Soixante ans après le premier vol de l’avion espion, Lockheed Martin propose de revisiter son U-2 pour en faire un appareil furtif et piloté optionnellement. Pas certain que l’US Air Force morde à l’hameçon…
Le U-2 a donc passé le cap symbolique des soixante ans cet été. Le tout premier appareil dessiné par le bureau d’études Skunk Works et Clarence « Kelly » Johnson, ingénieur de légende de Lockheed, avait pris l’air pour la première fois le 1er août 1955. Le U-2 avait été développé très rapidement parce que le besoin exprimé était simple : à l’époque où les satellites n’existaient pas, il fallait tout simplement voler le plus haut possible en emportant un appareil photo. L’appareil avait pris l’air après moins d’un an de développement, pour un coût inférieur de 15% à l’enveloppe prévue. Ca fait rêver…
On est d’accord que les U-2S qui volent aujourd’hui sous les couleurs de l’USAF n’ont plus grand chose en commun avec l’ancêtre de la Guerre Froide. Un peu comme la Golf VII d’aujourd’hui et celle de 1974: le nom et la forme sont toujours là, mais à l’intérieur on a changé d’ère…
Le U-2 fait partie de cette ménagerie aérienne entrée en service peu de temps après la seconde guerre mondiale et qui a mis dans le mille. B-52, C-130 et autres KC-135 sont du même tonneau : des avions bien pensés, solides, fabriqués à une époque où l’affrontement est-ouest justifiait toutes les dépenses. Pas étonnant que malgré leur âge canonique, on trouve encore ces appareils ou leurs descendants directs encore dans les unités de première ligne. Pour combien de temps encore ?
En 2006, le Pentagone rendait public un plan pour mettre un terme rapide à la carrière de l’avion. Il s’agissait tout autant de faire des économies que de laisser la place nette à la coqueluche du moment, le drone RQ-4 Global Hawk. Un scénario qui n’est pas sans rappeler le bras de fer qui oppose aujourd’hui le A-10 au F-35C.
Dans le cas du U-2, le salut vint non pas du Congrès américain mais des insuffisances du drone : le Global Hawk n’était pas à la hauteur, au propre comme au figuré. Malgré une envergure égale à celle d’un A320, le Global Hawk block 30 accumulait plusieurs insuffisances : vitesse et plafond opérationnel insuffisants (le U-2S est officiellement crédité de 70.000 ft en altitude de croisière, mais il peut sans doute évoluer plus haut…), faiblesse de la génération électrique pour faire tourner la charge utile, faiblesse également des capteurs embarqués…
A cela s’ajoutait également la difficulté à faire évoluer l’appareil dans l’espace aérien, avec l’exigence de réaliser des détours parfois considérables pour lui faire rejoindre sa zone d’action en évitant les voies aériennes. Le U-2 sauva donc sa peau et la trentaine d’appareils encore en service au sein de l’USAF a obtenu un sursis jusqu’en 2019. Et sans doute plus si les nouvelles évolutions du Global Hawk tardent trop où se révèlent également décevantes…. D’autant que les U-2 sont en très bonne forme : l’an passé, Lockheed Martin expliquait que la flotte n’avait consommé que 20% de son potentiel et qu’au rythme d’utilisation qu’on lui connaissait, l’avion pouvait durer sans peine jusqu’en 2050 !
Pas certain donc que l’Air Force se précipite pour lui donner un successeur. Lockheed Martin a pourtant révélé au milieu de l’été que ses ingénieurs réfléchissaient à un successeur ayant pour nom de code UQ-2 ou RQ-X. Dans la nomenclature américaine, le Q désigne les appareils sans pilote : le successeur du U-2S pourrait donc être un appareil optionnellement piloté, mais qui reprendrait l’essentiel des attributs du U-2S actuels, avec un moteur, un cockpit et même une charge utile identiques ou presque.
La solution du U-2 sans pilote avait pourtant déjà été proposée par le passé, mais elle n’a jamais fait vibrer l’USAF. Pour faire passer la pilule du Q, Lockheed Martin propose aujourd’hui d’offrir à l’avion une certaine dose de furtivité. Plus facile à dire qu’à faire sur un appareil à l’aérodynamique déjà très particulière et à la difficulté de pilotage notoire. On reparle de tout ça pour les cent ans de l’avion, en 2055…
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Le Lockheed U-2 aura-t-il un successeur ?
"Un scénario qui n’est pas sans rappeler le bras de fer qui oppose aujourd’hui le A-10 au F-35C."
Excusez-moi de chipoter, mais ne serait-ce pas plutôt le F-35A ? Il me semble que le F-35C est la version naval, qui n'équipera donc pas l'US Air Force...
Le Lockheed U-2 aura-t-il un successeur ?
rendre un U2 furtif ? je leur souhaite bien du plaisir....ils avaient essayé dans les années 60 avec des cordes à piano accrochées aux ailes et au fuselage et diverses peintures et des boitiers de guerre électronique. On appelait ca des dirty birds je crois, résultat : la Chine communiste et Cuba possèdent un important stock de pièces détachées signées Lockheed Martin Skunk Works. J'ai une théorie pour expliquer la démarche de L.M et je m'étonne que vous n'y ayez point pensé chez monsieur Lert : Lockheed est un grand écolo dans l'âme, il s'agit de recycler des avions espions de la guerre froide.... au lieu de les envoyer à la ferraille.
Faut pas gâcher si ca peut encore servir.
Le Lockheed U-2 aura-t-il un successeur ?
Si cela se fait, le nouvel avion n'aura plus grand chose en commun avec le U-2, si ce n'est peut-être le moteur et la charge utile… Merci pour votre message de l'au-delà soeur sourire, j'ai toujours beaucoup aimé votre enthousiasme. Dominique nique nique...
Le Lockheed U-2 aura-t-il un successeur ?
@ Frédéric Lert
en 2001 et 2002, à Al -Dafra, lors de l'atterrissage des U2, une chevrolet suivait sur le taxyway l'appareil en restant à sa hauteur, et permettait de renseigner le pilote sur la position des ses ailes afin d'éviter un touché malencontreux. En fin de course, des personnels du véhicule sortaient pour remettre des balancines sous chaque aile.
Voir photo jointe, véhicule sur la gauche.
Ce qui m'a toujours marqué au décollage, c'est la vitesse ascensionnelle pour un tel appareil.
Le Lockheed U-2 aura-t-il un successeur ?
Merci pour votre témoignage. La Chevrolet (Camaro ?) possède également un bon rapport poids-puissance…et même un très bon freinage. Ayant suivi les opérations des U-2 au départ d'Istres vers 1995, je me souviens être parti dans le tableau de bord de la voiture suiveuse sur un coup de frein un peu viril. Nous roulions alors sur la piste, directement derrière l'avion à l'atterrissage. Un bon souvenir...