C’était un point de vue de « bucheron », et il l’assume mais quand Jérôme, pilote français de bombardiers d’eau aux USA depuis bientôt 30 ans, sur le canapé gris du Lâcher Solo, s’est emporté contre les drones, c’était une réaction assumée.
Lui, le pilote passionné, ne peut s’imaginer être remplacé par une machine, tout comme le journaliste ou l’écrivain passionné se refuse à s’imaginer ne plus être en mesure de vivre de sa plume, c’est ainsi que je vois l’arrivée de l’IA comme une échéance terrifiante.
Personne ne nie plus l’intérêt de ces objets volants dans un grand nombre de missions. De la couverture du Tour de France au sauvetage de Notre Dame de Paris, pour la maintenance aéronautique ou les livraisons vitales au milieu de nulle part, les drones sont partout. Tout au plus, ils se montrent désormais indispensables pour des missions autre fois impossibles. Mais l’aviateur peut voir le drone comme la négation même de ce qui l’intéresse dans la conquête de l’air. Si on a inventé la montgolfière puis l’aéroplane c’était dans un seul but, s’envoler. On ne s’envole pas à bord d’un drone, et si on ne s’envole plus, à quoi bon ! Son cri du cœur, petite provocation amicale, a été, pour certains, une sorte de choc !
Le choc, le vrai, il a eu lieu le 9 janvier 2025 entre le CL-415 N°243 du Québec et un DJi de quelques centaines de grammes. Un gros trou dans le bord d’attaque de l’aile du Canadair en plein milieu des opérations de lutte contre les feux à Los Angeles.
L’histoire a aussi beaucoup choqué ! Mais les réactions lues ici et là, sur les réseaux sociaux, sont symptomatiques d’un monde morcelé.
Il existe deux types d’opérateurs de drones. D’un côté les professionnels, des pilotes formés et responsables, conscients que leur domaine d’opérations ne leur appartient pas exclusivement, et de l’autre les propriétaires de drones de loisir qui font voler leurs jouets, sans savoir que leur activité tombe sous le coup de la réglementation aérienne, sans aucune conscience de l’univers aéronautique, sans culture non plus. Ils pensent qu’ils ont le droit de voler comme ils le veulent, où ils le veulent, sans avoir conscience des risques qu’ils font courir aux autres, ni, même, surtout d’être en infraction, point le plus grave peut-être si on n’oublie pas le vieux principe « nul n’est censé ignorer la Loi ».
Les drones de loisir n’ont pas encore tué d’aviateur, mais le jour où ça viendra, le couperet réglementaire, déjà bien présent, pourrait tomber encore plus lourd, encore plus fort. Là encore, une communauté paiera sans doute un prix élevé pour l’inconscience d’un troupeau de brebis galeuses.
A-t-on le droit, quand on est un aviateur habitué de la basse-hauteur et qu’on te bassine depuis le début avec ton futur remplacement par des engins sans pilote et que ceux-ci, en attendant, constituent désormais un risque pour ta mission, de s’insurger, ou tout simplement d’être un petit peu provocateur ?
Il faut croire que non. C’est désormais un point de vue impopulaire qui peut valoir une volée de bois verts de la part des professionnels du commentaire agressif, généralement écrit dans un français approximatif et en réaction à une vidéo qu’ils n’ont pourtant pas vu en entier ni, donc, comprise.
Ceux-là, je verrai d’un meilleur œil qu’ils fussent rapidement remplacés par l’IA !
3 commentaires
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Mille fois d’accord! J’ajouterai que si un drone « de loisir » vient survoler une amie faisant « requin chagrin » (cf. Sardou, je sais, ça date) chez elle, je serai très en colère contre le droniste voyeur…
Le problème de l’évolution des drones et de l’aviation ‘piloté’ est un sacré challenge. C’est pourquoi l’EASA, soutenu par les grandes fédérations aéronautiques européennes a lancé une campagne cette semaine.
Si les drones et les aéronefs sont tous ‘visibles’ les deux mondes peuvent gérer leur co-existance en l’air!
Voici une annonce (en anglais…)
Conspicuity: SEE and BE SEEN is becoming a major concern, for the safety of all pilots, but also to find a way to share our airspace with the upcoming drone evolution.
EASA just published a flyer :
https://www.easa.europa.eu/…/sunny-swift-ads-l-see-and…
and a website :
https://www.easa.europa.eu/…/general…/%21conspicuity
This is the start of a whole campaign by different Airsport federations at national and European level (EMF, Europe Airsports, EHPU…)
SafeSkys one of the key players to realize this, without any investments in equipment – just using your mobile phone or tablet !
Bien dit, Frédéric ! Savez-vous ce qui me gêne le plus dans l’Intelligence artificielle ? C’est le mot ‘ART’ qu’il contient, mot qui est aux antipodes de l’inintelligence des promoteurs de ce ‘machin’, pour parler gaullien, destructeur non seulement d’emplois mais encore et surtout du raisonnement des humains les plus fragiles, à commencer par les enfants et les analphabètes, terme qui englobe aussi les ‘bêtes’. Et dans ces derniers il y a ceux qui font des saluts hitlériens sans conscience de ce que représente ce geste. Voilà, ça, c’était un scud ! Après tout, à l’égard d’un lanceur de fusées, c’est permis, non ? J’espère qu’il va passer la gentille et royale censure.