Coup de tonnerre à Oslo : la marine norvégienne retire ses hélicoptères NH90 déjà en service et réclame un remboursement.
La Norvège a annoncé qu’elle allait se séparer de ses 13 NH90 déjà livrés tout en réclamant un remboursement intégral (environ 500 millions d’euros) au constructeur NHI (consortium regroupant Airbus Helicopters, Leonardo et GKN/Fokker)
Les Norvégiens en ont apparemment plein les bottes et font quatre reproches à l’appareil : retards de livraison, fiabilité insuffisante, problèmes de maintenance et obsolescence de certains composants. Rien de léger donc… Pour eux, la situation actuelle est sans issue et aucune solution palliative ne pourrait être trouvée pour les satisfaire. « C’est une décision lourde, mais quel que soit le nombre d’heures de travail du personnel et le nombre de pièces de rechanges que nous commandons, les NH90 ne seront pas capables de répondre aux besoins des forces armées » a expliqué Bjorn Arild Gram, ministre de la défense norvégien au cours d’une conférence de presse.
La Norvège a commandé 14 appareils en 2001, les livraisons devant ensuite commencer en 2008. Seulement 13 appareils ont été livrés à ce jour (21 ans après la commande…) et le quatorzième devrait l’être en 2024 selon les Norvégiens. Chez NHI, on explique que ce dernier appareil est disponible. Une différence d’appréciation qui reflète sans doute un fossé grandissant entre l’industriel de son client…
Huit appareils seulement sont en configuration finale selon les Norvégiens, ceux-ci expliquant même ne disposer souvent que d’un seul appareil opérationnel. NHI de son côté réfute les accusations et explique ne pas avoir eu la possibilité de discuter avec la Norvège et de faire de propositions pour améliorer la disponibilité.
La France a commandé 27 appareils en version NFH (hélicoptère naval) pour équiper les flottilles 31F et 33F. Ces appareils ont connu leurs lots de problèmes et une disponibilité insuffisante qui avaient poussé la ministre Florence Parly à secouer le cocotier et mettre en demeure Airbus Helicopters de faire des progrès… Pour une bonne part, l’indisponibilité des appareils était due à la coexistence de différents standards et aux longues immobilisations chez l’industriel pour progressivement faire évoluer les appareils d’un standard à l’autre. Il fallait par exemple 20 mois d’immobilisation (!) pour faire passer un appareil du standard d’entrée en service « step A » au standard « MR1 », synonyme de pleine capacité des systèmes embarqués !
De tels délais expliquaient ces dernières années que l’on trouvait finalement plus d’appareils chez Airbus Helicopters ou dans les hangars de l’Atelier Industriel de l’Aéronautique de Cuers-Pierrefeu que sur les parkings des flottilles. Pour ces dernières, l’entretien des appareils dans des standards différents n’était pas non plus une sinécure. Ce goulet d’étranglement s’est peu à peu résorbé au fil des ans.
Un autre problème du NH90 tenait à la corrosion dont étaient victimes les appareils, qui faisaient dire à certains que l’industriel avait perdu un savoir-faire entre la génération des Alouette III et celles de NH90. « La lutte contre la corrosion est un combat permanent dont on a pris la mesure » explique-t-on dans les flottilles, où l’on ajoute que « les histoires de corrosion sont derrière nous ».
Avec sa flotte actuelle, la Marine française arme des plots de service public, tient les alertes anti sous-marines ou de contre-terrorisme, et placent des appareils sur les frégates et le porte-avions. L’appareil est jugé mature dans son standard MR1, le radar et le sonar sont qualifiés d’exceptionnels mais la suite de guerre électronique ne donnait toujours pas satisfaction l’an dernier.
Les Norvégiens sont apparemment loin d’atteindre ce niveau et ils ne se privent pas de renverser la table pour le faire savoir. Une réaction qui ne serait pas envisageable en France tant est grande l’interdépendance entre l’industriel, le gouvernement et les utilisateurs militaires.
Frédéric Lert
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