En 2018, pour la première fois de son histoire, le Red Bull Air Race organisera une manche de son championnat du monde en France. Ce sera du 20 au 22 avril, dans la baie de Cannes. Les deux précédentes tentatives avaient avorté. La troisième a été la bonne. Les organisateurs qui ont réussi à convaincre la DGAC, mais aussi la FFA, seront sous très haute surveillance. L’enjeu est de taille : la France qui aligne le plus important contingent de pilotes (6) sur le circuit Red Bull Air Race, offre aussi plusieurs autres sites qui intéressent les organisateurs.
Depuis 2003, date de la création du championnat, Red Bull a plusieurs fois fait du pied à la France pour qu’une Air Race se déroule sur notre territoire et, par deux fois, des négociations avaient débuté…
Deux rendez-vous manqués…
En 2008, Red Bull et la Direction Générale de l’Aviation civile (DGAC) étaient sur le point de conclure un accord lorsque le crash d’un racer MG-03 Harmattan causa la mort de son pilote, lors d’une course aérienne sur l’aéroport de Castres-Mazamet. Le Bureau d’Enquêtes et d’Analyses (BEA) n’arrivant pas à déterminer les causes de l’accident, et même s’il ne s’agissait pas d’une Red Bull Air Race, le mot « racer » ne fut plus en odeur de sainteté dans les couloirs de la DGAC et le projet fut abandonné.
En 2014, on dépoussiéra les dossiers et une course fut envisagée à Marseille. Hélas, le projet mourut dans l’œuf à cause de l’investissement financier nécessaire, visiblement trop élevé pour une Cité phocéenne moins passionnée d’avions entre des pylônes, que de ballons entre des poteaux… Pour 2018, la ville de Cannes – qui ne brille pas par ses exploits footballistiques – a choisi de laisser le Taureau rouge paître sur sa plage : une Red Bull Air Race aura lieu les 20, 21 et 22 avril 2018.
Un box inédit en France
En collaboration avec Red Bull, le projet a été piloté par la DGAC, la DSAC (Direction de la Sécurité de l’Aviation Civile) et SNA (Service de la Navigation Aérienne) sud-est. Les paddocks et équipes seront situés sur l’aéroport de Cannes-Mandelieu (LFMD) et la course se déroulera au-dessus de l’eau, face à la Croisette (où seront montées des tribunes) située à moins de 5 km à vol d’oiseau du seuil de la 22. Si, pour l’instant, on ne sait rien du tracé de la course, on a une idée du box dans lequel les pilotes slalomeront, et de la manière dont ils y entreront : après avoir décollé de LFMD, les avions effectueront une montée vers 1 000 ft pour rejoindre une zone de décompression située à l’est du port. Là, ils pourront descendre jusqu’au circuit et pénétrer dans un box aux caractéristiques aussi délirantes qu’inédites en France : de 2 000 pieds max à… 30 pieds sol mini !
Des conditions de vol littéralement hors la loi rendues possibles via une dérogation de survol à (très) basse altitude. Attention cependant : la DGAC veillera au grain. Car, en plus d’être présente sur l’aéroport, elle enverra des inspecteurs directement au PC-course de Red Bull pour veiller au strict respect des normes de sécurité. Souple n’est pas non plus contorsionniste…
ZRT, ZIT et cætera : un sacré casse-tête !
Comme lors de la plupart des événements aériens, une ZRT (Zone Réglementée Temporaire) sera mise en place mais elle sera relativement réduite dans la mesure où l’aéroport de Cannes ne pourra pas stopper complètement son activité aérienne. Des discussions sont d’ailleurs en cours avec le gestionnaire aéroportuaire pour trouver des solutions afin de ne pas trop impacter le trafic VFR et IFR. L’exercice sera d’autant plus complexe qu’une ZIT (Zone Interdite Temporaire) sera également créée afin de rendre immédiatement mobilisables des moyens de défense aérienne (notamment de lutte anti-drones) via des hélicoptères de la GTA (Gendarmerie des Transports Aériens).
Concernant le positionnement géographique de ces deux zones, pour l’instant, cela reste assez vague : À l’heure actuelle nous sommes sur une phase de recueil d’informations de la part de Red Bull, et nous ne pouvons donc pas donner de précisions sur les délimitations de ces zones réglementées, explique la DGAC. Traduction : nous attendons que Red Bull nous donne le tracé de la course.
S’investir et investir…
Parallèlement, plusieurs groupes de travail ont été mis en place par la préfecture et, outre celui qui sera dédié à la sécurité et à la gestion opérationnelle aérienne (dans lequel œuvrera la DGAC), il y a le « groupe Maritime » (sécurité et secours en mer), le « groupe Sécurité » (police, gendarmerie, Vigipirate), ou encore le « groupe Circulation au sol » (Trafic routier et flux de population à pied). Tout cela a un coût et, outre celui des moyens mobilisés par la préfecture et la municipalité, il faut savoir que Red Bull facture sa prestation à la ville de Cannes, à hauteur de 1 million d’Euros…
Si cela semble cher, il faut savoir que la Red Bull Air Race chez vous, c’est une petite ville dans la ville : bien sûr, ce sont des avions, des pilotes et leurs équipes, mais aussi et notamment des paddocks, une tour de contrôle, et donc énormément de personnel technique pour monter, contrôler, démonter toutes les structures… Et puis c’est aussi une direction des vols, des équipes médicales, de sauvetage, d’intervention en mer, etc, regroupés au sein de plusieurs PC : course (avec ses propres moyens de contrôle de navigation aérienne), sécurité air, mer, sol, etc.
