Les F-16 ont définitivement quitté le ciel hollandais, remplacés par des F-35. En 45 ans de présence, le petit chasseur-bombardier américain a laissé une empreinte profonde au sein de la Koninklijke Luchtmacht (KLu), l’aviation royale hollandaise.
Et plus qu’une page qui se tourne, c’est pratiquement un livre qui se referme : la Hollande faisait partie des quatre premiers pays clients du F-16 en Europe, avec la Belgique, la Norvège et le Danemark. Les plus de 50 ans se souviennent du séisme qu’avait provoqué en 1975 le choix conjoint de l’avion américain par les quatre pays européens. On parlait alors du « marché du siècle » gagné face à un pauvre Mirage F1 remotorisé avec un réacteur M53. Les deux avions ne boxaient pas dans la même catégorie…
Pour tous les pays qui l’ont choisi, et la Hollande ne fait pas exception, le F-16 a représenté un formidable bond en avant dont les effets se sont fait sentir pendant plusieurs décennies. Venant remplacer les F-104 et autres NF-5, il apportait avec lui un changement d’époque, de technologie et même, osons le mot, de philosophie.
Le F-16 était un avion extraordinairement moderne à l’époque de sa mise en service et la pureté de ses lignes est toujours présente, malgré les années et malgré les efforts continus des uns et des autres pour l’alourdir et lui greffer toujours plus de boites électroniques….
Au fur et à mesure des modernisations, le F-16 a sans cesse gagné de nouvelles capacités opérationnelles dans les domaines air-air et air-sol, et c’était peut-être là son principal atout : sa capacité d’évolution technique adossée aux exigences d’un très large club d’utilisateurs au premier rang desquels figurait la puissante US Air Force. Pour des hollandais qui considèrent que le tiers-monde commence au sud de Bruxelles, choisir un avion américain était l’assurance de rester solidement accroché à la puissance américaine et de progresser avec elle.
La Hollande a reçu un total de 213 F-16A/B entre 1979 et 1992, certains assemblés localement par Fokker. Une première commande de 102 avions a été suivie en 1983 par un deuxième lot de 111 avions. Le dernier est sorti de chaine d’assemblage de Fokker en février 1992. Entretemps, une partie de la flotte, 138 avions précisément, était portée au standard MLU qui en faisait l’équivalent des Block 50/52 de l’USAF. « Le standard MLU était extrêmement performant pour l’époque., se souvient un pilote français qui passa plusieurs années en échange au sein d’un escadron de la KLu. Il était même par certains aspects supérieur au block 50/52 de l’USAF ».
A la fin des années 1990, le standard MLU apportait un avion extrêmement polyvalent, réunissant même des équipements très avant gardistes pour l’époque : cockpit moderne avec écrans couleurs, liaison de données, nacelles de désignation laser très performantes, puis viseur de casque. Et toujours cette visibilité sur 360° exceptionnelle, inégalée même…
L’avion n’était pourtant pas exempt de défauts, le moindre n’étant pas l’absence d’intégration des équipements de guerre électronique (GE). Sur le Mirage 2000 (et encore plus sur le Rafale qui lui succède), les équipements de GE sont intégrés dans l’avion. Sur le F-16, la GE faite d’éléments rapportés, reste finalement assez pauvre : le brouilleur ALQ-131 est accroché sous le fuselage, occupe un point d’emport précieux et apporte de la trainée… Brouilleur et détecteur de menaces sont peu intégrés, leur couverture est imparfaite.
Imperfection aussi des commandes de vol qui offrent une moins bonne protection du domaine de vol que celles du Mirage 2000. Le G-LOC (perte de connaissance suite à une augmentation trop rapide du facteur de charge) et la vrille à basse vitesse font partie des préoccupations du pilote de F-16.
