Les retards du KC-46 placent l’US Air Force dans une situation intenable : ses besoins gargantuesques entrent en collision avec le vieillissement de sa flotte actuelle de KC-135. L’armée américaine pourrait donc faire appel à des prestataires privés. Et si Airbus avait l’opportunité de prendre sa revanche ?
Les Etats-Unis disposent actuellement d’environ 450 ravitailleurs, dont près de 400 KC-135 et une cinquantaine de KC-10 . C’est trente fois ce que peut aligner la France, mais le chiffre est tout juste suffisant pour faire face à tous les engagements. D’autant que l’Air Mobility Command (AMC), en charge de la flotte, envisage de retirer du service très rapidement 13 KC135 et 16 KC10 pour des raisons budgétaires.
Des appareils qui auraient du être remplacés par des Boeing KC-46 Pegasus, dont 179 exemplaires ont été commandés en 2011. Or ces avions ne sont pas au rendez-vous, et pour deux raisons : la première est très souvent citée, il s’agit tout simplement de l’incapacité de Boeing à livrer un avion opérationnel. La deuxième raison, parfois oubliée, tient cette fois à l’incapacité de l’Air Force à diriger ce programme d’équipement.
Pendant ce temps, le tempo d’opération est toujours élevé et l’usage du ravitaillement en vol quasi systématique, l’interventionnisme du Pentagone étant inversement proportionnel à l’autonomie des avions tactiques. Tout ceci fait que les vénérables KC-135, qui datent de la présidence Eisenhower, n’en peuvent plus.
Pour faire la jonction entre des avions qu’il va falloir retirer du service et des KC-46 qui se font attendre, l’AMC envisage donc de louer les services de prestataires civils. Ces appareils seraient utilisables pour les missions d’entrainement, les convoyages et les exercices. Les appareils de l’USAF garderaient la main sur les opérations de combat. C’est d’ailleurs une chose qui se pratique depuis une vingtaine d’années avec les appareils de la société Omega Aerial Refueling Services, mais à une échelle encore très limitée.
Un premier appel d’offre pourrait être émis dès le mois de juin 2020, avec une première capacité opérationnelle attendue dans le courant de l’année suivante. Le besoin aujourd’hui exprimé serait de 5.000 heures annuelles, soit un peu plus de 1.100 sorties d’entrainement.
Mais à terme, l’USAF évoque la possibilité de contractualiser 30.000 heures de vol par an : 21.000 heures pour les entrainements et les exercices, 2.100 heures pour les vols de test et d’évaluation des programmes en développement, 2.190 heures pour le soutien à l’exportation et enfin 900 heures pour appuyer les chasseurs en transit d’une base à l’autre.
Les soumissionnaires devront présenter des avions disposant de la double capacité : perche fixe pour ravitailler les avions de l’USAF et tuyau souple et panier pour travailler avec ceux des Marines et de la Navy. L’USAF envisage également à ce stade une première capacité opérationnelle avec la capacité de ravitailler les avions les plus nombreux de l’arsenal américain : F-15, F-16, F/A-18 (avec le panier), bombardiers B-1 et B-52.
Dans un deuxième temps, les appareils seraient utilisés en soutien des F-22, F-35 et A-10. Enfin une pleine capacité opérationnelle verrait les avions ravitailler des appareils plus exotiques tels que les C-130, P-8 de la Navy, C-17, RC-135, E-3 et E-8.
Le plan est beau mais il va se heurter à la disponibilité sur le marché des ravitailleurs et de leurs équipages qualifiés. Verra-t-on des entreprises remettre en vol des KC-135, transformer des Boeing 707, ou bien investir dans des avions neufs ? C’est ici que l’on peut se rappeler qu’Airbus fait le siège du Pentagone depuis plusieurs années déjà avec son A330 MRTT.
Le dernier échec en date face au KC-46 avait montré que sans bon travail de lobbying et sans un solide partenariat avec un industriel local, l’avionneur européen avait peu de chances de briser le monopole de Boeing. Fin 2018, Airbus a donc annoncé une alliance spectaculaire avec Lockheed Martin pour promouvoir l’A330 MRTT sur le marché américain.
La situation actuelle ouvre une fenêtre de tir intéressante pour le duo. Le communiqué de presse qui avait salué le rapprochement entre Airbus et Lockheed Martin l’avait d’ailleurs bien précisé à l’époque : « la coopération des deux entreprises (…) doit permettre d’adresser (sic) un large éventail d’opportunités allant de besoins court terme en matière de ravitaillement en vol par exemple sous forme d’une offre de services payants, à la conceptualisation du ravitailleur du futur ». La porte étant maintenant entrouverte, on va voir si les Européens peuvent y glisser le pied, ou même la jambe.
Frédéric Lert
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