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Défense

La deuxième vie américaine du Mirage F1 se prépare à Châteaudun

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Frédéric Lert

La société américaine ATAC rachète d’un coup 63 anciens Mirage F1 de l’armée de l’Air pour en faire des plastrons, capables d’entrainer les chasseurs les plus modernes de l’US Air Force. A Châteaudun, base de stockage des avions, c’est le branle-bas de combat pour démonter les Mirage et les faire partir en camion vers la Belgique, où certains seront révisés avant leur départ vers les Etats-Unis. Reportage…

Malgré les retards apportés par la valse des ministres de la défense cet été (passage de Jean-Yves Le Drian à Sylvie Goulard puis à Florence Parly), les négociations entre la société ATAC et la France (armée de l’Air, ministère des Armées et DGA), sont allées très vite. « Nous avons commencé les discussions en mars, l’accord a été signé le 7 août dernier et fin décembre tous les Mirage F1 auront quitté Châteaudun » résume Pierre Duval qui représente ATAC en France dans le cadre de ce contrat. « La haute hiérarchie de l’armée de l’Air a beaucoup poussé pour que l’affaire se fasse et l’état français a par ailleurs fait preuve d’une rapidité d’action qui a surpris tout le monde, notamment aux Etats-Unis… »

63 Mirage F1 et 157 moteurs Atar 9K50

ATAC se porte donc acquéreur de 63 avions, 157 moteurs Atar 9K50 et plus de 6 millions d’articles représentant 10.000m3 de pièces diverses, outillages et autres bancs test (dont par exemple 84 radars Cyrano IV, 72 réservoirs largables de 1200 et 2200 litres). Bien entendu, tous les matériels achetés ne sont pas bons de vol ou en état de marche.

L’achat de 63 Mirage F1 par la société ATAC donne un supplément de vie d’une dizaine d’années au moins au chasseur de Dassault. L’avion sera donc encore en service soixante ans après son premier vol… © Frédéric Lert / Aerobuzz.fr

Pour ce qui concerne les avions, 32 sont au niveau RDS1 et 31 au RDS2. L’armée de l’air distingue trois niveaux de RDS (retrait de service) : le RDS1 vaut pour des avions pouvant rapidement reprendre les vols, les RDS2 sont cannibalisables ou peuvent éventuellement être remis en vol au terme d’un chantier et les RDS3 ne sont bons que pour la ferraille…

Des Mirage F1 à reconstruire

On trouve parmi les 32 RDS1 six biplaces F1B, 16 Mirage F1CT et 10 Mirage F1CR. L’objectif d’ATAC étant de disposer d’une quarantaine d’avions opérationnels, il faudra donc également reconstruire huit avions aujourd’hui estampillés RDS2. Quant aux RDS2 restant, une fois débarrassés de toutes les pièces pouvant être utiles au reste de la flotte, ils seront détruits en Europe et ne verront jamais le nouveau monde…

Un Mirage F1CT dépourvu de sa pointe avant et de son radar. La question du radar reste pour l’instant sans réponse : ATAC devrait lancer un appel d’offre pour équiper ses Mirage d’un équipement de nouvelle génération, pourquoi pas à antenne active. © Frédéric Lert / Aerobuzz.fr

Jusqu’à la fin novembre, Châteaudun est donc l’épicentre de ce travail de déménagement : les avions quittent leurs hangars de stockage, passent par le GERSA (Groupement d’Entretien Réparation et Stockage Aéronefs) où ils sont démilitarisés puis ils sont transférés au hangar où travaille l’équipe de démontage de la Sofema. Une douzaine de mécaniciens y travaillent à la chaine pour démonter les voilures, dérives, empennages et réacteurs, et préparer le tout au convoyage routier vers la Belgique.

Démontage à la chaine

A ce jour, une quarantaine d’avions ont déjà été préparés, dont l’ensemble des RDS1. « Deux fois par semaine, nous sortons deux fuselages préparés et nous installons sur les remorques explique Franck Larue, le représentant local de SOFEMA qui dirige l’équipe de démontage. Pour quatre avions, nous avons également une cinquième remorque qui emporte les voilures, les profondeurs et les dérives ».

