C'était en novembre 2021, à la tribune d'European Rotors. Bruno Guimbal, au détour d'une présentation, dévoilait la silhouette d'un hélicoptère quadriplace. © Gil Roy / Aerobuzz.fr
La crise du Covid est surmontée, la construction d’une nouvelle usine est actée et l’évocation du quadriplace n’est plus un tabou : Bruno Guimbal passe à la vitesse supérieure. De retour d’Heli Expo 2022 à Dallas, le chef d’entreprise nous a reçu dans son usine d’Aix-les-Milles.
L’entreprise Guimbal est solide, elle vend, elle fabrique et encaisse des acomptes. Mais elle est désormais très à l’étroit dans ses murs. D’autant que Bruno et Véronique Guimbal attendent désormais un heureux événement, le cinquième depuis la naissance de leurs trois enfants et du Cabri. Le grand frère arrive, c’est quasi officiel…
« J’ai fait une interview vidéo pour Vertical pendant Heli Expo : j’ai dit que nous mettions de la puissance sur le nouveau projet, mais que l’on n’avait pas encore fait les premiers copeaux. Et je n’en dirai pas plus ! ».
Chassez le naturel, il revient à la VNE et Bruno Guimbal ne peut pas s’empêcher d’évoquer ce futur appareil. « Plus que jamais, c’est un projet que nous voulons concrétiser. Depuis plus de cinq ans, il ne se passe pas une semaine sans qu’on nous demande un quadriplace et j’ai déjà refusé plusieurs dizaines d’acomptes. Un ingénieur de Robinson nous a même dit qu’ils se préparaient à ce lancement et qu’ils avaient lancé le Cadet pour nous couper l’herbe sous le pied. Mais la crise mondiale de l’hélicoptère, avec une division par trois du marché entre 2016 et 2019, a été bien plus efficace… Quand je demande à mon distributeur américain le moyen de vendre plus de biplaces, sa réponse est immédiate : « annonce un G4 ! ». Le Cabri serait alors une porte d’entrée vers une vraie famille d’appareils et dans le même temps, un appareil plus grand et plus polyvalent offrirait un effet d’entraînement indéniable pour toute la gamme».
L’équipe d’Hélicoptères Guimbal et celle de son distributeur américain, Precision Helicopters, sur le stand au salon Heli Expo 2022 (Dallas). © Hélicoptères Guimbal
Cette famille en devenir, il faudra la loger et la question de la nouvelle usine est aujourd’hui centrale dans les réflexions de Bruno Guimbal. Les bâtiments actuels (2.800m2) sont mal agencés (tous les visiteurs doivent par exemple traverser le Bureau d’études) et n’offrent aucun potentiel de croissance. Ils ne peuvent pas être correctement chauffés ou climatisés et, plus grave, ne permettent pas de ségrégation entre l’activité commerciale, les développements nouveaux et l’activité militaire (drone VSR700). « Il faut engrener les rotors pour faire sortir les appareils de notre hangar et un appareil plus gros ne passerait pas. Nous n’avons pas de parking privé permettant une mise en route et de façon générale, nous ne pouvons pas recevoir correctement nos clients » complète Bruno Guimbal.
Si un accord est trouvé avec EDEIS, gestionnaire de la plateforme d’Aix les Milles, cette usine pourrait être construite en bout de piste. Mais plusieurs autres aérodromes font des offres très alléchantes pour attirer le constructeur, son projet de 5 ou 6 millions d’euros et sa centaine d’emplois directs.
« Nous avons bouclé le cahier des charges et nous consultons des architectes. J’espère une construction en 2023 » résume le patron. « Outre la place disponible, une meilleure qualité des locaux et une capacité d’évolution, nous voulons disposer de notre propre parking pour faire les points fixes de sortie de chaine et de maintenance sans contrainte ».
