Aussi étonnant que cela puisse paraître, c’est le premier Airbus qui rejoint la prestigieuse collection du musée de l’air et de l’espace. Ce sera aussi, à partir de 2018, la plus volumineuse machine volante que pourront découvrir de l’intérieur, les visiteurs. L’A380 MSN4 est arrivé en vol au Bourget où il s’est définitivement posé, le 14 février 2017, à 17h. Il aura fallu quatre ans de tractations pour en arriver là. Maintenant s’ouvre un autre chantier…
Catherine Maunoury faisait le siège d’Airbus depuis des années pour obtenir un A380. Sa première demande à Tom Enders, le PDG d’Airbus, remonte à l’automne 2012. Cette livraison est donc, en quelque sorte, le cadeau d’adieu du constructeur à la directrice du musée de l’air et de l’espace qui quitte ses fonctions à la fin du mois de février 2017. C’est une belle histoire pour les amateurs de téléréalité, mais ce n’est pas comme cela que les choses se sont passées.
Quatre années d’attente
Offrir à un musée un avion aussi superlatif que l’A380 n’est pas une mince affaire. Il y a d’abord le contexte. Les ventes du super jumbo jet européen ne sont pas celles escomptées et le programme tourne au ralenti, à la cadence de production d’un avion par mois. Dans ce contexte, au sein d’Airbus, certains craignaient que l’arrivée du premier A380 dans un musée entraine des raccourcis sarcastiques. Ca n’a pas manqué, mais au pire, les critiques ne dureront que le temps d’une poussée de fièvre médiatique.
Le vrai problème est ailleurs, et il est d’ordre technique et, par conséquent, aussi (un peu) économique.
Le Bourget et Aéroscopia servis
En fait, Airbus se sépare simultanément de quatre avions d’essais qui arrivent en fin de vie aux essais en vol. Outre l’A380 MSN4 destiné au musée de l’air, il y a un second A380 (MSN2), le premier A320 (MSN1) et le premier A340-600 (MSN360). Ces trois appareils sont destinés à Aéroscopia qu’ils rejoindront dans les vingt mois à venir. Il suffira de les tracter. Il n’y a qu’une clôture à démonter et une route à traverser. Airbus l’a déjà fait avec un Concorde, un A300 et plus récemment un A400M. L’opération sera réalisée quand le musée de Blagnac aura aménagé une nouvelle aire goudronnée de 2 hectares au nord de ses installations.
Pour l’exemplaire destiné au musée de l’air, le problème de la livraison s’est posé de manière radicalement différente. C’est un avion en parfait état de fonctionner qu’a livré en vol, Airbus au Bourget, le 14 février. Avant même de l’aménager pour le rendre accessible au public, Airbus doit récupérer tous les éléments qui ont encore du potentiel ainsi que les équipements d’essais les plus récents. Il va notamment falloir déposer les quatre réacteurs Engine Alliance.
Un chantier d’aménagement en deux temps
En même temps qu’ils vont démontrer les équipements, les techniciens d’Airbus vont également vidanger les circuits carburant et hydrauliques, mettre l’avion en condition de stockage longue durée, installer des éclisses pour éviter que les surfaces mobiles battent au vent et poser des béquilles pour soulager le train d’atterrissage.
Ce premier chantier doit être fini le 10 avril 2017, date prévue du transfert de l’A380 MSN4 vers un parking éloigné, pour permettre le montage des installations du salon du Bourget qui ouvre ses portes en juin 2017. Il reviendra le 15 juillet. C’est à partir de cette date que l’aménagement scénographique sera réalisé. Il est également financé en grande partie par Airbus. A titre indicatif, l’aménagement intérieur de l’A300 exposé à Aeroscopia a coûté environ 200.000 euros.
Mise en œuvre d’un partenariat
Le budget global est évidemment supérieur, si l’on intègre l’intervention des mécaniciens des essais en vol, mais aussi le fait que l’avion devra pouvoir être déplacé à volonté, ce qui nécessite une mise en condition et un entretien spécifique du train d’atterrissage.
