Installé dans un hangar de la base aérienne 106 de Bordeaux Mérignac, le Conservatoire de l’Air et de l’Espace d’Aquitaine (CAEA) recèle quelques très belles pièces. Pour l’instant loin des regards du public…
Comme son nom l’indique, le Conservatoire est un endroit où l’on conserve. On conserve les avions, les souvenirs mais aussi une certaine exclusivité. Commençons par les avions. « Ce qui nous intéresse, ce sont les avions étudiés, construits ou utilisés en Aquitaine explique Alain Arpino, l’actuel secrétaire. La formule ouvre de vastes horizons et l’on trouve au conservatoire une large gamme d’avions estampillés Dassault (pour beaucoup assemblés de l’autre coté de la piste de Mérignac), un Skyhawk aux couleurs singapouriennes (une douzaine furent utilisés depuis la base de Cazaux), un B-26 Invader (ancien du CIFAS stationné sur la BA106 ) et de nombreuses autres belles bêtes, pour un total de 60 aéronefs. « Si nous retrouvions un Condor, nous serions contents…. » note au passage Alain Arpino. Les quadrimoteurs de la Luftwaffe furent basés à Mérignac de 1940 à 1944…
Deuxième volet de son activité, la conservation des souvenirs se traduit par la possession de nombreux moteurs (une cinquantaine), maquettes, simulateurs de vol, d’archives conséquentes et surtout par l’engagement d’environ 200 adhérents, dont de nombreux anciens du monde aéronautique. Leurs compétences sont mises à profit dans les différents chantiers de restauration.
En courte finale figure aujourd’hui le B-26 Invader, ancien pot de fleur placé devant le PC de la BA 106 et qui a exigé à ce jour trente mille heures de travail pour retrouver son lustre. De l’avis de tous, il s’agit là du futur joyau de la collection, qui rejoindra sur le podium le Noratlas remis en état entre 2001 et 2008. Si les avions sont restaurés, ils ne sont pas pour autant remis en état de vol.
Il y eut, au début des années 2000, le rêve de remettre en vol un Cessna 337. L’hypothèse fut rapidement abandonnée : un tel chantier aurait exigé des moyens financiers et humains dépassant de beaucoup les capacités des volontaires. Le CAEA possède toutefois un Stampe et un Stark en état de vol basés sur l’aérodrome voisin de Saucats.
La collection du CEAE est impressionnante, mais elle reste pour l’instant inaccessible au public. Pour reprendre les mots de son secrétaire, « Le CAEA est un club privé. Members only… ». Et voici pourquoi…
Fondé en 1997 et installé au nord de la piste 05-23, du côté de Dassault Aviation et de ce qui était à l’époque la Sogerma, le Conservatoire a subit de plein fouet la tempête de 1999 qui a sérieusement endommagé son hangar qui l’hébergeait. La CCI, propriétaire des lieux, en a profité pour raser le bâtiment et donner son congé au CAEA.
Amie fidèle, l’armée de l’Air a accepté de recueillir la collection sur la base aérienne, de l’autre côté des pistes, dans l’un de ses hangars rendu vacant par le départ des dernières unités navigantes. Mais le répit a été de courte durée puisqu’en 2011, l’accès du public (qui pouvait jusque là visiter la collection sur rendez-vous) a été interdit au motif que le hangar ne pouvait pas recevoir le public. Entre autres raisons, l’absence de toilettes handicapées et une charpente fragilisée. On venait en effet de redécouvrir que, 70 ans plus tôt, une bombe allemande (non explosée) avait ébranlé la charpente tandis que deux poteaux de la structure avaient fait connaissance avec trois balles de 12,7mm.
Le CAEA accueillait 10.000 visiteurs par an avant 2011, il n’en reçoit plus aujourd’hui que 2.500 pendant le seul week end des journées du patrimoine. Encore ces visiteurs ne sont ils pas admis dans le hangar : ils viennent voir les avions qui sont tractés sur le parking pour quelques heures…
Cette situation est elle définitive ? On espère bien que non au CAEA où l’on porte depuis quelques années le projet d’un musée ouvert au public. Comme toujours dans ce genre d’affaire, la multiplicité des intervenants et des bailleurs potentiels ne facilite guère les choses.
Les études préliminaires montrent qu’une dizaine de millions d’Euros permettrait la mise en place de l’infrastructure nécessaire. Entre les municipalités (l’aéroport est à cheval sur les communes de Mérignac et St Jean d’Illac), le département, la région et les industriels locaux (au premier rang desquels figure Dassault), les discussions sont longues et passionnantes.
Mais une idée semble aujourd’hui se dégager, qui verrait Aerocampus (institut de formation à la maintenance aéronautique porté par la région) se poser comme maitre d’œuvre d’un projet plus vaste comprenant le CAEA. « Il n’y pas de calendrier pour l’instant, nous sommes dans l’attente que le tour de table soit bouclé » résume Alain Arpino. « Nous dérivons à la surface de la mer en attendant que l’on nous passe une remorque ». Ancien chef de piste aux essais en vol de Dassault Aviation à Cazaux, Alain Arpino est aussi un poète.
