L’aéronautique n’échappe pas à la contrefaçon. L’année dernière, c’est le motoriste franco-américain CFM International qui en a été la victime, quand sont apparues sur le marché, des pièces de moteur accompagnées de documents falsifiés. A priori, moins de 1 % des moteurs CFM ont été concernés affirme le motoriste qui se veut rassurant. Avant d’ajouter que la plupart des pièces impliquées étaient des éléments non numérotés comme des boulons, des rondelles et des bagues. Un avertissement sans frais. Mais cela a suffi pour que des dirigeants d’Airbus, American Airlines, Boeing, Delta Air Lines, GE Aerospace, Safran, Standard Aero et United Airlines unissent leurs forces pour lutter contre ce fléau qui porte atteinte à la sécurité des vols. A Washington, ils viennent de sceller un accord.
La menace est d’autant plus inquiétante, que la supply chain est sous tension. Les fournisseurs et équipementiers ont de plus en plus de difficultés à suivre les cadences infernales imposées par les donneurs d’ordres, au premier rang desquels figure Airbus qui n’en démord pas.
Il y a quelques jours, le PDG d’Airbus a réaffirmé ses objectifs 2026 : 75 A320 par mois, mais aussi 14 A220, 10 A350 et au moins 4 A330. Soit un minimum de 103 d’avions par mois. De quoi mettre sous pression les sous-traitants en place et susciter des vocations chez de nouveaux entrants, à commencer par des entrepreneurs peu scrupuleux qui pourraient flairer un bon coup.
Le risque est limité et les donneurs d’ordres veillent. Ils connaissent leurs fournisseurs. Cela ne sert donc à rien à jouer à se faire peur d’autant que les vrais problèmes sont ailleurs, à commencer du côté des ressources humaines.
Malgré les moyens mis en œuvre par la filière, les « talents » ne se bousculent pas dans les jobs dating et il est de plus en plus illusoire de vouloir retenir les nouvelles recrues quand elles ont décidé de passer à autre chose… L’industrie aéronautique connaît elle aussi son lot de démission, à tous les échelons.
Pourtant, s’il y a une industrie qui a besoin de stabilité, c’est bien l’aéronautique. Il faut du temps à la culture de la sécurité pour infuser dans le comportement d’un salarié. Du temps pour qu’elle devienne une seconde nature. La sécurité d’un vol commercial commence, dans l’atelier, sur l’établi.
A Toulouse, Airbus a créé une sorte d’incubateur dans lequel chaque salarié du site est invité à suivre un circuit. L’idée est de le sensibiliser à ses responsabilités. Sur un mur, il y a cette phrase manuscrite du PDG du groupe : «… et rappelez-vous, nous construisons notre culture de la sécurité ensemble ». Signé Guillaume.
« Ensemble » est le mot juste. Il renvoie à la notion de transmission qui va des anciens vers les nouveaux. Qui évoque aussi l’esprit du compagnonnage. La culture de la sécurité repose non seulement sur le savoir-faire, mais aussi sur le savoir-être. On en revient toujours à l’accompagnement. Sauf qu’au moment d’intégrer dans les équipes des nouveaux venus d’horizons les plus divers et aux profils nouveaux, dans les entreprises, on commence à se dire qu’on a poussé un peu trop vite les anciens vers la sortie, au moment de la pandémie. Ces anciens qui au premier coup d’œil sont capables de reconnaître une pièce suspecte, par exemple…
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Je sursaute quand je lis "culture de la sécurité pour infuser dans le comportement d’un salarié" et «… et "rappelez-vous, nous construisons notre culture de la sécurité ensemble ». Signé Guillaume.
L'exemple devant toujours venir d'en haut, qu'attend Airbus pour équiper ses avions d'une protection "anti-décrochage" dans toutes les lois de pilotage en Stabilité Neutre, ce que requiert la dérogation (Spécial Conditions) accordée pour la certification.
L'Airbus Rio-Paris n'aurait pas décroché s'il en avait été équipé.
Bravo, Gil ! Remarquable analyse. Le savoir-être doit animer tout protagoniste de l'aviation. Ce mot composé contient toutes les capacités : celle de la compétence, mais aussi celle de la remise en question, celle de l'honnêteté intellectuelle, celle encore de la responsabilité.