Le Pôle SAFE Cluster et ses partenaires SGDSN, DCI et le cluster danois CENSEC ont organisé, à Avignon, les 7 et 8 novembre 2017, un séminaire sur les drones intitulé « Sommes-nous aujourd’hui capables de nous en protéger ? ». Jules Martin, juriste stagiaire chez Selene-avocats (membre du Conseil pour les Drones Civils), qui est intervenu dans les débats, revient ici sur l’implication réelle des industriels français et étrangers dans la recherche de réponses technologiques qui semblent prendre tout leur sens, en période « post Etat d’urgence ».
Si le début du 20ème siècle a été marqué par les premiers vols d’avions motorisés, le début du 21ème siècle est quant à lui marqué par le développement d’une nouvelle catégorie d’engins : les drones. Ce nouveau palier aéronautique franchi par l’homme est le fruit des plus récents progrès accomplis dans des domaines clés tels que l’informatique, la robotique, l’optronique et la transmission de données. Reste que cet outil, militairement, socialement et, économiquement utile, canalise la critique en raison des usages maladroits et malveillants dont il fait l’objet (surtout s’agissant des drones de loisirs). Les survols de sites sensibles (centres nucléaires, établissement pénitentiaire), les collisions impliquant drone et aéronef, l’usage à des fins terroristes, la captation d’images etc. sont autant d’exemples qui témoignent des risques dont il est porteur.
Sommes-nous aujourd’hui capables de nous en protéger ? C’est dans cette problématique que le séminaire organisé par le Pôle SAFE Cluster et ses partenaires SGDSN, DCI et le cluster danois CENSEC à Avignon, les 7 et 8 novembre 2017 s’est inscrit, témoignant de l’implication réelle des industriels français et étrangers dans la recherche de réponses technologiques qui semblent prendre tout leur sens, en période « post Etat d’urgence ».
S’il existe aujourd’hui des mesures de divers ordres pour combattre la menace drone, plusieurs projets de systèmes anti-drone ont été exposés, théoriquement et pratiquement, par des industriels à l’attention d’entreprises et de consommateurs en demande.
La réglementation. Actuellement, 80% des survols illicites résultent d’un usage inconscient. Aussi, faire prendre conscience aux utilisateurs de drone de la réglementation en vigueur est l’une des priorités du législateur. Ce dernier, notamment par la voix du Conseil sur les Drones Civils, recherche en permanence un équilibre entre les intérêts en présence, afin de ne pas fragiliser une filière créatrice d’emplois. Ainsi, dans le cadre d’un premier palier stratégique de renforcement de la sécurité de l’usage des drones (avant la formation, l’enregistrement/immatriculation et, le signalement électronique et lumineux), le législateur a souhaité permettre la diffusion d’une information claire auprès de tous les utilisateurs de drone. C’est l’objectif
assigné au nouvel article L425-1 du Code de la consommation qui oblige les fabricants, importateurs et vendeurs d’occasion à inclure dans les emballages de leurs produits et de leurs pièces détachées une notice d’information exposant les règles élémentaires à respecter pour utiliser ces appareils en conformité avec la législation et la réglementation applicables. Ce souci du détail a l’avantage d’isoler l’information et de la rendre accessible aux constructeurs amateurs assemblant eux-mêmes leurs drones, pratique qui tend à se développer.
La jurisprudence. Les tribunaux français, conscients de la « menace drone », sont intransigeants vis-à-vis des utilisateurs. En effet, les rares affaires en la matière ont abouti à la confiscation voire, la destruction, des drones méconnaissant la réglementation, les magistrats étant particulièrement sévères s’agissant des vols illicites au-dessus de zones urbaines.
Les premières mesures « counter-drone ». Faire de ces mesures une garantie de sécurité nationale (établissement pénitentiaire) et un outil de compétitivité (palais du festival de cannes) sont deux objectifs qui ont poussé certains établissements à s’équiper. Ainsi, par exemple, Patrick Gomez, chef du service du droit pénitentiaire au Ministère de la Justice, a fait état des différentes mesures de sécurité leur permettant, actuellement, de se protéger de la menace drone. Rappelons en effet qu’en 2017, 13 survols de drones ont été détectés au-dessus de 8 prisons provoquant des troubles de la détention, une atteinte à l’image ainsi que la turbulence des agents.
