Pierre Simonet, l’un des derniers Compagnons de la Libération, vient de s’éteindre (5 novembre 2020), dans sa 99ème année. Il fut l’un de ceux qui, au lendemain du 8 mai 1945, alors que les Français fêtaient la Libération, passa entre les piliers de la Tour Eiffel et survola Paris, à bord de son petit avion d’observation.
La seconde guerre Mondiale vient de se terminer. Pierre Simonet, alors affecté au 1er régiment d’observation aérienne allait être rapatrié, avec d’autres membres de son escadrille sur le terrain d’Issy les Moulineaux, l’actuel héliport. Désireux de participer à la fête eux-aussi, ces équipages qui venaient d’en découdre sur de multiples fronts, cherchaient l’idée originale qui leur permettrait d’affirmer leur présence en ce jour de liesse.. : « Pour nous, les rebelles de la première heure, il fallait que nous fassions quelque chose qui sorte de l’ordinaire » raconte Pierre Simonet dans un interview en 2015.
» Je suggère alors : Pourquoi ne pas passer sous la Tour Eiffel ?… » Le circuit en vol est rapidement organisé. Nous prendrons en rase-motte l’esplanade du Trocadéro, le pont d’Iéna, passerons sous l’immense voûte de fer, survolerons le Champ de Mars et terminerons par un virage sur l’Ecole Militaire… » poursuit-il « Il y a de la place à revendre… » Le lendemain, le mois de mai tire à sa fin, nos trois Piper Cub enfilent à la suite le grand passage. Il y a peu de monde… un soldat américain tout étonné nous photographie en vol (…). Ce n’était pas un exploit de pilotage, il fallait plus de culot que d’adresse, et nous n’avions demandé de permission à aucune autorité. L’Armée de l’Air, tout comme l’Administration de l’Aviation Civile voguaient dans l’euphorie de la victoire… »
L’histoire ne dit pas si nos valeureux équipages eurent ensuite quelques comptes à rendre à ces mêmes autorités, mais ils avaient réussi leur pari et en étaient très fiers !
C’est sur ce dernier exploit que se termina peu après la carrière militaire de Pierre Simonet, né à Hanoï d’un père polytechnicien, ingénieur des Ponts et Chaussée, le 27 octobre 1921, dans ce qui était alors le Tonkin (Français).
Après des études secondaires à Marseille et en Indochine, il rentre en France pour y effectuer ses études supérieures de mathématiques, alors que la France et l’Angleterre viennent tout juste de s’engager dans un conflit avec l’Allemagne.
Trop jeune pour être mobilisé au moment de la déclaration de la guerre, il poursuit ses études, mais ne peut se résoudre à voir la France aux mains de l’ennemi. Choqué de la décision du Maréchal Pétain de demander l’armistice, il répond à l’appel du Général de Gaulle, alors qu’il n’a que 19 ans et embarque aussitôt (le 24 juin 1940) depuis Saint Jean de Luz, sur le dernier cargo en partance pour l’Angleterre.
Il sera alors versé dans une unité d’artillerie des Forces Françaises Libres et réembarquera peu après pour Dakar avec un corps expéditionnaire ayant pour mission de rallier l’Afrique Occidentale française (AOF) à la France Libre. S’enchaîneront alors pour lui les campagnes de Syrie et de Lybie, sous les ordres du Général Koenig. Auteur de plusieurs faits de bravoure, il y recevra ses deux premières citations. En 1942, une bataille chasse l’autre en Afrique du Nord. A la bataille de Bir-Hakeim succède celle d’El Alamein et de Tunisie en 1943.
Il accumulera les sorties à l’issue du Débarquement de Provence, le 15 Août 1944. Il participera ensuite à la bataille de Belfort et de Strasbourg, n’hésitant pas à survoler à basse altitude les lignes ennemies pour collecter le maximum de renseignements. Dans les campagnes d’Italie, puis de France, le Sous-Lieutenant Simonet aura effectué 137 missions de guerres en 250 heures de vol.
