Pilote de ligne, auteure… Daphné Désrosiers est avant tout passionnée. Elle raconte ici une procédure de mise en route du bimoteur de Cessna qui ne figure pas dans le manuel de vol, mais qui a retenu (évidemment) l’attention de Jean Barbaud…
Du Jodel D112 au Boeing 737-800 NG, j’ai eu la chance de piloter différents types d’avions depuis mon premier vol solo à bord d’un DR315. Si celui-ci demeure un des moments les plus fantastiques de ma carrière, une drôle de machine m’a cependant émerveillée.
Je l’ai rencontrée sur le tarmac de l’aéroport de Dzaoudzi où je venais d’être embauchée comme pilote pour la Préfecture de Mayotte. Le manuel de vol en poche, j’ai appris à piloter cet étrange avion bi-poutre au fuselage rondouillard, le Cessna 337 G. Plus communément désigné « Push-Pull » en raison du positionnement de ses moteurs, un tractif à l’avant et l’autre propulsif à l’arrière, cet étrange bimoteur a des performances impressionnantes.
J’ai réalisé de nombreuses missions variées, que ce soient la surveillance des côtes à basse altitude, la recherche de navires en détresse, le comptage des baleines à bosse ou les vols de plusieurs heures entre Mayotte et Madagascar. Et le F-GGTN n’a jamais manqué à ses devoirs.
Son incroyable stabilité le laissait de marbre lorsque brutalisé, il louvoyait entre les cellules orageuses ou se retrouvait propulsé en finale à 150 Kt pour se poser 20 secondes plus tard dans un mouchoir de poche grâce à ses volets d’une efficacité redoutable.
Je me souviendrai toujours d’une sortie de visite de maintenance où les mécaniciens malgaches ne voulaient pas laisser partir l’avion tant qu’ils n’avaient pas accompli leur rituel local. Pressée par le plan de vol, j’avais tenté de démarrer mais la tentative ce jour là se révéla infructueuse.
Surprise et anxieuse, je commençais à m’interroger avant de franchir l’Océan Indien quand je vois alors l’équipe de mécaniciens tourner autour de l’avion tout en invoquant le ciel et en arrosant différents coins du hangar avec du rhum. Croyances ou superstitions, la magie s’est néanmoins opérée. Une fois l’autorisation de mise en route accordée, les moteurs se mirent à tourner bruyamment avant de poursuivre nos aventures mahoraises !
Daphné Desrosiers
© Dessin : Jean Barbaud / Animation : Martin Roy
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incantations pour que les "grandes oreilles" DGSE de Mayotte envoient des bonnes ondes pour que le TN se mette en route; c'est dans le manuel standard du personnel qui a besoin d'en connaitre ..... besoin d'en connaitre Daphné ?
Coucou Daphné !
Belle anecdote qui illustre parfaitement la tradition malgache ! Mais tu as eu de la chance : cette tradition est intimement liée aux ... morts !!!
Bruno Riviere (Un zanatany)
Pas seulement, on asperge également de rhum les quatre coins de la maison qui vient d'être construite.
Je te rejoins pour dire que c'est une offrande aux morts pour qu'ils ne viennent pas ensuite "hanter" les lieux.
Merci pour cette jolie anecdote...
J'ai lu cet article avec grand plaisir car j'ai convoyé en mai 97, pour le compte du préfet de Mayotte, le TN de Mâcon jusqu' à Dzaoudzi en compagnie d'Henri son ancien propriétaire.
Un très beau vol via Ajaccio, Héraklion, Louksor, Djibouti, Mombassa et Dzaoudzi où j'ai assuré la formation du VAT qui était chargé d'effectuer les missions de surveillance maritime.
Je confirme que le TN était un "percheron" imperturbable dans les pires conditions avec ses deux 225 CV turbo. Il avait été construit par Reims Cessna pour le compte de l'aéronavale portugaise dont il arborait encore la belle tenue camouflée.
Merci d'avoir ravivé cet excellent souvenir.
Avec une pensée pour mon compère Henri, passionné d'aviation, qui nous a quittés il y a quelques années.
La société EULAIR ayant remis au goût du jour un aéronef bimoteur de type Push-Pull (le Twin2), en cas de besoins, nous arroserons, nous aussi, différents coins du hangar avec du Rhum (si le propriétaire n'y voit pas d'inconvénients !). Mais ce qui a marché à Madagascar marchera-t-il en Ile de France ?