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Défense

Rafale : les décibels de l’exportation

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Frédéric Lert

La formation de certains pilotes des clients exports du Rafale va se faire directement depuis l’aéroport de Bordeaux Mérignac, où sont assemblés les avions. Les autorités prennent soin de déminer la question des nuisances sonores, tandis que les riverains se méfient maintenant des succès commerciaux du chasseur français … 

2015 et 2016 ont été deux années de réussite pour le Rafale avec le gain de trois contrats export : Egypte tout d’abord en 2015 avec 24 appareils, Qatar la même année avec également 24 appareils et enfin Inde l’année suivante avec 36 appareils. Fin 2017, le Qatar annonçait l’achat de douze appareils supplémentaires, portant le total des exportations à 96 avions.

Dura lex sed soutex

Après des années de vaches maigres, tout baigne donc pour l’avion et le « team Rafale » composé de Dassault Aviation, Thales et Safran. Mais ce soudain afflux de commandes ne va pas sans poser quelques problèmes pour la formation des mécaniciens et des pilotes des armées étrangères clientes. L’armée de l’Air, en première ligne pour les activités de soutien aux exportations (soutex) porte déjà sa part du fardeau.

La transformation des pilotes égyptiens et qatariens a débuté à Saint Dizier au sein de l’ETR (Escadron de Transformation Rafale) avant de se poursuivre à Mont-de-Marsan pour tout ce qui concerne l’emploi opérationnel de l’avion. Un hangar très beau, très propre, a été construit spécialement pour accueillir l’activité des ces clients arabes qui évoluent au sein d’un escadron temporaire. Ce dernier utilise pour l’instant des avions puisés dans le parc français.

Des Indiens dans la ville

Pour ce qui concerne l’Inde, les choses sont différentes : l’armée de l’Air étant au taquet avec ses engagements opérationnels et l’assistance aux deux premiers pays clients, le témoin a été passé à Dassault Aviation. Le contrat indien est clair : la responsabilité de la formation des mécaniciens et pilotes incombe directement à l’avionneur. A noter que ce dernier est également responsable de quelques heures de formation au profit des pilotes qatariens frais émoulus de Mont-de-Marsan.

Voilà pour le contexte. Maintenant se pose la question de l’impact de ces formations sur l’activité aéroportuaire de Mérignac. Car c’est bien au départ de la plateforme bordelaise, où est implantée la chaine d’assemblage des avions, que doit se faire la formation.

Une réunion publique d’information s’est tenue en début de semaine dernière à Saint Jean d’Illac, commune d’un peu plus de 5.000 habitants limitrophe de l’aéroport (celui-ci est d’ailleurs en partie installé sur son territoire ). En présence du maire de la commune ainsi que de représentants de la DGAC, de Dassault Aviation et de l’armée de l’Air, de nombreuses précisions ont été apportées sur l’activité à venir.

Près de 900 vols programmés

On a ainsi appris que 72 vols étaient programmés d’avril à mai 2019 pour les Qatariens. Le contrat indien est bien plus important, avec 800 vols prévus, d’octobre 2019 à janvier 2021, répartis en trois cycles de formation de 17 semaines chacun. Soit une moyenne de trois vols (ou six mouvements) par jour ouvré sur un peu moins de 18 mois. Forcément, ça va s’entendre et des études sont en cours pour limiter la gêne sonore.

Fin 2017, l’usine de Mérignac avait livré 149 avions à la France, armée de l’air et marine, et 14 autres pour les clients export. Pour les quatre années à venir, les livraisons se feront uniquement au profit de l’export. © Frédéric Lert/Aerobuzz

D’abord en limitant les vols : la zone de Mérignac ne servira qu’aux décollages et atterrissages, les entrainements proprement dit se faisant ailleurs. Les vols ne seront programmés que du lundi au vendredi, de 8h30 à 18h. Les patrouilles ne dépasseront pas quatre avions simultanément et aucun vol de nuit ne sera lancé depuis Mérignac : pour ces missions particulières, les avions seront mis en place sur d’autres plateformes au cours de périodes bloquées d’une semaine. On pense aux bases aériennes de Cazaux ou Mont-de-Marsan, mais ces deux terrains ont déjà leurs propres contraintes de voisinage…

Arrivée au break !

