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Culture Aéro

Le 15 avril 1988, le Tu-155 vole à l’hydrogène

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Juste avant l’implosion de l’URSS, le bureau d’études de Tupolev menait des recherches sur l’hydrogène comme carburant pour l’aéronautique. Dans un article de la revue Tekhnika Molodezhi de janvier 1989, Alexei Tupolev, académicien et chef du bureau d’études de Tupolev revient en détail sur la préparation et le déroulement du  premier vol du Tu-155 dont l’un des moteurs était alimenté en hydrogène. Un de nos lecteurs au Canada, Vladimir Krementzoff, a retrouvé dans ses archives cet article intitulé « La solution d’un ciel propre », et nous en propose une traduction.

Le 15 avril 1988, le TU-155 effectue son premier vol expérimental. Le vol n’a duré que 21 minutes, et nous attendions l’équipage, dirigé par le pilote d’essai V.Sevankvev, aussi nerveusement que si nous attendions des cosmonautes. Lors de ce vol, le TU-155 a utilisé de l’hydrogène liquide comme carburant.

Nous avons commencé à travailler sur le projet d’un tel appareil quelques années auparavant, et une bonne partie du temps a été dédiée à la mise au point de systèmes sur bancs d’essais, mais pour répondre à toutes les questions, et décider définitivement si l’avion à hydrogène avait lieu d’être, il n’y avait d’autre solution que de le faire voler.

« Nous nous débarrassons des rejets nocifs, du CO2 dont l’excès dans l’atmosphère, provoque de toute évidence un « effet de serre » ». Alexei Tupolev

On me demande souvent : « Mais pourquoi l’hydrogène et pas autre chose ? » réponse courte : « parce que le produit de sa combustion est l’eau ». Nous nous débarrassons des rejets nocifs, du CO2 dont l’excès dans l’atmosphère, provoque de toute évidence un « effet de serre ». Nous cherchons en permanence de nouveaux types de carburants, et il est maintenant temps d’en chercher un qui soit écologique. Si auparavant la priorité dans l’aviation, et même dans tous les autres moyens de transports, la priorité était la vitesse, les visions ont maintenant beaucoup changé. Le plus important maintenant, c’est de ne pas nuire à l’environnement, obtenir une atmosphère propre.

À cette courte réponse, on peut ajouter de nombreux « pour », « contre » et des « mais ». Avant toute chose, l’hydrogène coûte cher. Mais le prix du pétrole lui aussi augmentera continuellement, car les réserves n’en sont pas illimitées. C’est vrai qu’il y a aussi le gaz naturel. Quoi qu’il en soit, le TU-155 est prévu pour utiliser ce type de carburant sous forme liquide aussi.

« Tout cela rend plus difficile l’utilisation de l’hydrogène, c’est une évidence. »

L’augmentation des risques d’incendie, le maintien d’une température cryogénique et les contraintes de poids, tout cela rend plus difficile l’utilisation de l’hydrogène, c’est une évidence. Mais ses caractéristiques uniques, en premier lieu son fort pouvoir calorifique, trois fois supérieur à celui des énergies fossiles, nous poussent à chercher des solutions et laissent espérer qu’un jour, le H2 sera économiquement rentable.

Ayant maintenant répondu brièvement à la question « pourquoi ? », je vais essayer de répondre tout aussi brièvement à la question « comment ? ».

Comment avons-nous réussi à mettre autant d’hydrogène liquide à bord, que nécessaire pour voler ? Le fait est que ce carburant prend quatre fois plus de volume que le kérosène ; de plus les réservoirs doivent être très bien isolés.

« Nous avons utilisé un TU-154B comme base, qui est relativement spacieux. »

Sur le prototype, cela n’a pas posé de problèmes particuliers, dans la mesure où nous avons utilisé un TU-154B comme base, qui est relativement spacieux. Dans l’aviation moderne, on place le carburant dans les ailes, mais dans notre cas, cela ne suffit pas. C’est pourquoi nous avons décidé de le mettre ailleurs – à l’intérieur du fuselage.

