100 ans d’aviation en Gironde

C’est sur un tempo chronologique que ce volume de 144 pages au format 22 x 23,5 est bâti, et s’il est certain que la plupart des sujets évoqués pourraient faire l’objet d’études largement approfondies, l’œuvre de synthèse est magistrale et se lit avec plaisir.

Cette année, Bordeaux et les communes adjacentes – notamment Mérignac, sur le territoire de laquelle est implanté l’aéroport local, dont les origines ont cent ans – ont décidé de fêter « leur » centenaire de l’aviation. Mais commémorer c’est bien, encore faut-il pour cela rappeler les facettes de cette histoire des ailes bordelaises, car loin de se cantonner aux événements de 1910 (le mort accidentelle, à Croix d’Hins, du pionnier Léon Delagrange ou la Grande semaine d’aviation de Bordeaux, qui fut l’ultime de la saison à Beau-Désert/Mérignac), ce sont tous ceux du siècle qui sont à l’honneur. Cet ouvrage est donc là pour ressortir de l’ombre tous les jalons, petits ou grands, humains ou industriels, de ces 100 années écoulées.

Et quel homme plus compétent que René Lemaire pour diriger ce travail collectif ? Ingénieur qui a débuté à la SNCASO avant d’effectuer le reste de sa carrière chez Dassault (à Mérignac…), il peut légitimement être considéré comme l’un des pères de la prestigieuse dynastie des Falcon. Soucieux tout autant du devoir de mémoire que de la préservation du patrimoine aéronautique, il fut le président fondateur, dès 1987, du CAEA, le Conservatoire de l’air et de l’espace d’Aquitaine. On a pu lire sous sa plume des articles monographiques dans les pages du Fana de l’aviation, et surtout, il est connu comme coauteur d’un ouvrage en deux volumes, incontestable référence dans le domaine de la carte postale ancienne aéronautique d’avant 1914. Une pointure ! L’ingénieur devenu historien (n’est-ce pas lui qui a travaillé sur l’identification du bimoteur qui transporta De Gaulle en Angleterre au départ de Mérignac le 17 juin 1940 ?), c’est un gage de rigueur dans la démarche de collecte et de hiérarchie de l’information. Ce sont donc une dizaine de personnes qui ont avancé sous sa houlette, avec efficacité, car ce livre est né en quelques mois !

Le lecteur retrouvera dans cet ouvrage construit sur un rythme chronologique tour à tour les balbutiements de l’aviation en Aquitaine (et même les premières ascensions en ballons), la naissance de l’industrie et des centres militaires de formation (loin du front), l’émergence des aéro-clubs avec et sans moteur, l’avènement du transport aérien, etc., jusqu’aux établissements de recherches qui mènent aux fusées et aux missiles d’aujourd’hui. Grand pôle aéronautique, qui n’a que peu à envier à Toulouse, on s’apercevra en se plongeant dans ce livre, constitué d’une myriade de petits sujets, que l’aéronautique fait réellement partie de la culture et du paysage bordelais. Support véritablement pédagogique de ce « Centenair », cet ouvrage à la mise en page moderne et claire et à l’iconographie nombreuse et de qualité, est là pour que rien ne soit oublié – une mission dont il s’acquitte au mieux.

Jean Molveau