Reste que si l’ensemble de ces mesures sont les bienvenues, elles deviennent aujourd’hui insuffisantes. En effet, la « menace drone » devient de plus en plus prégnante : la réglementation peut être outrepassée et les techniques susmentionnées sont d’ores et déjà facilement contournables par une technologie en constante évolution. Ainsi, l’adage selon lequel « mieux vaut prévenir que guérir » est partagé tant par les industriels que par un large panel de consommateurs.
La demande des consommateurs concernant les mesures anti-drones est croissante mais n’en est pas moins exigeante. Les consommateurs se sont exprimés sur leurs besoins et, in fine, sur leurs attentes quant aux solutions présentées.
Comme le résume très bien le thème du séminaire, la demande souhaite pouvoir détecter, identifier, classifier et, si nécessaire, neutraliser le drone. A cela s’ajoute les exigences propres à chaque consommateur. En effet, selon le secteur dans lequel il souhaite installer ces dispositifs anti-drone, les exigences varient. Une exigence est toutefois partagée par tous et semble aujourd’hui être le nerf de la guerre : le coût du dispositif. Ainsi, le cahier des charges des industriels est relativement chargé.
D’une part, ils doivent offrir une solution permettant de détecter et d’identifier un drone en approche le plus tôt possible. C’est-à-dire un système capable de géo-localiser le drone (voire le télépilote), d’estimer sa vitesse, sa trajectoire, son poids… En somme, un système permettant de collecter toutes données utiles à l’évaluation de la dangerosité du drone.
D’autre part, une solution permettant de catégoriser et, si nécessaire, de neutraliser le drone. En effet, une fois détecté et identifié, la demande souhaite pouvoir répondre rapidement à la question suivante : est-ce un survol avec une intention malveillante ou un survol simplement maladroit ? Si le survol est maladroit alors la dissuasion sera préférée à la neutralisation et inversement si le survol est malveillant. Cette approche, pragmatique et réaliste, offre un compromis bienvenu entre sécurité et potentiel économique du secteur.
Enfin, sans être exhaustif, peuvent être recensées d’autres exigences exposées par la demande : une solution permanente 24/7; un nombre d’opérateurs et de compétences RH restreints etc.
Le séminaire a été l’occasion pour des industriels français et étrangers de présenter des solutions diverses et variées répondant à ces besoins. Pas moins de 7 solutions ont ainsi été proposées (radar, brouillage de radiofréquences etc.).
De plus, le secteur de l’industrie en a profité pour s’interroger sur les barrières réglementaires auxquelles il devait faire face. En effet, actuellement, il existe une réglementation qui qualifie certains systèmes anti-drone de « matériel de guerre » (système de brouillage de communication par exemple). Cette réglementation doit-elle être pensée à l’aune du phénomène drone ? C’est un point sur lequel les juristes s’interrogent.
Les réponses scientifiques et techniques existent. Pour certains, l’avenir réside dans le « security by design » et pour preuve, les projets d’infrastructures intelligentes commencent à voir le jour.
Désormais, c’est au droit de prendre assez de recul afin d’apporter une solution objet de compromis. En effet, si le droit peut difficilement précéder la technologie et peut presque aussi difficilement anticiper la réalité économique, il se doit toutefois de ne pas être trop en retard sur l’avenir.
Jules Martin
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Excellent article!
Aujourd'hui la (très grande) majorité des drones est importée, et ne suivra pas la réglementation française, réglementation à portée très limitée par ailleurs.
Pour exemple, si je prends les dernières lois anti-drones, les législateurs n'ont pas fait la différence entre les aéromodélistes et les "consommateurs" qui jouent avec un "drone", tout en excluant de leurs restrictions les drones de moins de 800g, afin de ne pas heurter les industriels et marchands de "jouets".
Pourtant ce sont bien les consommateurs de ces jouets qui ont causé l'écrasante majorité des incidents, pas les professionnels du secteur, ni les aéromodélistes.
En revanche, les appareils d'aéromodélisme, eux, dépassent presque tous cette limite des 800g et sont donc impactés de plein fouet par cette réglementation qui en rend l'usage interdit en rase campagne ou montagne, sauf à effectuer des déclarations pénibles auprès de la DGAC, requérant moult papiers administratifs compliqués à obtenir, démarches incompatibles avec la pratique de loisir occasionnel.
Résultat:
on aboutit (une fois de plus) à une réglementation qui tue une activité qui pourtant n'a jamais posé problème en 50 ans et n'a rien à voir avec la préoccupation initiale, tout en laissant le champ libre aux "jouets" à l'origine de la plupart des incidents.
Bel exemple de réglementation qui loupe royalement sa cible.
Avec les salutations du dommage colatéral.