Nous avons placé le carburant à l’arrière de l’avion. Pour le premier réservoir d’hydrogène liquide, nous avons choisi une solution assez simple : nous avons pratiquement prix deux réservoirs faits avec des matériaux solides et légers, l’un à l’intérieur de l’autre. La capacité ainsi obtenue nous permettait d’effectuer des vols d’essais d’une heure à une heure et demie.

En ce qui concerne le moteur, il a été conçu par le bureau d’étude dirigé par l’académicien Nicolaï Kuznetsov. Le NK-88 fonctionnant à l’hydrogène, a été placé dans la nacelle tribord.

« la glace et le feu ».

Ainsi, nous avons réussi à relever le défi avec ce prototype, mais au prix de beaucoup de « places passagers. » Mais comment faire avec un avion de ligne réel ? De toute évidence en profitant de la situation suivante : si le pouvoir calorifique de l’hydrogène est trois fois supérieur à celui d’un carburant conventionnel, alors il en faut trois fois moins en termes de poids, et de ce fait on peut augmenter les capacités de la machine.

La plus grande difficulté que nous avons rencontrée peut se rapporter aux mots du poète [Robert Frost NdT] : « la glace et le feu ». Le carburant doit être stocké et maintenu à une température cryogénique. Disons que c’est la « glace ». Les conditions nécessaires à sa combustion sont en revanches plus proches du « feu. »

L’hydrogène liquide qui s’évapore à -253°C, nécessite une isolation très poussée

Mais commençons par la « glace. » L’hydrogène liquide qui s’évapore à -253°C, nécessite une isolation très poussée (c’est pourquoi il y a du vide entre les deux couches du réservoir). Mais malgré celle-ci, il reste en ébullition en permanence. Il faut donc mettre en place un système de maintient de la pression à plusieurs atmosphères, autrement une part significative s’évaporerait durant la montée. Pendant le vol, la pression est maintenue dans le réservoir de façon à garder de la vapeur d’hydrogène saturée. Nous avons prévu un système de maintien de la pression, composé de sous-systèmes de compression d’hydrogène gazeux et de contrôles d’expulsion.

À bord, nous utilisons l’hélium à des fins de sécurité et utilitaires. Il supporte des températures auxquelles d’autres gaz se seraient solidifiés. Ainsi, nous l’utilisons pour ouvrir et fermer des soupapes. Il est utile aussi en cas de situation d’urgence, de fuite d’hydrogène. En cas de défaut du réservoir, des soupapes de sécurité évacuent l’hydrogène vers un compartiment spécifique, situé dans la queue de l’appareil, et depuis ce compartiment vers l’extérieur.

Il s’est avéré impossible d’empêcher l’évaporation

Le carburant atteint la chambre de combustion du moteur par des tuyaux eux-mêmes isolés avec du vide. Malgré cela, il s’est avéré impossible d’empêcher l’évaporation, et régler la combustion alors que l’on envoie un mélange de gaz et de liquide en ébullition dans l’injecteur est extrêmement compliqué. C’est pourquoi le carburant est préalablement chauffé afin que le moteur soit alimenté par du gaz uniquement et l’alimentation depuis le réservoir se fait à l’aide de pompes.

En cas de nécessité, une soupape à l’intérieur du réservoir permet de couper l’alimentation. Si le moteur est éteint, de l’hélium sous pression est injecté dans le circuit. Ce bouchon d’hélium empêche le contact thermique entre l’hydrogène liquide et l’air ambiant, et en cas de fuite, c’est l’hélium et non l’hydrogène qui se retrouvera dans le moteur et la carlingue.

L’hydrogène peut former un mélange explosif avec l’air

Parlons maintenant du « feu ». Étonnamment, il y a de fortes similitudes avec la « glace » – l’isolation et un certain nombre de systèmes pour empêcher les fuites d’hydrogène. En cas de fuite dans le système d’alimentation d’un avion conventionnel on utilise du kérosène – ce liquide est effectivement inflammable, mais il s’évapore très lentement. Il nécessite une quantité significative d’énergie pour prendre feu. C’est bien évidemment très dangereux, mais sans commune mesure avec l’hydrogène liquide. En cas de fuite, il s’évapore instantanément se répandant dans toute la carlingue qui, comme chacun sait est équipée d’un grand nombre d’équipements électriques, et peut s’embraser à la moindre étincèle.

