Rafale contre Typhoon : lequel pour remplacer les Mig21 BIS indiens ?

Après la déconvenue de Dubaï, une nouvelle chance s’offre à Dassault de décrocher la première commande à l’export pour son Rafale. L’Inde est sur le point de signer pour 126 avions de combat. Elle hésite entre l’Eurofighter Typhoon et le Rafale. Analyse des forces en présence…

Le contrat du siècle se joue actuellement en Inde. Les forces armées indiennes se préparent à déclarer le vainqueur de cette méga commande de 126 avions de combat de nouvelle génération dont la majeure partie sera produite sous licence en Inde. Un contrat record de 10 MD d’euros au bas mot. Cette compétition très disputée depuis plusieurs années, qui a vu s’affronter les poids lourds du marché oppose aujourd’hui deux champions européens, le Typhoon et le Rafale. Sans préjuger du vainqueur, examinons les points forts de cette finale qui sera riche en rebondissements dans les jours à venir au fil de l’analyse des offres.

La compétition est serrée, les indiens qui ont dans un premier temps évalué tous les prétendants sur 643 points techniques au cours des trois dernières années fondent à présent leur décision sur plusieurs dizaines de critères tels que les performances militaires bien sûr, mais aussi les couts d’acquisition et de possession sans oublier l’importance des transferts de technologie. Enfin gardons à l’esprit qu’un tel contrat militaire est un geste politique fort, par conséquent, il y a fort à parier que des facteurs extérieurs au produit proposé seront déterminants. Sur le papier les deux avions sont à la fois proches et différents.

Le Typhoon, également désigné Eurofighter est le fruit d’un consortium international désigné Eurofighter GMBH qui rassemble sous une même ombrelle Alenia, EADS, BAE Systems (Allemagne, Italie, Espagne, Royaume Uni). A ses débuts en 1988 l’appareil a été pensé comme un appareil de supériorité aérienne. Il s’agissait de pouvoir contrer les redoutables Mig et autres Tupolev de l’ex URSS tout en rationalisant le parc des avions de combat en Europe, une façon disait t-on alors de promouvoir les avionneurs en Europe tout en partageant les couts…

Le Typhoon, déjà produit à 300 exemplaires, dispose de nombreux atouts pour séduire. Sa formule aérodynamique s’articule autour d’une voilure delta complétée par un plan canard placé très en avant de l’avion. Un radar multimode à longue portée de détection ECR 90 Captor bientôt doté d’une antenne active et une panoplie de missiles courte et moyenne portée (ASRAAM, IRIST, AIM9 Sidewinder, et AMRAAM et METEOR).

Son autoprotection repose sur un ensemble intégré DASS qui assure les fonctions de détection de menaces et de brouillage au moyen de brouilleurs embarqués et remorqués. A noter que si le système semble manquer de maturité, le choix de placer les nacelles des équipements de contremesures en extrémité de voilure est des plus judicieux dans la mesure ou cette position permet une couverture optimale autour de l’avion tout en facilitant des modes de brouillages complexes tels que le cross eye jamming, une technique qui permet de faire disparaitre électroniquement l’avion aux yeux des radars adverses.

Son principal atout réside dans ses deux formidables moteurs Eurojet EJ200 qui délivrent une poussée unitaire de 90 KN. Ils lui confèrent un rapport poids poussée très intéressant pour décoller court par temps chaud et soutenir la comparaison avec n’importe quel avion en combat aérien. Des moteurs qui peuvent encore être dopés par l’ajout de tuyères à poussée vectorielle pour réduire le rayon de virage et diminuer la course au décollage….

Force est de constater que le programme est une réussite avec plus de 300 unités livrées et des commandes export en Autriche et en Arabie saoudite par exemple. Pour autant tout n’est pas rose. L’avion comme nous l’avons dit plus haut est le fruit d’une coopération internationale, source de retards, de surcouts et de compromis politiques et techniques pas toujours faciles à gérer. Cela explique sans doute en partie la lenteur du développement du programme et les retards dans la mise au point des capacités air/sol de l’avion.

Il n’empêche malgré les retards et les difficultés accumulées tout au long de la vie du programme, l’Eurofighter/Typhoon bénéficie du soutien indéfectible des pays producteurs qui sont l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne et le Royaume Uni. Un atout de poids pour gagner des contrats face à la puissance française, américaine et russe en la matière.