Les intervenants de la réunion publique ont ensuite détaillé les études en cours pour limiter l’impact des décollages et des atterrissages. Pour l’heure, c’est bien sur les atterrissages qu’il sera le plus aisé d’agir, avec comme mesure phare l’abandon des procédures ILS au profit d’arrivées au break. Comme sur une base aérienne.

Les avions de ligne qui se présentent à l’atterrissage commencent une descente régulière à 15 km environ du seuil de piste, jusqu’au toucher des roues. Avec une arrivée au break, les Rafale resteront à 3000 ft/sol jusqu’à l’initial, à environ 7 km de la piste. Ils descendront ensuite à 2000 ft et c’est à cette altitude qu’ils entreront dans le circuit, passeront le seuil de piste et iront ensuite « breaker ». « C’est environ 5 minutes de bruit à basse altitude qui sera ainsi économisé » estiment Dassault et la DGAC.

Contrôleurs DGAC formés « break »

La piste 23 est utilisée dans environ 80% des procédures et dans ce cas là le break se fera à main droite, ce qui entrainera les avions au-dessus des zones industrielles en restant dans l’enceinte de l’aéroport ou à son abord immédiat. Une patrouille de quatre avions « breakant » toutes les trois secondes pourra respecter ce gabarit. En cas d’atterrissage en piste 05, le break se fera à main gauche pour toujours rester sur la partie ouest de l’aéroport. Les schémas montrés pendant la réunion présentent une réduction spectaculaire de l’empreinte sonore en dehors de l’aéroport avec cette méthode.

Différents scénarios sont envisagés au décollage mais les études montrent pour l’instant que les variations dans l’utilisation de la post-combustion n’apportent pas de gains significatifs. ©DR

L’arrivée au break va toutefois nécessiter une gestion particulière des trajectoires et une formation particulière des contrôleurs à la tour. La DGAC indique travailler avec l’armée de l’Air sur ces questions.

Ca coince au décollage

Limiter les nuisances au décollage est une affaire en revanche moins simple. Impossible de se passer de l’utilisation de la post combustion sur le Rafale, qui s’entend à quelques lieues à la ronde. Une première étude à porté sur les modalités précises de l’emploi de la PC, avec deux cas envisagés : utilisation pendant 18 secondes, coupure à 300 kt et 1600ft d’altitude à l’issue d’une montée rapide. Ou bien utilisation pendant 11 secondes, coupure à 250 kt à 300ft au-dessus de la piste avec à la clef une trajectoire bien plus plate (dans les deux cas, l’avion est toujours dans l’emprise de l’aéroport quand il coupe sa PC).

Les résultats affichés par les services techniques de la DGAC et Dassault ne laissent pas planer de doute : que la PC soit coupée après 18 ou 11 secondes, l’impact sonore est similaire dans les deux cas, la plus grande proximité avec le sol effaçant le gain issu d’un usage plus court. A noter que ces mesures ont été faites dans le cadre des vols de réception des appareils sortant de chaine (il faut un minimum de deux vols de réception par avion et il sort en ce moment un avion par mois environ).

Situation temporaire, c’est promis

La question du bruit au décollage reste donc entière, bien que la possibilité existe de jouer sur les trajectoires ou les niveaux de puissance. « Nous étudierons toutes les possibilités » expliquaient les intervenants à St Jean d’Illac, en insistant à plusieurs reprises sur le fait que cette situation n’était que temporaire et intimement liée au contrat indien.

Frédéric Lert

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Frédéric Lert

Journaliste et photographe, Frédéric Lert est spécialisé dans les questions aéronautiques et de défense. Il a signé une trentaine de livres sous son nom ou en collaboration. Il a rejoint Aerobuzz en juin 2011. Au sein de la rédaction, Frédéric Lert est le spécialiste Défense et voilures tournantes.