L’hydrogène peut effectivement former un mélange explosif avec l’air dans un large spectre de proportions, allant de 4 à 74% en volume (contre 0,7 – 0,8% pour le kérosène) et son inflammation ne nécessite qu’une énergie de 0,02mJ, ce qui est largement inférieur à ce qui est nécessaire pour un carburant fossile.

Isoler soigneusement tout le circuit d’hydrogène

Une fuite d’hydrogène, un incendie, une explosion peuvent avoir les pires conséquences à bord. Pour se protéger des fuites, nous nous sommes inspirés… de la lutte contre le crime – par la prévention, la neutralisation et la maîtrise. Avant toute chose, il a fallu isoler soigneusement tout le circuit d’hydrogène. Le système expérimental, comprenant le réservoir, l’alimentation, les tuyaux a été placé dans un compartiment hermétique. La liaison entre le moteur et le système a été faite avec de l’acier inoxydable.

Les raccords, le câblage, les tuyaux… sont tous recouverts d’isolant. Tous les systèmes électriques à proximité de la nacelle moteur sont protégés.

Des capteurs analysent l’atmosphère dans tous les compartiments de l’avion, à proximité du réservoir, la nacelle, le cockpit, l’espace passagers en permanence. Des systèmes de détection d’incendie, de fumée, de contrôle du vide isolant le réservoir et les tuyaux sont prêts à donner l’alarme au moindre risque.

Toutes les zones à risque sont ventilées en permanence

L’un des principaux moyens de faire face à une fuite d’hydrogène, c’est simplement la ventilation. Toutes les zones à risque sont ventilées en permanence par le système de conditionnement d’air de l’avion. En cas de nécessité, il est possible d’injecter rapidement de l’azote, ce qui permet d’éteindre immédiatement les flammes.

Mais ce n’est pas pour rien que l’on dit que « le ciel commence au sol ». Il ne suffisait pas de concevoir un avion. Il a fallu développer et construire toute l’infrastructure de ravitaillement au sol. Elle a été placée dans un endroit isolé de l’aérodrome, que l’on utilise comme parking et comme zone de maintenance. C’est en quelque sorte un mini aéroport à hydrogène.

Un mini aéroport à hydrogène

La plateforme est équipée de tuyaux renforcés et le réseau peut recevoir l’hydrogène de quatre véhicules de ravitaillement. Les tuyaux sont isolés, et sont connectés à l’avion par des manchons métalliques placés sur des supports mobiles.

Le carburant est chargé dans l’appareil par gravité, en utilisant un principe proche de celui des vases communicants. La citerne du véhicule de ravitaillement est équipée d’un évaporateur ; celui-ci produit une pression positive qui pousse l’hydrogène dans le réservoir de l’avion.

Toute la procédure de ravitaillement est télécommandée. Un des plus grands risques, est qu’il peut rester un peu d’air « coincé » dans le réservoir après un vol. Il se solidifie aux températures cryogéniques et risque plus tard, de créer un mélange explosif avec l’hydrogène en ébullition. C’est pourquoi il est très important d’effectuer un contrôle du réservoir par chromatographie gazeuse avant chaque ravitaillement.

Il faudra repenser entièrement l’organisation des aérodromes

De plus, nous avons placé des gicleurs à tous les endroits où le risque de fuite d’hydrogène est plus élevé. Ils ont pour rôle d’arroser l’avion et les ravitailleurs d’eau, dans le cas où l’hydrogène s’embraserait.

Dans un premier temps, toute cette infrastructure de ravitaillement peut sembler assez complexe, et on s’imagine qu’il faudra repenser entièrement l’organisation des aérodromes, puisque les autres avions et le matériel aéroportuaire auront tout intérêt à éviter cette zone « maudite », mais cela devient très simple si on l’installe non pas sur l’aérodrome, mais en dessous. L’avion n’aura qu’à se stationner à l’emplacement indiqué et il pourra recevoir le carburant depuis une réserve souterraine.

Nous avons d’ailleurs déjà testé des pompes centrifuges électriques dans des cryostats spécifiques. Nous avons rencontré quelques problèmes et avons pu en éliminer les causes. L’étanchéité de chaque soupape, chaque soudure, chaque connexion a été contrôlée. Nous avons testé aussi tout l’appareillage de mesures.