Mais à côté de ça, c’est un avion taillé pour faire la guerre : un camion à bombe dans la configuration air-sol, avec la possibilité d’emporter six bombes de 250 kg ou deux bombes Mk 824 d’une tonne. Il reste supersonique avec deux gros réservoirs externes et une fois ceux-ci vides, il peut toujours aller chercher 9G en combat ! « Et l’ergonomie du cockpit est remarquable » souligne notre pilote français. « On s’y sent immédiatement très bien, avec le mini manche latéral, cette visibilité incroyable sur 360° et un brellage particulier : le pilote porte un harnais sur lui qu’il attache aux bretelles du siège et il ajoute ensuite une ceinture ventrale, comme sur un avion de ligne. C’est simple, efficace et surtout ça laisse une très grande liberté de mouvement ! »
Ajoutons, ce n’est pas anodin, un système de préparation de mission « Falcon View », aussi simple que bien pensé, qui fait à l’époque des jaloux du côté des pilotes français qui transpirent sur les premières versions du SLPRM…
Cet avion efficace et solide, la KLu l’a utilisé au combat en Bosnie, en Libye, en Irak et en Afghanistan, sans oublier les missions de réassurance de l’OTAN dans les pays baltes et les dernières opérations contre l’état islamique au Moyen Orient. Le 4 avril 1999, pendant l’opération Allied Force, la Hollande s’est même offerte une victoire aérienne, la première depuis le seconde guerre mondiale. Un MiG 29 serbe a rencontré un missile AMRAAM et ça c’est mal terminé pour lui…
La dernière unité utilisatrice était le 312 Squadron basé à Volkel. Le dernier vol opérationnel a été conduit le 24 septembre 2024. Trois jours plus tard, la KLU a organisé un vol d’adieu avec six avions qui ont fait le tour du pays en survolant une douzaine de bases aériennes et de villes. En deux heures c’était plié.
La place est nette à présent pour le F-35 qui a atteint sa pleine capacité opérationnelle sous les couleurs hollandaises. Y compris d’ailleurs pour la mission de bombardement nucléaire, avec des armes américaines, sous la tutelle américaine.
Le premier F-35 a été remis à la KLU en novembre 2019. L’évènement avait été célébré avec un shampouinage involontaire de l’avion par les pompiers de Leeuwarden. Au lieu d’aqua simplex, l’avion avait reçu de la mousse et ça n’avait faire rire personne.
La Hollande a reçu aujourd’hui une quarantaine de F-35 sur les 52 commandés. Une commande supplémentaire serait dans les tuyaux. On résume : 213 F-16 mis en service dans les années 1980, 138 modernisés dix ans plus tard et maintenant 52 F-35 pour les remplacer. On voit bien l’allure de la courbe…
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Toutes mes félicitations pour ces explications très détaillées. Pour avoir piloté un F-16 au simulateur (à Florennes - Belgique), j'avoue que le cockpit est très bien agencé : il n'y a rien ! Enfin presque, comparé au Boeing 747 classique que je pilotais à l'époque. J'avais été surpris par le mini-manche qui, sur la console droite, ne bouge pas d'un poil. J'ai un instant cru que tout était factice et qu'on m'avait berné. Mais non, il fonctionne à la pression de la main… et ça marche, même pour un béotien… tiers-mondiste qui était arrivé à le décoller et le reposer sans casse virtuelle. J'aimerais bien que Frédéric m'organisât une petite séance de simulateur F-35. Ça devrait être tout aussi facile à piloter, ce truc moche. Il ne doit y avoir qu'un gros bouton : celui de l'éjection ! Le reste est sans doute pré-programmé dans les calculateurs de bord ou télécommandé depuis une intelligence artificielle au sol !
Oui Bernard, pas de problème pour t'organiser une séance en simulateur qui sera précédée par un diner au Jules Verne. Comme tu viendras de loin et que tu seras sans doute fatigué après toutes ces émotions, je te réserverai également une chambre au Ritz avec oreiller garni, ça va sans dire. Merci de contacter la direction de la communication et des opérations spéciales d'Aerobuzz pour régler les détails pratiques.
D'accord pour le Jules Verne. Ça sera la seconde fois pour moi, donc pas vraiment une nouveauté, mais j'ai peur qu'on fasse vieux couple, toi le gigolo et moi… le vieux pervers bien évidemment. Et voilà que bdd qui vient du 13, un fada jaloux sans doute, et nous dit qu'il n'y a plus qu'à tirer !!! Décidément Aerobuzz nous surprendra toujours.
Mdr... y'a plus qu'à tirer... la chasse, bordel !