L’A380 MSN4 reste propriété d’Airbus. Charge au musée d’assumer les coûts d’exploitation à travers les profits générés par la visite. Outre les agents de sécurité, les tourniquets, l’entretien quotidien, etc, il faut aussi prévoir un rafraichissement de la peinture extérieure tous les quatre ans. Airbus y tient. Le modèle économique qui en découlait ne devait pas être une surcharge financière pour Airbus.
Une convention a été signée entre Airbus et le ministère de la Défense duquel dépend le musée. La rédaction de ce contrat a pris un certain temps. Les juristes des deux parties ont échangé jusqu’à la veille au soir. Rarement, mise en scène de signature de contrat, organisée au centre de livraison de Blagnac, n’aura été aussi réaliste…
Airbus Heritage
Le transfert de l’A380 MSN4 au musée de l’air et de l’espace, comme celui des autres avions Airbus à Aéroscopia, a été géré par Airbus Heritage, un service dirigé par Jacques Rocca et créé au sein d’Airbus, en 2009, au moment des célébrations du quarantième anniversaire du constructeur européen. C’est lors du franchissement de ce cap symbolique qu’Airbus a pris conscience de la nécessité de la protection, la conservation et à la valorisation des machines qui incarnent son histoire et son épopée d’Airbus, mais aussi à celles des archives des sociétés qui l’ont précédées.
Plus qu’un service, Airbus Héritage est un réseau de passionnés qui rayonnent dans tous les services d’Airbus et sur tous ses sites. Ces ingénieurs, commerciaux, techniciens, administratifs, etc, sont capables de se mobiliser pour trouver les ressources nécessaires à la réalisation d’un projet, au sauvetage d’une ou plusieurs machines, comme les quatre avions d’essais dont se séparent cette année le constructeur. L’A340-600 a été exfiltré de Tarbes où il était promis au démantèlement…
D’une certaine manière, Airbus a pris le relai des associations locales de conservation du patrimoine aéronautique, à commencer par les Ailes Anciennes de Toulouse et Aérothèque. C’est aussi à ce moment-là qu’Aéroscopia Airbus Heritage a largement contribué à la réalisation du musée Aéroscopia. Ce musée bénéficie d’un soutien financier d’Airbus de 3,5M€ ainsi que de la mise à disposition d’une Caravelle, d’un Concorde, d’une Corvette, d’un des premiers Airbus A300 bénéficiant d’une mise en scène originale imaginée par l’association Flight Heritage, ainsi que du premier A400M d’essais. a véritablement été lancé et que ce musée aéronautique tourné vers le futur, du fait de sa proximité avec Airbus, est devenu un écrin naturel pour les modèles qui ont marqué et qui marqueront l’histoire du constructeur.
Outre les avions d’essais confiés à Aéroscopia et depuis aujourd’hui au musée de l’air et de l’espace de Paris-Le Bourget, Airbus Heritage veille aussi au Transall d’Hambourg (Allemagne), au Concorde de Filton (Grande-Bretagne) et à l’A300 MSN3 destiné à Cologne (Allemagne). Airbus compte aussi des partenariats avec d’autres prestigieux musées tels que l’Aerospace Museum de Bristol, le Swedish Science & Technology museum à Stockholm et le Norsk Luftfartsmuseum en Norvège. Un protocole d’accord a également été signé entre Airbus et le musée du Futur de Dubaï pour collaborer sur la recherche et le développement dans le domaine des innovations aéronautiques.
C’est donc par la voie des airs que l’A380 MSN4 est arrivé au musée du Bourget avec à son bord une cinquantaine de privilégiés. Le quadriréacteur aurait du faire un passage sur la piste du musée avant son ultime atterrissage, mais des travaux de maintenance au centre de contrôle aérien de Roissy ne l’ont pas permis. A défaut d’un passage à l’arrivée, l’équipage d’essais du MSN4 a offert une boucle au départ, au-dessus de Blagnac. Un vrai tour de piste basse hauteur comme l’enseigne le manuel du pilote privé d’avion… à l’exception du décollage sous 30° de pente, suivi d’un virage à grande inclinaison à droite et une prise de terrain en U pour un ultime passage assorti d’un battement d’ailes pour le personnel des usines de Blagnac.