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    • Le propre des chasseurs modernes rafale,eurofighter,et même des plus anciens F14,F15,sukhoi su 27 mig 29 c'estd''être naturellement bruyants par leur motorisation (post-combustion).Si les motoristes pour avions civils sont parvenus à des résutats spectaculaires grace principalement à des double-flux à fort taux de dilution (ils frisent 10),il ne faut pas s'attendre à des miracles pour les moteurs militaires

  • Ancien militaire de la 106 dans les années 70 à la 92° EB , il y avait énormément plus de traffic militaire, avec les Mirage IV, les Mirage III B du cifas, les NordAtlas, les Vautour N et B, les 262, qu'aujourd'hui. Sans oublier les vols de chez Dassault. En revanche il fallait être patient pour voir une Caravelle III de Royal Air Maroc ou d'Air Inter.
    L'Armée de l'Air est à l'origine du terrain de Beau Désert pendant la première guerre mondiale et c'est encore l'Armée de l'Air qui acheta les terrains de Beutre et Teynac dans les années 30, multipliant par 4 la surface de l'aérodrome.
    C'est en bonne intelligence que les trafics civils et militaires profitent d'installations communes. Pourquoi faire une BA à Mérignac et un aéroport civil à Pessac ?
    Réjouissons-nous des ventes de Rafale à l'export qui rééquilibre notre déficit de la balance commerciale. Que les râleurs se taisent, je les entend d'ici, ils me cassent les oreilles !

    • Habitez-vous sur la trajectoire de décollage des avions militaires de la base de Mont-de-Marsan ?
      Je ne pense pas !!! Cela devient "INFERNAL".
      Notre santé est en jeu : pollution et nuisances sonores dépassant les seuils de tolérance...

      • Entièrement d'accord avec vous. Beaucoup de vols sont trop bruyants et inutiles. Rappelons que la ville était là avant la base...

    • Un scoop pour Jean-Mi, votre fan: depuis 100 ans, le monde a changé! (je sais qu'un militaire ne se rend jamais, même à l'évidence, mais quand même...).

    • Déficit du commerce extérieur: 65 milliards officiellement.
      J'aimerais être sur que les Mistral et les Rafale vendus à l'Egypte seront bien payés par ce pays et non par la Coface ou par un tour de passe passe dont on a le secret pour effacer des dettes (aide au développement, ....?)

    • Kubath a écrit :
      Que les râleurs se taisent, je les entend d’ici, ils me cassent les oreilles !

      Alors un conseil : faites comme les riverains de l'aéroport de Mérignac : achetez des boules QUIES, car dans le civil on a le droit de dire ce que l'on pense.

      • Je suis d'accord avec jean Mi
        J'avais eu la même réflexion en reponse à un habitant depuis peu a côté de Tours qui ne supportait pas non plus le bruit des avions. Je lui avait prédit un avenir plus sombre quand les militaires s'en iraient. Et Bingo, c'est ce qui est en train de se passer et ce qu'il ne sait pas encore c'est que le trafic civil va augmenter mais surtout les charges aussi vu que les militaires ne vont plus participer.

      • Justement, dans le civil, on a le droit de dire ce que l'on pense ! Je dis donc : la base aérienne 106 étant active depuis 100 ans, ayant de plus une activité de production d'avions (donc d'essais), et étant une base importante car proche d'une grande ville, or donc, quand une telle base existe depuis 100 ans et qu'on vient y acheter une maison à 300 mètres de là, on vient pas se plaindre 2 ans après de découvrir que des avions militaires ça vole souvent... Je partage donc la citation de Kubath.

  • Aurait-on oublié que la ville de Merignac fait peut-être fortune avec les industries aéronautiques et les employés installées dans sa commune depuis plus de 50 ans ?
    Aurait-on oublié la base aérienne 106 sans avion aujourd'hui mais d'où partaient des mirages tous les jours!
    Impact sonore ? Mais il ne fallait pas acheter une maison ou appart sur les couloirs aériens !
    Cette histoire me fait penser à des citadins qui ont acheté dans un village et veulent faire arrêter l'horloge de l'église parce qu'elle sonne les heures.
    Moi je me réjouis du bruit car cela signifie l'industrie bordelaise se porte bien.

    • Que la commune de Merignac qui beneficie des emplois et des taxes lies a l'aeroport et aux entreprises aeronautiques profite egalement des nuisances ce qui n'est pas le cas car les nuisances sont pour les autres communes.Il ne s'agit pas de fermer l'aeroport mais de le gerer avec equite.

    • Il existe un concept qui s'appelle le développement durable et qui vise à faire coexister la croissance économique, le progrès social et la qualité de vie en trouvant le juste équilibre entre ces nécessités qui peuvent être contradictoires!
      Il n'y a pas plus à se réjouir du bruit (!) que de la pollution de l'air ou de l'eau!