Systèmes anti-incendie complexes

Le plus compliqué, cela a été de créer un banc d’essais pour les systèmes anti-incendie. Là, il nous a fallu combiner un système d’émission d’azote, des groupes de capteurs d’incendie, de fumée ainsi que de contrôle du vide et de l’isolation – en fait, le banc devait être multifonctionnel et l’informatique nous a beaucoup aidé.

Lors des essais du moteur NK-88, nous avons testé un feu moteur ; le fait d’avoir pu maîtriser immédiatement l’incendie nous a démontré que nous avons pris les bonnes décisions en ce qui concerne la sécurité.

Une structure a été spécialement conçue pour étudier le fonctionnement en commun du moteur avec le système d’alimentation en hydrogène liquide. Nous avons fait une maquette à échelle réduite du réservoir, avec toute l’alimentation, et avons tiré un tuyau de taille réelle depuis la maquette vers le moteur.

En vol, tout était cent fois plus compliqué.

Mais n’allez pas croire que grâce aux essais poussés au sol, le travail de l’équipage en vol était de tout repos. En vol, tout était cent fois plus compliqué. Nous continuions à tester tous les systèmes, et nous avons défini tout un programme d’incidents et de situations d’urgence à tester. Et je dois dire que de toutes ces situations d’urgence, l’avion s’en est sorti avec les honneurs.

Le premier vol a été un succès, et il y en a eu d’autres. Et maintenant que se passera-t-il ? Y-aura-t-il un avion de ligne utilisant l’hydrogène comme carburant ? Oui. Il y a quelques mois un communiqué informait que notre bureau d’étude avait développé un nouvel appareil très économique, le TU-204. Dans un premier temps, cet avion volera au kérosène, mais il a conçu pour pouvoir voler aussi avec un carburant cryogénique.

Alexei Tupolev, janvier 1989

(Traduction : Vladimir Krementzoff)

 

Notes du traducteur

  • Le 18 janvier 1989, le TU-155 – immatriculé CCCP-85035 (URSS ; 85 = TU-154; 35 = numéro de série) modifié pour fonctionner au gaz naturel liquéfié effectue son premier vol. S’en suivront de nombreux vols d’essais, dont qui amèneront le prototype notamment à Bratislava, Nice, Berlin et Hanovre.
  • Le 26 décembre 1991, l’URSS est dissolue.
  • Le successeur du TU-155, le TU-156 équipé de trois moteurs NK-89, version améliorée du NK-88 et fonctionnant au gaz naturel n’a jamais volé. Son premier vol était planifié pour 1997.
  • En 1998, la compagnie Gazprom tente de relancer le projet TU-156, mais n’obtient pas de financement de l’état qui devait s’élever à 1/3.
  • Très peu d’information sur le TU-206, projet basé sur le moyen-courrier et successeur des TU-155/156 circule.
  • Le TU-155 85035 est toujours visible à l’aéroport de Zhukovsky, près de Moscou

 

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  • @ Vladimir_k: Entièrement d'accord avec vous. Comprendre la Russie, et son âme, est extrêmement complexe.
    "La culture russe est marquée par une dualité fondamentale. Les antinomies s'expriment sur des registres multiples. La première, est d'ordre géographique: la Russie n'est ni d'Orient, ni d'Occident, mais participe des deux. La deuxième antinomie sépare l'Etat et le Peuple, le pouvoir et la Vie". (La Russie et son double; Gérard CONIO).
    La Russie n'est pas ruinée ou attardée, la Russie est bien vivante et ne la sous-estimons pas.

  • @ JP Delevoye
    Bilan d'une société de consommation militaro agressive ! Que peut-on acheter en Russie ? Des mugs en peuplier gravés de l'effigie figée de Vla dit Mir...

    • La Russie est un très grand pays, qui s'étant de la Finlande jusqu'au Japon, avec toutes le spectre culturel que cela implique ; il n'y a pas une Russie, mais des Russies, au même titre que la France est un assemblage de cultures (Région Nord, Alsace, Corse, etc.)

      La Russie est aussi et paradoxalement un pays jeune avec une histoire chargée.

