Daher-Socata a réussi le tour de force de travailler pendant près de quatre ans sur le projet TBM900 sans qu’aucune information ou photo ne fuite sur les réseaux sociaux. Le constructeur de Tarbes l’a joué finement, en particulier au moment des essais en vol (200 heures) réalisés pour l’essentiel à Tarbes, mais aussi à Istres, avec trois prototypes.
Un TBM équipé de winglets ne passe pas inaperçu. Encore moins trois. Et pourtant le programme d’essais en vol a duré 18 mois sans qu’aucun témoin ne trahisse le secret. Entre septembre 2012, date du premier vol du TBM900 sous le nom de code « Projet Century », et mars 2013, 220 heures de vol ont été nécessaires pour mettre au point le nouvel avion et démontrer qu’il répondait aux normes de certification européenne et américaine. « Au début nous programmions les vols très tôt le matin, quand il n’y avait pas encore d’activité sur l’aéroport de Tarbes », explique Stéphane Jacques, le chef-pilote de Daher-Socata, l’homme aux 2.500 décrochages sur TBM900…
Mais il en faut plus pour déjouer les spotters, et rapidement, Daher-Socata a compris la nécessité de passer un marché avec eux, en les mettant dans le secret. Ils ont été autorisés à prendre librement toutes les photos qu’ils souhaitaient à condition qu’ils s’engagent à ne pas les diffuser avant le 12 mars 2014, date de la présentation officielle du nouvel avion. La dizaine de photographes a tenu parole. Le constructeur avait mis dans la balance l’enjeu économique du programme. Il a procédé de même avec les professionnels évoluant sur la plate-forme aéronautique et en particulier avec les contrôleurs aériens. La tour de Tarbes est devenue complice de l’entreprise de dissimulation.
Les vols d’essais étaient décidés en fonction du programme des vols de la plate-forme. A l’époque où chaque passager aérien et pilote possède sur lui le moyen de faire des photos et des vidéos et surtout de les diffuser sur la terre entière instantanément, l’objectif était d’éviter les rencontres sur les taxiways ou au seuil de piste. Stéphane Jacques ne cache plus qu’au retour d’un vol d’essais, il lui arrivait régulièrement d’attendre, en l’air, que la menace ait disparu avant de se poser. C’est là que la complicité avec les contrôleurs aériens jouait à fond. « Une fois posé, il m’est souvent arrivé d’échanger aussi par SMS avec l’atelier pour savoir si je pouvais rejoindre l’usine. C’était notamment le cas lorsqu’il y avait des clients présents. Il fallait que j’attende qu’ils soient repartis pour y aller ».
C’est avec un sourire malicieux et surtout le sentiment d’avoir réussi leur coup que tous ceux qui ont travaillé sur le programme y vont de leur anecdote. Ils ne cachent plus leur satisfaction d’avoir réussi à certifier le nouvel avion avant même que son existence ne soit dévoilée. L’effet de surprise a été total et c’était le but recherché par Daher-Socata qui a ainsi démontré de façon magistrale, moins à la communauté aéronautique, qu’à ses donneurs d’ordres, sa capacité à développer sur fonds propres et avec ses ressources internes un programme aéronautique complexe. Qui peut produire un monoturbopropulseur performant peut prendre en charge n’importe quel sous-ensemble d’un avion de ligne ou d’un hélicoptère.
Le jeu comportait sa part de risque. Tout le monde n’aime pas les surprises. En particulier celui qui vient de signer un chèque de plus de 3,4 millions de dollars pour s’offrir l’avion de ses rêves et qui découvre quelques semaines plus tard la nouveauté qui rend obsolète son acquisition. Les clients ont été les derniers à être mis dans la confidence. A ceux qui étaient sur le point de signer pour un TBM850, Daher-Socata a présenté le TBM900. C’était en janvier 2014. La surprise a été, pour eux aussi, totale. En l’espace de quelques semaines, le constructeur a signé 40 ventes soit l’équivalent de ses livraisons de 2013.