Revenu à la vie civile à l’issue de la guerre, il entrera en 1946 à l’École Nationale de la France d’Outre-mer (FOM) puis en sera nommé administrateur en Indochine en 1947 et 1948. Il suivra les cours de l’École d’Application de l’INSEE et obtiendra en 1949 un certificat de l’Institut de Statistique de l’Université de Paris. Il sera affecté au Cameroun de 1950 à 1957, où il terminera sa carrière d’administrateur, comme chef de Région.
En 1958, Pierre Simonet entrera dans la fonction publique internationale. Après avoir accompli une mission dans le bassin du Mékong avec l’Organisation des Nations-Unies pour l’Agriculture et l’Alimentation, il sera affecté par l’ONU en Iran comme conseiller en statistiques économiques. De retour en France en 1960, Pierre Simonet intègrera l’Organisation de Coopération et de Développement économique (OCDE) puis le Fonds Monétaire International.
Compagnon de la Libération par décret du 27 décembre 1945, Pierre Simonet nous quitte en étant titulaire de la Grand Croix de la Légion d’Honneur, de la Croix de Guerre 39/45 (7 citations) de la Médaille de la Résistance et de la Médaille Coloniale. Pierre Simonet est membre du Conseil de l’Ordre de la Libération depuis le 1er juin 1999.
En 2020, lors des commémorations des 80 ans de l’appel du 18 Juin, le Premier Ministre britannique Boris Johnson annonçait que les quatre derniers compagnons de la Libération, Edgard Tupët-Thomé (décédé en septembre), Hubert Germain, Daniel Cordier et Pierre Simonet, seraient nommés membres honoraires de l’ordre de l’Empire britannique. Cette décoration sera remise à Pierre Simonet par l’ambassadeur du Royaume-Uni en France, chez lui à Toulon, le 7 juillet 2020.
Ainsi s’exprimait, avec la plus grande humilité Pierre Simonet, l’un des trois derniers compagnons de la Libération au cours d’un récent interview donné à un confrère dans sa maison de Toulon qu’il avait choisie pour vivre sa retraite.
Le Président Macron a rendu hommage à « cet homme animé du souffle de la liberté qui, par-delà les risques et les frontières, fut toujours guidé par son immense amour de la France »…
Pierre Simonet sera inhumé dans le département de la Drôme.
Ph. Chetail
Les hélicoptères Puma HC2 âgés d’un demi-siècle seront retirés du service en 2025. Ils seront… Read More
La tour de contrôle centrale de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle est en travaux. Fin… Read More
Depuis plus de quatre décennies, le Pilatus PC-7 constitue la pièce maîtresse de la formation… Read More
On a rarement vu une compagnie aérienne aussi bien préparée à déposer le bilan que… Read More
Dans un roman, Jean Rousselot raconte à la première personne du singulier la carrière militaire… Read More
Textron Aviation a livré à l'armée de l'air péruvienne le premier de 2 Beechcraft King… Read More
View Comments
Bon voyage monsieur. Merci pour votre action.
En ces jours ou l'on célèbre le cinquantenaire de la mort du Général, et la mémoire de nos poilus...
Ca me rappelle le père d'un copain, qui m'avait raconté avoir vu des Piper Cub passer sous la tour Eiffel à la libération. En fait il devait être là ce jour dont on parle ici... Il m'a raconté avoir vu un américain passer en P-38 également, mais un autre jour !
En fait le passage sous la tour en a titillé pas mal, avant que les chefs mettent le holà...
Adieu à nos derniers vrais Chevaliers !
Aussi modestes que valeureux, espèce devenue rare aujourd'hui...
N'oublions pas leur exemple.
" Per ardua ad astra " !
Per ardua ad astra ! A travers l'adversité, jusqu'aux étoiles !
Cette locution latine est belle, mais est-elle appropriée ?
Alors qu'elle symbolise la RAF, qui ne voulut pas former ce Compagnon...