Le nouveau porte-avions chinois, baptisé Fujian, a été mis à l’eau le 17 juin 2022 à Shangai. Avec ce navire de plus de 80.000 tonnes, les Chinois font désormais jeu égal avec les productions américaines.
La Chine avance vite, très vite. En moins de 25 ans, en partant de zéro, elle est passée d’un porte-aéronefs d’occasion acquis auprès de l’Ukraine à un porte-avions « géant », comparable sur de nombreux points avec ce que les Américains produisent de mieux aujourd’hui. Elle a survolé les étapes avec la détermination qui la caractérise et la facilité de celui qui avance sur un chemin déjà bien balisé.
En 1998, Pékin a acheté le Varyag, un navire de 53.000 tonnes. Le Varyag, depuis rebaptisé Liaoning, est alors incomplet, il a des problèmes de fiabilité, mais qu’importe : après une dizaine d’années d’efforts, le navire entre en service dans la marine chinoise qui se frotte grâce à lui aux joies et aux mystères de l’aviation embarquée.
Deuxième étape en 2019 avec la mise en service du Shandong, copie du premier mais cette fois made in China. Le navire est également un « STOBAR « : short take off but arrested recovery. En clair, les avions sont conventionnels et ils décollent par leurs propres moyens, sans catapulte, mais avec le bénéficie d’un tremplin en bout de pont. Le retour se fait avec l’utilisation d’une crosse d’appontage et de brins d’arrêts, comme sur un porte-avions « classique ». Du Shandong, les Chinois sont donc maintenant passés au Fujian, avec pont plat, catapultes, piste oblique et brins d’arrêts, équivalent de la nouvelle génération de porte-avions américains. Un grand bond en avant qui leur permet de faire l’économie de plusieurs décennies de développement.
Tout n’a pourtant pas été simple pour les Chinois qui envisagèrent par exemple dans un premier temps des catapultes et brins d’arrêt de technologie classique. Ils firent finalement le choix de suivre les Américains sur la technologie des catapultes électromagnétiques (EMALS). Ont-ils sur ce point laissé l’US Navy défricher le terrain pour ensuite s’engouffrer dans la brèche ? Ont ils su profiter d’une manière ou d’une autre des technologies développées Outre Atlantique ? Le fait est que le catapultage électromagnétique apporte une flexibilité considérable en permettant d’ajuster précisément la puissance de la catapulte à la masse de l’aéronef, du plus léger au plus lourd. Mais la technique a été complexe à développer et sa sophistication excessive est toujours l’objet de critiques.
Etonnamment, la Chine n’a pas fait le choix d’une propulsion nucléaire pour le Fujian. Ils maitrisent pourtant le mariage de l’atome et du navire avec une flotte de sous marins nucléaires. Pour assouvir les besoins en puissance électrique du Fujian, elle a toutefois développé un système hybride dont la mise au point aurait été la cause de deux ou trois ans de retard. Le prochain porte-avions chinois, dont la conception a déjà commencé, devrait en revanche être à propulsion nucléaire.
La mise à l’eau du 17 juin 2022 n’est qu’une première étape pour le Fujian. Plusieurs années vont maintenant s’écouler pour la mise au point des équipements, leur intégration dans le navire et surtout la constitution d’un groupe aérien embarqué. Les Liaoning et Shandong embarquent des chasseurs Shenyang J-15, très librement inspiré du Sukhoi 33 russe. Ces appareils seront toujours embarqués sur le nouveau porte-avions, mais avec des modifications les rendant compatibles avec l’emploi de catapultes. Ils seront complétés par des FC-31/J-35, clone chinois (en mode biréacteur) du F-35.
Les Chinois terminent également la mise au point du KJ-600 équivalent local de l’avion radar Hawkeye américain. Quand tout ceci sera au point, la Chine aura donc une copie du Carrier Air Wing américain à sa disposition. Il leur restera à acquérir un savoir-faire équivalent… Petite fierté française, on verra même sur le pont du navire chinois des Z-9 et Z-8, copies des Dauphin et Super Frelon conçus à Marignane. La classe…
Reste la question à 100 milliards de Yuan : que va faire la Chine avec son nouveau navire ? Pékin n’a pas (encore) la prétention de faire flotter son pavillon en Atlantique. Ses ambitions sont par contre parfaitement identifiées en Mer de Chine (la mal nommée) et même jusque dans l’Océan indien où passent ses lignes d’approvisionnement en provenance de l’Afrique et du Moyen Orient. Il ne serait donc pas étonnant de voir le Fujian jeter l’ancre à Djibouti, les installations de la base navale chinoise dans le territoire étant dimensionnées pour le recevoir. Et puis qui sait, peut-être le Fujian franchira-t-il un jour le canal de Suez pour rendre une visite de courtoisie à Marseille ou Alger ?…
Frédéric Lert
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