Pour beaucoup de futurs pilotes de ligne, l’ATR 42 ou 72 constitue le premier avion de leur carrière, donc aussi la première qualification de type indispensable pour voler en compagnie. Le constructeur franco-italien qui dispose du plus grand parc de simulateurs FFS, voit passer dans ses centres des pilotes venus des horizons les plus divers dont la formation initiale peut comporter de graves lacunes. Le challenge pour les instructeurs est de qualifier, en sortie de simulateur, des pilotes sûrs.
Plus que n’importe quelle autre qualification de type, l’ATR42/72 est sans doute celle qui met le plus en évidence l’hétérogénéité des compétences des pilotes. Bien qu’ils aient suivi, en principe, le même cursus, pour arriver jusqu’à la porte d’un simulateur Full Flight d’ATR, tous ne s’installent pas aux commandes avec la même assurance.
Certains enchainent directement la qualification de type dans la foulée de leur formation modulaire ou ab initio. Typiquement ils enfilent un ATPL (Air Transport Pilot Licence) théorique, suivi d’un CPL (Commercial Pilot Licence) et de la licence MCC (Multi-Crew Coordination). C’est en particulier le cas des pilotes ab initio envoyés par les compagnies qui les ont recrutés et qui prennent en charge leur formation. La QT est l’étape suivante. Ils l’abordent avec le minimum réglementaire d’heures de vol. Ils n’ont souvent pour seule expérience aéronautique, celle qu’ils sont en train d’acquérir dans les centres de formation où ils passent.
Il y a, à l’autre extrémité du panel, les pilotes qui se forment à la force du poignet. Ils ont accumulé les heures de vol aux commandes des avions les plus diverses et dans le cadre d’activités aériennes plus ou moins bien structurées. Cette population possède en général un carnet de vol bien rempli. La QT ATR signifie pour eux le passage au statut de pilote de ligne. Dans beaucoup des cas, ils financent eux-mêmes leur formation qui coûte entre 20 et 22.000 €.
On trouve également dans les centres de formation d’ATR des pilotes expérimentés envoyés par les compagnies clientes du constructeur.
Pour les ab initio, une semaine de familiarisation sur simulateur est obligatoire, soit une vingtaine d’heures. Lors de ce pré-stage, même si les pilotes remplissent les exigences des prérequis (CPL et MCC au minimum), il peut parfois arriver que les instructeurs ATR détectent des lacunes dans leur formation. Quand dans certains pays asiatiques la qualification de vol aux instruments peut être délivrée à de simples observateurs, une remise à niveau s’impose souvent.
Pour palier aux diverses lacunes détectées en amont du simulateur et les corriger, ATR et l’Ecole Nationale de l’Aviation Civile (ENAC)ATR et l’ENAC ont également développé une filière cadet pour les compagnies. 30 élèves chinois sont en cours de formation ont développé un partenariat. En cas de nécessité, les instructeurs d’ATR peuvent ainsi envoyer leurs élèves, suivre des cours intensifs pour revoir certains points présentant des manquements dans les domaines pratiques du CPL et théoriques de l’ATPL. Le stagiaire retrouve ensuite le cursus normal de la qualification de type.
Le FFS (Full Flight Simulator) est l’outil de base de l’entraînement à la « qualif« : les heures de vol réel, sur avion, sont réservées à la fin de formation, et consistent en six tours de piste. Le département « training » de l’avionneur avec un total de sept simulateurs représente seulement 25% de l’offre d’heures simulateur au niveau mondial sur les versions 42 et 72-600. Les compagnies exploitant des flottes importantes d’ATR choisissent souvent d’investir dans un simulateur.
L’objectif d’ATR est d’accélérer le développement de son offre de formation et d’entrainement, pour les pilotes, mais aussi pour les techniciens et le personnel de cabine. L’avionneur dispose aujourd’hui de cinq centres. Le premier a été ouvert en 1985 à Toulouse. Le plus récent est celui de Miami (février 2017) , Un nouveau simulateur FFS va être installé à Toulouse en juillet 2018 et un autre est prévu à l’été 2018, dans l’un des centres existants.
Annuellement, ce sont près de 3.500 stagiaires en moyenne qui fréquentent le réseau des centres de formation ATR, toutes formations confondues : les « training centers » proposent plus de 250 formations à destination des pilotes, des membres de cabine, des techniciens de maintenance et des opérations en vol.