Les trois premiers TBM900 ainsi que l’avion de démonstration se sont envolés, vendredi 14 mars 2014, de Tarbes pour les Etats-Unis où ils seront livrés, en début de cette semaine, à leurs propriétaires. Les photos étaient autorisées. Le TBM900 n’est plus un avion furtif.
Gil Roy
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TBM900, un secret bien gardé
Bonjour à toutes et à tous!
Peu importe le nom, j'en voudrais un moi de c't'avion là! Ouff! Vraiment c'est la plus belle machine volante d'entre toutes. Je vie au Québec et j'aimerais bien faire des allez retour Rimouski-Montréal pour aller voir jouer mes Canadiens (club de hockey) Surtout à 610 km/h Ça me ferais une belle façons de sauvent du temps! Vraiment la classe cet avion! Entre le Pilatus PC-12 NG et le TBM 900 mon choix serait difficile mais j'aurais un petit penchant pour le TBM! ;-)
TBM900, un secret bien gardé
220 heures de vol d'essais incognito, c'est bien dire que Tarbes, c'est mort !
TBM900, un secret bien gardé
Et pourquoi cet horrible acronyme de SOCATA traine toujours dans la designation de ce bel l'avion? Ne serait-il pas mieux d'utiliser MORANE ou DAHER-MORANE?
TBM900, un secret bien gardé
Gabriel,
Pourquoi cet "horrible" acronyme de SOCATA comme vous dîtes ? Tout simplement parce que l'entreprise s'appelle DAHER-SOCATA !! N'est-ce pas une bonne raison ?
Elle ne s'appelle plus MORANE. Le nom de SOCATA est utilisé depuis 1966 !
Que ce soit EADS SOCATA ou DAHER-SOCATA, l'identité première à Tarbes reste SOCATA ! L'héritage Morane-Saulnier est là bien entendu mais maintenant, avant d'être DAHER, nous sommes avant tout SOCATA !
TBM900, un secret bien gardé.
Bonjour.
Question d'un néophyte.Quelle route emprunte ces avions au dessus de l'Atlantique?Merci.J-Marie
TBM900, un secret bien gardé.
Bonjour,
le TBM étant un monomoteur, il ne peut jamais aller trop loin en pleine mer en cas de panne moteur. Ceci oblige donc pour rejoindre le continent américain à passer par le Nord, comme pour les premiers vols transatlantiques : Angleterre, Écosse, Islande, Groenland, et enfin Canada (par exemple : http://perso.numericable.fr/sophie.pariente/bigpond2/indexbp2fr.html).
TBM900, un secret bien gardé.
Bonjour,
vu que c'est un mono moteur, il n'a pas le droit d'être trop loin en haute mer (en cas de panne) ; du coup la route obligée est via l'Angleterre, l'Ecosse, l'Islande, Groenland, puis on arrive en Amérique via le Nord-Ouest du Canada. Comme lors des tous premiers vols transatlantiques ! (Par exemple, pour aller à Oshkosh : http://perso.numericable.fr/sophie.pariente/bigpond2/indexbp2fr.html)
TBM900, un secret bien gardé
4 ans....pour une paire de winglets, de trappes de train dont le tbm700 originel était équipé, un capotage moteur en carbone, un nouvel arrêtier de dérive, une pressu automatique et une manette moteur combinant puissance, régime hélice et sélecteur de ralenti. Ce n'est pas la révolution du siècle.....mais une belle opération de communication !
TBM900, un secret bien gardé
Il est vrai qu'analyser l'existant, dessiner des pièces, produire des protos, les mettre au point, industrialiser et certifier ces modifications, le tout avec des objectifs ambitieux en gain de perfo, des contraintes de coût et sans que ça s'ébruite, c'est hyper facile et rapide...
Félicitations à tous ceux qui se sont investis sur ce projet.
TBM900, un secret bien gardé
Aussi bien en tant qu'ancien journaliste qu'ancien attaché de presse, je dis bravo ! Mais sur une grande plateforme, cela n'aurait pas été possible de trouver des spotters aussi compréhensifs...
Humour très (trop ?) noir : qui les gens de Daher-Socata ont-ils conseillé pour faire disparaître le vol MH370...?