Amadouer la bureaucratie soviétique pour une image historique ? Le photographe japonais Katsuhiko Tokunaga l’a fait. Obtenir les premières photos aériennes du chasseur Sukhoi Su-27 a été une histoire de relations humaines.
Nous sommes en 1990, le rideau de fer s’ouvre mais l’URSS est toujours vivante. Les Soviétiques ont exposé pour la première fois le Sukhoï Su-27, un biréacteur de combat lourd mais très maniable, au salon du Bourget en 1989. Malgré une présentation en vol stupéfiante, l’appareil porte encore de nombreux secrets.
« En octobre ou novembre 1989, ma secrétaire reçoit un appel du bureau d’études Sukhoï, on lui demande si je suis disponible pour réaliser les photographies d’un ouvrage anniversaire », raconte Katsuhiko Tokunaga. « On lui explique que j’ai été choisi parmi les photographes qui étaient présents au Bourget et dont ils avaient vu les images. On me demande de me rendre au salon de Singapour en février. J’étais absent lors de la conversation et l’interlocuteur de ma secrétaire n’a pas rappelé. » Les deux Japonais s’interrogent : est-ce un canular ?
« Katsu » a déjà prévu d’être présent au salon pour un magazine local. Sur place, il rencontre bien l’ingénieur de Sukhoï qui a cherché à le joindre.
Commence alors un patient travail de persuasion. Il s’agit d’emporter l’adhésion de la délégation russe – environ 25 personnes – malgré la barrière de la langue. « Très peu parlaient anglais », se souvient Katsu. Les traductions étaient chronophages.
Grâce à l’ouverture d’esprit du directeur général de Sukhoï, raconte le photographe, le projet de prises de vue aérienne est lancé. C’est une course contre la montre. Les Russes veulent que leurs deux avions présents à Singapour – un monoplace et un biplace – soient sur la photo. Il faut donc trouver, dans les deux jours qui précèdent l’ouverture du salon, un troisième avion pour le photographe.
Dassault, Pilatus… c’est finalement la force aérienne royale australienne qui fournit deux chasseurs biplaces F/A-18 Hornet. Le constructeur, McDonnell Douglas, paiera le carburant. Il faut encore lever un obstacle bureaucratique : les Singapouriens acceptent la séance photo dans leur espace aérien à condition que leur pays ne soit reconnaissable sur aucune image.
Côté russe, la communication est compliquée. Un interprète devra s’installer dans le Su-27 biplace. En outre, le briefing de la veille implique toute la délégation et son organisation très hiérarchisée. Katsu parvient à faire accepter son programme d’une heure.
Dernière difficulté : la séquence finale, qui implique le seul monoplace. Plus d’interprète ! Mais Katsu a tout prévu : il a numéroté les configurations et appris les chiffres correspondants en russe.
La principale surprise de la séance photo sera son déroulement… sans surprise. Les Russes auront suivi le programme. Le résultat est cette photo en vol du Su-27 : la première.
Thierry Dubois
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Des 1985 ou 86 l’on commençait à apercevoir cette silhouette unique photographiée par l’OTAN au dessus de la de la mer de Barents dûment publiée dans AWst et le Jane´s sans que se l’on se rende alors bien compte de la taille de cette grosse machine ...3 ans plus tard, au Bourget, lors de sa première incursion à l’Ouest, comme beaucoup, j’ai été très marqué par le panache des présentations en vol d’Evguenii Frolov et bien sur Victor Pougatchev (dont il doit me rester un autographe à la volée au fond d’un tiroir) ...Tout ceci demeure pour moi, la marque d’un temps et une valeur symbolique forte tant ce geste d’ouverture de l’Est ne laissait alors pas encore imaginer l’effondrement du mur de Berlin suivi de la dissolution de l’Union Soviétique respectivement 5 et 18 mois plus tard ...