Après Stephen Grey au mois de Juin à La Ferté Alais, c’est un autre grand Monsieur du monde des collectionneurs et des shows aériens qui tire sa révérence. Son image est attachée aux époustouflantes présentations en vol du Corsair et du Zéphyr. Ramon Josa a choisi le meeting de Roanne pour annoncer discrètement à quelques amis que cette présentation publique serait la dernière. Il met ainsi un terme à une carrière aéronautique commencée dans le milieu du siècle dernier.
Entré en 1954 à l’âge de 18 ans à l’Ecole des mécaniciens « machine » de la « Royale » à Saint Mandrier, la destinée du jeune « mousse », qui deviendra quelques décennies plus tard le Directeur de l’Ecole d’Aviation embarquée, n’était pas à priori orientée vers la troisième dimension mais plutôt vers les entrailles des vaisseaux de la Marine Nationale.
Affecté à la « machine » du porte avions La Fayette à l’issue du cours de maistrance et côtoyant quotidiennement les pilotes, il comprend rapidement que son seul horizon risque d’être les fonds de la cale pour de longues années. Il met alors tout en œuvre pour réaliser son rêve : devenir pilote ! Mais si le but envié et la volonté d’y parvenir lui donnent suffisamment de ressources pour « déplacer les montagnes », il avoue avec le recul : « Cela n’a pas été chose facile, le volontariat ne suffisait pas, encore fallait-il que la hiérarchie accepte de me voir changer de spécialité… ». Ce combat contre l’administration militaire durera 4 ans ! Il obtiendra pourtant satisfaction en janvier 1959 et entrera au cours de pilote d’Aéronautique Navale.
Il participe à la guerre d’Algérie sur Corsair et aux opérations armées du Liban, en 1983, sur Super Etendard. En 1972, il devient officier d’appontage, fonction qu’il exercera alternativement avec des affectations en flottille opérationnelle. Il effectue également deux années de commandement d’une escadrille équipée de Falcon 10 et de Morane Paris.
Mais le moment le plus intense de sa carrière, il va le vivre début 1977 alors que le territoire de Djibouti proclame son indépendance sous couvert de la protection de la France.
La situation devient tendue, les appétits somaliens et éthiopiens se font rapidement jour, le sud Yemen déclare étendre ses eaux territoriales jusqu’à 50 nautiques. A bord du Clémenceau quatre Etendards IV et deux Crusaders (F8) armés sont maintenus en alerte. Le 7 mai au matin, six Etendards et deux « Crus » sont catapultés pour un exercice de défense aérienne. Ramon pilote l’un de ces avions, le LV Manaud est aux commandes de l’autre.
A quelques minutes du retour à bord, Ramon est envoyé en interception sur deux échos «suspects». Il prend l’interception à son compte et se trouve rapidement face à 2 Mig 21, armés de missiles électro magnétiques. Au croisement, les deux Mig « breakent » sur lui en enclenchant la post combustion… Ramon raconte : « je contre en très fort cabré PC allumée et très rapidement je prends l’avantage et me place derrière l’un d’eux à 500 mètres. J’efface les sécurités armement de mon missile, la tête infrarouge s’accroche instantanément au réacteur de ma cible et j’entends le signal d’accrochage du « target » dans mes écouteurs. Etant en situation de riposte, je demande au porte avions l’autorisation d’ouvrir le feu. Après quelques secondes, le bord me demande de renoncer à tirer et remettre le cap vers le P.A… Ayant retrouvé mon équipier, je romps l’engagement et rentre vers le « Clem » quelque peu désappointé. Une expérience unique pour le pilote de chasse que j’étais ! »
C’est ainsi toute une carrière de pilote dans l’Aéro que Ramon Josa va effectuer, qui verra son terme le 14 février 1991, jour de son 55ème anniversaire, alors qu’il est Chef du Service Opérations (CSO) de la base Aéronavale de Hyères. Ramon Josa Capitaine de Frégate honoraire est chevalier de la Légion d’Honneur, officier de l’Ordre National du Mérite, médaillé militaire, médaillé d’aéronautique, titulaire de la valeur militaire avec trois citations dont une à l’ordre du corps d’armée décernée au Liban en 1983. Sa plus belle distinction est pourtant, de son avis, d’être grâce à Juliette, son épouse et ses deux enfants Valérie et Jean Charles, l’heureux grand père de Marie, Elodie, Marie, Camille, Jérémy et Théo.. A cette occasion, il prendra le commandement d’un défilé aérien composé de 32 Etendard, Super Etendard, Crusader et Fouga/Zéphyr, autant d’appareils qu’il a lui-même piloté au cours de ses 32 ans de service. Il quittera donc l’Aéro avec 6655 heures de vol et 800 appontages effectués sur Corsair, Aquilon, Etendard IV M et P, Alizé, Fouga et Crusader, totalisant 28 appontages de nuit sur cette machine terrifiante mais tellement adulée de ses pilotes : « Pas facile lorsqu’on commence ce sport à 42 ans ! » avoue t’il avec un rien de fierté et d’humilité dans la voix.
