Une campagne d’essais conduite un peu plus tôt en avril 2021 a permis de progresser sur le dossier épineux de la capacité de ravitaillement en vol des hélicoptères par l’A400M. L’objectif est à portée de main, mais il reste encore du travail sur les opérations de nuit.
L’A400M a volé pour la première fois en décembre 2009 et il est entré en service opérationnel au sein de l’Armée de l’Air et de l’Espace (AAE) six ans plus tard. Le 2 avril 2021, la 61ème escadre de transport installée sur la base aérienne 123 d’Orléans réceptionnait son 18ème appareil. L’objectif est de disposer de 25 A400M d’ici la fin 2025 et de doubler ce nombre d’ici… 2035 !
A chaque fois qu’elle en a l’occasion, l’AAE se félicite des performances remarquables de l’avion et de ses capacités de transport. Jusqu’il y a peu, la présence de deux beaux cailloux dans sa chaussure, le largage des parachutistes et le ravitaillement en vol des hélicoptères, empêchait toutefois l’institution d’afficher une satisfaction totale.
S’agissant du premier caillou, l’affaire est presque réglée : deux avions ont été modifiés et trois autres le seront d’ici la fin de l’année pour être capables de larguer en un seul passage 116 parachutistes par les deux portes latérales. Les précédents avions restent pour l’instant limités à une capacité de largage de… 30 soldats par une seule porte, soit peu ou prou l’équivalent de ce que pouvait faire un C-47 sur le bocage normand en 1944.
Pour ce qui concerne le ravitaillement en vol des hélicoptères (l’avion est déjà capable de ravitailler des avions de chasse et des gros porteurs), les choses évoluent également dans le bon sens, mais il reste semble-t-il un grain de sable dans la machine.
Tous les A400M sont aujourd’hui susceptibles de servir de ravitailleur avec l’installation de nacelles idoines sous la voilure rappelle Airbus. L’avion peut emporter 50,8 tonnes de carburant dans la voilure et le caisson central de voilure et l’ajout de deux réservoirs supplémentaires dans la soute peut porter ce total à 62,2 tonnes.
Les premiers essais de ravitaillement en vol sur un E725 avaient donné des cheveux blancs à l’équipage DGA Essais en vol de l’hélicoptère. Pris dans les turbulences de sillage, l’appareil s’était retrouvé dans une situation… compliquée.
Après un long intermède, l’appareil revint sur le devant de la scène, des ingénieurs de haute volée ayant entretemps pensé à allonger les tuyaux de ravitaillement en vol pour reculer la zone de contact et éloigner l’hélicoptère des turbulences les plus fortes.
Une nouvelle campagne de ravitaillement en vol, entreprise en septembre 2019, montra la justesse de la solution. En quatre jours, 51 contacts secs (sans transfert de carburant) furent réalisés. Il fallut ensuite attendre un an de plus (pourquoi un tel délai ?) pour entreprendre de nouveaux essais avec cette fois des transferts de carburant. C’était en septembre 2020.
Encore six mois de plus (pourquoi un tel délai ? bis) et on en arriva à la campagne menée du 22 mars au 2 avril 2021 et rendue publique deux semaines plus tard. Ces derniers essais, placés sous la responsabilité industrielle d’Airbus, ont été organisés par DGA Essais en vol, avec la participation de l’armée de l’AAE et notamment de navigants du CEAM (Centre d’expertise aérienne militaire). L’A400M, fourni par Airbus, opérait depuis la base aérienne 106 de Bordeaux Mérignac, les deux EC725 Caracal engagés provenant quant à eux de l’escadron d’hélicoptères 1/67 Pyrénées basé à Cazaux.
« L’objectif de cette campagne était d’avancer dans la certification de la capacité de l’A400M à ravitailler des hélicoptères, de jour et de nuit » précise la DGA. Huit vols ont eu lieu dont un avec deux hélicoptères en ravitaillement simultané ainsi que deux vols de nuit conduits aux JVN. L’ensemble a représenté plus de 25 heures de vol d’essais et « 81 contacts et 6,5 tonnes de carburant transférées » selon le décompte d’Airbus.
La campagne a bénéficié d’une météo particulièrement favorable et les ravitaillements ont été réalisés entre 1.000 et 10.000 ft à des vitesses aussi basses que 105 noeuds. Un travail « qui confirme les résultats positifs des campagnes précédentes » indique la DGA.
Une chose intrigue pourtant : Airbus annonce que la qualification n’aura lieu qu’en fin d’année, « pour terminer le travail sur le ravitaillement de nuit ». Pourquoi ce travail n’a-t-il pas été terminé à l’occasion de la dernière campagne ? Le ravitaillement de nuit avec un ou deux hélicoptères poserait-il des problèmes particuliers ? Organiser de tels essais exige un bel alignement des planètes pour ce qui concerne la disponibilité des hommes et des machines et on veut bien imaginer que si la possibilité avait existé de clore la campagne de qualification une bonne fois pour toute, Airbus, la DGA et l’AAE s’en seraient volontiers saisis.