Le démontage d’un avion de combat est un mécano qui ne requiert finalement que très peu de main d’oeuvre. Les mécaniciens travaillent par équipes de trois sur chaque avion. © Frédéric Lert / Aerobuzz.fr

Les avions sont envoyés à la SABCA qui a, soit dit en passant, l’expérience de la modernisation des Mirage F1C marocains… L’entreprise belge est chargée de la révision initiale des 32 premiers avions. Les suivants seront révisés directement aux Etats-Unis, ATAC souhaitant mettre les mains dans le cambouis pour acquérir son propre savoir-faire technique.

Transfert de compétences

C’est à ce jour une des rares certitudes que l’on peut avoir sur le programme. Car de nombreuses questions, et des plus passionnantes, restent à ce jour en suspens… Qui va former les mécaniciens américains ? La société sud africaine Paramount, qui a une bonne expérience de l’avion, est bien placée pour former les « primo formateurs ». Mais ensuite ?

ATAC achète pas moins de 157 réacteurs ATAR 9K50 avec les avions. Tous ne seront pas avionnés… © Frédéric Lert / Aerobuzz.fr

Autre question essentielle, quelle avionique sera donnée aux avions ? Une chose semble certaine : les appareils recevront une suite (radio, GPS, transpondeur, TCAS…) issue du commerce, disponible sur étagère et bon marché. Mais ATAC souhaite également équiper les Mirage d’un radar moderne et très performant qui pourrait être à balayage électronique et antenne active (AESA).

Remise à niveau

Les difficultés d’intégration d’un tel radar dans la cellule et les systèmes du Mirage risque toutefois d’en faire un projet plus long et plus coûteux que ne le souhaite ATAC. Plusieurs industriels américains, israéliens ou européens sont potentiellement sur les rangs. Mais avant que ces futurs radars soient disponibles, il faudra faire avec les Cyrano IV actuels. Leur remise en route demandera sans doute aussi l’intervention d’un industriel.

Les Mirage F1CR ont été les derniers avions retirés du service en France, en juin 2014, deux ans après les Mirage F1CT. ATAC fait l’acquisition non seulement d’un immense stock de pièces détachées, mais aussi d’avions très bien entretenus… © Frédéric Lert / Aerobuzz.fr

Idem pour les moteurs, dont une trentaine sur les 157 sont uniquement bons pour la ferraille. Mais quid des autres ? Qui se chargera de leur remise en route ? Ces questions, et quelques dizaines d’autres, occupent les jours et les nuits de Pierre Duval et de ses interlocuteurs. Avec en toile de fond le chronomètre qui tourne : les avions doivent non seulement avoir quitté Châteaudun à la fin du mois, mais les dix premiers doivent également assurer leurs premières missions opérationnelles en septembre 2018. Ce qui veut dire que les premiers vols de mise au point et d’entrainement devront commencer en avril ou mai de l’année prochaine.

Des pilotes US pour les Mirage F1

Les formations initiales des premiers pilotes instructeurs d’ATAC se feront en Afrique du Sud avec l’aide de Paramount, encore elle. La société sud-africaine possède aujourd’hui 6 monoplaces CZ et quatre biplaces, acquis tout récemment. Peut-être d’anciens pilotes français seront-ils requis pour apporter une formation plus pointue dans la mission air-air ou le travail au radar.

Les avions, débarassés de leurs voilures et de leurs dérives, sont envoyés vers la Belgique sur des camions. Quatre avions quittent ainsi Chateaudun chaque semaine. © Frédéric Lert / Aerobuzz.fr

Mais il ne faut pas que les Français se fassent d’illusions en rêvant à une carrière américaine : à terme, les avions opèreront à partir de bases opérationnelles de l’US Air Force face aux avions les plus modernes de l’arsenal US. Il est donc certain qu’ils seront pilotés par des Américains…

80.000 heures de vol en vue pour les F1

N’oublions pas enfin que le business du « Red Air » qui s’ouvre aux Etats-Unis est colossal : l’US Air Force affiche un besoin d’environ 40.000 heures de vol par an. C’est grosso modo l’équivalent de l’activité « chasse » de l’armée de l’Air !

