Cette biographie de Jean-Marie Saget, pilote d’essais historique de la maison Dassault, par le journaliste François Besse, est la rencontre de deux professionnels exigeants, passionnés par l’aviation, animés par la même rigueur. Malgré l’admiration qu’il porte à son sujet, le biographe a su conserver la distance qui convient à cet exercice au long cours. Le résultat est à la hauteur de l’attente.
Jean-Marie Saget est « le » pilote d’essais fétiche du constructeur français Dassault. Recruté par Marcel Dassault pour devenir pilote d’essai, en 1955, alors qu’il est pilote de chasse, il n’a cessé de mettre au point les nombreux prototypes du constructeur jusqu’en 1989, en balayant toutes les époques, des commandes de vol mécaniques aux commandes de vol électriques. Aujourd’hui, à 87 ans et à plus de 20.000 heures de vol, la passion de Jean-Marie Saget le conduit à continuer à former les voltigeurs en aéro-club. François Besse rend hommage à ce monument des essais en vol dans un livre imposant.
J’ai reçu en fin de semaine ce pavé de presque 2 kg, et bien qu’il ait failli m’échapper des mains, c’est avec une certaine fébrilité que je me suis précipité pour une lecture rapide. Je me doutais que je tenais là un trésor capable d’occuper mes soirées pendant au moins une année.
François Besse nous avait déjà donné un aperçu de ses talents de conteur, capable de déterrer le plus indicible détail d’une vie aventureuse, avec la bible des Avions Robin, écrite avec la complicité du constructeur, Pierre, de son épouse Thérèse, de leur fils Christophe. Il se surpasse avec cette autre partition à la gloire de Jean-Marie Saget et des essais en vol dont j’avais, en quelques lignes et quelques photos salué le passage des 20.000 h de vol. A me relire, je m’aperçois que j’ai mis trop en avant ce pilote si simple, oubliant que dans les essais en vol, un pilote n’est pas grand chose sans son équipe.
S’il fallait en faire le « pitch » (soyons moderne), je dirais que ce bouquin est une ode humaniste à la famille de tous ceux qui ont fait les essais en vol, la piste, les mécanos, les ingénieurs, les pilotes, chez Dassault, et que si l’on a tendance à glorifier « le » pilote, cette histoire des essais remet chacun à la place qu’il mérite, et quel mérite !
Illustration : J’ai bien aimé l’histoire toute simple du cric qui évite que le Mystère 20, après une démo, ne se couche à cause d’un pneu crevé, opération discrète menée par les mécanos de piste, évitant aux VIP de descendre d’un avion bancale ! Surtout que JMS leur avait servi, lors du vol, un très discret tonneau barriqué à ne pas renverser une coupe de champagne ! Nombreux sont ceux qui se reconnaîtront dans l’imposante iconographie, et l’on sent que JMS a tenu, ainsi, à remercier cette grande famille, sans laquelle, certains jours, 10 à 12 vols d’essais s’enchainaient, tant les programmes étaient denses.
Bien que linéaire dans le déroulement des 90 vols prototypes auxquels JMS a participé, la table des matières, fort bien faite et exhaustive, permet de se déplacer dans le temps, et d’aller sans peine lire les récits des vols du Balzac, où JMS parle de Bigand, puis d’aller en Egypte pour le crash en Alpha Jet (10 pages), de revenir sur Rozanoff dans les années 50, de sauter au Mirage 4000, point d’orgue, à mon humble avis, des démonstrations de JMS au Bourget. Avec Auguste Mudry, nous étions admiratifs devant la souplesse et la précision des figures et de l’enchainement. J’eus droit, bien sûr, à « on reconnait la patte du Cap 10 ».
Je suis resté sur ma faim quand JMS raconte, c’est très court, son vol en F104, « prêté » par un copain belge. On comprend vite que ça ne vaut pas les avions Dassault, sauf peut être pour la poussée de la PC. Ce court paragraphe est compensé par 50 pages sur le 4000 : de quoi se plaint-on ?
Je ne peux que vous recommander l’investissement d’une demie heure de vol largement amorti par les jours de mauvais temps. Vous pourrez même le prêter : un bon exemple de co-lecture…
Je remercie François Besse de terminer son ouvrage (en forme d’épilogue, page 440) sur le renfort carbone du longeron du Cap 10, un des avions préférés de JMS, un long travail qui n’aura pas été inutile, initié par ce grand pilote, réalisé comme toujours par une équipe.
