La Belgique aura attendu soixante ans avant de produire un nouvel avion de tourisme. Pour construire le Sonaca 200, Sonaca Aircraft a choisi l’aérodrome de Namur pour se lancer dans l’aventure. Le bâtiment sorti de terre en septembre 2019 accueille désormais les ateliers et les bureaux de l’avionneur qui prévoit une montée en cadence de sa production à 40 biplaces en 2020 et jusqu’à 80 en pic maximal de production.En 2015, quatre employés du groupe Sonaca proposent au comité directeur de renouer avec l’activité historique de l’entreprise belge : l’aviation légère. L’idée était d’innover sur de nouveaux marchés avec de nouveaux produits et de nouveaux clients. L’actuel groupe Sonaca est l’héritier de la Société Générale d’Entreprises Aéronautiques créée en 1920 à Gosselies, puis de la Société Belge des Avions Fairey, qui produit jusqu’en 1961 le Tipsy Nipper, dernier avion léger construit en Belgique.
Fairey assemble en Belgique les Hawker Hunter, les F-104G ainsi que les 160 F-16 de la composante air belge. En 1978, la région wallonne, aujourd’hui actionnaire à 99% dans le groupe Sonaca, rachète l’entreprise et la baptise Sonaca (Société Nationale de Construction Aérospatiale). L’entreprise poursuit ses activités de construction notamment dans le milieu militaire (fabrication d’une partie du fuselage des F-16 belges et leur assemblage, différents éléments de l’A400M d’Airbus defense & space), dans l’aviation civile (bord d’attaque des ailes depuis l’A310 jusqu’à l’A350 d’Airbus, des Embraer 170/190 et des Falcon 7X et 8X de Dassault Aviation) et dans le spatial (depuis la navette européenne Hermes jusqu’au bouclier thermique de l’atterrisseur martien Beagle 2 lancé en 2003).
« Le groupe Sonaca, c’est aujourd’hui 5000 personnes qui travaillent sur neuf sites répartis dans le monde dans autant de filiales » explique Pierre Van Wetter, responsable commercial de Sonaca Aircraft et pilote de présentation du Sonaca 200. « Quand nous avons proposé au comité directeur du groupe, avec quatre autres collègues, de renouer avec l’aviation légère, l’idée a été très vite adoptée, parce qu’elle permet d’élargir les compétences de Sonaca et parce qu’elle permet au groupe de lancer un programme d’innovation, sur lequel reposent désormais plusieurs projets en cours de développement. »
Bénéficiant des précieuses infrastructures du groupe, actionnaire majoritaire, la nouvelle filiale, baptisée Sonaca Aircraft, est une PME qui mène sa barque en indépendance. Sur les 5.000 employés du groupe, cinquante personnes sont dédiées à l’activité de Sonaca Aircraft. En à peine deux ans de développement, le Sonaca 200 effectue son premier vol le 19 juin 2017. Il aura fallu attendre près de soixante ans pour qu’un nouvel appareil d’aviation légère soit produit sur le sol Belge. L’objectif affiché est avant tout de fournir aux écoles de pilotage un outil complet pour la formation : robuste, moderne et efficace.
Pour développer son biplace aussi rapidement, Sonaca Aircraft a fait appel à quatre concepteurs de kits, en Europe et dans le monde. Après étude et essais en vol, c’est le kit du sud-africain The Airplane Factory qui a été retenu : le Sling 2 devenant la base de travail de l’équipe belge pour mettre au point le Sonaca 200 : le 2 pour biplace et les 00 pour les versions ultérieures (le Sonaca Trainer Pro est ainsi enregistré sous le numéro 201). Après de nombreuses modifications apportées par l’équipe, en accord avec The Airplane Factory, le Sonaca 200 obtient sa certification CS-VLA (Very Light Aircraft, avions très légers, avec une masse maximale au décollage de 750 kg) par l’EASA en juin 2018, trois ans seulement après avoir déposé son dossier. « Nous avons été aidés en cela non seulement par les outils et savoir-faire à notre disposition dans le groupe Sonaca, mais également par les conseils précieux de la DGAC qui, venue de France, a suivi toutes les étapes de la production du prototype et jusqu’à sa certification » explique encore Pierre Van Wetter.
Quatre-vingt pourcent du kit original a été remanié pour aboutir au Sonaca 200 : « La forme de l’avion, le profil de l’aile et le choix des matériaux ont été maintenus. En ce qui concerne les modifications et les améliorations apportées au prototype, 80% de la structure de départ a été remaniée afin de répondre aux exigences du marché, d’une part, et aux exigences de certification EASA, d’autre part. Nous avons significativement modifié la résistance structurelle pour considérer une masse maximale au décollage de 750 kg avec un facteur de charge de 4.4G, soit une augmentation de l’ordre de 25% par rapport à l’avion initial ».
