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Défense

Garuda VII (1/3): Les Rafale français en action dans le ciel indien

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Frédéric Lert

Depuis 2003, l’exercice franco-indien Garuda est le reflet d’une expansion majeure de la coopération militaire entre la France et l’Inde. La septième édition de l’exercice, qui s’est tenue du 26 octobre au 12 novembre 2022 sur la base aérienne de Jodhpur, s’est traduite par l’envoi par la France de cinq Rafale et d’un Airbus A330MRTT ravitailleur. Aerobuzz.fr a suivi l’exercice en Inde.

Trois éditions précédentes avaient été organisées en Inde, respectivement en 2003, 2006 et 2014 sur les bases de Gwalior, Kalaikunda and Jodhpur. En 2005, et plus près de nous en 2019, la force aérienne indienne était venue en France avec des Sukhoi 30 MKI. Au cours du dernier Garuda VI, les Sukkhoi du Squadron 24 « Hunting Hawks » s’étaient installés à Mont-de-Marsan où ils avaient fait forte impression.

Ces avions occupent une place de premier plan dans le dispositif de défense aérienne de l’Inde qui s’oppose au Pakistan sur son flanc ouest et fait face à la Chine sur sa frontière nord. Garuda VI avait été l’occasion de nouer des liens fructueux entre la partie indienne et le glorieux régiment de chasse 2/30 Normandie-Niemen qui les accueillait. C’est ce même Normandie-Niemen qui était de nouveau à la manœuvre début novembre 2022 pour la nouvelle édition de l’exercice.

Le Rafale a la réputation de se contenter d’une empreinte logistique minimale, soit une dizaine de personnes par avion en moyenne permettant d’assurer deux vols par jour, et même trois en cas de vol de nuit. © Frédéric Lert/ Aerobuzz.fr

A une heure de vol dans l’ouest de New Dehli, Jodhpur est une ville moyenne à l’échelle indienne (un peu plus d’un million d’habitants) qui est également la capitale du Rajasthan. La base aérienne s’ouvre sur la ville avec une entrée monumentale décorée d’un MiG 21 installé en pot de fleurs. A l’intérieur, des installations sobres mais bien entretenues, qui contrastent avec le reste de la ville. Des dizaines de petites mains balaient inlassablement la poussière et passent la serpillère.

Le détachement français, 130 personnes au total, dont une douzaine de pilotes de Rafale, s’est installé à l’ouest de la piste, dans un bâtiment partagé avec un escadron d’hélicoptère de combat. De manière classique, la mise en place a fait l’objet d’une soigneuse manoeuvre logistique ayant permis d’acheminer à bon port cinq Rafale, le personnel technique et navigant et le matériel de remise en oeuvre des avions.

Les Indiens fournissaient une partie du matériel de piste, et notamment ces étonnants petits véhicules porteurs de groupe de puissance. © Frédéric Lert/ Aerobuzz.fr

« Nous n’avons pas eu à emmener de matériel lourd, C’est l’avantage du Rafale qui sait voyager léger… » explique le capitaine Guillaume qui dirige le détachement de la mécanique : une cinquantaine d’hommes et de femmes de différentes spécialités en provenance de l’ESTA (Escadron de Soutien Technique Aéronautique) 15/30 Chalosse de Mont-de-Marsan. « Les différentes spécialités sont représentées, avec des pistards, des spécialistes avionique et vecteur, des armuriers. Le détachement comptait également un mécanicien servitude, un préparateur de mission et un spécialiste structure venu avec son matériel et capable le cas échéant de faire des retouches sur les matériaux composites. De quoi permettre au moins à un avion de rentrer en France par ses propres moyens ». La moyenne de dix mécaniciens par avion est classique et permet d’assurer deux tours par jour, éventuellement complétés par des vols de nuit.

Les Rafale ont fait preuve d’une disponibilité sans faille pendant les deux semaines d’exercice. © Frédéric Lert/ Aerobuzz.fr

Tout a commencé avec un échelon précurseur qui s’est posée dans le pays le 27 octobre, amené à pied d’oeuvre par un A400M. Quelques heures plus tard arrivaient les cinq Rafale F3R et l’essentiel du détachement. « Les avions sont partis de Mont-de-Marsan avec une moyenne de 70 à 80 heures de potentiel, ce qui nous mettait à l’abri de tâches de maintenance préventives qu’il aurait fallu réaliser en Inde note le capitaine de l’ESTA. Nos interventions se limiteront donc aux dépannages ». A la fin de l’exercice, le bilan des heures de vol montrera que tous les appareils possédaient encore au minimum une quarantaine d’heures de potentiel, largement assez pour regagner la France. 

