Henri Chorosz raconte ses vols marathon autour du monde

Aux commandes d’un monomoteur Glasair II S FT (180 cv) qu’il a construit lui-même, Henri Chorosz a sillonné le monde en solitaire, avalant des étapes de plusieurs dizaines d’heures de vol sans escale.

Avec ce livre intitulé « Chronologie de l’extraordinaire odyssée aérienne d’Henri Chorosz », réalisé en collaboration avec Maurice Griffe aujourd’hui disparu (Editions TSH), le lecteur est en droit de s’interroger sur les motivations d’Henri Chorosz. Imaginez un instant : notre homme, pilote privé plus que cinquantenaire décide en 1991 d’acheter en kit un Glasair. Deux ans plus tard et des milliers d’heures de travail dans son garage de La Gaude en Provence, l’avion est complètement monté, avec notamment la très grande collaboration de sa femme Monique.

Jusque-là rien de très original. Sauf que notre constructeur amateur va installer des réservoirs supplémentaires dans son avion pour porter la capacité totale d’emport de carburant à 860 litres, alors que la masse à vide du monomoteur est de 650 kg. Au total, l’avion sera homolgué avec une masse maximale au décollage de 1535 kg. Et avec cette citerne volante, Henri Chorosz va ni plus moins tenter – et réussir – des vols transatlantiques, toujours seul à bord. Pour ce pilote, ancien cadre chez IBM, qualifié IFR France, Canada et Etats-Unis dès 1987, ces vols sont la réalisation de ses rêves.

Henri Chorosz, né en France en 1935 de parents immigrés polonais, est tellement épris d’aventures aériennes, de raids aériens devrait-on écrire, qu’il va même refaire point par point le même vol record que celui qu’avait entrepris Charles Lindberg, les 20 et 21 mai 1927, en reliant avec son fameux Spirit of St-Louis, New York au Bourget, soit 5.898 kilomètres en 33 heures et 30 minutes. Pour sa part, Henri Chorosz effectuera un vol de 5.812 kilomètres en 18 heures et 18 minutes. Dans la chronologie du vol, effectué le 19 juillet 1995, le pilote raconte: « après une descente au niveau 110 (3.353 mètres) j’ai bénéficié d’une attitude très aimable des contrôleurs aériens Irlandais et Anglais. Ils ont négocié pour moi, avec le contrôle militaire, le passage de nombreuses zones interdites au trafic de l’aviation privée. Celui de Jersey, hyper sympa, m’a pardonné un dépassement du respect du niveau accordé. […] Seule la contrôleuse de Brest s’est distinguée en me forçant à passer sous contrôle VFR (normalement elle n’en avait pas le droit, le commandant est seul maître à bord). Plus tard, elle voulu me faire sauter ma licence américaine de pilote en s’adressant à la FAA. » (page 12).

De cette chronologie originale mise en page sous forme d’un accordéon (les 56 pages de l’ouvrage se déplient en un seul long ruban…), on retiendra les vols les plus fous qu’a réalisé Henri Chorosz entre 12 mai 1995 (vol d’homologation à Seattle) et le tour du sud de l’Afrique parcouru le 8 septembre 2004. Des vols qui, tous, répétons-le, sont effectués sans escale et seul à bord, à l’exception du vol d’homologation bien entendu. New York-Cannes, soit 6525 km en 21h24 ; Dakar-Orlando, soit 6765 km en 25h10 ; Hilo (Hawai)-Lakeland (Floride), soit 7378 km en 25h42, soit une moyenne de 287 km/h. Et puis l’accident (sans gravité pour le pilote) à l’Île Marion alors que le Glasair tentait de rejoindre Le Cap et Christchurch via le pôle sud… Et finalement, la vente de son avion à un pilote sud-africain au Cap.

C’est vraiment un récit d’aventures écrit en langage parlé et parfois très drôle (lors d’une arrivée à Cayenne, en provenance du Cap Vert, le commandant de l’A340 d’Air France s’étonne qu’un si petit avion puisse parcourir un si long vol sans escale…). C’est aussi fort bien documenté et agrémenté de nombreuses cartes, photos, et encadrés… ainsi que les fac-similés de ses nombreux diplômes et records. On y retrouve même un article tiré d’Air & Cosmos (juillet 1998) et signé Thierry Dubois, expliquant pourquoi les tuyères aérodynamiques de bout d’aile qu’a fait installer Henri Chorosz sur son Glasair lui ont permis de gagner pas loin de 10% de vitesse et 10% de trainée en moins… Bref, une chronologie vraiment extraordinaire d’un pilote hors normes… qui coule actuellement une retraite paisible !

Bruno Rivière