« Les structures de l’appareil ont été renforcées. Les longerons principaux de la voilure, la connexion au fuselage et le longeron central ont été redessinés et certains alliages d’aluminium ont été modifiés afin de tenir compte des charges aérodynamiques, de la fatigue des matériaux ainsi que des aspects liés à la corrosion. Les changements portent également sur le renforcement de l’arceau de verrière, le train d’atterrissage, l’empennage vertical et horizontal y compris sa connexion au fuselage, l’hélice, le système de freinage ainsi que l’instrumentation et le circuit d’alimentation d’essence. Quelques modifications aérodynamique ont également été apportées pour répondre à la vrille non-intentionnelle et intentionnelle. »
Si la majeure partie des pièces est produite à Gosselies, dans l’usine principale située sur l’aéroport de Charleroi, c’est l’aérodrome de Namur qui a été choisi pour l’assemblage final des appareils. Les deux pistes sont distantes d’à peine vingt minutes en vol et l’aérodrome de Namur est beaucoup moins encombré par le trafic aérien commercial. Installé dans un hangar non loin de la piste, la production des premiers appareils a débuté ici en 2017. Un algéco provisoire servait à l’origine de bureaux, puis onze autres sont venus s’ajouter, suivant la progressive montée en puissance de Sonaca Aircraft à Namur. Les douze algéco ont été désertés en septembre 2019 au profit d’un bâtiment de 2.000 m2 flambant neuf, monté à proximité, qui abrite désormais les bureaux de la PME, mais également les chaînes d’assemblage des deux versions : Sonaca 200 avec tableau de bord analogique et Sonaca 200 Trainer Pro, glass cockpit. Le premier est vendu 177.500 euros, le second 208.500 euros.
Dix Sonaca 200 ont été livrés jusqu’à présent, notamment auprès de deux écoles belges (Belgian Flight School et Air Academy New CAG) ainsi qu’à une école turque (Ayjet). Le carnet de commandes s’élève aujourd’hui à 60 appareils répartis en 2/3 pour le Sonaca 200 et 1/3 pour le Trainer Pro. Il faut compter un an entre la commande et la livraison. Sonaca Aircraft table sur 20 livraisons en 2019, avec une montée en cadence liée aux nouveaux locaux, plus vastes. Si seulement quatre appareils pouvaient être assemblés en parallèle dans le hangar jusque-là occupé par Sonaca Aircraft, le nouveau bâtiment permet de gagner en efficacité : les deux lignes d’assemblage des deux versions seront côte à côte et permettent d’envisager quarante livraisons en 2020 puis cinquante en 2021. Sonaca Aircraft table même jusqu’à 80 livraisons.
Tous les éléments métalliques composant le Sonaca 200 sont fabriqués ou formés au sein du groupe Sonaca, à Charleroi ou sur le site roumain. Le nouvel atelier, moderne, est prévu pour accueillir une production entre 60 et 80 appareils par an, sur deux lignes d’assemblage. L4atelier permet désormais d’assembler huit appareil en parallèle. Un show-room a même été aménagé de manière à accueillir les clients pour la livraison de leur Sonaca 200.
En parallèle, l’équipe de Sonaca Aircraft travaille sur d’autres projets en lien direct avec le biplace. Le premier consiste à développer un service après-vente afin de fournir au client les pièces de rechange dont il a besoin. Ensuite, Pierre Van Wetter évoque l’idée du leasing : l’idée est de louer un ou plusieurs avions aux écoles qui en feraient la demande sur une période donnée puis de vendre l’appareil sur le marché de l’occasion.
Fabrice Morlon
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Ne pas oublier que cet avion a été conçu il y a quelques années en Afrique du Sud sous le nom de SLING.
SONACA a fait certifier cet avion en Europe pour l'industrialiser et le vendre en y apportant quelques modifications pour ce faire.
Je me souviens de précedents articles sur SONACA, les commentaires odieux et désagreables à propos de cette audacieuse aventure Belge. L'auteur de remarques pertinentes sur la viabilité de cette machine et de son futur succès furent litteralement dénigrés. Preuve en est qu'une bonne analyse de marché accompagnée de moyens techniques et financiers appropriés valent mieux qu'une équipe de doux reveurs.
Bravo