Les cinq centres répartis sur le globe totalisent plus de 100.000 heures de formations et d’entrainement par an. La formation initiale, et notamment le passage de QT, est le cœur du métier d’ATR dans ces « training centers. »
Les simulateurs chez ATR sont utilisés de deux manières, en fonction des centres. En France, par exemple, les deux « training centers » ont chacun leur spécialisation. A Toulouse, où sont basés quatre simulateurs et une grande partie des instructeurs 80 instructeurs sont répartis dans les cinq centres à travers le monde : Toulouse, Paris, Johannesburg, Miami, Singapour, le centre assure les qualifications de type (QT), la transformation en ligne, les validations ou renouvellements… A Paris, en revanche, il fonctionne à la demande, pour l’entrainement régulier des équipages (« recurrent training« ). Il peut également servir pour la passage des QT en cas d’encombrement à Toulouse.
Tous les centres sont équipés des mêmes outils : du simulateur jusqu’aux salles de briefing/debriefing en passant par les FPT (Flat Pannel Trainer, équivalent des maquettes utilisées précédemment mais désormais pourvus d’écrans tactiles).
Ainsi, pour transformer un pilote de la version -600 à -500 il faudra une demi-journée de formation. En revanche, passer d’une version -500 à -600 nécessitera cinq jours de formation, dont deux jours au simulateur.
Réglementairement, la formation en vue de l’obtention d’une QT intègre un minimum de 32 heures sur FFS. ATR table sur 36 heures minimum. Au total, une QT représente un minimum de 70 heures de formation (cours au sol, simulateur, vols réels).
La majeure partie des 36 heures de cours au sol, soit entre 20 et 25 heures, sont passées sur le FPT (Flat Pannel Trainer) qui permet de visualiser la position des commandes des différents systèmes. Composé d’écrans tactiles, le résultat des actions du pilote est affiché sur deux écrans : lorsqu’une pompe à carburant est mise en route, l’écran affiche tout le circuit carburant.
Ainsi, le FPT permet de se familiariser avec le cockpit de l’avion, avec les différentes procédures, avec la gestion des systèmes et des pannes, avant que de prendre place dans le simulateur. Tous les jours que durera la QT, soit environ six semaines, le candidat passera au moins une heure à « potasser » sur le FPT.
Chaque séance en simulateur FFS est précédée d’un briefing d’une heure. Elle est enregistrée en vidéo pour permettre d’être « rejouée« . Le FFS est l’outil idéal pour aborder les situations inusuelles et s’entrainer à la gestion des pannes.
L’accès au simulateur se fait par une passerelle qui le relie à l’étage où se situent les salles de briefing et debriefing. Le cockpit accueille l’équipage en charge de la conduite de l’appareil. Le poste instructeur est situé derrière les pilotes. Un « jumpseat » est également installé près de la porte d’accès. Une fois la passerelle relevée, le vol simulé peut débuter. La séance de FFS dure trois heures pendant lesquelles sont enchaînés les différents exercices et scenarii définis lors du briefing.
A la sortie du simulateur, une salle de debriefing avec écrans permet de faire le point sur la séance. Pendant une heure, l’instructeur va passer au crible le déroulé de la séance avec la possibilité de visionner le film enregistré dans le cockpit. L’objectif est de dresser la liste des points à améliorer.
Ce n’est qu’une fois arrivé au terme de cette formation que le pilote candidat pourra réaliser un vol réel cette fois, composé de six tours de piste.
Sept simulateurs assurent actuellement la formation des pilotes ATR. Deux nouveaux simulateurs vont enrichir les centres en 2018 et permettre chacun de dispenser plus de 4.000 heures de formation par an. Avec les besoins en pilotes qui vont augmenter au cours des 20 ans à venir ATR estime que 1.000 pilotes supplémentaires par an seront nécessaires aux opérateurs de ses avions sur 20 ans, l’avionneur n’en restera pas là.
Fabrice Morlon
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Bonjour.
Très bonne synthèse de l'articulation actuelle des programmes de formation.
Toutefois une relecture attentive aurait permis la suppression de quelques fautes,de français d'une part (exemple : "palier à quelque chose" au lieu de "pallier quelque chose") et de quelques...."fautes de frappe" (exemple : "la passage").
Cordialement.
D.LWN