Jean-Marie Klinka
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Bonjour,
J'ai ressenti une grande tristesse mêlée d'une vraie nostalgie en découvrant tardivement la disparition de Monsieur Jean-Marie SAGET, un homme rare, un modèle solide dont notre société manque cruellement aujourd'hui.
Il m'a instruit au cours de nombreuses séances de voltige à Nangis et lors des stages merveilleux d'Argenton/Creuse (années 2001 à 2004). Il m'a régalé de vrilles endiablées dont il avait le secret et qu'il maitrisait évidemment parfaitement. Son amour du CAP 10 était efficacement partagé par une myriade d'instructeurs de tous âges le secondant, respectant la discipline que "Le Chef" savait distiller pour le bien et la sécurité de l'organisation.
MERCI, vous étiez Le Maître,
Au revoir là-haut
JMG
Bonjour et merci MR SAGET. Mon fils Thibaut aujourd'hui pilote de ligne a passé son PPL à NANGIS le jour de ses 17 ans et comme il était avide de sensations, son moniteur lui conseilla de voir au hangar d'à côté s'il était capable de voltiger. Nous fûmes accueillis par MR SAGET dont nous ignorions tout et qui proposa un vol d'essai. Je n'étais pas très rassuré de confier mon fils de 17 ans à un ''monsieur âgé'' ( 78 ans à l'époque ) surtout pour des galipettes aériennes. Au retour, il me dit simplement: '' il tire bien sur le manche le gamin ''. Il assura donc le début de la formation de mon fils et nous allions au fil du temps découvrir son incroyable aventure aérienne. Je me souviens également d'une de ses phrases magiques lorsque je lui posai la question : mais on faisait comment quand on vous confiait un avion avec un seul siège pilote? Et il nous répondit: à cette époque on nous disait: un avion c'est un avion, ce sont tous les mêmes. Monte et tu verras bien! Sacré bonhomme et bon vol vers les cieux. Merci
Mon père, Pierre Jarry, était chef de brigade et donc moniteur de pilotage pour les promos 49 et 50 de l'Ecole de l'Air: JMS en faisait partie. Lorsque des Elèves demandait à mon père comment il fallait s'y prendre, il avait l'habitude de leur répondre: "Faites comme Saget!"... Déjà en 1950, JMS était le modèle à suivre...
Jean-Marie Saget par François Besse.
Je me suis intéressé à la personnalité exceptionnelle de JMS depuis toctobre 1970, époque à laquellle j'ai appris à piloter aux commandes d'un Rallye Commodore MS892 150cv à Korhogo en Côte d'Ivoire. Agronome, je me suis intéressé au Rallye agricole 220cv,
magistralement présenté à Abidjan lors d'un week-end de promotion de la gamme Socata
Aerospatiale : le Rallye s'est écrasé, JMS en est sorti indemne...chapeau, bravo l'artiste!
Jean-Marie Saget par François Besse.
À 15 ans j'avais écrit une lettre à monsieur Saget pour lui faire part de mon admiration et combien j'aurais aimé devenir pilote comme lui(pbs de vue).
J'étais très fier de recevoir une réponse de sa main.
J'ai toujours cette lettre après 44 ans.
Jean-Marie Saget par François Besse.
Merci Michel de souligner l'intérêt, pour notre "mémoire", de cet ouvrage. J'ai dû ré-écrire une partie de mon papier, à la demande de Gil Roy, qui m'a soutenu que 10% de nos lecteurs connaissent JMS, alors que mon premier papier était plutôt orienté 90%. C'est vrai, la tendance à l'oubli ! Notre mémoire s'efface devant l'abondance .. Heureusement il reste parfois le papier qui, heureusement, encombre nos étagères.
Jean-Marie Saget par François Besse.
Parfois au hasard d'une rencontre et d'un vol à Nangis, on serre la main d'une personne présentée par un papa à peine plus jeune mais respectueux du grand pilote. Merci pour ce livre, prochain cadeau pour la fête des pères.
Jean-Marie Saget par François Besse.
Merci François de prendre soin de notre histoire aéronautique contemporaine en construisant des dossiers aussi professionnels et aussi complets. On s'aperçoit souvent avec surprise que plus personne ne se souvient d'un évènement pourtant récent, qu'on n'a plus tel ou tel témoignage concernant des Hommes, des machines, des exploits que nous avons vécus. Pour cette pérennité rien ne vaut un bon bouquin. Tout ceux qui un jour ont planté leur disque dur seront de mon avis...
Jean-Marie Saget par François Besse.
Un grand monsieur, et quelle longévité, chapeau bas.