Frémissement. Emballement. C’est reparti pour un tour. Les compagnies aériennes vont manquer de pilotes. Les médias nationaux annoncent la pénurie à venir. Les indices sont concordants. Les filières cadets sont réactivées ou vont bientôt l’être. Et même si des milliers de pilotes n’ont pas encore retrouvé de boulot et qu’une partie de la flotte est encore confinée, ce n’est plus qu’une question de mois. Les low cost sont fébriles. Les experts qui, par définition, ne se trompent jamais affirment que c’est maintenant que tout se joue : « si vous avez toujours rêvé de devenir pilote de ligne, foncez ! »
Il y a là, comme une désagréable impression de déjà-vu.
A chaque fois c’est le même scénario, avec les mêmes questions angoissantes pour les candidats pilotes de ligne, les lycéens et leurs familles. Est-ce bien raisonnable de se lancer dans une formation à plus de 100.000 euros sans aucune garantie en retour ? Ne vaut-il pas mieux attendre que le ciel du transport aérien se dégage un peu ? N’est-il pas déjà trop tard ? Méfions-nous des injonctions : le rêve peut vite tourner au cauchemar.
Une désespérante impression de vivre un nouveau cycle.
Le transport aérien qui se projette en 2050 à longueur de communiqués de presse n’est pas foutu de s’engager sur ses besoins à court terme. Il faut payer pour voir, croiser les doigts et miser sur sa chance. Et c’est ainsi depuis toujours… Mais le plus extraordinaire, c’est qu’à chaque nouveau cycle, le secteur, une fois de plus cueilli à froid, semble redécouvrir une règle immuable.
La prise de conscience est systématiquement liée à un effondrement du marché de l’emploi des pilotes de ligne que personne n’avait vu venir. Les causes sont chaque fois différentes. Souvent inattendues. Généralement brutales. Elles conduisent aux mêmes drames humains. Tous les pilotes ne sont pas logés à la même enseigne. Tous ne bénéficient pas des mêmes parachutes dorés, ni même des mêmes protections sociales. Quant aux élèves-pilotes, c’est l’angoisse.
Quelques mois plus tôt, rien ne semblait pouvoir remettre en question le plein emploi. Surement pas les perspectives de croissance des économistes du transport aérien. Les experts ont la capacité de se projeter loin dans le temps et lissent les courbes. Pour eux, les crises sont des incidents de parcours qui ne remettent pas en question la croissance à long terme. Tout au plus, elles peuvent la décaler des quelques trimestres, au pire de quelques années. Sauf que ces « incidents de parcours » et ces « contre-temps » ne sont pas vécus de la même manière pour les élèves et les pilotes fraîchement qualifiés qui doivent faire face, mois après mois, aux échéances d’un emprunt souscrit pour financer une formation de pilote de ligne.
Pendant ces périodes de crise, l’aviation se met en mode survie. Les CV s’empilent sur le bureau des chefs-pilotes des compagnies régionales et des sociétés d’avions taxis. Les écoles de pilotage tournent au ralenti. Les aéro-clubs débordent d’instructeurs. Entretenir une qualification de type devient un cauchemar.
Et puis, sans non plus que personne ne l’ait vu venir, c’est l’aspiration. Les majors débauchent les pilotes des compagnies régionales et des low cost qui elles-mêmes ne se privent pas de recruter sur les terrains d’aviation d’affaires. Les écoles de pilotage font monter les enchères pour tenter de conserver leurs instructeurs au moment où elles en ont à nouveau le plus besoin. Dans les aéro-clubs, les stagiaires se désespèrent.
Personne ne se risque à annoncer un retournement de cycle ni à tabler sur son amplitude. Et quand la machine à recruter se remet en marche, personne ne prend le temps de se retourner pour tirer les leçons du traumatisme que vient de vivre la profession. C’est la course en avant. Un sprint qui peut vite devenir un parcours d’obstacles pour les aspirants. C’est le moment de regarder où vous mettez les pieds !
Gil Roy
Les hélicoptères Puma HC2 âgés d’un demi-siècle seront retirés du service en 2025. Ils seront… Read More
La tour de contrôle centrale de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle est en travaux. Fin… Read More
Depuis plus de quatre décennies, le Pilatus PC-7 constitue la pièce maîtresse de la formation… Read More
On a rarement vu une compagnie aérienne aussi bien préparée à déposer le bilan que… Read More
Dans un roman, Jean Rousselot raconte à la première personne du singulier la carrière militaire… Read More
Textron Aviation a livré à l'armée de l'air péruvienne le premier de 2 Beechcraft King… Read More
View Comments
Bonne analyse.
Être parmi les premiers embauchés c'est être Commandant de Bord ou passer plus vite CDB, c'est, avec un meilleur salaire, assurer plus facilement l'investissement financier.
La prise de risque peut payer.
La passion peut aider à prendre le risque.