Inconséquent

Les dimanches passant, vous pensiez peut-être que vous échapperiez à un Dépose Minute sur le « Projet de loi de Finances 2025 ». Pourquoi en rajouter une couche le week-end quand vous saturez déjà la semaine ? Vous êtes, en effet, aussi bien placés que nous pour juger de l’inconséquence du gouvernement. Les coupes sont saignantes. Le président argentin a fait des émules en France ; ce n’est plus un rabot que manient les ministres, mais une tronçonneuse. Pas un secteur n’y échappera, ni personne.

A quoi bon multiplier les conférences de presse et les réunions avec les conseillers dans les ministères puisque le PLF2025 passera coûte que coûte. Le gouvernement n’est pas fait pour durer, mais pour tailler dans le vif. Les ministres seront sacrifiés, comme des pans entiers de l’économie.

Cette semaine, les compagnies aériennes ont ressorti une étude du cabinet Deloitte sur « le poids socio-économique du transport aérien en France ». A quoi bon ? Le ministre délégué aux Transports a d’autres priorités. Les aéroports français se sont alarmés de la décision de Ryanair de quitter dix aéroports régionaux français si la hausse de la taxe de solidarité sur les billets d’avion (TSBA) était appliquée. Oui, et alors ?

Cette semaine aussi, le président des professionnels français de l’aviation d’affaires (EBAA France) était sur le plateau de JumpSeat. La TSBA va peser 150 millions d’euros de plus en 2025 sur l’aviation d’affaires française. Les riches peuvent payer. C’est un fait, sauf que la grande majorité des utilisateurs de l’aviation d’affaires ne sont pas des « riches », mais des professionnels qui travaillent.

Prenons l’exemple des médecins qui font la navette, une fois par semaine, entre le CHU de Dijon et l’hôpital de Nevers. Ils voyagent en DA-62, un bimoteur léger de 5 places bien serrées loin du confort d’un jet. Mais pour permettre à des praticiens d’aller consulter au cœur du désert médical et de faire l’aller-retour dans la journée, le DA62 est bien utile.

Si le Projet de loi de Finances 2025 est voté en l’état, sur chaque médecin, dans chaque sens, une taxe de 300 euros sera prélevée. Soit au total 1.800 euros qui au final seront payés par l’Agence régionale de la santé ou les collectivités locales. Deux autres entités ponctionnées par ailleurs. Pas sûr que le service aérien n’y survive.

Autre exemple : celui du transport de greffons pour le compte des hôpitaux parisiens. Ce sont entre 400 et 500 vols par an. A priori, le gouvernement à renoncer à les taxer. Ce n’est pas pour autant que cette mission vitale n’est pas remise en question. Elle représente, environ un tiers de l’activité de la compagnie qui a le contrat. Les deux autres tiers sont des vols classiques d’aviation d’affaires avec des passagers qui vont être surtaxés, à chaque vol. L’équilibre économique est rompu. Sans les passagers le jour, le transport des greffons n’est plus viable la nuit, ou alors à un autre tarif.

Ce sont deux exemples, absolument pas pris au hasard, mais qui sont une réalité. Qui sera encore là en 2025, dans les ministères, pour assumer les conséquences en cascade de ces décisions prises dans l’urgence, sans en mesurer leur impact ? Une question qui déborde largement le seul domaine de l’aéronautique. Et c’est aussi pour cela qu’elle valait bien un Dépose Minute !