre électronique et de la défense sol-air avec la simulation d’une très large gamme de systèmes. Les équipages de Mont-de-Marsan ont pu ainsi travailler sur le combat collaboratif, qui passe notamment par l’extension du champ d’application des liaisons de données.
Dans son standard F4.1, le Rafale permet par exemple l’échange de données de ciblage entre avions, que ce soit en mission air-air ou air-sol. Un avion peut ainsi transmettre à un ou plusieurs autres le point visé par une nacelle de ciblage ou un radar. Gain de temps, gain de précision, meilleure répartition des armements au sein d’une patrouille face à des cibles multiples, les possibilités offertes par cette capacité sont considérables.
Dans le mode air-sol, les contrôleurs avancés au sol peuvent également être intégrés dans le réseau L16 et échanger des informations avec l’avion sans avoir à parler à la radio. C’est ce que l’on nomme le Digital Edited Close Air Support, l’appui-feu 2.0 en quelque sorte…
Utilisé dans toutes les phases de vol et dans toutes les missions, le viseur de casque Scorpion a également confirmé sa place centrale dans le standard F4.1 Son association avec le SPECTRA NG, le radar AESA et l’OSF NG, forme un ensemble cohérent et puissant qui permet à l’avion français de tenir plus que jamais son rang dans un cadre multinational, comme l’a montré Arctic Defender.
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La Russie, à l'économie en grandes difficultés suite aux embargos et au désastre démographique qui se profile, avec une armée de tanks qui ne sont plus que des centaines, des milliers ? de cercueils sur le front du Donbass, grignotant avec grand peine quelques kilomètres sur ce front, voilà donc l'ennemi redoutable qui nous pousse aux ordres de l'Oncle Sam.
Nous dira-t-on le coût de cette expédition en Alaska ?
Mais nous sommes riches, les JO le démontrent, les repas présidentiels le confirment.
L'hôpital, l'école, et tant d'autres services comme la cour des comptes voient tout cela par un autre bout de la lorgnette.
La facture va tomber, très lourde, dans les prochains mois.