En décembre 1991, trois de ses amis lui demandent de se rendre en Argentine pour les représenter dans une adjudication internationale, dont l’objet est un Corsair (F4U-NL – BuNo 125541 à l’origine) Après bien des aventures, l’épave arrive au Castellet en 1995 : la reconstruction peut commencer, Didier Rhomer et Claude Semenadisse vont s’en charger, chacun dans leur domaine.
Rendu à la vie civile, Ramon va dans le même temps débuter une nouvelle activité professionnelle. Il entre alors dans l’équipe de programme du porte avions Charles de Gaulle à la DCN (direction des Constructions Navales) au sein de laquelle il va œuvrer jusqu’en 1997, comme adjoint au directeur de programme, en charge des installations aviation. Qui de plus compétent pouvait assurer cette charge ?
A l’issue de cette deuxième activité, il rejoindra ses amis dans le monde des avions anciens ; il s’agit d’abord d’un T6 en cours de reconstruction autour duquel une association, Les Ailes de l’Aéro dont il assure toujours la présidence, sera créée. Dans le même hangar, la reconstruction du Corsair F-AZYS touche à sa fin. De décembre 1991 à mars 2000, il aura fallu 9 ans pour redonner vie à ce magnifique warbird.
Le Corsair peint aux couleurs de la 14ème Flotille, prendra l’air le 9 Mars 2000, avec Ramon aux commandes pour un premier vol, à l’issue d’une magnifique restauration illustrant un bel exemple de ce que peut faire la passion, la pugnacité et la compétence technique. Ramon totalise 118 présentations en meeting aérien sur le Corsair, qui, à la suite de subsides insuffisants pour pallier à son entretien, a du malheureusement être vendu à un collectionneur Argentin vivant en Allemagne. Ce dernier aura la délicatesse de confier « son » avion, préservé aux couleurs françaises et sous les marques de la 14F à son ancien « cocher » pour le meeting du Centenaire de l’Aéronautique Navale à Hyères en Juin 2010. Ce n’est pas sans une certaine émotion que celui qui a tellement mis en valeur le « 14F-6 » dans les meetings, en reprendra le manche pour la dernière fois, pour une présentation inoubliable.
Ramon poursuivra alors son activité meeting au manche du CM 175 Zéphyr N° 28 (F-AZPF) des Ailes de l’Aéro. Dans les mois à venir, ce bon serviteur à la dérive papillon si caractéristique des productions de Pierre Mauboussin et Robert Castello, actuellement en vente, risque de changer de propriétaire. Formons l’espoir qu’il demeure sur le territoire qui l’a fait naître !
Avec le départ de Ramon Josa du monde des présentations en vol (à 78 ans quand même !), c’est l’un des piliers d’une génération de fins pilotes formés à l’école de la chasse embarquée, qui se retire de la scène.
Philippe Chetail
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Je découvre ce blog avec tant de retard que j’en suis vraiment honteux..
Cher Jos, tu étais un exemple à suivre pour le jeune pilote que j’étais et tu fus également de ceux qui m’ont motivé pour prétendre devenir un jour Officier d’Appontage.
Je te dois donc quelques belles frayeurs et quelques cheveux blancs à la PFOA mais avant tout le plaisir incommensurable d’avoir mis un petit peu mes pas dans les tiens !
Toums
Miguel,
Cher Ramon,
Ton livre est passionnant, et je veux t'adresser ces quelques lignes après sa lecture.
Je t'ai connu alors que j'étais jeune Enseigne à la 59S et nous nous sommes côtoyés pendant de longues années sur Fouga, Etendard IVM et Super Etendard.
