Le 3 octobre 2014, les Forces aériennes stratégiques ont célébré leur demi-siècle d’existence, sur la base aérienne d’Istres. Premier pilier de la force de dissuasion française, les FAS ont aussi formé un socle sur lequel s’est bâti l’armée de l’Air moderne que l’on connaît aujourd’hui.
On ne va vous raconter ici l’histoire de la Force de dissuasion, la littérature est déjà abondante sur le sujet. Rappelons en quelques mots que les premières études atomiques commencent en France sous la 4ème république, avant d’être poursuivies avec enthousiasme et ténacité par le général de Gaulle. Le Général en fait une affaire personnelle : pour garantir sa souveraineté, la France doit avoir sa bombe, un point c’est tout. Pour les crédits, c’est open bar.
Le 13 février 1960, l’opération Gerboise bleue illumine la région de Reggane et vitrifie quelques hectares de sable, aux portes du Sahara. Les scientifiques français se sont bien battus et la première explosion atomique française est une réussite exceptionnelle dont le retentissement est considérable. Les Américains ne pensaient pas la France capable d’y arriver seule. Une autre raison de leur étonnement, et non des moindre, vient du niveau d’énergie dégagé : environ 60 kT. Les premières explosions américaines, russe ou britanniques n’avaient jamais dépassé les 20 kT…
En coulisse, une deuxième course s’est engagée pour doter la France de l’outil pouvant faire de cette réussite scientifique un véritable outil militaire. Les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins exigeant de très longues études, les feux sont poussés pour la création d’une composante aérienne. Ce sera les FAS. Le 8 octobre 1964, quatre ans et demi après la première explosion, un Mirage IVA, sa bombe AN11 et un Boeing ravitailleur tiennent pour la première fois l’alerte nucléaire.
A l’ombre des deux super-puissances, les moyens français semblent dérisoires. Mais dans la logique du « faible au fort », ils sont jugés suffisants : il suffit d’être capable de faire assez mal à un agresseur pour que celui-ci renonce à toute agression. Voilà pour la théorie. En pratique, la « bombe » est aussi un symbole de pouvoir sur la scène internationale. Et à l’intérieur de l’armée de l’Air, la création des FAS se traduit par une véritable révolution culturelle.
A l’instar des autres militaires, les aviateurs sortent tout juste de la guerre d’Algérie. Ils vont passer en quelques années du T-6 au Mirage IV. Avec les FAS, qui ne tolèrent aucune approximation, aucune déviation des procédures et de ce qui y écrit, un vent de rigueur nouveau souffle sur l’institution. L’obligation d’excellence et de réussite, qui porte la crédibilité de la politique de dissuasion française, devient un mot d’ordre. Procédures, réseaux de communications, outils de planification et de commandement, ravitaillement en vol, guerre électronique, navigation tout temps… : un grand nombre de concepts qui nous paraissent aujourd’hui naturels sont portés par les FAS et viennent progressivement irriguer l’ensemble de l’armée de l’Air « conventionnelle ».
Depuis une vingtaine d’années, les échanges se sont encore accélérés avec la participation des FAS, appareils et équipages, aux missions conventionnelles. Il y avait eu, dans les années 70, l’utilisation des Mirage IV dans le cadre de missions de reconnaissance stratégiques. La mise en service du Mirage 2000N se traduit à la fin des années 90 par les premiers bombardements « conventionnels ». La mise en service du Rafale accélère le mouvement, avions et équipages étant pleinement interchangeables avec les forces conventionnelles. Après les Balkans, les FAS participent donc activement aux guerres en Lybie et au Mali. Bien évidemment, les ravitailleurs sont eux depuis longtemps sur tous les fronts.
Mais cet emploi n’obère en rien tout ce qui fait la spécificité des FAS. Les deux escadrons de chasseurs, l’escadre de ravitaillement en vol et les quelques autres unités très discrètes fournissent un socle solide sur lequel s’appuie l’armée de l’Air toute entière. La sanctuarisation de la mission nucléaire est une assurance vie non seulement pour le pays, mais pour l’armée de l’Air dans son ensemble.
Frédéric Lert
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La France fête les 50 ans de ses Forces Aériennes Stratégiques
Le cinquantième anniversaire aurait pu être célébré à Mont de Marsan plutôt qu'à Istres. C'est là qu'ont été mis sur pied les deux premiers escadrons des FAS : l'EB 1/91 Gascogne sur Mirage IV A et l'ERV 4/91 Landes sur C-135 F, ainsi que le premier DAMS (dépôt atelier de munitions spéciales) dont je ne me souviens plus du numéro.
L'alerte nucléaire réelle n'a pas été tenue le 8 octobre 1964, mais environ un an après, le temps de former les personnels et de compléter quelques expérimentations.
J'ai aussi un doute sur l'époque où le Mirage IV a été employé pour des missions de reconnaissance stratégique. J'aurais tendance à penser que c'est plus tard que dans les années 70. Mais là, je n'en suis pas sûr.
La France fête les 50 ans de ses Forces Aériennes Stratégiques
D'accord avec vous sur la première partie de votre message. Pour ce qui concerne les missions de reconnaissance, plusieurs témoignages ont été publiés sur l'emploi du Mirage IV au-dessus du Tchad dans les années 70. Cordialement.
La France fête les 50 ans de ses Forces Aériennes Stratégiques
La dissuasion nucléaire est un domaine très mal connu en France. A signaler avec d'autant plus d'acuité, la parution d'un livre qui comble beaucoup de trous culturels en nous apprenant comment elle est née, ce qu'elle est, et quelles sont ses perspectives d'évolution. C'est l'excellent "Essai nucléaire", de Philippe Wodka-Gallien, chez Lavauzelle.
La France fête les 50 ans de ses Forces Aériennes Stratégiques
Pour les FAS il ne faut pas oublier les 20 années des missiles sol sol balistiques stratégiques du plateau d'Albion qui étaient sous commandement FAS ! http://www.capcomespace.net/dossiers/espace_europeen/albion/albion_genese.htm