Dans l’intervalle, l’AAE se débrouille avec ses alliés (Italiens, espagnols et américains) et ses propres KC-130J achetés à Lockheed Martin dans l’urgence et au prix fort pour pallier les retards de l’A400M. L’AAE n’a pas ménagé ses efforts pour décrocher cette capacité et l’escadron Pyrénées, qui utilise les EC725 Caracal, fait aujourd’hui partie du Commandement des Opérations Spéciales et place donc cette capacité de raid à longue distance avec ses hélicoptères au service des forces spéciales.
La possibilité de ravitailler en vol des hélicoptères est une capacité ancienne : en 1967, pour célébrer le 40ème anniversaire de la traversée de Charles Lindbergh, deux HH-3E (Sikorsky S-61) de l’US Air Force, avaient traversé l’Atlantique d’une traite, en trente heures de vol et neuf ravitaillements en vol. A la même époque, l’US Air Force faisait un large usage de ce savoir-faire pendant la guerre du Vietnam.
Mais 60 ans plus tard, très peu de pays disposent de cette capacité parce qu’elle est très exigeante en ressources : avions, hélicoptères et surtout entretien des qualifications.
Frédéric Lert
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Airbus vient de mettre au point sur l'A330 MRTT, un système automatique de ravitaillement en vol, basé sur l'intelligence artificielle, qui reconnait les formes de l'avion ravitaillé, en collaboration avec l'armée de l'air de Singapour.
Ce procédé concerne uniquement les systèmes de perche rigide déployées par le tanker, et non les paniers au bout de flexibles.
On aurait aimé qu'Airbus se concentre davantage sur le ravitaillement des hélicos par l'A400M, afin d'accélérer quelque peu cette qualification, qui n'en fini plus de finir.
Au fait, quelqu'un saurait il m'expliquer pour quelle raison l'A400M n'est pas équipé de winglets aux extrémités des ailes, alors qu'Airbus en a installé sur les C295, Boeing sur le C17, et que ces ailettes sont présente sur la quasi totalité des avions modernes ?
Vis à vis des délais étonnants.
Ne pas oublier le petit théâtre que l'armée entretient vis à vis des politiques : ils viennent d'obtenir des C130J, il serait dommage que ces machines soient obsolètes quelques semaines après car l'a400m fait tout en mieux…
Ça risquerait de faire passer l'armée de l'air pour des petites capricieux.
Je n'ai pas d'info, je ne fais que persifler :-) et je suis prêt à croire qu'il n'est pas si simple de rallonger les tuyaux.
Dans un article précédent (La Royal Air Force va se débarrasser de ses C-130J) j'ai abordé le problème du ravitaillement des hélicos par l'A 400M. Je complète par la problématique de l'hélico lui-même. A la fin de l'article je précisais attendre de voir pour une utilisation opérationnelle. Je maintiens.
Au rythme de 200 kg transférés par minute, une dizaine de minutes derrière le ravitailleur sont nécessaires pour compléter le plein d'un Caracal.
L'avion ravitailleur vient se positionner au niveau des hélicos, puis déroule les tuyaux contenus dans les nacelles accrochées en extrémité de voilure.
Il maintient la vitesse la plus basse possible pour lui, environ 200 km/h (105 Kts environ), pour cela le ravitailleur a les volets fortement sortis.
L'hélicoptère est quant à lui proche du maximum de sa puissance pour tenir cette allure. Faire coïncider les vitesses est la première difficulté.
Maintenir un engin à voilure tournante au cœur des turbulences provoquées par le ravitailleur en est une autre, encore plus délicate.
Heureusement, le Caracal dispose d'un pilote automatique très performant, qui participe à la stabilisation de l'appareil pendant cette phase critique. En son absence, la maîtrise de l'hélicoptère de 11 tonnes deviendrait pratiquement impossible…
Le ravitaillement hélico est très différent de ce que l'on peut connaître sur avion de chasse avec le système perche-panier. L'approche jusqu'au panier est plus facile avec un avion. Sa vitesse et son comportement aérodynamique simple font que l'avion est comme sur des rails. On peut donc se permettre d'approcher lentement et d'affiner la trajectoire dans les derniers centimètres.
Les choses sont plus compliquées avec l'hélicoptère.
D'abord parce que la perche est très longue afin de dépasser le disque du rotor: plus de 4 m une fois déployée, avec donc, un bras de levier imposant.
Ensuite et surtout, parce que son pilotage est complexe, chaque action aux commandes entraînant une cascade de réactions dans les trois dimensions.
Le vol rectiligne avec variation de vitesse est la discipline la plus compliquée qui soit sur une voilure tournante.
A l'issue du rapprochement avec l'avion ravitailleur, la procédure impose de marquer un arrêt à quelques mètres du contact afin de vérifier l'état du panier et les paramètres de vol, avant de poursuivre.
