Après les échanges de bons procédés et la construction sous licence des Junkers 52 et du Noratlas, France et Allemagne étaient à égalité à la mi-temps : 1 partout, la balle au centre. Le temps était alors venu pour une véritable coopération… Ce sera le Transall.
Pendant plus de quarante ans, le C-160 Transall a été un miroir de la France, de ses engagements internationaux, militaires et humanitaires. Qu’il se fut agi de transporter des hélicoptères, des sacs de riz, des moutons, des billets de banque et des lingots d’or, des soldats… l’avion était toujours là. Increvable.
Le Transall était apprécié de ses utilisateurs, parce que, comme le résumait un mécanicien, « on pouvait le toucher, le tordre dans tous les sens… Avec l’A400, il faudra enfiler une blouse blanche avant de brancher une valise ».
L’histoire officieuse raconte que le président de Gaulle, n’ayant pas réussi à vendre le Mirage III à l’Allemagne, souhaitait un solide projet de coopération pour réaffirmer les sacro-saints liens franco-allemands. Les transporteurs levèrent le doigt ou furent désignés volontaires. Peu importe : après le Noratlas, un nouvel avion tactique moderne était le bienvenu. Et vente ou pas des Mirage III à l’Allemagne, le principe d’une coopération internationale s’imposa.
Les seuls besoins français, une centaine d’avions tout au plus, ne justifiaient pas d’ailleurs le lancement d’un programme purement national. En mai 1958, des spécifications très succinctes furent adoptées par Paris et Bonn pour un futur avion cargo d’assaut. Une douzaine d’années seulement après la fin de la guerre, la création d’un nouvel avion militaire souleva un débat en Allemagne et l’engagement financier fut difficile à obtenir Outre Rhin.
Pour faciliter les négociations qui s’engagèrent, la direction de Nord Aviation (qui représentait la partie française) joua alors une carte majeure : l’industrie allemande serait non pas sous-traitante, mais véritablement partenaire du projet et le développement du nouvel avion se ferait à parts égales entre Français et Allemands.
C’était un magnifique cadeau fait à l’industrie aéronautique allemande qui ne demandait qu’à renaître de ses cendres. En décembre 1958, le projet de coopération fut finalement entériné. On pu alors entrer dans le dur…
La France, qui regardait du coté de l’Afrique, souhaite mettre l’accent sur l’allonge, comme ce sera fait quarante ans plus tard avec l’A400M. Les Allemands qui ne songeaient qu’au théâtre d’opération européen, poussaient pour des capacités STOL (décollages et atterrissages courts). Le Transall fut donc un compromis, mais pour une fois un compromis réussi.
La rampe d’accès fut jugée prioritaire pour le chargement et le déchargement de charges lourdes. Après les C123 et C130 américains, tout le monde s’accordait sur cette formule. Comparée à celle du Noratlas, la soute était une véritable cathédrale et le train d’atterrissage était taillé pour les terrains les plus improbables.
Réussite technique, l’avion fut également le symbole d’une réussite humaine. Quinze ans seulement après la fin de la guerre, la coopération se fit sans heurt majeur et dans une ambiance jugée très amicale par les témoins de l’époque, malgré quelques grincements de dents ici ou là….
Grande première, des ingénieurs français allèrent travailler en Allemagne et des Allemands s’installèrent à Châtillon. Pratiquement tous les vols d’essais se firent avec des équipages mixtes franco-allemands, les dialogues se faisant la plupart du temps en anglais.
Le premier prototype (V1) décolla pour la première fois le 25 février 1963 de Melun Villaroche. Il fut suivi le 25 mai de la même année à Lemwerder, près de Brème, par le V2. Le V3 décolla à son tour de Hambourg le 19 février 1964. En septembre de la même année, la France et l’Allemagne signèrent un accord officiel portant sur l’achat commun de 160 Transall (110 pour l’Allemagne et 50 pour la France).
