Le nouveau bimoteur d’Airbus Helicopters, aux couleurs de l’opérateur américain PHI, devait être l’attraction du salon Heli Expo (Dallas 7-10 mars 2022). Mais la guerre en Ukraine et l’indisponibilité de l’Antonov 124 qui devait lui faire traverser l’Atlantique en ont décidé autrement : l’appareil va finalement arriver en bateau. Heli Expo tombe à l’eau, mais le « route proving » dans le golfe du Mexique avec PHI, est maintenu.
Passée la contrariété du rendez-vous raté avec le public, la présence de l’appareil aux Etats-Unis sous les couleurs de PHI est l’histoire d’une réussite et d’un pari. Réussite tout d’abord, parce que l’opérateur américain très présent sur le marché pétrolier ne cache pas son intérêt pour le nouvel appareil.
Pendant les 8 mois à venir, le H160 jaune et noir va être utilisé pour du « route proving » dans le golfe du Mexique : il va partager le quotidien de la compagnie, réaliser les vols de liaisons vers les plateformes pétrolières, transporter des passagers, du fret, familiariser les équipes techniques et les équipages.
La page du COVID semblant se tourner, la demande et le prix du pétrole repartant à la hausse, l’industrie pétrolière américaine est optimiste. Le H160 semble arriver sur le marché au bon moment, alors que la demande pour des hélicoptères dans le segment très populaire des 12 places est soutenue et que les AW139 (Leonardo) et autres S-76 (Sikorsky) vieillissent.
« Le H160, au coeur de ce segment, est un peu plus petit que l’AW139, mais il possède une grande cabine et il est moins cher que son concurrent italien tout en offrant pratiquement autant de capacité que lui » souligne Gilles Armstrong, directeur du programme, rencontré le 16 février 2022 à Marignane. Le Dauphin avait tenu la moitié de ce segment il y a longtemps, avant de se faire tailler des croupières par les appareils d’Agusta. L’enjeu financier est considérable et Airbus Helicopters se donne avec le H160 les moyens de reconquérir le terrain perdu.
PHI prévoit dans un premier temps d’exploiter quatre H160 dans le golfe du Mexique. La suite est en discussion avec Airbus Helicopters et les compagnies pétrolières…
Mais l’envoi du H160 outre-Atlantique est également un pari, parce que la certification FAA n’est pas encore en poche. « On a des retards sur la certification, reconnait Gilles Armstrong. Nous avions pensé qu’une fois obtenue la certification EASA (NDA : ce qui a été fait le 1er juillet 2020), décrocher celle de la FAA serait une simple formalité. Or la FAA a soulevé plus de questions que prévu, et des questions parfois complexes. Et le COVID ne nous a pas aidé dans les échanges avec l’agence américaine ».
Quand on lui demande un exemple des contrariétés rencontrées, Gilles Armstrong cite les mesures de bruit : « Le H160 est l’un des hélicoptères les plus silencieux au monde, et malgré le blanc-seing accordé par l’EASA, il a fallu revenir sur le sujet avec la FAA, ce qui n’avait pas été anticipé ! Après un important travail, nous arrivons aujourd’hui au terme de ce processus et nous sommes confiants sur une certification américaine imminente, suivie d’une entrée en service cet été. C’est pour cela que nous avons pris la décision de faire coïncider l’envoi de l’appareil aux Etats-Unis avec le salon Heli Expo ».
On se souvient que la première livraison officielle du H160 a eu lieu le 10 décembre dernier à Marignane, avec comme client l’opérateur japonais ANA. La certification japonaise venait tout juste d’être reçue. L’appareil, qui sera utilisé par des chaines d’information, est en cours d’équipement et n’a pas encore débuté ses opérations. 2022 verra donc l’entrée en service également aux Etats-Unis et quelques autres pays, dans les missions de transport corporate, pour l’industrie pétrolière et au profit de quelques clients particuliers.
Airbus Helicopters fait état d’un carnet de commande de 90 appareils à ce jour (avant l’ouverture d’Heli Expo), dont 52 ventes enregistrées en 2021. Parmi celles-ci, dix appareils sont destinés à la Gendarmerie française qui devra avoir reçu ses appareils avant les Jeux Olympiques de 2024. Ces H160, destinés notamment au transport du GIGN, sont déjà en cours d’assemblage sur la chaine de Marignane.
A l’instar des autres hélicoptères de la Gendarmerie Nationale, il s’agit d’appareils civils équipés de systèmes de mission particuliers. Ils ne devront pas être confondus avec les H160M « Guépard », version militaire du H160, dont le développement se poursuit à ce jour et pour lequel les armées françaises ont exprimé un besoin global de 169 appareils.
Autre utilisateur militaire de H160 civils, la marine nationale qui va louer six appareils à Airbus Helicopters (associé à Babcock et Safran Helicopter Engines) pendant dix ans pour remplacer les dernières Alouette 3. Différentes campagnes d’essais conduites en 2021 ont permis de qualifier l’emploi d’un treuil de sauvetage, de valider le transport de charges à l’élingue ou encore l’utilisation de l’appareil dans un environnement chaud et poussiéreux.
Le H160 et ses optionnels arrivant à présent au terme de leur développement, les efforts d’Airbus Helicopters vont maintenant essentiellement porter sur l’industrialisation. L’assemblage du H160 se fait à Marignane sur une ligne d’assemblage final (FAL) innovante, taillée sur mesure pour le nouvel appareil. L’objectif est de parvenir dès 2023, quand la période de rodage sera définitivement passée, à un cycle de 40 jours pour assembler les différents tronçons et équipements en provenance d’Allemagne, d’Espagne ou de France. C’est deux fois moins de temps qu’il en fallait pour assembler un Dauphin.
Huit appareils sont aujourd’hui visibles sur les postes d’assemblage de cette chaine. Sept autres appareils, dits de « pré-série » sont aujourd’hui « en piste », prêts à être livrés. «Les hélicoptères de pré-série sont identiques à ceux de série pour les clients » explique-t-on à Marignane. «S’ils ont reçu cette dénomination, c’est essentiellement parce qu’ils ont permis d’optimiser le processus d’assemblage pour réduire le cycle de production ».
Telle qu’elle est dimensionnée, la FAL de Marignane autorise la production de 35 H160 par an. Si le succès de l’appareil devait se confirmer, Airbus Helicopters pourrait hisser cette capacité de production à 45 appareils par an en utilisant des ressources aujourd’hui consacrées au H175. Ce dernier se vend mal, 5 à 10 appareils par an seulement, et on évoque à Marignane l’idée d’une « flexline » qui pourrait indifféremment produire des H175 et des H160. Le malheur des uns fait le bonheur des autres…
Frédéric Lert
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bonjour,
l'annulation du vol en Antonov 124 a été indiquée semble-t-il avec un très court préavis. Sans doute était il trop tard pour réserver un Beluga ?
Cordialement
Bonjour à tous.
L'utilisation d'un Beluga n'a pas été envisagée pour remplacer AN124 ?