Un dernier vol spécial
L’A380 est un paradoxe. Les compagnies en sont tombées amoureuses quand elles l’ont découvert. A l’époque, il s’appelait A3XX. Elles ont imaginé alors les aménagements intérieurs les plus extravagants. A ce jour, Airbus n’en a vendu que 317. Il en reste une centaine à livrer et les clients de sont pas pressés de les mettre en ligne.
Pourtant cet avion est devenu la coqueluche des passagers qui, selon une étude d’Airbus, sont prêts à payer un peu plus cher pour avoir la possibilité de voyager à bord du super jumbo jet. Ils s’épanchent ensuite sur le site « iflyA380.com » dédié par Airbus à l’A380. Il est sûr aussi, que l’A380 MNS4 va devenir la nouvelle attraction du musée de l’air et de l’espace et qu’il va attirer, à partir de 2018, de nombreux visiteurs, prêts à découvrir les secrets du quadriréacteur d’Airbus, lors d’un voyage immobile.
Cette pièce de taille qui vient enrichir la collection du musée du Bourget est aussi une ligne supplémentaire à ajouter au bilan des deux mandats de Catherine Maunoury à la tête du musée de l’air et de l’espace.
Gil Roy
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et que dire des Caudron dont on (j') attend la réapparition depuis si longtemps ..
Eux aussi sont également tellement représentatifs de notre savoir faire national .
Un retour de ces deux appareils+ une rétrospective axée Riffard, Arnoux, Boucher et Charnaux serait du plus bel effet et prendrait bcp moins de place...
Il aurait été encore temps de recevoir un A380 lorsqu'ils seront retiré de service, en bout de potentiel.
Heureux que l'appareil ne soit pas destiné à une destruction pure et dure ou encore livré au pourrissement sur un tarmac quelconque. Pour une fois que nous bénéficions d'un appareil en relativement bon état nous n'allons quand même pas nous plaindre.
Infos du site du MAE:
Sauvegarde des collections !!!!
Durant les travaux de restauration de l’aérogare historique du Bourget, les équipes de la conservation ont réalisé un grand chantier sur les collections du musée de l’Air et de l’Espace.
Pour cela, une campagne de dépoussiérage et de conditionnement a été mise en oeuvre en amont du transfert des œuvres vers des lieux de réserve à l’abri du chantier. Ainsi presque dix mille pièces (objets d’arts, arts graphiques, plans, tenues,…) ont déjà été déplacées depuis le début du mois de décembre.
Il est important de protéger les objets de la poussière car elle est abrasive ; elle favorise certaines réactions comme la corrosion ; elle capte l’humidité ambiante et la retient, elle attire les insectes et nourrit les moisissures. Il faut donc dépoussiérer puis conditionner les collections pour éviter que la poussière ne se redépose dessus tout en maintenant une circulation d’air. D’où l’utilisation massive du Tyvek©, matériau de protection spécialisé.
Mon étonnement est :
Ceux qui dorment dehors ne sont pas affecté par : l'humidité,la poussière,la lumière,les insectes.......................
Oui c'est étonnant mais j'ai entendu cette remarque par mon instructeur canadien à propos des avions qui dorment dehors..pourtant le climat... la bas..: comme disait notre regretté Pierre Desproges " astonish nein??" ou "étonnof niet?"
A peine12 ans pour cette machine.. Le musée de l'air manque déjà singulièrement de fonds au moins pour ne pas laisser la caravelle du Général tomber en morceaux (un exemple parmi d'autres, qui lui attend depuis ....45 ans), que faire au Bourget de ce mastodonte dont personne ne veut même à toulouse ? Rappelons que les proto du 747, du Dash-80 ou A300B eurent eu une carrière bien plus prolifique avant de faire valoir leur points de retraite (non anticipée)..
A moins qu'ils ne manquent de place sur le parking à Toulouse?....
Néophytes et visiteurs lambda porteront, hélas, bien plus d’intérêts a cette obèse et hideuse machine qu'aux belles pièces pourrissantes a proximité. Il y a toujours ce 707 cargo qui moisit progressivement, un Constel' (!) et quand même l'un des Breguet 941... sans compter le DC-7 et les Noratlas qui méritent bien mieux.
tout a fait d'accord , j'ose supposer que c'est un don ! ! !
a voir l'etat des appareils, le musé ne doit pas disposé d'un budget important, helas mais il manque aussi cruellement de pub...
D'accord