Ce projet, Bruno Guimbal le porte depuis plusieurs années. Il estime aujourd’hui que les planètes sont correctement alignées pour se lancer. Et effectivement, quand on l’interroge sur la situation de sa société, il semble disposer d’un solide stock de bonnes nouvelles : « Nous avons terminé 2021 dans une situation bien meilleure qu’avant le Covid, malgré une vingtaine d’appareils livrés seulement. En 2020, au coeur de la crise, je passais mon temps à convaincre mes interlocuteurs que nous allions bien, que nous n’allions pas disparaitre. L’impact du COVID s’est surtout fait sentir sur l’absentéisme des salariés, encore catastrophique ! Aujourd’hui nous sommes au taquet pour la production, avec de gros efforts pour monter la cadence. Notre carnet de commande est repassé au-dessus d’un an. Le 300ème Cabri vole et sera livré bientôt ».
Bruno Guimbal est rentré des Etats-Unis avec le moral au beau fixe, après avoir signé deux ventes « inattendues », après avoir posé des jalons sur quatre ou cinq autres et avoir rencontré quantité de pilotes et d’instructeurs venus lui dire leur passion pour le Cabri.
Il est également heureux d’avoir passé de longues heures avec des ingénieurs de la société Beta Technologies, qui développe un des e-VTOL les plus ambitieux. S’il reste dubitatif sur la viabilité d’un tel projet, il évoque avec plaisir la levée de fond réussie de cette start up : « Beta Technologies a levé 460 millions de dollars auprès d’investisseurs, avec un effet immédiat : Kyle Clark, le patron, a offert à ses 290 employés un brevet avion ou hélico. Et pour y parvenir, Beta a immédiatement acheté trois Cabri et pris six options supplémentaires ! Je n’espérais pas bénéficier un jour de la manne des start-up ! »
Autres faits notables de ces dernières semaines, la percée du Cabri en Israël et les conséquences de la guerre en Ukraine. Dans le premier cas, Bruno Guimbal annonce une certification israélienne en courte finale et un premier client professionnel ayant opté pour le haut de gamme, avec l’avionique « Cristal » centrée sur le Garmin 500 et la toute nouvelle climatisation intégrée.
Pour ce qui concerne la Russie, la pilule est un peu amère mais pas catastrophique : une semaine avant le début des combats, Guimbal Hélicoptères a payé à l’aviation civile russe 25.000 € pour un complément de certification relatif à l’avionique Cristal. L’histoire dira si cet investissement est une perte sèche, mais toujours est-il qu’un Cabri qui était prêt à être livré en Russie dans les jours à venir ne le sera jamais. Il est d’ores et déjà quasiment revenu à un autre client en Europe.
Bruno Guimbal et son hélicoptère biplace Cabri G2 sur l’aérodrome d’Aix-les-Milles. © Frédéric Lert / Aerobuzz.fr
Pour Bruno Guimbal, il s’agit là d’un irritant, mais de pires soucis sont ailleurs, avec une inflation qui s’installe dans son paysage, ainsi que dans toute l’industrie. Lycoming a par exemple annoncé en novembre dernier une hausse du prix de ses moteurs supérieure aux dix dernières années cumulées. Dans l’urgence, Bruno Guimbal a pu commander une poignée de moteurs au prix 2021, mais immédiatement après, une nouvelle hausse à deux chiffres a été annoncée par le motoriste.
Le plexiglass et l’aluminium connaissent quant à eux des hausses respectives de 40 et 100% ! De quoi éclipser la déconvenue sur le marché russe qui devrait impacter encore plus le rival Robinson. Adossé à un solide carnet de commandes, Bruno relativise un peu : « Cela reste des soucis de riches… »
Frédéric Lert
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Bravo Monsieur Guimbal,
Hâte de découvrir les premières esquisses de votre nouvelle usine, tant espérée par vous tous.
Un bonjour également à vos collaborateurs que j'avais eu le plaisir de croiser
Cordialement
B PETIT