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Défense

La France envoie de nouveaux missiles en Ukraine

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Frédéric Lert

Emmanuel Macron a annoncé la fourniture de nouveaux armements aéroportés à Kiev, bombes guidées AASM de Safran et missiles de croisière SCALP-EG de MBDA. Un plan ambitieux qui permettra de renforcer la capacité air-sol de l’Ukraine. 

Après l’enlisement de sa contre-offensive mi-2023 et une certaine stabilisation du front, l’Ukraine compte plus que jamais sur la réussite de ses raids à longue portée pour prendre l’ascendant sur son adversaire russe. Les quelques dizaines de missiles de croisière déjà fournis par la Grande-Bretagne et la France ont fait la preuve de leur très grande efficacité contre des objectifs situés en Crimée : ponts, dépôts de munitions, installations miliaires et navires. C’est dans ce contexte qu’intervient l’annonce par Emmanuel Macron de la fourniture d’une quarantaine de missiles SCALP-EG à l’Ukraine.

Un premier lot de quelques dizaines de missiles avait été fourni par la France au cours de l’été 2023. L’annonce en avait été faite au sommet de l’OTAN de Vilnius en juillet 2023. Le nombre précis d’engins n’avait pas été fourni, mais la rumeur évoquait une cinquantaine de missiles. Emmanuel Macron a cette fois été plus précis avec le chiffre d’une quarantaine de SCALP-EG.

Entre les opérations en Libye et en Syrie, sans oublier les entrainements et les tests, la France aurait déjà tiré une centaine de missiles, sur une dotation totale de 400. Une partie de ces missiles ont été rénovés récemment pour prolonger leur potentiel d’utilisation. La cession à l’Ukraine au total d’une centaine d’engins donne une idée du stock restant à la disposition de l’Armée de l’air et de la Marine.

La France s’est engagée par ailleurs à fournir une cinquantaine de munitions AASM par mois.  Le calibre des munitions concernées n’a pas été précisé. La munition a été utilisée au combat par les Rafale français en Afghanistan, en Libye et en Irak. Elle l’a sans doute été par un ou plusieurs clients du Rafale à l’export, on pense notamment à l’Egypte et au Qatar.

L’AASM se distingue par sa précision terminale et son propulseur lui offrant une allonge de plusieurs dizaines de kilomètres. © Frédéric Lert / Aerobuzz.fr

L’AASM est constitué d’un kit de guidage et de propulsion installé sur un corps de bombe standard de l’OTAN. Le kit de guidage placé à l’avant de la bombe offre dans tous les cas de figure un guidage inertiel hybridé GPS. A cela peut s’ajouter un guidage terminal infrarouge par reconnaissance d’image ou bien un guidage laser permettant un tir sur des cibles en mouvement.

Le panachage de ces modes opératoires permet en théorie d’obtenir une bonne précision terminale même en ambiance de brouillage GPS, comme c’est souvent le cas sur le champ de bataille ukrainien. Le tir est possible dans le cadre de missions programmées ou sur une cible d’opportunité désignée en vol par le pilote.

A l’arrière de l’AASM est installé le kit de propulsion : un moteur fusée complété par une voilure qui se déploie au largage. Pour une AASM de 250kg, la portée maximale obtenue par un tir en altitude et à grande vitesse, est de 70 km selon Safran. Il est probable que le chiffre réel est supérieur.

La motorisation permet toutefois de tirer l’AASM en basse ou très basse altitude, sans que l’avion porteur ait à s’exposer. La portée fond alors comme neige en soleil et serait de l’ordre de 15km. Un tel mode opératoire permettrait d’attaquer des objectifs sur la ligne de front ou immédiatement derrière, tout en restant à distance de sécurité vis à vis de la défense sol-air à courte portée.

Pour l’Ukraine qui a mis l’accent ces dernières semaines sur les coups de main audacieux contre les arrières de l’ennemi, les AASM n’auront pas le même impact stratégique que les missiles de croisière. Mais 50 AASM par mois, soit possiblement un objectif de valeur détruit par jour, c’est un rythme qui devient intéressant au niveau tactique, à fortiori sur l’aviation ukrainienne pouvait à terme disposer d’AASM 1000kg ! Une question reste aujourd’hui en suspens : quel sera l’avion tireur de cette munition ?

De la même manière que les Ukrainiens ont intégré le missile HARM, la bombe guidée JDAM ou le missile de croisière SCALP-EG sur leurs avions d’origine soviétique, en concevant au passage un pylône spécifique pour faire l’interface, il est facile d’imaginer de l’AASM sur les Sukhoi ou les MiG. On peut aussi envisager l’emport de la bombe française sur les F-16 qui vont commencer à être livrés.

L’intégration de l’AASM sur le F-16 avait déjà été obtenue lors du développement de la munition pour les marchés export. A noter que l’intégration de la munition a également été faite sur les Mirage F1 marocains modernisées.

Autre solution, qui tient plus du fantasme, l’emploi de l’arme depuis des Mirage 2000D qui seraient livrés à l’Ukraine. Tout semble possible dans cette guerre, donc on se gardera d’afficher des certitudes en la matière. Mais tout de même, les Mirage 2000D jouent encre un rôle précieux au sein de l’armée de l’air française.

Les quelques avions qui pourraient être cédés exigeraient un tel niveau d’investissement technique et humain pour l’Ukraine que cette cession semble d’autant peu probable que plusieurs solutions alternatives existent.

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Frédéric Lert

Journaliste et photographe, Frédéric Lert est spécialisé dans les questions aéronautiques et de défense. Il a signé une trentaine de livres sous son nom ou en collaboration. Il a rejoint Aerobuzz en juin 2011. Au sein de la rédaction, Frédéric Lert est le spécialiste Défense et voilures tournantes.

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  • La première pensée qui me vient à l'esprit est que le prix d'un Scalp est le même que celui d'un Scanner médical : 600 000 euros.

      • Pour ceux qui croient que la Russie veut envahir l'Europe de Kiev à l'île d'Oléron, c'est encore plus qu'il faut donner.
        Pour ceux qui croient que l'objectif de Poutine est de pérenniser la Crimée et le Dombass russophone et russophile alors toute cette escalade ne fait que radicaliser la Russie et la pousser vers la Chine, La Corée du Nord, l'Iran ,... et les BRICS.
        Belle réussite ! pour les plus grands profits des milieux militaro-industriels.

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