Il y a quelques années, une étude avait montré que les musées aéronautiques de Dax et Biscarosse recevaient environ 15% des visiteurs de passage dans ces deux villes. En appliquant ce même ratio, on arriverait à environ 100.000 visiteurs annuels pour un musée aéronautique au sein de la CUB (Communauté Urbaine de Bordeaux). Le potentiel de visites est donc là, mais comme pour tous les musées, le questionnement porte moins sur l’investissement initial que sur le financement dans la durée.
Frédéric Lert
adresse :
Base aérienne 106, Mérignac.
site internet :
www.caea.info
email : voir sur le site internet
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Le passé aéronautique de l’Aquitaine enfermé
Bonjour
Votre série d'été sur les musées aéronautiques est absolument passionnante, d'autant plus que rien de tel n'avait jamais été réalisé auparavant. Continuez comme ça, comme on dit dans les bulletins scolaires !
Pour infos les autres F1 irakiens (monoplaces, une douzaine ?) connurent des fins de vie misérables, à Châteaudun ou ailleurs. L'Armée de l'air ne fit pas d'effort pour les récupérer (paresse intellectuelle des officiers mécanos ?) au motif que les standards étaient différents (altis en mètres, badins en km/h à la soviétique - ou à la française d'il y a longtemps, avant l'impérialisme anglo-saxon issu de la guerre) On aurait pu en faire une petite escadrille à Colmar, pour les pilotes qualifiés uniquement (ces avions avaient TOUS les équipements et armements)
Mais voilà, déjà au début des années 90 plus aucun pays déjà client de F1 n'était intéressé (l'Afrique du Sud était encore sous embargo) tous les moyens et l'intérêt disponible allaient vers le Mirage 2000 voire le Rafale .... et surtout c'était une affaire d'industriels et d'exportation, l'Armée de l'air ne voulait pas en entendre parler, et surtout les assurances gouvernementales allaient payer... avec l'argent de l'état, c'est-à-dire le vôtre !
Bref, une triste histoire.
Je m'étais assis dans le cockpit dans d'un de ces monoplaces à l'époque, chez Dassault où j'allais prendre livraison d'un 2000 .... il y en avait des boutons et des écrans ! et la place arrière du biplace était une vraie place de combat, pas comme dans les biplaces français.
Bref, par respect de l'aviation et du travail humain, on aurait pu faire autrement ... si on avait voulu.
Cette affaire ressemble à celle des Transalls Sud-Africains, que l'on n'arriva pas à récupérer à la même époque et qui partirent à la ferraille là-bas avec un nombre ridicule d'heures de vol au compteur, tout ça pour qu'on se lamente après de ce que nos C160 n'avaient plus de potentiel !
Donnez le pouvoir aux mécanos et autres pailleux, et c'est ce que vous obtenez.
VG
Dubai
Le passé aéronautique de l’Aquitaine enfermé
Le Mirage F1BQ ne compte que 8h15 de vol ; peut il être considéré techniquement (je ne parle pas des autorisations administratives) comme en état de vol ?
Le passé aéronautique de l’Aquitaine enfermé
bonsoir,
non, l'avion n'est plus en état de vol, et depuis longtemps. L'embargo durant, l'avion a servi de réservoir de pièces détachées pour d'autres F1. Il était en outre équipé d'une instrumentation en système métrique, à la russe, ce qui interdisait de facto son emploi en France !
frédéric lert
Le passé aéronautique de l’Aquitaine enfermé
Bonjour à tous,
Si mes souvenirs sont bons ,je crois que le Mystère IV N était dans le hangar de la subdivision "Equipement bord" de l'ex B.A 721 de Rochefort .
Le passé aéronautique de l’Aquitaine enfermé
Bonjour,
n'avez vous pas commis une erreur concernant l'Invader?
En effet, celui-ci était le A26 et non B26, qui si je me souviens bien, concernait le Marauder.............
Par contre, un grand bravo pour le travail fourni, dommage que Bordeaux soit un peu loin pour moi..........
Amitiés aeronautiques
Le passé aéronautique de l’Aquitaine enfermé
C'est pas si simple ! Le B-26 Marauder de chez MARTIN, mis en service en 1939, a été retiré en 1948, année où le A-26 Invader de DOUGLAS, né en 1945, a été renommé B-26, jusqu'à son retrait en 1965...
Le passé aéronautique de l’Aquitaine enfermé
Bonjour Michel,
votre question est légitime, ma réponse succincte : en 1948, l'USAF supprima la catégorie "A" (pour Attack) de ses appareils. Les Invader encore en service, nés A-26, furent donc rebaptisés B-26. Sans risque de confusion puisqu'à cette époque tous les B-26 Marauder avaient été retirés du service. En résumé, on parle du A-26 Invader pendant la seconde guerre mondiale, et de B-26 Invader pendant la guerre de Corée, d'Indochine, d'Algérie, du Vietnam etc.
Frédéric
Le passé aéronautique de l’Aquitaine enfermé
Les A-26 ont été redésignés B-26 après-guerre.