Le Rafale est né à peu de choses près en même temps que l’Eurofighter. Mais à la différence de ce dernier le bimoteur francais, dernier né de la famille Dassault é été pensée d’emblée comme un appareil polyvalent, savant dosage entre les capacités air/air et air/sol autrement dit le combat aérien et les frappes terrestres.

A l’instar du Typhoon, le Rafale est conçu selon la formule voilure delta/plan canard. La différence notable est la position du plan canard qui est implanté au dessus des entrées d’air. Selon le constructeur, la conception du Rafale intègre dès les premières études à la fin des années 80 la notion de discrétion radar. Sans être aussi furtif qu’un F22 Raptor américain ou qu’un Sukhoi T50, le Rafale est néanmoins plus discret que le Typhoon. Un signe distinctif des efforts en la matière est la position des entrées d’air et les motifs en dent de scie sur les bords de fuite des plans canard. Sa propulsion est assurée par deux moteurs Snecma M88 de 75 kn de poussée qui, bien qu’inférieurs à ceux du Typhoon lui assurent des performances honnêtes dans toutes les missions air/air et air/sol.

Mais le véritable signe distinctif du Rafale réside dans son système d’arme qui fusionne les données du radar RBE2, de l’Optronique secteur frontal, et du système d’autoprotection Spectra. Une première sur un avion français qui n’a d’égale que le traitement de l’information embarqué sur l’avion de combat le plus cher du monde, le F22 Raptor. Spectra, pour système de protection et d’évitement de conduites de tir du Rafale permet, sans être détecté de traquer , d’identifier et d’engager des cibles aériennes et terrestres. En cas de besoin, il apporte des solutions de brouillage robustes contre toutes les formes de menaces sol air et air air connues à ce jour.

La panoplie d’armement du Rafale comprend des missiles air-air moyenne portée MICA et bientôt Meteor ainsi que tout une panoplie d’armes air-sol de précision. Sans oublier le canon de 30mm et les pods de reconnaissance ou de désignation qui font du champion français un véritable avion à tout faire. Une polyvalence démontrée lors des récentes opérations en Afghanistan ou en Libye.

Pour autant l’avion qui s’illustre dans l’armée de l’air et l’aéronavale française n’a pas percé sur les marchés export . L’appareil est t-il si mauvais qu’il ne séduit personne ? que lui reproche t-on au juste ? Son principal défaut n’est pas technique, il souffre d’un mal bien franchouillard, l’auto dénigrement. Il n’est pas rare en effet d’entendre dans les médias ou dans la population des critiques sur cet avion invendable parce que trop cher ou trop sophistiqué ou inutile… Bref, pas en phase avec son époque.

C’est oublier que le Rafale, qui remplace le Mirage F1, le Super Etendard, le Crusader, le Jaguar, le Mirage 2000 et le Mirage IV est probablement, aux dires de beaucoup d’observateurs français et étrangers le meilleur avion de combat de sa génération. Sa polyvalence, sa facilité d’emploi, en font un avion de premier choix en ces temps de compromis budgétaires le tout pour un prix sensiblement inférieur à celui du Typhoon ou d’un F22 Raptor.

Alors certes l’avion ne s’est pas vendu en Corée du sud ou au Maroc ou à Singapour. Certes il est perfectible sur de nombreux points. Mais c’est oublier que lors des évaluations technico opérationnelles l’avion français est systématiquement arrivé en tête de classement, loin devant ses opposants. Seule la carte politique a fait la différence… Il serait temps, de croire en cet avion qui rassemble le meilleur de la technologie hexagonale du moment et dont le succès à l’export assurerait certes la fortune de Dassault mais aussi un véritable bol d’air pour les innombrables sous traitants de ce programme emblématique.

Enfin, et pour revenir à la compétition il y a le choix indien. L’Inde veut remplacer ses MIG21 BIS, tout en acquérant de la technologie et un certain niveau d’autonomie en termes d’armement. Des impératifs intégrés dans offres commerciales des compétiteurs. Sur le papier le Typhoon et Le Rafale se tiennent au coude à coude avec un léger avantage au Typhoon en air-air et en termes d’appui politique. Mais un avantage certain du Rafale en termes de polyvalence et de maturité. Le Rafale bénéficie lui de la bonne réputation des Mirage 2000 en service en Inde depuis les années 80. A suivre donc.

La Rédaction