On l’attendait depuis 2014, le premier vol du démonstrateur technologique furtif X-2 (ex ATD-X) de Mitsubishi Heavy Industries a finalement eu lieu hier 22 avril à Nagoya. L’appareil, qui doit démontrer des qualités de furtivité, symbolise la recherche d’une plus grande autonomie technologique par le Japon.
Le X-2 est un petit gabarit : 14,2m de long pour 9,1m d’envergure. C’est grosso modo un mètre de moins que le Rafale dans chacune des dimensions. L’avion est petit, mais il porte de gros espoirs. Le Japon compte dessus pour se frotter à plusieurs technologies que l’on retrouve sur les avions dits « de cinquième génération » : furtivité radar, poussée vectorielle, capteurs de nouvelles générations avec par exemple des antennes conformes placées dans la peau de l’avion.
L’intégration d’armements ne figure pas dans son programme d’essais et d’ailleurs il ne dispose pas de soute à munitions. Celle-ci sera en revanche indispensable à tout avion opérationnel, mais on en n’est pas encore là. L’objectif du X-2 est bien de défricher le terrain technique et d’ouvrir la voie, à l’horizon 2030, à un éventuel remplaçant des actuels F-15J (construit sous licence au Japon) et Mitsubishi F-2 (clone de F-16, conçu en coopération avec Lockheed Martin). L’enjeu de ce développement est technique, industriel, mais aussi géopolitique. L’aspect purement militaire n’est que la cinquième roue du carrosse : les aviateurs japonais se contenteront de ce qu’ils recevront, ils en ont l’habitude.
Le Japon fait face aujourd’hui à un puissant voisin, la Chine, qui lorgne avec intérêt sur le chapelet d’îles reliant l’île de Kyushu à Taiwan. Vue de Chine, ces pointillés rocheux (dont le plus célèbre porte le nom d’Okinawa) forment une barrière sur la route du Pacifique. Vue du Japon, ce sont des confettis de territoire qu’il convient de protéger. Alors va pour le développement d’avions modernes et dissuasifs…
Mais l’essentiel n’est il pas ailleurs ? Discrètement, mais avec obstination et à grand frais, le Japon s’est offert ces dernières décennies une industrie aérospatiale complète, avec des technologies dites « de souveraineté ». Lanceurs spatiaux, hélicoptères, avions commerciaux, avions d’affaires, avions de combat et avions de mission, tous les domaines ont été méthodiquement passés en revue. L’analogie avec la France n’est pas vaine. Avec cette différence majeure toutefois que le Japon n’a jusqu’à présent jamais pu compter sur les revenus de l’exportation de matériels militaires. Guidés par la seule la volonté d’appuyer la base industrielle et de renforcer sa souveraineté technique, le développement aéronautique japonais s’est toujours fait sans véritable impératif de rentabilité économique.
Le développement du X-2 et possiblement d’un futur avion de combat furtif se situe dans cette logique d’acquisition de savoir-faire. Une logique également légitimée par une course régionale à la furtivité, avec la Chine qui ne cache pas ses ambitions en la matière, mais aussi peut-être la Corée du Sud, avec son programme KFX. N’oublions pas aussi le poids de l’histoire.
Tokyo aurait bien aimé s’offrir le F-22 qui convenait parfaitement à ses besoins de nation insulaire et géographiquement très étendue : autonomie, capacité de détection, rapidité de déplacement, le chasseur furtif de Lockheed Martin cochait toutes les cases des besoins japonais. Les demandes furent, dit on, insistantes auprès de Washington qui ne céda jamais. La peur de voir « fuiter » entre de mauvaises mains des technologies de pointe fut plus forte que la logique industrielle.
Si le Japon avait été associé au F-22, l’avion serait peut-être encore en production, l’USAF n’en serait pas mécontente et on parlerait peut-être moins du F-35… Le F-35 justement : faute de grives, les Japonais durent se contenter de merles et s’engagèrent en 2011 dans le programme du monoréacteur furtif. Les quatre premiers avions seront livrés directement par les Etats-Unis à partir de cette année et trente huit autres seront assemblés localement par Mitsubishi. Les F-35 remplaceront les derniers F-4 Phantom encore en service. Mais le monoréacteur de Lockheed Martin n’étant pas un chasseur, la question du remplacement des F-2 et F-15J reste entière.
Une autre question que l’on peut se poser porte sur les relations entre Mitsubishi et Lockheed Martin, partenaires depuis plusieurs décennies dans le domaine des avions de combat. Difficile d’imaginer l’absence de toute porosité entre les deux industriels, notamment sur le thème de la furtivité…
Frédéric Lert
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Premier vol du X-2, démonstrateur technologique de Mitsubishi.
Une architecture Américano-Russe avec 2 dérives à l'arrière. Les Européens de l'ouest ont préférés tous en rester à l'empennage vertical simple le plus souvent. Fouga Magister excepté bien sur. La source d'inspiration semble évidente.
Premier vol du X-2, démonstrateur technologique de Mitsubishi.
bonjour Francesco,
je dirais même plus… architecture américano-américaine très classique, avec empennage horizontal fortement dimensionné et absence de plans canard. Sans même parler du foie gras, le volatile palmé n'est pas très prisé Outre Atlantique…
Premier vol du X-2, démonstrateur technologique de Mitsubishi.
bonjour Alexander,
Non, la furtivité n'était pas à l'ordre du jour pour le Rafale, en raison des contraintes trop fortes que cela aurait fait peser sur le programme. Le Rafale avait pour seule ambition une certaine "discrétion" avec à la clef une diminution de sa surface équivalente radar (SER), ce qui passait par des compromis techniques relativement simples à obtenir (choix des matériaux, découpe de certains panneaux, inclinaison des rails lance missile en bout d'aile, entrée d'air fixes…). Pour ce qui est de la furtivité réelle des B-2 et autres F-22, dont la SER peut être travaillée au gré des circonstances, bien malin celui qui sait exactement de quoi il retourne. Il serait logique que l'US Air Force ne dévoile pas toutes ses batteries en la matière avant d'avoir réellement à le faire...
Premier vol du X-2, démonstrateur technologique de Mitsubishi.
La furtivité a été aussi au programme du Rafale. Toutefois les armes embarqués ne sont pas furtive l'avion est toujours détectable de qu'il est armée, surtout le rafale peut embarquer 1.5x son poids. Il à été également constaté que la furtivité poussez a l'extrême ne donne pas vraiment un grand avantage. Meme le bombardier furtive des USA le B-2 a été détecté par les radars Français quand il a été engagé en IRAQ et donc la furtivité n'est qu'aussi bon que les radars des adversaires sont mauvais.