Michel Mouton tente de définir le commandant de bord

Pour Michel Mouton, ancien pilote d’Awacs dans l’armée de l’air et actuel pilote d’ERJ-145 chez Regional, la formation qui permet à un pilote de ligne d’accéder à la fonction de commandant de bord n’est pas satisfaisante. Dans un ambitieux essai, il tente d’expliquer pourquoi et apporte des propositions.

Du haut de son expérience professionnelle, dans l’armée de l’air puis dans le transport aérien civil, Michel Mouton (48 ans) a acquis la conviction qu’il existe de profondes lacunes dans la formation spécifique des commandants de bord. Partant de ce constat, il s’est attaché à comprendre comment un pilote accédait à cette fonction, au fil des années passées en place droite. Il a également analysé, ce qu’attendait une compagnie de ses commandants de bord et, par conséquence, comment elle les préparait à assumer cette responsabilité.

Il existe certes un prérequis réglementaire pour acquérir le galon qui confère à un pilote l’autorité sur son équipage. A ces conditions administratives vient généralement s’ajouter un cursus propre à chaque compagnie, destiné à accompagner la transition. Pour Michel Mouton, cela n’est pas suffisant et surtout, l’essentiel de l’acquisition des compétences se fait, avec plus ou moins d’efficacité et de succès, de manière empirique. « La formation du commandant de bord repose essentiellement sur une transmission orale. Elle est faite de rencontres entre de vieux commandants de bord et de jeunes copilotes », explique l’auteur qui, à travers ce travail d’écrivain, s’attache à mesurer les limites de cet apprentissage.

Michel Mouton s’est lancé dans un vaste chantier qui devrait s’étendre sur cinq volumes de plus de 300 pages chacun. Le premier qui vient de paraître est centré sur l’autorité. L’auteur est allé rechercher chez les philosophes une définition de l’autorité pour la confronter à la réalité du métier. Cette recherche l’a conduit jusqu’à la psychanalyse. « J’ai trouvé en effet que la définition philosophique de l’autorité renvoyait à Lacan. Le copilote se confronte aux pères successifs que sont les commandants de bord. Il devient à son tour, commandant de bord, lorsqu’il accepte le risque ».

Pour Michel Mouton, le « tout facteurs humains » apparu dans les années 90 a dévoyé la notion de commandant de bord. « Quand on utilise la notion de leadership, comme c’est le cas dans les compagnies aériennes aujourd’hui, on oublie la notion d’autorité et on ne comprend pas le comportement d’équipe ». L’auteur souhaite ouvrir le débat et surtout nourrir la réflexion avec ce premier essai qui peut se lire à deux vitesses, en prenant le temps ou pas d’approfondir chaque référence philosophique, sans pour autant perdre le fil de la démonstration…

Gil Roy