Les drones sont-ils l’aviation de demain ? C’est, en substance, la question essentielle que pose Michel Polacco, dans un très bel ouvrage publié aux Editions Privat.
Le livre que consacre Michel Polacco aux drones est sans doute plus lourd que les mini-drones qu’il présente avec toute la science, la précision et la rigueur qui le caractérisent et qu’on lui connait bien. En 150 pages, abondamment et fort joliment illustrées par des images sélectionnées avec soin et souvent inédites, l’auteur aborde tout ce qui touche aujourd’hui aux drones, tant militaires que civils, en évoquant l’histoire des premiers engins volants habités ou non tout en dressant un état des lieux minutieux des drones aujourd’hui et en imaginant plusieurs pistes de développement dans l’avenir. Après une Introduction aussi claire que prometteuse, l’auteur dresse en huit chapitres un des états parmi les plus didactiques et synthétiques jamais publiés sur le dossier des drones.
« L’usage des drones se multiplie, écrit-il dans les toutes premières pages de son ouvrage sorti en novembre 2014. Quelque 1.800 opérateurs ou fabricants de drones commerciaux civils sont répertoriés dans le monde en 2014, dont plus de 600 en France qui se situe en tête. Vient ensuite la Grande-Bretagne, avec 250. On en compte 70 au Canada et en Australie, et un seul aux États-Unis où ils restent appareils d’Etat sauf rares dérogations, car la législation tarde à les émanciper ». Voilà bien une première surprise que nous réserve la lecture de ce beau livre.
Les profanes sur la question découvrent donc que, à l’inverse de la sinistrose dominante qui tend à faire croire que la France se traine bonne dernière dans tous les secteurs, la voilà leader dans le domaine sans doute considéré comme l’un des plus prometteurs dans un avenir proche parce qu’il associe directement R&D, innovations technologiques et usages multisectoriels dans des domaines civils aussi diversifiés que la logistique, le transport, l’agriculture, le BTP, la sécurité civile, voire la livraison de colis et, tout simplement, les loisirs et qu’il autorise toutes les réflexions stratégiques possibles dans les domaines militaires : évolution des théâtres d’opérations, cyberguerre, systèmes combinés, etc.
Ce livre ne laisse pas grand-chose dans l’ombre. Il y est question par exemple du remplacement progressif des avions par les drones. Fourmillant d’anecdotes l’auteur évoque même le « Manuel du Djihadiste » saisi par les troupes françaises en opérations dans le Nord du Mali et dans lequel les chefs terroristes donnent des instructions dans ce « petit guide pratique » pour échapper à la surveillance des drones, exercice bien plus difficile qu’à l’égard des satellites espions, parfaitement prévisibles et réguliers dans leurs passages au-dessus de points donnés, quand les drones n’obéissent à rien de régulier et de répétitif…
Bien plus près de nous, autre exemple très concret : l’emploi par la SNCF de drones pour surveiller ses 30.000 kilomètres de voies ferrées et veiller au bon état de ses 30.000 ouvrages d’art. C’est devenu pratiquement un impératif de bonne gestion et prévision. En novembre 2013 des drones de surveillance ont ainsi été déployés sur toute la longueur du trajet Paris-Marseille pour lutter contre le vol de câbles en cuivre (coût annuel de ce préjudice pour la SNCF : 70 millions d’euros). Cette pratique a connu une très nette régression en une année du fait de la surveillance renforcée par les drones.
Michel Polacco n’est pas restrictif dans son approche des familles de drones. Le plus gros est montré en majesté. Il s’agit du RQ-4B Global Hawk, il pèse 15 tonnes et dispose de la plus grande autonomie existant actuellement au monde (36 heures) ce qui lui a permis de rejoindre sans escale l’Australie en ayant décollé des Etats-Unis. Le plus petit drone au monde, développé par le CNRS et l’ONERA (centre français de recherche aérospatiale) est le Clear Flight. Il dispose d’ailes vibrantes et mesure entre 2 et 3 centimètres. Une photo pleine page nous montre cet étonnant nano-drone aussi petit qu’une pièce d’un euro… Et puis on découvre la beauté froide et épurée du Neuron, le démonstrateur de drone furtif de Dassault qui se projette dans un avenir proche en envisageant un « système de combat aérien du futur » où avions pilotés et drones évolueront ensemble en patrouille contribuant ainsi à faire de l’aviation militaire une arme de « système de systèmes ».
La législation en vigueur pour les drones fait l’objet d’un traitement particulier dans cet ouvrage. Mais c’est dans le chapitre sur les « pilotes » et dans le suivant intitulé « le drone, l’homme et la morale » que le lecteur trouvera matière à s’élever dans la réflexion sur ces drôles de machines volantes. L’auteur nous dit bien que les « drones ne sont pas des avions sans pilote, mais des appareils dirigés à distance ». Il convient donc de ne pas du tout considérer le facteur humain comme totalement éliminé de l’environnement aérien du drone. Il l’est d’autant moins que la place de l’individu dans l’engagement du drone militaire est souvent bien plus exposée, paradoxalement, à des facteurs de stress.
Michel Polacco le rappelle fort judicieusement : « Les pilotes de drone vivent souvent très mal les missions de guerre qui leur sont confiées. On a constaté depuis quelques années que la guerre dématérialisée a des effets néfastes sur les opérateurs de drones de combat américains. Loin du champ de bataille (…) ils se trouvent parfois en situation de tuer ou de faire tuer d’un simple geste. (…) On peut difficilement rentrer dîner en famille en toute quiétude après avoir tué. (…) Une mission de guerre n’est pas une séance de jeu vidéo ou de télétravail… ».
On le mesure dans le court extrait qui précède : ce livre, au-delà d’une réalisation technique parfaite (hommage aux Editions Privat qui confirment une fois encore leur grand professionnalisme dans la réalisation d’ouvrages toujours esthétiquement très réussis), en plus de la richesse de l’iconographie et de la précision quasi-chirurgicale des informations chères au grand spécialiste aéronautique qu’est l’auteur, nous amène à réfléchir sur une innovation technologique majeure dès aujourd’hui et sans aucun doute omniprésente dans les trente prochaines années. Finalement, dans la forme mystérieuse du Neuron, véritable raie manta des airs, furtive et presque inquiétante tellement elle semble vivante, se révèle la réponse à la question sous-titre du livre de Michel Polacco : « Non seulement les drones seront l’aviation de demain, ils sont déjà celle d’aujourd’hui ».
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