  • Qu'on arrête de pleurnicher...Les nuisances sonore OK....pauvre petit occidental contraint par sa notion du confort, bien être et vie routinière sans surprises désagréables.
    Si ces ventes ont une répercussion sur la santé économique du pays alors cela rendra service à tout le monde. Nous avons de quoi être fier de notre arsenal technologique militaire. Dommage cependant qu'un composant majeur de l'armement du rafale soit Made in USA, cela limite nos libertés d'interventions, car, sans l'accord de Washington, pas de bonbinettes actives.

    • Vous devez habiter dans une région et un quartier où vous ne craignez pas que l'on vienne installer un champ éolien, ou une usine d'incinération d'ordures ménagères ou les rails du TGV.
      J'ai subi les dictâtes des militaires durant ma formation de pilote sur la base de Creil ; à leur tour de subir nos exigences. J'ai été expulsé de l'aérodrome de Guyancourt avec mes collègues pilotes et tous les jours nous lisons les souffrances de nos aéro-clubs (ceux qui servent de nid d'éclosion aux carrières aéronautiques civiles ou MILITAIRES) parce que nos petits avions (souvent présents bien avant l'urbanisme voisin) font trop de bruit. Alors il est normal que l'on se demande POURQUOI l'entrainement des pilotes militaires devrait se faire sur un aéroport civil ? Parce que cela facilite la vie de quelques décideurs de haut rang ? Les péripéties de Notre Dame des Landes résonnent encore à nos oreilles.

  • L'aéroport de Bordeaux n'est pas une base aérienne militaire, on peut donc légitimement comprendre que les riverains s'émeuvent du vacarme qui s'annonce....
    En revanche ils comprendront ainsi sans doute vraiment ce que bruit aérien veut dire, par rapport à une activité civile de transport en commun qui s'attire les foudres de certains d'entre eux pour des véhicules qui font moins de bruit (perçu au sol) que des scooters!

    • Le terrain de Bordeaux comprend un aéroport ET une base aérienne. La BA 106 sur laquelle il y a eu pendant des années des aéronefs militaires dont les mirage 4 qui décollaient jour ET nuit.

      Ce sont les riverains qui ont construits près la piste et pas la piste près des habitations. La servitude était connue à l'achat du bien immobilier.

      • Rappelez-moi en quelle année les Mirage IV ont été retirés du service?
        Par ailleurs il n'existe aucune disposition légale ou réglementaire entraînant une information objective en matière de bruit des acheteurs immobiliers contrairement à ce que vous sous-entendez (on peut d'ailleurs s'en étonner lorsque l'on connait les dizaines de pages de diagnostiques divers et variés qui accompagnent de tels achats!).

  • Est si Dassault allait avec armes et bagages, personnels et clients faire ses formations
    hors de France ça arrangerait tout le monde sauf l'économie et les emplois!! Bof c'est
    pas grave il y l'assurance chômage et l assurance maladie pour les oreilles:on est Français ou pas?

  • Pau vre france qui se plaint de tout
    Cela me rappelle une voisine qui , il y a quelques annees , voulait porter plainte car un avion de la base de cognac etait passe au dessus du lotissement
    Quid du bruit des voitures , des tracteurs qui moissonnent la nuit , des mobylettes sans pot , des tondeuses du dimanche , du voisin qui fait des travaux etc etc
    On veut bien vendre des avions mais uniquement des planeurs ......:-)

    • Ma foi..c'est pas faux Michel. Vu comme ça, les décibels de l'exportation seront supportables.

  • Article intéressant, complet et plein de bon sens. Merci M. Lert.
    Une petite remarque néanmoins (qui n'a rien de désobligeant) : la photo en début d'article me fait penser furieusement aux screeners volés en salles de cinéma ! ;-) Dassault n'aurait-il pas de les JPEG originaux à vous fournir ?

    • bonjour Alpha,
      merci pour votre commentaire. Effectivement la photo a été faite pendant la présentation publique. Je suis journaliste à la sauvette...
      cordialement
      frédéric

  • C'est bien beau une arrivée au break , mais c'est uniquement quand il fait beau justement . En conditions ifr , ça reste une longue finale .

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