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Défense

La renaissance du 1/5 Vendée sur Rafale à Orange

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Frédéric Lert

L’escadron de chasse 1/5 « Vendée » a été officiellement recréé le 18 juillet 2024 sur la base aérienne 115 d’Orange. Six mois plus tard, où en est-on ? Visite guidée avec le commandant du 1/5.

Le Lcl Pierre, commandant de l’escadron, reçoit ses visiteurs dans un bureau neuf et spacieux, dont il a lui-même pu choisir la couleur des murs. Privilège du chef d’un escadron revenu à la vie 17 ans après sa dissolution. Les longs couloirs sont encore désespérément vierges de souvenirs, la salle d’opérations est calme, la salle de repos magnifique. Le bâtiment répond aux normes environnementales les plus exigeantes, avec une ventilation naturelle et une isolation phonique de compétition : les Rafale peuvent circuler sous les fenêtres, on ne les entend pas.

Le siège social de l’escadron de chasse Vendée, symbolique de l’armée de l’Air et de l’Espace 2.0 © Frédéric Lert/Aerobuzz.fr

Au centre du bâtiment, la ZAR, Zone d’Accès Réservée, est une très grande pièce aveugle, protégée par une cage de Faraday bloquant les émissions électromagnétiques. On y badge et on dépose son téléphone avant d’y pénétrer. « Le coeur de l’activité opérationnelle de l’escadron » explique le Lcl Pierre que l’on croit sur parole, puisque l’accès en est interdit aux journalistes.

Autres particularités de ce bâtiment qui a pour l’instant de faux airs de siège social, des salles de sommeil et un amphithéâtre de 70 places, bien taillé pour les « mass brief ». « Moins spectaculaire que celui du Normandie Niémen concède le Lcl Pierre (qui fut un temps adjoint chef-ops de l’escadron, précisons-le), mais notre écran est plus grand avec un projecteur en 8K ». Et toc !

Tout cela est grand et beau, mais semble encore étrangement vide. « Nous sommes encore en phase de montée en puissance » résume le Lcl Pierre, en montrant sur sa droite le bureau immaculé de son second. « Le bureau est vacant, je n’ai pas encore d’adjoint ».

C’est propre, lumineux et fonctionnel : les installations techniques ont également changé de génération. © Frédéric Lert/Aerobuzz.fr

Parti de presque zéro en juillet 2024, le Vendée est fort aujourd’hui de 141 personnes : une centaine de mécaniciens qui lui sont directement rattachés, une douzaine de pilotes, des marqueurs, et personnels administratifs et pour l’instant dix avions en parc. Les huit premiers ont servi pendant quelques mois à Mont-de-Marsan avant de poser leurs roues à Orange. Les deux derniers arrivés sont sortis de la chaine d’assemblage final de Mérignac en décembre 2024.

Tous les avions sont au standard F4.1 block 2, ce qui correspond à l’état de l’art actuel. Le Vendée à vocation à n’utiliser que des Rafale C monoplaces mais on aperçoit tout de même sur les parkings deux biplaces. Notre interlocuteur explique pourquoi : « nous ne formons pas au pilotage du Rafale, c’est le travail de l’ETR (Escadron de transformation Rafale) de Saint-Dizier, mais nous utilisons les biplaces pour les missions de transformation technique de nos pilotes. L’apprentissage du travail avec la nacelle de désignation laser Talios est par exemple bien plus simple et productif lorsqu’il se fait avec un biplace ». Le Vendée devrait posséder une douzaine d’avions cet été et 17 à la fin de l’année. Il attend également un premier simulateur pour le mois de mars et à terme quatre sphères permettront l’entrainement simultané et coordonné de plusieurs pilotes.

Les Rafale F4.1 sont compatibles avec les viseurs de casque Scorpion, en témoigne les mires visibles sur le sommet de la verrière et servant au positionnement du casque dans l’espace. Frédéric Lert / Aerobuzz.fr

Avec ces moyens, le Vendée monte progressivement en puissance sur l’ensemble des missions dévolues au Rafale, exception faite de la mission nucléaire qui reste l’apanage de la 4ème escadre de Saint-Dizier. La polyvalence du Rafale est une chance pour l’armée de l’Air et de l’Espace mais aussi une contrainte pour les unités, qui doivent faire en sorte de maîtriser sur le bout des doigts la totalité des capacités offertes par l’avion. Pas simple…

Cette exigence de polyvalence est toutefois adossée à une certaine spécialisation des escadrons. Chacun d’entre eux est ainsi nommé « référent » dans un domaine bien précis, à charge pour lui de s’y investir plus que les autres et de faire profiter l’ensemble de la communauté Rafale de son savoir-faire.

L’EC 2/30 Normandie Niémen de Mont-de-Marsan est ainsi référent pour le travail en coopération avec les forces spéciales, tandis que son voisin, le 3/30 Lorraine, est référent dans le domaine air-air.

« Le Vendée a vocation à devenir référent pour la mission SEAD (suppression des défenses sol-air) souligne le Lcl Pierre. Il y a une vraie volonté de l’armée de l’Air et de l’Espace de réinvestir cette mission ». Au début des années 2000, on expliquait dans l’Armée de l’Air qu’il était inutile d’entretenir des capacités dans cette mission, nos alliés sachant très bien le faire. Les temps ont changé, la météo a fraichi…

Et si le Rafale peut aujourd’hui ajouter cette corde à son arc, il manque toutefois à la France un armement offensif spécifiquement conçu pour cette mission SEAD. Le travail se fait donc à la bombe AASM et au missile de croisière…

Après les ZAD et les ZFE, voici venir les ZAR, Zone d’Accès Réservé. Signe des temps, même la syntaxe est innovante… © Frédéric Lert/Aerobuzz.fr

Depuis décembre 2024, le Vendée a également récupéré la PO (Permanence opérationnelle) traditionnellement installée à Orange. Cette mission de police du ciel qui couvre le sud-est de la France depuis la BA115 avait été confiée aux Mirage 2000-5 de Luxeuil depuis la fin des derniers Mirage 2000C en juin 2022. Elle avait ensuite été donnée de manière transitoire à un détachement de deux Rafale de la 30ème escadre, avant que le Vendée puisse en assumer la responsabilité. 

Dans les mois à venir, le Vendée va continuer à grossir jusqu’à rassembler plus de trente pilotes à l’horizon 2027. A ce moment-là, il sera prêt à se séparer d’une partie de ses forces vives qui iront jeter les bases de son futur voisin, l’EC 2/5 « Ile-de-France », qui sera recréé à l’été 2028.

Les travaux d’infrastructure pour le deuxième escadron Rafale d’Orange débuteront en 2026. Dès lors, on trouvera sur la BA115 deux escadrons de chasse sur Rafale, un escadron de soutien technique aéronautique (ESTA) pour les servir, le tout sous la houlette d’une 5ème escadre dont l’état-major est également en phase de montée en puissance.

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Frédéric Lert

Journaliste et photographe, Frédéric Lert est spécialisé dans les questions aéronautiques et de défense. Il a signé une trentaine de livres sous son nom ou en collaboration. Il a rejoint Aerobuzz en juin 2011. Au sein de la rédaction, Frédéric Lert est le spécialiste Défense et voilures tournantes.

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