La 33ème escadre de surveillance, de reconnaissance et d’attaque (33ème ESRA) a été officiellement activée le 5 septembre 2019 sur la base aérienne 709 de Cognac. Les Mirage IIIR et F1CR laissent donc la place au drone MQ-9 Reaper dans l’Histoire de la grande 33. C’est la vie…
L’histoire étant un éternel recommencement, l’Armée de l’air poursuit son grand mouvement de recréation des escadres. La dernière en date a donc été la prestigieuse 33ème escadre, historiquement associé aux missions de reconnaissance. Elle avait été dissoute en 1993, les escadrons dont elle était alors constituée continuant leur vie de manière indépendante.
La 33ème escadre recréée réactivée jeudi dernier sur la base de Cognac est toutefois sensiblement différente de son ancêtre, puisqu’on parle désormais d’escadre de surveillance, de reconnaissance et d’attaque. Trois mots pour trois missions différentes et complémentaires, qui résument parfaitement les capacités du drone MQ-9 Reaper. Pour ce qui est de l’attaque, une première capacité de bombardement est attendue en fin d’année pour les appareils français.
La « 33 » est pour l’heure composée de seulement deux escadrons : l’Escadron de Drones (ED) 1/33 Belfort et l’Escadron de Transformation Opérationnelle Drone (ETOD) 3/33 Moselle, chargé de la formation initiale des équipages. Mais la situation va rapidement évoluer, avec la création l’an prochain d’un escadron de soutien technique aéronautique (ESTA) puis celle d’un deuxième escadron de drones, le futur 2/33 Savoie qui reprendra les traditions de la dernière unité utilisatrice des Mirage F1CR. Enfin, il est prévu que la 33ème ESRA intègre en 2023 les ALSR (Avions légers de surveillance et de reconnaissance) qui vont être dans un premier temps basés à Evreux. La loi de programmation militaire prévoit huit de ces appareils (des Beechcraft King Air 350) dont l’équipage à quatre sera similaire à celui des drones Reaper.
Le cadre administratif est donc en place et les aéronefs sont également à pied d’œuvre : trois sont stationnés à Niamey, deux à Cognac et la France recevra trois appareils supplémentaires (au standard Block 5) en fin d’année. Reste la question de la « manœuvre RH » (ressources humaines), c’est à dire du personnel. La formation des équipages est un chantier essentiel qui appartient aujourd’hui à l’ETOD 3/33 Moselle nouvellement créé.
« La mission de l’escadron est la formation initiale des quatre membres d’équipage (pilote, opérateur capteur, coordinateur tactique et opérateur image) » explique le Lcl S. qui commande la nouvelle unité. « Une des difficultés tient à la grande variété des parcours et des profils des spécialistes rejoignant l’escadre. Il faut donc tenir compte des expériences passées de chacun, pour adapter l’enseignement à chacun et obtenir en sortie des officiers et des sous-officiers avec un même niveau de compétence et un socle de connaissance solides. Nos stagiaires recevront également un premier vernis tactique, avant de rejoindre l’escadron de drones Belfort pour y poursuivre leur progression et acquérir leur qualification opérationnelle, sur le même modèle que les escadrons de chasse ».
L’ETOD s’est inspiré de ce qui se pratique dans les formations américaines pour définir les programmes français. Contrainte RH oblige, la filière américaine n’est d’ailleurs pas totalement abandonnée puisque une partie des pilotes et opérateurs capteurs français continueront à être formés Outre Atlantique, en parallèle du cursus français.
Très attendue, la mise en service du simulateur de mission en début d’année à Cognac était une condition sine qua non pour rendre l’ETOD pleinement opérationnel. Avec ce simulateur moderne, qui reproduit le cockpit de pilotage et le cockpit « renseignement », les équipages peuvent aller « dans les coins du domaine de vol » en simulant les pannes moteurs et en travaillant la gestion des liaisons satellites sans prendre de risque avec les appareils disponibles. L’autre avantage est de pouvoir créer des environnements tactiques aux difficultés croissantes et d’aguerrir ainsi les équipages.
Si les outils sont donc en place, l’armée de l’air continue sans doute de buter sur la ressource en instructeurs. On ne le redira jamais assez, le drone est un appareil piloté à distance dont la très grande autonomie se traduit par une consommation élevée d’équipages qui doivent se relayer au cours de missions marathons. Il faut donc produire de la main d’œuvre, mais il faut en même temps nourrir l’ogre Barkhane dans le Sahel ce qui oblige à envoyer des instructeurs en opex à Niamey. Autre donnée à prendre en compte, celle des mutations et des changements d’affectation, comme dans tous les autres escadrons de l’Armée de l’air. Malgré la richesse des missions, le plaisir de « voler » sur Reaper échappe encore à certains pilotes de combat mutés au sein de l’ETOD. Et comment pourrait-il en aller autrement ?
Pour faire passer la pilule, l’Armée de l’air propose aux navigants des passages de trois années dans l’unité, à l’instar de ce qui se pratique avec les autres moniteurs issus des forces et affectés en école. Pour atteindre les objectifs très ambitieux en termes d’équipages (ils sont 20 aujourd’hui et l’objectif est d’en avoir 30 en 2021 et 80 en 2030, quand l’effectif de l’escadre sera alors de 1000 personnes !), la mise en place d’une filière robuste de recrutement et de formation sera essentielle. C’est bien ce à quoi s’emploie chaque jour l’ETOD dans une course permanente contre la montre.
Frédéric Lert
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View Comments
"le plaisir de « voler » sur Reaper échappe encore à certains pilotes de combat"
et ce n'est pas près de changer. Faites-moi ça, et je démissionne.
Pauvres gars, qui vont passer les prochaines années à expliquer laborieusement à tout le monde, y compris leurs familles, que "en fait c'est pareil la mission avant tout" - je leur souhaite bien du courage.
Prochaine étape : y mettre des basiers.
Seconde étape : faire passer tout ça à l'Armée de Terre (il y a déjà un régiment à Chaumont, avec des drones légèrement plus petits) lors des salons aéronautiques, on a pu voir des industriels déclinant leurs drones en trois tailles : petit, moyen, et grand - à charge pour les pays acheteurs de faire leur répartition envers leurs différentes armées (oui, car la Marine aussi va en avoir)
En 1964, on nous avait promis juré que le temps des hélices était terminé et des élèves-pilotes physiquement inaptes au supersoniques avaient été éliminés à ce seul motif médical. Alors, parlez-nous un peu des hélices… à brasser les courants d'air de la "défense d'y voir".