Luxeuil future base aérienne nucléaire 100% Rafale

Le président Macron annonce que deux escadrons de Rafale destinés à la base aérienne 116 de Luxueil seront destinés à la mission nucléaire avec le missile ASN4G hypersonique. Une vraie surprise et un investissement de 1,5 milliard d’euros pour permettre à la BA118 de remplir sa mission.

En déplacement officiel sur la BA116 de Luxeuil-les-Bains le 18 mars 2025, Emmanuel Macron a donc annoncé que l’état allait accroitre et accélérer les commandes de Rafale : «C’est un impératif dans le contexte actuel. C’est aussi un choix naturel pour intégrer l’effort des aviateurs vis-à-vis de l’Ukraine, avec la cession de nos Mirage » a-t-il expliqué aux militaires présents.

Faisons un point rapide de la situation des Rafale en France : au 31 décembre 2024, 234 avions ont été commandés (Armée de l’air et Marine confondues) et 178 livrés. Les commandes se sont faites par tranche et les livraisons en cours portent sur la tranche 4 (40 avions) dont il ne restait plus le 31 décembre 2024 que 14 avions à livrer. Les livraisons de cette T4 seront complètement terminées en fin d’année 2025, permettant alors l’équipement des deux escadrons Rafale d’Orange. La France abordera alors un nouveau cycle avec les avions de la tranche 5 (T5).

La commande de cette T5 a été passée en décembre 2023. Elle correspond à une commande de 42 aéronefs, dont 12 destinés à remplacer les Rafale cédés d’occasion à la Croatie. Avec cette T5, le total des Rafale commandés par la France atteint 234 avions. Un chiffre auquel devront être retirés les 24 avions cédés à la Grèce et à la Croatie (ainsi que les avions perdus en vol) pour obtenir le volume « net » d’avions disponibles.

Jusqu’à maintenant, il est prévu que ces 42 avions de la T5 seront livrés d’ici 2032. Mais au cours d’une audition devant la commission de la défense de l’Assemblée nationale en octobre 2024, le général Bellanger, chef d’état-major de l’armée de l’Air et de l’Espace, avait expliqué souhaiter une accélération de ces livraisons. On verra bien ce qu’il en sera…

Arrive maintenant le discours d’Emmanuel Macron à Luxeuil. Le président de la République a donc évoqué la commande de Rafale supplémentaires, une commande que l’on peut assimiler à une tranche 6 (T6) portant cette fois sur des avions au standard F5. Cette future commande avait déjà été évoquée récemment par le ministre des armées Sébastien Lecornu qui avait indiqué que les forces françaises avaient besoin d’acquérir 30 avions de plus, dont 20 pour l’armée de l’Air et de l’Espace et 10 pour la marine.

On peut supposer que l’annonce faite à Luxeuil se place dans la continuité des déclarations du ministre : ainsi, la commande d’une future T6 donnerait 20 avions de plus à l’AAE, de quoi équiper l’équivalent d’un deuxième escadron de Luxeuil, le premier devant recevoir les avions de la T5 qui seraient portés au standard F5. Des annonces devraient être faites à ce propos dans les semaines à venir.

Le Rafale F5 emportera le futur missile ASN4G (missile nucléaire de 4ème génération) et il pourra être accompagné par un drone de combat agissant comme un capteur ou une plateforme de tir déportée. Sa mise en service opérationnel est prévue actuellement pour 2035. A cette date, l’AAE devrait donc passer au « tout Rafale » avec le retrait des derniers Mirage 2000D, les Mirage 2000-5F ayant quant à eux été abandonnés quelques années auparavant (on parle de 2029).

Au-delà des avions, les annonces du président de la République augurent également de changements majeurs pour la base aérienne de Luxeuil. Il était déjà prévu que celle-ci recevrait un, voire deux escadrons de Rafale : l’ancienne ministre des armées Florence Parly l’avait annoncé dès 2019. Mais on ne parlait à l’époque que de Rafale F4 et il n’était alors pas question de mission nucléaire.

Et puis, plus près de nous, Sébastien Lecornu suggérait quant à lui l’installation de deux escadrons de Rafale dès 2032 qui « (…) participeront aux contrats opérationnels des Forces aériennes stratégiques ». La formulation était ambiguë. L’annonce d’Emmanuel Macron, qui évoque le Rafale F5 et le missile ASN4G hypersonique pour 2035, semble lever cette ambiguïté. Emmanuel Macron a annoncé un investissement de l’état de «près de 1,5 milliard d’euros» pour adapter la base aux nouveaux avions, à leur nouvel armement et à leur nouvelles mission. Un milliard et demi d’investissement, c’est environ six fois plus que ce qui a été consacré à la BA115 d’Orange pour préparer l’arrivée de deux escadrons de Rafale, y compris en comptant des infrastructures non liées directement au nouvel avion (nouvelle tour de contrôle, nouveau mess mixte…).

Une différence considérable donc, qui s’explique sans doute en grande partie par les exigences de la mission nucléaire, du stockage et de la protection des armes, des besoins en communications sécurisées et peut-être aussi de la mise en oeuvre des futurs drones de combat.

La base de Luxeuil avait pourtant participé dans le passé à la mission de dissuasion en accueillant des escadrons de bombardement nucléaire de 1966 à 2011. Les derniers occupants porteurs de cette mission avaient été les Mirage 2000N des escadrons 1/4 Dauphiné et le 2/4 La Fayette (le troisième escadron, le 3/4 Limousin, opérait quant à lui depuis Istres). Mais par la suite, la Révision générale des politiques publiques (RGPP) avait abouti à un vaste jeu de bonneteau : les deux escadrons nucléaires rééquipés en Rafale B avaient migré vers Saint Dizier et la base de Luxeuil avait échappé de peu à la fermeture en héritant des Mirage 2000-5 du Groupe de chasse 1/2 « Cigognes », en provenance de la BA102 de Dijon qui, elle, fermait.

Proche de la fermeture il y a une quinzaine d’années, Luxeuil est donc maintenance promise à un bel avenir en devenant la base aérienne la plus moderne de France, avec une population qui sera à terme de 2.000 militaires et civils (contre mille aujourd’hui). Elle a dix ans pour s’y préparer, et avec elle la ville de Luxeuil !