Ensuite, une fois le contact établi avec le panier, il est nécessaire de pousser le panier afin d'enrouler partiellement le tuyau et déclencher les contacts de transfert. Il faut aussi s'élever légèrement afin que le tuyau fasse une courbe vers le bas pour éviter tout sectionnement par les pales, ensuite, augmenter la puissance pour maintenir la vitesse du à l'augmentation de poids de l'hélico au fur à mesure du transfert.
il faut arrêter de cracher ds la soupe, et raconter n importe quoi . L'A400M est l'un des meilleurs avions militaires de sa catégorie et n'as certainement rien à envier à ses concurrents C17,C130 ou autre, bien au contraire. il a peut-être coûté plus cher que prévu à cause des mêmes problèmes qu'on connu le Rafale et l'Eurofighter, et que connait aujourd'hui le Scaf (merci les anglais et les allemands), mais c'est le plus moderne de tous, et ses capacités évolutives sont énormes, la preuve en est les certifications des versions spécifiques déjà obtenu et je ne doute pas qu'il obtienne celle-ci de nuit ds les prochains mois. Son panel ainsi élargit il ne pourra que mieux répondre à une demande de plus en plus internationale. Bon vol à lui !
En langage clair, un avion raté hors de prix.
Vous avez sans doute raté un épisode.
Le ravito des voilures tournantes semble bien plus délicat que celui des jets, pour ce que j'ai découvert, comme simple observateur qui a du mal avec l'autocensure et le l'auto-bashing ...
Sous le contrôle des vrais connaisseurs : Il y a la vitesse, qui génère des zones turbulentes à l'arrière du ravitailleur, l'altitude, turbulences en basses couches, la maniabilité de l'hélico conjugué avec la longueur de la perche déployée.
Malgré l'adresse des pilotes, ça fait beaucoup et il faut parfois choisir entre la vie du tuyau et celle de l'équipage de l'hélico.
Georges, un appel à contribution a été lancé pour éviter une situation de risque.
Il manque un génie pour adapter le principe aux conditions turbulentes, à la nuit. Comment faire quand ça bouge, à fortiori de façon différente pour les 2 aéronefs, et qu'un micro geste sur un commande prend des proportions importantes (perche de 5m) que le tuyau fini par passer dans le disque des pales (pilote pâle également) ?
On change de ravitailleur ? Un MRTT...
On propose à l'hélico de rentrer avec ce qui lui reste ?
On ne fait pas la mission ?
On fait venir une équipe d'Experts blogueurs qui débattront avec les gens de l'art pour refaire le match ?
Dans tous les cas je ne vois où l'A400 est pris en défaut, face à des challengers de même type...
Problème de la vitesse : pour que les hélicos soient "confort", ils ne doivent pas être "à donf", et l'A400M pas au mini non plus. Mais ça se passe coté A400M avec tous les volets dehors, et de l'incidence. Ce sont dans ces conditions que les turbulences de sillage sont maximums, et ça mets le bazar pour les hélicos qui suivent, qui sont justement au plus mauvais endroit pour se choper les-dites turbulences à leur maximum !
Bref, ravitailler un hélico, ça a toujours été un beau bazar à effectuer !
L'A400M est plus lourd et plus gros que les Transall qui faisaient ça pas trop mal. Il est aussi nettement plus rapide.
On ne fait pas ça avec un MRTT parce qu'on n'envoie pas un liner en basse altitude ravitailler des hélicos en zone hostile. Mais un avion d’assaut comme l'A400M, oui.
A noter que le ravitaillement en vol d'hélico n'est du tout un sport de masse !
L'A330 MRTT ne vole pas assez lentement pour les hélico, c'est bien pour cela qu'on ne fait pas appel à lui.
Airbus connaissait toutes les difficultés du ravitaillement des hélicos et ne les a visiblement pas assez pris en considération.
Et comme le souligne Frédéric Lert, les modifs prennent beaucoup de temps pour des solutions qui paraissent tout de même relativement simples comme le rallongement des tuyaux.
Bonjour à tous
Il se passe quoi avec la peinture de cet A400M ? Encore un PB ?
Surprenant sur un appareil récent , cela n'augure rien de bon sur la protection anti corrosion à long terme .
Salutations
Ces plaques sont dans la zone des réservoirs. En plein soleil tout le temps... Et ça aime pas. La peinture, ça vieillit vite, et à cet endroit, on ne le voit jamais du sol...
Les transalls sont dans le même état, mais ils ont 40 ans... Et pas trop rouillés.
Le fuselage ne semble pas touché, de même que les surfaces hors réservoirs... Y'a surement une explication plus technique !
Effectivement sur les surfaces extrados la peinture s'écaille par plaques entières . Enquête et actions correctives à mener d'urgence chez Airbus !
Concernant le largage de parachutistes par les portes latérales, vous indiquez que deux appareils ont été modifiés en conséquence.
Sait on de quels modifications il s'agit ?
J'avais cru comprendre que ce sont les sangles déclenchant l'ouverture des parachutes, qui ont été rallongées (même principe que pour les tuyaux de ravitaillement hélicos !) afin de retarder l'ouverture et de l'éloigner de l'appareil.
Le ravitaillement en vol des hélicoptères est réservé à l'usage des forces spéciales.
Or les dernières infos diffusées concernant la future version Forces Spéciales du NH90, ne font pas état de la présence d'une perche de ravitaillement ?!
Concernant les sangles de parachutes, en l'occurrence, ce sont des modification sur les parachutes et non sur l'appareil ...