Outre les mécaniciens, les cinq avions ont nécessité l’envoi d’un lot technique d’environ 30 tonnes de fret et 180 m3 répartis dans deux avions : un A400M et un Boeing 737-800 cargo affrété auprès de CAMEX Airline, en Georgie.

Le Rajasthan est connu pour ses innombrables temples. On est loin de la forêt landaise… © Frédéric Lert/ Aerobuzz.fr

« L’A400M a été utilisé pour les équipements volumineux poursuit le capitaine Guillaume : potence pour manipuler le siège éjectable, groupe hydraulique, moteur de rechange sur son chariot de transport etc. Le Boeing 737 transportait quant à lui principalement les pièces de rechange et des petits outillages : un radar, une charnière permettant d’ouvrir et manipuler la pointe avant, des vérins pour réaliser des tests hydrauliques et des roues complètes permettant de dépanner deux avions, soit quatre roues pour le train avant et quatre autres pour le train principal. Il était d’ailleurs plus simple d’emporter des roues complètes plutôt que des pneus, car dans ce dernier cas il aurait également fallu se charger d’une presse, ce qui nous aurait encombré inutilement ».  Il est intéressant de noter que figuraient également dans les bagages de la mécanique des pylônes de bout d’aile, même si aucun missile n’était du voyage. Ces pylônes portent en effet les feux de navigation du Rafale et leur endommagement pourrait signifier l’immobilisation de l’avion.

Autre acteur essentiel des déploiements lointains, un Airbus A330MRTT de l’escadron de ravitaillement en vol et de transport stratégique (ERVTS) 1/31 Bretagne a également été de la partie dès le premier jour de l’exercice en « tirant » les Rafale depuis la France. Une première étape a conduit les appareils jusqu’à la base aérienne 104 d’Al Dhafra dans les Emirats Arabes Unis. Après une nuit de repos, tous sont repartis en direction de Jodhpur.

Avec son allonge et sa capacité d’emport, l’Airbus A330 MRTT est ce que l’on appelle un « game changer » en bon français. Il porte sur ses épaules les ambitions de la France dans la région Indo-Pacifique. © Frédéric Lert/ Aerobuzz.fr

Une fois arrivé, l’Airbus a passé une nuit sur place avant de revenir aux EAU d’où il est ensuite reparti pour convoyer cette fois un Rafale vers le salon aéronautique de Djakarta (Indonésie). Une fois le salon terminé, l’Airbus est rentré en France en déposant au passage le Rafale aux EAU.

Dernier mouvement dans ce jeu complexe d’aller et venues, un autre Airbus est ensuite revenu à Jodhpur pour participer à la dernière semaine de l’exercice et se rendre disponible pour le convoyage retour des chasseurs vers la France. Partout où il passe, l’A330MRTT impressionne par ses dimensions et sa flexibilité opérationnelle. « Nous pouvons ravitailler jusqu’au niveau 350, avec une plage de vitesse allant de 260 à 300 noeuds » explique un pilote. « A la demande des Indiens, nous avons travaillé à 18.000 pieds et 270 noeuds. Nous sommes également très flexibles sur les débits exigés par les différents types de chasseurs et qui peuvent varier du simple au triple. Un Eurofighter ne peut recevoir par exemple que 400 kg par minute. Un Rafale, c’est près de trois fois plus, avec 1,1 tonne par minute. Les Sukhoi 30, que nous avons ravitaillés dans le cadre de l’exercice, peuvent quant à eux recevoir 800kg par minute ».

Alors comment les Rafale ont-ils travaillé en Inde ? C’est ce que nous verrons demain dans la deuxième partie de ce reportage.

Frédéric Lert

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Frédéric Lert

Journaliste et photographe, Frédéric Lert est spécialisé dans les questions aéronautiques et de défense. Il a signé une trentaine de livres sous son nom ou en collaboration. Il a rejoint Aerobuzz en juin 2011. Au sein de la rédaction, Frédéric Lert est le spécialiste Défense et voilures tournantes.

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  • Le Rafale "voyage léger", mais il a tout de même fallu faire appel à un transporteur civil.
    Si l'Armé de l'Air a fait état du déplacement de l'A400M ainsi que de l'A330MRTT, son service d'information a été plus discret concernant le 737 géorgien.

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