      Je vous encourage malgré tout à le visiter, une fois les frontières ouvertes, il s'agit d'un pays bien plus dynamique qu'il n'y parait, avec beaucoup de créativité, beaucoup de solutions techniques intéressantes, vous pourriez être surpris.

      • mes parents y sont allés en 1967, en voiture (Dyane break...) avec leurs 2 enfants (8 et 11 ans) couchés sur des planches à l'arrière et les bagages dessous. L'accueil a été inoubliable dans chaque "bled" traversé jusqu'à Moscou puis Yalta, etc...
        Pays fermé pour ceux qui ne veulent pas l'ouvrir... Et qui ne veulent toujours pas !

      • De quoi me parlez-vous ? J'y suis allé en 2005 de Moscou à Saint-Pétersbourg et VVP faisait déjà la tronche sur les mugs ! Effectivement les frontières s'étaient ouvertes, après 73 ans d'obscurantisme, restent les esprits à ouvrir et c'est plus difficile que les bouteilles de vodka !

  • Sidérant de lire ça plus de 30 ans après sa rédaction, notamment sur l'effet de serre et le réchauffement climatique que certains, et non des moindres, n'ont toujours pas assimilé!
    Une question cependant: qu'a-t-on fait pour faire prospérer cette piste d'avenir entre 1989 et l'annonce récente d'AIRBUS d'un plan à l'horizon de 2035?

      • Je vais lancer une suggestion absurde, mais après tout, on est là pour discuter, alors pourquoi pas.

        Ne serait-ce pas l'occasion de recycler les A-380, qui ont largement le volume pour transporter hydrogène et passagers ?

        C'est sûr, il y a l'aspect psychologique à travailler, les passagers ayant sans doute été marqués par les images du Hindeburg sans vraiment les comprendre*, et s'imaginant être assis sur une bombe volante.

        * Dans les faits, les deux tiers des passagers+équipage ont survécu, et ceux qui hélas sont décédés, l'ont été soit par des brûlures dues au diesel des moteurs, soit par chute, soit par inhalation des gaz de combustion. L'hydrogène n'a tué en fait personne, car étant plus léger que l'air, sa combustion se dirige exclusivement vers le haut, pas vers le bas.

      • Je pense que le problème actuellement n'est pas du coté des avionneurs, mais plutôt des "gaziers". Les avionneurs sont demandeurs, tout comme le secteur automobile et camion, et même le train. Mais ce n'est pas un avionneur qui va inventer une nouvelle méthode pour produire de l'hydrogène (en masse) de manière écologique. Ce sont bien les gaziers, et je pense qu'ils y travaillent.
        De même pour le stockage et le transport du gaz produit, les technologies sont plutôt coté "gazier" qui est le premier embêté du sujet. En parallèle des avionneurs et automobilistes, qui vont inventer les réservoirs adaptés.
        Dans les voitures, un petit volume d'hydrogène donne des autonomies de 400km environ, c'est gérable et le poids n'est pas un problème (réservoir haute pression). En avion, il faudra plusieurs heures d'autonomie, donc beaucoup de gaz, et il faut que ce soit léger et un minimum crash-proof... Des réservoir à 700 bars ou à -252°C, ça le fait pas.
        Donc oui, les avionneurs cherchent et sont moteurs, demandeurs. Mais ils ne disposent pas encore des billes technologiques à appliquer, qui ne sont pas du domaine aéro.

      • "Or, depuis 30, il n’y a eu aucune révolution technologique qui permette de produire de l’hydrogène facilement et économiquement, et écologiquement. Il n’y a eu également aucune révolution technologique sur le stockage de l’hydrogène (gaz fin qui passe à travers toute paroi même épaisse), que ce soit sous pression (700 bars pour plusieurs mètres cube ?) ou sous forme liquide proche du zéro absolu (-252° ?)."

        Vous avez tout à fait raison Jean-Mi, mais peut-être qu'il n'y a pas eu de révolution technologique parce que l'on n'a pas cherché.