Tu étais déjà , en 1971, un grand pilote que tous admiraient et aimaient. Au fil des ans, tu es devenu une référence car non seulement tu étais un pilote exceptionnel, mais tu étais aussi un homme intelligent, toujours souriant, totalement disponible, ouvert aux autres, généreux et bienfaisant.
Je garde un souvenir marquant de ces deux raids incroyables : celui du 9 septembre 1983 sur Deir El-Qamar et celui du 17 novembre 1983 où nous avons survolé ensemble la Bekaa...Ce sont des moments forts qui soudent...
Tu m'as beaucoup appris...
Tu n'as jamais rien lâché...
Tu étais un exemple pour tous ...
Merci Ramon,
CVH Alain MICHEL
Ramon, que dire après tout ça! J'ai eu aussi la chance de partager quelques belles aventures avec toi, mais mon souvenir le plus fort, tu le sais, c'est cette phrase dans mon dos: " Lieutenant, il ne faut pas vous laisser abattre!" Merci pour tout!
Ramon Josa quitte la scène du spectacle aérien
excellent souvenir a la FERTE-ALLAIS avec les retrouvailles de mon cousin FRANCOIS GUILLAUME
Ramon Josa quitte la scène du spectacle aérien
Commandant JOSA
Bien après l'évènement que représente la fin de votre carrière aéronautique, j'accède par hasard à ce site. En lisant tous les hommages mérités sur vos qualités de pilote et d'officier je me remémore mes affectations à la 59S (juin 1971/sept1974) et à la 12F (juin 1975/août 1979), des lieux où vous avez été indirectement ou directement mon chef (off armement 12 F).
Oui Commandant bravo, félicitations et respect pour votre immense carrière de pilote. Vous avez porté très haut la cocarde de l'aéronautique navale et vous méritez une longue retraite.
CV (H) Raymond DELAMARE
Ramon Josa quitte la scène du spectacle aérien
Bonjour Commandant JOSA,
Mécano aéro en visite V50 et V250 etc... sur les zéphyr, j'avais 19 ans en 1974.
J'ai dû vous attacher les bretelles sur fouga ou étendard quelques fois lorsque je faisais du service piste comme je l'ai fait pour BADILLER ou pour feu le LV FAVATIER notre O2 à la 59S durant cette période.
Puis j'ai eu l'immense honneur de vous serrer la main lors d'un meeting à la base de Garons peu avant sa dissolution de 2011.
Nous avons eu l'occasion d'échanger quelques instants.
C'est avec émotion que je vous ai trouvé par hasard sur ce site et c'est avec beaucoup de respect que je vous salue.
Michel NADAL ancien de l'Aéro, 59S et 55S
Ramon Josa quitte la scène du spectacle aérien
Bonjour Ramon,
Tu as toujours été une référence pour moi qui n'étais qu'un "Piaf" dans l'armée de l'air.
Tout à été dit sur toi ou presque ; mais une chose est sûre, et je te félicite grandement pour avoir pris cette sage décision:"Arrêter de voler en meeting"et profiter pleinement de toute ta (grande ) famille!... Papa n'a pas su la prendre......snif.
Tu connaissais bien Papa et sa "rigueur" légendaire, maintenant tu connais un peu mieux le fiston avec qui tu as partagé des vols "magiques": Corsair -Vampire, Zéphyr- Vampire et Zéphyr-Magister!...
Dommage que je ne t'ai pas connu plus tôt, mais durant tous ces meetings communs, tu m'as toujours montré le vrai sens du mot "passion".
Tu la partages comme personne et c'est vraiment un régal de parler avec toi.
Je te souhaite une bonne "seconde" retraite bien méritée et...à la chasse....bordel !
Didier Berger
Solo display Fouga...
Ramon Josa quitte la scène du spectacle aérien
Salut Ramon, merci de m'avoir permis d’être ton dernier mécano ce fut un plaisir et honneur de le faire pour toi, et si tu a besoin n’hésite pas.
A bientôt
Ramon Josa quitte la scène du spectacle aérien
Cher Ramon, je découvre ce site grâce à l'ami Christian Martin. Nostalgie, certes, mais que de joies nous avons connues, raquettes en mains ou au manche de ces superbes avions. VERT APPONTAGE ! Même si c'est le dernier !
Ramon Josa quitte la scène du spectacle aérien
Merci Ramon de m'avoir tant appris (avec le sourire).