La France avait envisagé initialement de commander une centaine d’avions, notamment pour assurer les liaisons avec l’Afrique. Mais en 1963, ce besoin fut divisé par deux : la liaison avec l’Algérie, devenue indépendante, n’avait plus de raison d’être et les contraintes financières eurent raison des rêves de grandeur du transport aérien militaire. En 1967, une fois le partage de l’activité industrielle gravé dans le marbre, l’Allemagne tenta à son tour de réduire sa commande à 60 unités. Mais la difficulté d’intégrer cette nouvelle donne dans le plan de charge industriel fit reculer le gouvernement de Bonn. Celui-ci réussit finalement à revendre 20 de ses avions à la Turquie…
Le premier appareil de série sortit de chaîne en Allemagne en mai 1967, suivi six mois plus tard par le premier appareil assemblé en France par Nord Aviation. Le 26 avril 1968, l’armée de l’Air et la Luftwaffe prirent officiellement livraison de leurs premiers Transall lors d’une cérémonie binationale.
L’armée de l’Air recevra 53 C-160F (3 présérie et 50 avions de série) jusqu’en mars 1973. L’Allemagne prit livraison dans les mêmes temps de 113 C-160D, dont trois de présérie et vingt qui furent donc très rapidement rétrocédés à la Turquie.
Dans le même temps, neuf exemplaires (C-160Z, pour « Zuid Afrika ») furent vendus à l’Afrique du sud. La fabrication de cette première version se termina donc après seulement 169 avions de série, ce qui pouvait être considéré comme un échec commercial pour un avion de cette valeur. Le Lockheed Hercules avait déjà raflé la mise, particulièrement auprès des pays de l’Otan.
Mais l’histoire n’était pas finie : en 1976, Aerospatiale (conglomérat dans lequel s’était fondu Nord Aviation) annonça la relance de la fabrication du Transall pour satisfaire les besoins de l’armée de l’Air.
Celle-ci souhaitait acquérir 25 avions supplémentaires dotés d’une capacité de ravitaillement en vol. Le coût de cette relance s’annonçait exorbitant et d’un point de vue opérationnel, sans doute eut-il été plus judicieux d’acheter « sur étagère » aux Américains deux escadrons de C-130 « Hercules ». C’est d’ailleurs ce que souhaitait l’état major de l’armée de l’Air. Mais le denier mot fut politique et la solution nationale l’emporta.
Autre étape majeure dans la vie de l’avion, la rénovation de 70 avions (49 avions de première série et 21 de nouvelle génération) fut décidée en 1989. L’idée d’une remotorisation, un moment envisagée, fut finalement abandonnée : la rénovation porta essentiellement sur l’avionique, les communications et le système de navigation. L’appareil s’alourdit mais ne gagna pas de muscles et la relative sous motorisation devint un peu plus aiguë encore…
Depuis leur mise en service, les Transall français n’ont cessé de barouder sous toutes les latitudes et longitudes. Depuis l’Australie jusqu’au Pérou, en passant par l’Amérique du Nord, la Russie, l’Asie centrale et la plupart des pays africains, l’armée de l’Air a écrit à bord de l’avion quelques uns des pages les plus épiques de son histoire moderne.
Avec le Transall, les équipages du Cotam (Commandement du Transport Aérien Militaire) puis de la FAP (Force Aérienne de Projection) ont labouré des millions de kilomètres de nuages et brassé des océans de poussière. La fin du Transall est maintenant attendue à l’horizon 2023 côté français. Son remplacement par une flotte d’A400M et de C-130 mettra un terme à une saga exceptionnelle qui reste à écrire !
Frédéric Lert
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bonjour,
A mon avis vous confondez charge utile et charge offerte.
(charge utile = limitation du jour- masse a vide)
(charge offerte= charge utile-carburant)
Le carburant est inclus dans la charge utile.
La charge marchande est au plus égale à la charge offerte.