        Je ne présage pas des résultats qu'Airbus pourraient obtenir, je ne suis pas compétent pour ça, mais je trouve l'idée qu'ils cherchent intéressante.
        Après tout, Airbus a des moyens financiers que Tupolev et l'URSS n'avaient pas, 30 années supplémentaires d'expérience et de recul, des outils de modélisation qui n'existaient pas en 1988, de nouvelles générations d'ingénieurs, et des partenariats internationaux possibles.

        Aussi, ils font tout simplement le job qu'on leur demande : on râle après le transport aérien qui pollue, ils cherchent des solutions, qu'elles soient bonnes ou pas (et on ne sait pas si elles le sont avant d'avoir essayé)

      • bonne réponse ! Mouarf !
        @BIB57 : l'expérience pratique des années 80-90 a démontré que la propulsion par hydrogène était inapplicable en l'état. Je crois que les conclusions sont claires non ?
        Or, depuis 30, il n'y a eu aucune révolution technologique qui permette de produire de l'hydrogène facilement et économiquement, et écologiquement. Il n'y a eu également aucune révolution technologique sur le stockage de l'hydrogène (gaz fin qui passe à travers toute paroi même épaisse), que ce soit sous pression (700 bars pour plusieurs mètres cube ?) ou sous forme liquide proche du zéro absolu (-252° ?).
        Les conclusions des années 90 sont donc toujours valables : Ca marche, mais ce n'est pas utilisable en pratique, même à petite échelle.
        Il y a des voitures qui roulent à l'hydrogène, vendues chez les concessionnaire (Toyota, Hyundai, Honda, Mercedes). Sauf que le nombre de pompes à hydrogène frôle le néant, dans un nombre de pays qui se comptent sur les mains.

  • Pour diminuer le volume, il y a le "slush hydrogen", hydrogène liquéfié à moins 263 degrés soit encore 10 degrés de moins que la version liquide. A cette température l'hydrogène devient pâteux.

  • Excellent article, merci à son auteur.
    J'y découvre que le soucis écologique habitait déjà les esprits éclairés quand la masse ne rêvait encore que de consommer.

    • 1988 : année de création du GIEC, organisme souhaité par Tatcher et Reagan pour avoir un œil indépendant (que des compilations, pas de laboratoire propre, 196 pays, 15000 chercheurs).

  • Nous pourrons dire, en toutes éventualités à nos enfants : nous savions !
    Merci il y aura toujours de grands Hommes, quel que soit le régime politique.

  • tout a fait étonnant...
    - la capacité d'innovation et industrielle de l'URSS étonne encore. qu'en reste il depuis la chute du mur?
    - en 1988, il ne faisait déjà plus doute pour l'ingénieur croyant ce qu'il sait que le CO2 était un problème, ni qui les ressources naturelles n'etaient pas infinies. au point de vouloir se lancer dans un projet ô combien audacieux...

    merci pour cet article!

  • Un TRES grand merci à l'auteur de la traduction d'avoir partagé ce remarquable article d'une actualité surprenante.

    En somme les récents objectifs d'Airbus consistant à "hydrogéner" l'aviation se révèlent largement débroussaillés par nos camarades Russes, et depuis belle lurette.
    Ce qui ne représente une surprise qu'à ceux dénigrant leurs talents de concepteurs.

    Toutefois la pertinence commerciale et technologique de l'application de cette formule "verte" remise au goût du jour semble quelque peu utopique.
    Il y a fort à penser que si la formule s'était avérée possible en mode exploitation, cet admirable projet Russe aurait trouvé une autre issue que celle d'un appareil se dégradant depuis 31 ans exposé aux éléments naturels.

    A propos de l'opportunité de rendre compatible l'emport du carburant avec de la charge utile commerciale...les lois de la physique risquent bien de représenter un obstacle de taille, disons quasiment incontournable pour le secteur aéronautique.

    La taille des réservoirs d'hydrogène des lanceurs spatiaux est tellement impressionnante que l'on voit mal comment une "compression technologique" de ces volumes serait envisageable, y compris en considérant la différence de puissance développée par leurs moteurs et potentiellement ceux d'appareils de ligne.

    L'épopée remise d'actualité s'avère captivante, en espérant qu'il ne s'agisse pas uniquement d'une tentative commerciale destinée (une fois de plus) à capter des fonds prévus pour la recherche.

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