En résumé, c’est une grosse écurie, mais ce million d’Euros qui fera forcément râler le contribuable cannois sera vite amorti par des retombées économiques immédiates. Par ailleurs, la ville a également conscience de l’impact médiatique d’un tel événement, puisque plus de 30 chaînes de TV retransmettent la Red Bull Air Race, et pour cause : ce spectacle aérien 2.0 est aussi impressionnant sur place que devant son poste de télévision…
Le point de vue de la FFA
À propos de la Red Bull Air Race, la Fédération Française Aéronautique et son président, Jean-Luc Charron, sont partagés : « L’aspect négatif, c’est qu’une fois que le grand public aura vu ce genre de show, il pourrait s’attendre à trouver la même chose sur d’autres manifestations aériennes, et ce ne sera pas forcément le cas » dit-il avant de poursuivre « en revanche, le côté positif c’est que ça attire du monde vers l’aéronautique, et qu’une partie de ce public se retrouvera sur nos meetings aériens ».
Il reconnaît néanmoins que le point numéro deux l’emporte sur le numéro un, mais pointe un autre souci : la disponibilité, pour les championnats de voltige, des pilotes français qui sont six à slalomer entre les pylônes en nylon.
En effet, en 2017, on se souvient que Mika Brageot avait dû privilégier la Red Bull Air Race et, de fait, n’avait pas pu se rendre en Afrique du Sud pour disputer les 29e Championnats du Monde de voltige, les dates des deux événements ayant été trop proches. « Nous avons donc signalé à Red Bull que certaines choses ne nous convenaient pas, et nous leur avons demandé d’ajuster leurs calendriers » explique Jean-Luc Charron. Il faut croire que la FFA a été entendue, car de nouveaux accords, signés mi-octobre 2017 entre la FAI et Red Bull, prévoient notamment que la voltige et l’Air Race ne se téléscopent plus. Wait and see…
Vers plus de sensationnel ?
L’apparition de ce type de courses en France, pays habituellement allergique à toute évolution qui chahuterait le sacro-saint principe de précaution, serait-elle une porte ouverte, une main tendue vers des événements de plus en plus sensationnels ? Les Red Bull Air Races ne se déroulant pas qu’au-dessus de plans d’eau, pourrait-on, dans le futur, imaginer une étape française au-dessus de l’hippodrome de Vincennes, comme en 2016 à Ascot (Angleterre) ou encore au-dessus d’un circuit automobile tel que Nevers Magny-Cours, comme en 2017 à Indianapolis (USA) ?
À cette question, la réponse de la DGAC surprend dans un premier temps : « En France, on n’a jamais vu d’avion décoller depuis un circuit automobile sur de tels événements [à Indianapolis et à Ascot les avions décollaient devant le public, nlda]. Cela semble assez compliqué, mais nous ne sommes pas fermés à la discussion »… Puis, redevient très terre-à-terre dans un second temps : « La course de Cannes est une première expérience et nous verrons le retour que nous aurons là-dessus. Pour l’instant, la priorité est de tout mettre en œuvre pour l’organiser avec les normes de sécurité nécessaires ». Sur ce deuxième point, on leur fait confiance…
Bastien Otelli
Les hélicoptères Puma HC2 âgés d’un demi-siècle seront retirés du service en 2025. Ils seront… Read More
La tour de contrôle centrale de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle est en travaux. Fin… Read More
Depuis plus de quatre décennies, le Pilatus PC-7 constitue la pièce maîtresse de la formation… Read More
On a rarement vu une compagnie aérienne aussi bien préparée à déposer le bilan que… Read More
Dans un roman, Jean Rousselot raconte à la première personne du singulier la carrière militaire… Read More
Textron Aviation a livré à l'armée de l'air péruvienne le premier de 2 Beechcraft King… Read More
View Comments
Bonjour,
N'étant pas abonné premium, je n'ai pas accès à l'intégralité de cet article qui, peut-être, nuance un peu les propos énoncés dans l'introduction.
De mon point de vue, cela pourrait être catalogué pour l'instant comme un souhait pour l'année 2018: la période est propice et je comprends que l'on puisse se laisser aller à l'euphorie au détour des bulles de champagne.
Néanmoins, je suggère à M. Otelli d'être un peu plus prudent dans ses affirmations car cela me paraît un peu tôt d'affirmer que Red Bull Air Race a réussi à convaincre la DGAC.
Cordialement,
En effet, il aurait été mieux que vous lisiez cet article... qui explique pourquoi la DGAC a été convaincue par la Red Bull Air Race.
Quand on voit ce qu'on subit lors de l’organisation des meetings, ce n'est pas la DGAC que je crains , ce sont les services et les sous chefs des départements et des préfectures qu'il va falloir observer...
Où peut on avoir des places, mais je pense que cette compétition doit être à guichet fermé !
Bonjour,
Un site qui serait idéal , au dessus du lac d'Aix les bains .
Entre la montagne du Revard et la dent du Chat .
La piste de Chambéry au bout du lac et les spectateurs sur l'esplanade.ce serai super et en sécurité ,
Faut bien rêver !