« Rien ne saurait être fait, qu’il n’y entre de la passion » : Valérie André

En ce jour de printemps du 21 avril 2022, le Général Valérie André a 100 ans. Celle que ses frères d’arme, en Indochine aux commandes de son hélicoptère Hiller 360, surnommait « Madame Ventilo ». Sa famille, ses amis, le monde de l’aéronautique, du médical et le monde militaire lui rendent hommage.

L’histoire de la vie de Madame Valérie André-Santini incarne les valeurs humaines de courage, d’audace et de dépassement de soi. Sa destinée est exceptionnelle en tant que « Pionnière » ; pilote, parachutiste, neurochirurgien, femme militaire et femme de guerre. Le général Valérie André est Grand-croix de la Légion d’honneur et de l’ordre national du Mérite avec sept citations à la Croix de guerre.

« Il y a des femmes qui ont la modestie aussi grande que le courage. Valérie André en fait partie et de nombreuses femmes militaires et civiles lui doivent aujourd’hui de pouvoir piloter. » Jean Lartéguy

Le respect et la tendresse me lient à notre Général après avoir écrit un ouvrage en symphonie avec elle. Il me paraissait important de répondre à l’invitation d Aerobuzz pour mettre au-devant de la scène celle qui a ouvert tant de portes, distribué tant de sourires et d’encouragements à tous.

« Je fus projetée dans l’infini. Le souvenir du rêve qui m’emporta ce jour- là est resté très précis dans ma mémoire. J’avais 10ans … J’étais un bolide qui fonçait à travers l’espace, parmi les étoiles, croisant d’autres bolides, à des vitesses vertigineuses. » Valérie André

Rêve précurseur de l’aventure de l’Air et de l’Espace, auquel sans nul doute a participé et contribue encore aujourd’hui notre Général. L’Héliport d’Issy-les-Moulineaux a été inauguré le 8 mars 2022, « Héliport Valérie André » en présence de ses proches, de personnalités militaires, politiques dont son neveu le Député-Maire André Santini.

« Il est des vies si romanesques qu’elles semblent écrites dans l’encre de l’imagination. Et pourtant, madame le Général, rien n’est fictif dans le destin qui est le vôtre. Le destin d’une femme libre. Une femme qui refuse que son existence lui soit dictée. Qui sait ce qu’elle veut, dans une époque qui considérait que les hommes le savaient mieux qu’elle. Une héroïne, médecin de guerre, pilote d’avions et d’hélicoptères. Un personnage de roman, pour qui chaque chapitre est un combat. » Extrait du discours de Jean-Baptiste Djebbari, Ministre chargé des transports

La petite Valérie est née le 21 avril 1922, à Strasbourg de parents artistes au sein d’une famille nombreuse. Voler et soigner les autres font partie de ses désirs les plus profond.

Son premier contact avec l’aviation a lieu au polygone de Strasbourg, elle trottine rapidement un bouquet de pivoines à la main derrière l’avion qui vient de se poser et d’où descend avec grâce la grande aviatrice Maryse Hilsz. Puis c’est le bac et les premières leçons de pilotage à bord d’un avion Potez… La guerre d’un coup stoppe son apprentissage… S’enchainent les études de médecine, à Clermont- Ferrand, à Paris pour ne pas être arrêtée en tant qu’Alsacienne, Valérie résiste… Une rencontre déterminante celle du professeur Binet, qui lui propose de se spécialiser en médecine de guerre et d’aller rejoindre l’équipe médicale sur place en Indochine. Valérie n’hésite pas et son destin s’incarnera dans la voie militaire !

Le docteur André se retrouve en 1949 à l’hôpital de My-Tho et ensuite à Coste en neurochirurgie. Brevetée parachutiste, elle arrive à convaincre sa hiérarchie de la nécessité d’apprendre à piloter un hélicoptère pour aller chercher les blessés dans les zones inhospitalières. Elle reviendra en France pour passer son brevet de pilote sur « Hiller » à Cormeilles en Vexin et repartira rapidement en l’Indochine.

Le capitaine André fait partie de l’équipe du Colonel Alexis Santini (qui deviendra quelques années plus tard son époux, son grand amour) et du lieutenant Henri Bartier. Ils pouvaient à tour de rôle mener de nombreuses missions « Evasan » à la suite sous le feu des mitraillages et souvent avec l’angoisse d’arriver trop tard pour les blessés qui geignaient dans les paniers d’osier installés de chaque côté des portes de la cabine de pilotage de l’hélicoptère. Tout en pilotant, Valérie André gardait un œil sur eux et pouvait leur parler malgré le bruit assourdissant du rotor.

« Sur les trois pilotes, l’un d’eux est une femme. Un tout petit bout de femme. Et ce petit bout de femme est un grand bonhomme. Elle est à la fois pilote d’hélico et médecin. Elle s’appelle Valérie André… » Général Jean-Paul Salini, pilote de chasse

Elle est nommée par ses frères d’arme « Madame Ventilo », son nom de code à bord de son hélicoptère est « Ventilateur ». Avec son hélicoptère Hiller 360, elle a pu recueillir en brousse des combattants blessés qui n’auraient pas supporté un long brancardage vers un centre hospitalier.

Pour la population et ceux qui lui vouent une reconnaissance sans limite, c’est « la Femme descendue du ciel ».

En avril 1952, première femme à avoir apponté sur la plateforme d’un bâtiment de guerre stationnant en baie d’Along « l’Arromanches ».

Et puis en 1959 c’est la guerre d’Algérie, le Colonel s’engage cette fois à bord d’Alouette et de Sikorsky 365, ses missions de guerre seront toujours accomplies pour sauver des vies.

Villacoublay, le 21 avril 1976 est un jour mémorable pour le Colonel André et le monde va changer. C’est la première fois qu’une femme devient général dans l’armée française. Pour elle, c’est l’aboutissement tout naturel d’une route effectuée avec courage, force et discrétion.

Catherine Maunoury exprime à notre amie Valérie : « Tu n’as jamais frémi ni tremblé. Tu as toujours mesuré et accepté le risque, le danger mais tu écartes naturellement la peur car tu places plus haut encore ta mission, ton devoir de sauver des vies. Coûte que coûte. »

La gentillesse, l’écoute attentive, la jeunesse d’esprit du Général Valérie André sont salvatrices. Je ressens en sa présence, lors de nos rencontres, cette énergie commune et immortelle « celle des Aviateurs ».

Martine Gay