Ce volume d’heures sera donc confié à plusieurs sociétés de service et c’est tout un écosystème qui se met actuellement en place. Avec sa quarantaine de Mirage en ligne, ATAC pourra fournir environ 8.000 heures de vol par an. Soit 80.000 heures sur dix ans. Un business que l’on peut évaluer à la louche à près d’un milliard de dollars !

Frédéric Lert

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Frédéric Lert

Journaliste et photographe, Frédéric Lert est spécialisé dans les questions aéronautiques et de défense. Il a signé une trentaine de livres sous son nom ou en collaboration. Il a rejoint Aerobuzz en juin 2011. Au sein de la rédaction, Frédéric Lert est le spécialiste Défense et voilures tournantes.

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  • Bonjour, je suis un des chauffeurs de l'entreprise qui a transporté les 63 mirages f1 en Belgique ,je vois que la SABCA a eu du mal dans le temps imparti ,à les remettre en ordre de marche ...personnellement cela a été une belle expérience non sans soucis...!,

  • Bonjour mr
    Suite de l'aventure des F1 en belgique
    Pendant un peu plus d'un an une équipe de mecanos français ont travaillé sur 5 appareils ATAC ayant réduit le délai un seul a pu être testé au sol essai moteur inclus ensuite les 5 F1 ont été démontés et emballés
    Cette semaine ils ont quitté la SABCA par cammion vers le port d'Anvers pour les USA
    Tous les autres appareils stockés non loin d'ici doivent suivrent le même chemin sans qu'aucun travail ne soit effectué dessus

  • Bonjour
    Beaucoup d'informations très interressantes et passionnantes ,pour un ancien représentant technique qui a œuvré sur les Mirage F1 pendant plus de 30 ans .
    Cela me replonge dans les années 1975 ,mise en service des premiers F1 a Reims ,Orange et Cambrai ,puis a l'exportation .....
    A bientôt de lire la suite de cette aventure

  • J'ai participé à la rénovation des F1 marocains. Cela a duré quelques longues années et ils étaient tous en état de vol... Alors avec des avions stockés. Enfin ça fait plaisir que l'on s'intéresse encore à ces formidables avions.

  • Donc nos mirages F1 vont avoir une deuxième vie en dehors du pays. J'ai cru comprendre que la patrouille de France allait remplacer les alfa jets par des PC 21. Pourquoi pas par des mirages F1 remis à neuf par nos soins et que nous connaissons très bien. On a fait la même chose avec le porte avions FOCH remis à près que neuf et qui a fini au Brésil je crois. Suite pendant laquelle notre porte avions, CHARLES DE GAULES avait fait cadeau d une hélice au large de la Guadeloupe pour être immobiliser pendant un moment et nous puissance de dissuasion nucléaire n avions même pas un porte avions en état de marche.
    A bon entendeur.

  • Pourquoi la France n´a jamais eu l´idée de vendre ces avions á ses ex colonies en Afrique qui en ont tant besoin dans la guerre contre le terrorisme? Si les Mirages F1 peuvent servir de "plastrons", ils peuvent aussi bien voler dans une guerre où les pays africains font face á des ennemis sans capacité aérienne.

    • L'Armée de l'Air ne possède pas d'équipe de vente et c'est surtout Dassault qui revend des pièces mais seulement lorsqu'il n'a pas pu placer des appareils neufs!!!!d’où le faible pourcentage de revente des avions stockés.

      • A ce que je sache, tous les services de l'Etat disposent depuis des lustres d'une entité qui s'appelle "Les Ventes des Domaines" qui est là pour assurer la vente des biens dont l'Etat veut se séparer.

    • @Ghost :
      Peut être parce que aucun pays africains n'a les moyens de :
      - se payer ces avions
      - de former et payer des pilotes
      - de payer le carburant pour les faire voler
      - de payer les pièces détachées pour les faire voler
      et que donc la France n'a pas envie de payer à la place des états...
      C'est aussi simple....
      Regardez de quoi sont constituées les forces aériennes des pays africains....vous comprendrez...

      • Econocroc a l amerloc , le c337 au Vietnam , plutôt simplex et très efficace... Ou un Jojo avec carabines a bouchons aux brisure des ailes , toujours moins cher !
        Mais le roi du suermark largait des vrais sacs a pommes de terre pour nourrir les déplacés , c est mieux ?

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